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Une foule de curieux envahissait l’escalier de la berge.


L’ACCIDENT DU PORT DE BERCY

Table des matières

— Au secours! au secours! Un enfant qui se noie!

Par une chaude matinée du mois d’août, je traversais le Pont de Bercy quand, soudain terrifié, je vis tomber à l’eau, du plat-bord d’une péniche où il trottinait, un bébé de deux à trois ans à peine.

Le pauvre petit, échappant une minute à la surveillance de sa mère, jouait avec un chat sur la bande étroite qui borde le bateau, le seul passage libre quand le chargement est fait. Minet avait fait quelques bonds pour s’enfuir; le bambin, voulant le rattraper, avait trébuché... allait périr.

Au galop, je descendis sur la berge, ne cessant d’appeler au secours; plusieurs chalands et péniches étaient à quai, mais les bords de la Seine étaient déserts: les rayons ardents du soleil éloignant les flâneurs.

Tout à coup le patron du bateau, qui, sans doute, avait entendu mes cris d’alarme, s’élança hors de sa cabine et, devinant ce qui s’était passé, se jeta dans une barque heureusement amarrée le long de la péniche.

Cependant, il m’avait semblé, en dégringolant l’escalier de la berge, voir quelqu’un plonger dans la Seine, près de l’endroit où l’enfant était tombé.

Suivant la mère affolée à travers le dédale de tonneaux dont la péniche était encombrée, je gagnai le plat-bord d’où l’enfant avait glissé dans l’eau. O bonheur! Il était sauvé ! Dans la barque, le marinier, haletant d’émotion, nous tendait de ses bras tremblants..... deux enfants étroitement serrés, le sauveteur et le sauvé, car le vaillant plongeur n’avait pas douze ans!

Sur le pont, sur l’escalier descendant à la berge, près de la péniche, une foule compacte de curieux s’était amassée. Nous entrâmes dans la cabine. La douleur des braves gens fut, heureusement, vite calmée: leur enfant était sauf, grâce au courageux petit Parisien qui ne l’avait pas laissé deux secondes dans l’eau. Dès les premiers soins — énergiques et prompts — le bébé revint à lui.

Drapé comme un Arabe dans une chaude couverture de laine blanche, la mine éveillée et les yeux riants, le gamin nous raconta, tandis que ses vêtements séchaient, qu’il se promenait sur la berge quand tout à coup il avait vu le blondinet tomber à l’eau; tout naturellement, il s’y était jeté pour le repêcher. Le marinier était tout de suite venu, recueillant dans sa barque l’intrépide nageur et son précieux fardeau.

Comment reconnaître un pareil acte de courage si simplement accompli? La mère éplorée confondait dans ses caresses les deux enfants.

En compagnie du pénichien, je reconduisis le modeste héros — bien séché et réchauffé — au domicile de ses parents. Ils habitaient sur le quai de la Râpée, à la grande joie de leur fils, qui nous avoua qu’il adorait les bords de l’eau, les baignades, qu’il aurait voulu naviguer et que, pendant les vacances, il venait souvent — en cachette de sa mère — faire un tour à la Seine, histoire de causer avec les gens de la rivière.

Son rêve — mais pourrait-il jamais le réaliser? — son rêve eût été de voir la mer!

Ce désir fut un éclair pour le brave marin.

— Je t’emmène au Havre à bord de ma péniche, s’écria-t-il dans un élan de reconnaissance, si tes parents le permettent, et je vais de ce pas le leur demander.

— Voulez-vous me prendre comme second? dis-je à mon tour, pour descendre la Seine jusqu’à la mer; je serai heureux de faire avec vous tous ce voyage original, que depuis longtemps je désire accomplir.

— Avec grand plaisir, si ça vous, plaît!

Il ne restait plus qu’à obtenir l’autorisation paternelle. Le père, fier de la belle action de son fils, consentit sans peine; la mère, elle, avait des craintes et cédait moins volontiers. Certes, son garçon était un bon enfant, une excellente nature, intelligent, travailleur, — et tout en causant elle nous faisait admirer, dans une petite bibliothèque qui ornait sa chambre, les beaux prix de l’année remportés par l’écolier studieux.


A l’heure des classes, son fils était un élève modèle; mais, en récréation et au temps des vacances, c’était une autre affaire: il n’y avait plus moyen de le tenir, il était tellement vif, remuant, imprudent! Elle redoutait pour lui, éloigné de sa mère, quelque malheur.

SUR LE QUAI DE BERCY.

La péniche prenait un chargement de fûts vides.


J’insistai, et je promis si bien de ne pas le perdre de vue un instant, que la mère accepta à son tour de se séparer de son fils.

Nous partions en bateau, nous reviendrions en chemin de fer.

Je m’engageai — comme dans le Tour du Monde, de Jules Verne — à ramener notre jeune voyageur après deux semaines de vacances, à la douzième heure sonnant du quinzième jour, autrement dit à minuit. (Le train arrivait en gare de Paris à onze heures précises du soir.)

Ce fut dit, ce fut fait. De notre excursion naquit ce livre: le Journal de voyage de mon ami le petit Parisien.

le retour du Havre à Paris en chemin de fer.


De Paris à la mer

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