Читать книгу Code naturel de la morale sociale expliqué par la céphalométrie et mis à la portée de tout le monde - Armand Harembert - Страница 13
L’ESPRIT
ОглавлениеLe siége de l’âme raisonnable, ubi sedet pro tribunali, est le cerveau et non le cœur, comme avant Platon et Hippocrate on l’avait communément pensé.
CHARRON. (De la Sagesse, 1589.)
La tête humaine, comme la création nous la donne et non comme les mauvais milieux la déforment, présente un ensemble de cavités où de grands chercheurs ont fini par trouver l’habitation de la pensée, puis, ensuite et peu à peu, la localisation respective des facultés qui la composent. Les savants ont presque tous aujourd’hui accepté cette localisation.
Le Dr Félix VOISIN.
L’harmonie des sons est à quelques égards comparable à celle des facultés cérébrales, et l’absence de vibration ou la discordance d’une seule des parties du cerveau est une note fausse qui suffit à troubler son équilibre.
Le Dr L. CRUVEILHlER.
L’homme possède, avec les instincts et l’intelligence, les facultés de l’esprit auxquelles il doit ses progrès incessants dans la connaissance de la vérité, une, éternelle, infinie.
Le mot esprit, qui au propre signifie souffle, respiration, vie, exprime ici l’idée d’émanation d’une puissance divine qui, harmonisée avec la matière et la vie, constitue tout ce qui se meut dans le temps éternel et l’espace infini. (Voir p. 109, DOCTRINES.)
L’esprit se révèle à l’homme par la faculté de comparer, d’expliquer, de juger et de respecter ou d’abhorrer tous les produits de l’intelligence combinée avec les instincts. De là les idées dites innées, et qu’on pourrait nommer aussi, je crois, les idées éternelles de vérité, de justice, car, quand elles surgissent en l’homme, elles n’y produisent que l’effet d’un réveil.
L’homme possède sous le frontal, dans la partie moyenne et supérieure du lobe antérieur, au-dessus des organes de l’intelligence, ceux des facultés de l’esprit, qui sont: la pénétration, K; l’imagination, L; l’équité, M, et le respect, N.
La PÉNÉTRATION, K, est la faculté de comparer; mariée à l’imagination et à l’harmonie, elle fait naître la causalité, saisit les rapports entre la cause et l’effet; elle crée l’induction, les sciences, et encore ce qu’on appelle généralement l’esprit du monde, qui est bienveillant avec l’équité et la sympathie, religieux avec le respect, ingénieux et pratique avec la configuration et l’harmonie, brillant avec la mémoire des mots. Quand la mémoire est plus forte que la pénétration, cet esprit n’est plus que du bavardage.
Sans l’équité, qui, agissant avec la sympathie, crée la bonté, la bienveillance, cet esprit est caustique et jaloux, parce qu’alors la fierté dégénère en orgueil, envie, jalousie. Sans la circonspection, il est gai, léger; avec beaucoup de circonspection, il est rarement bruyant. «Le rire du sage se voit et ne s’entend pas.»
Comme on le voit, l’homme est un être mixte entre l’animal et le mythe qu’on appelle ange; son esprit et ses instincts doivent, exercer l’un sur l’autre une utile influence. Souvent l’équilibre n’existe pas, les instincts trop puissants ou une mauvaise éducation font de l’esprit un esclave et l’on n’écoute plus sa voix affaiblie, qui ne saurait qu’éveiller le remords.
L’IMAGINATION, L, est la faculté de créer des suppositions, des fictions, des images pour arriver à la connaissance de la cause des différences et des analogies reconnues par la comparaison. On lui doit, par ses combinaisons avec les autres facultés, l’espérance, la poésie, etc.
Gall a reconnu dans cet organe le talent poétique; Spurzheim, l’idéalité ; Cubi, la méliorativité, sentiment du beau idéal. (Voir p. 62, COMPARAISON.)
Broussais a pensé, avec raison, que cette faculté, à laquelle on a attribué le pouvoir de s’élancer hors de la matière pour parcourir l’espace, pour deviner ce qui n’a pas été démontré, n’a pas été considérée par les phrénologistes d’une manière vraiment philosophique, parce que l’imagination, toujours en rapport avec d’autres facultés, ne peut être traitée isolément.
Les phrénologistes, qui multipliaient les facultés primitives, ont placé dans l’imagination, en se rapprochant de la comparaison, de l’équité ou du respect, huit organes pour la saillétivité, la gaieté, la mimiquivité, la réalitivité ou aversion pour le doute, la merveillosité, la sublimitivité ou l’amour du terrible, du grandiose, du sublime, l’espérance, et l’effectuativité, désir d’encourager, tendance à effectuer. (Voir p. 62, COMPARAISON.)
L’ÉQUITÉ, M, est le sens du juste et de l’injuste, la conscience. On lui doit, comme je l’expliquerai plus tard, la sensibilité, la bienveillance, l’abnégation, la charité..
Les phrénologistes, trompés par l’apparence, ont placé le sens du juste et de l’injuste, le sens moral dans la fierté qui pousse la classe trop nombreuse des méchants, ou mieux des égarés, à paraître bien plus qu’à être consciencieux, et il ne leur restait plus pour l’organe qui nous occupe que la bonté, la bénévolentivité, désir du bonheur des autres, plaisir à y contribuer, ce qui n’est qu’une nuance de l’équité combinée avec la sympathie. (Voir p. 65, COMPARAISON.)
Gall avait bien cru d’abord que cet organe était celui de l’équité ; mais l’exemple de Dodd, qui le possédait très-développé et se rendit coupable de plusieurs faux, empêcha ses continuateurs d’admettre cette opinion.
Ils n’avaient donc pas encore reconnu que la notion de l’équité ne suffit pas pour faire les hommes justes; qu’il faut avec elle l’observation, la comparaison, la causalité, la circonspection et la persévérance. Il faut connaître avant de juger, il faut être prudent et fort pour être toujours juste.
Le RESPECT, N, est le couronnement de l’esprit, l’amour et l’admiration du beau, du vrai, du juste, que la pénétration, l’imagination et l’équité, harmonisées avec l’intelligence, nous ont fait connaître.
Gall a vu dans cet organe la théosophie, Dieu, la religion; Spurzheim, la vénération; Cubi, l’inférioritivité du catholique devant le représentant de son Dieu.
Broussais a dit: «Ce sentiment supérieur est un des principaux liens de la société ; si l’on ne vénère pas ce qui est vénérable, à commencer par les auteurs de nos jours et par nos instituteurs, tous les liens sociaux sont rompus; l’homme le plus bas, le plus vil, le moins cultivé se croit au niveau des plus grandes supériorités réelles.»
Lorsque nos prêtres nous apprennent à mépriser les hommes, la terre, la vie, pour ne contempler qu’un ciel inondé de la splendeur d’un Dieu qui y attend ses élus, le respect n’est plus que de la théosophie. En se combinant alors avec l’imagination, il fait naître la superstition, le surnaturalisme, l’amour du merveilleux, etc.
D’après la céphalométrie, la raison, en faisant comparer la terre aux millions de mondes qui l’entourent, révèle une loi éternelle, un ordonnateur esprit infini. L’équité est sa voix, le respect un effet de sa grandeur, l’imagination le cherche, et l’harmonie, qui, unie à l’imagination et à l’équité, nous fait rêver des perfections indéfinies, est sa promesse.
Le mot esprit est celui qui convient pour exprimer la faculté qu’a l’homme de saisir les rapports des phénomènes, de s’élever à la connaissance de leurs causes, de faire naître ainsi les sciences, les arts, la sagesse, le génie.
Les animaux, par l’action répétée des sensations et l’exercice de la mémoire, s’élèvent, comme l’a écrit M. Flourens, jusqu’à l’intelligence. Cuvier a dit: «L’intelligence des animaux ne se considère pas elle-même, ne se voit pas, ne se connaît pas. Les animaux n’ont pas la réflexion, cette faculté suprême de l’esprit de l’homme de se replier sur lui-même.» Enfin, M. Flourens ajoute: «En relisant de nouveau, j’ai mieux compris cette analyse profonde à la façon de Descartes, qui sépare, qui cherche du moins à séparer partout les idées des sensations, la faculté de comparer des simples impressions renouvelées, et la pensée, l’esprit de l’homme de l’intelligence des brutes.»
Aristote, auquel on attribue cette affirmation: nihil est in intellectu quod prius non fuerit in sensu (il n’y a rien dans l’âme qui ne lui ait été transmis par les sensations), a commencé la grande discussion sur les idées innées ou intérieures et les idées extérieures ou transmises par les sens, divisant encore aujourd’hui les philosophes qui confondent l’esprit avec l’intelligence, l’âme avec la vie; mais, éclairé par la céphalométrie, tout le monde reconnaîtra que cette opinion d’Aristote, fausse parce qu’il parlait de l’esprit, est vraie si l’on traduit intellectus par intelligence; car l’intelligence n’est, comme je viens de le dire, que le résultat de la faculté de se rappeler et d’associer toutes les sensations qui nous viennent du monde physique au milieu duquel elle doit diriger les instincts; de là les idées extérieures ou acquises par les sens.
Descartes, en ne cherchant que les inspirations intérieures, ne prétendait pas, sans doute, rejeter les idées extérieures, produit de l’intelligence qui, complété par l’esprit, devient la raison individuelle. (Voir p. 38, RAISON.) Ce qu’il s’efforçait d’oublier, ce dont il était parvenu à faire table rase, c’étaient les enseignements de l’argutie et les aberrations de l‘esprit.
Les facultés de l’esprit non équilibrées entre elles et non harmonisées avec l’intelligence s’égarent. De là les aberrations de l’imagination et du respect, auxquelles on doit les superstitions, le surnaturalisme, le mysticisme, le fanatisme, etc., qui ont détourné momentanément la civilisation de la route du progrès.
De même que les sensations physiques se rectifient l’une par l’autre (le bâton à moitié plongé dans l’eau paraît rompu, le toucher rectifie les imperfections de la vue, la connaissance du monde physique est le résultat de l’action harmonisée de toutes les sensations), de même aussi la connaissance du beau, du vrai, du juste, du monde moral, doit naître de l’action puissante et harmonisée de toutes les facultés de l’esprit mariées à une intelligence complète.
Que penserions-nous, en effet, d’un homme qui, jugeant tout seulement par les yeux, croirait la voûte étoilée qu’il aperçoit par sa fenêtre plus petite que sa chambre, son doigt plus gros que la montagne qu’il voit à l’horizon?
Que devons-nous penser aujourd’hui de ceux qui, pour connaître la vérité, ne se sont servis que de l’une des facultés de l’esprit: l’imagination?