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[56][57]V Le déroulement de la procédure d’asile devant le SEM

Adriana Romer

1 Généralités

Ce chapitre présente les différentes phases de la procédure d’asile allant du dépôt de la demande d’asile jusqu’aux modalités des auditions conduites par le SEM.

Dès le dépôt de la demande d’asile commence ce qu’on appelle la phase préparatoire. Elle dure au plus trois semaines. Elle permet au SEM de recueillir les premières données et de procéder à des mesures d’instruction visant à vérifier l’identité et l’origine du requérant et à déterminer si un autre Etat Dublin est éventuellement compétent pour traiter la demande d’asile. L’idée est d’établir le contexte de cette demande et de préparer le dossier pour les étapes ultérieures de la procédure. En règle générale, une brève audition portant notamment sur les données personnelles du requérant a lieu pendant la phase préparatoire.

Par la suite, en fonction du résultat des premières mesures d’instruction, le SEM accorde au requérant le droit d’être entendu s’il envisage une non-entrée en matière ou, dans le cas contraire, procède à une audition sur les motifs d’asile au sens de l’art. 29 LAsi. C’est en règle générale pendant cette phase qu’intervient l’attribution du requérant à un canton. Si l’audition n’a pas eu lieu au Centre d’enregistrement et de procédure (CEP), la loi prévoit qu’elle se déroule auprès du SEM à Berne dans les 20 jours suivant l’attribution au canton. En pratique, ce délai n’est toutefois que rarement respecté, pour diverses raisons. On observe même parfois des retards considérables dans le déroulement de la procédure, pouvant être qualifiés de retards injustifiés lorsque la décision n’est pas rendue à temps (sur la notion de retard injustifié, voir chap. VI, pt 4.3).

2 La demande d’asile

La demande d’asile est l’acte d’une personne n’ayant pas la nationalité suisse qui demande à la Suisse de l’accueillir et de la protéger. Autrement dit et selon les[58] termes de la loi, est considérée comme telle toute manifestation de volonté par laquelle une personne demande à la Suisse de la protéger contre des persécutions (art. 18 LAsi). Le besoin de protection ne doit pas forcément être reconnaissable et l’utilisation du mot « asile » n’est pas exigée.1 L’ouverture de la procédure d’asile n’est soumise qu’à la seule condition que la volonté de déposer une demande d’asile soit exprimée.2 La demande peut intervenir oralement, par écrit ou même par signes ou par gestes.

3 Dépôt de la demande d’asile

3.1 Généralités

Selon l’art. 19 LAsi, la demande d’asile peut être déposée au poste-contrôle d’un aéroport suisse (voir pt 3.5) ou, lors de l’entrée en Suisse, à un poste-frontière ouvert (voir pt 3.4) ou encore dans un centre d’enregistrement et de procédure (CEP, voir pt 4).

Jusqu’en septembre 2012, une demande d’asile pouvait aussi être déposée auprès d’une représentation suisse à l’étranger.3 Désormais, elle ne peut l’être qu’à la frontière ou sur territoire suisse (art. 19 al. 1bis LAsi). La seule possibilité restante4 de demander protection contre des persécutions à la Suisse, depuis l’étranger, est de solliciter un visa humanitaire. Nous y reviendrons au pt 3.6.

Selon l’art. 8 al. 3 OA 1, les demandes d’asile émanant de personnes qui se trouvent en détention (toutes formes de détentions comprises) ou qui purgent une peine doivent être adressées aux autorités cantonales. Le canton compétent est celui qui a ordonné la détention.

Les enfants de moins de 14 ans dont les parents se trouvent déjà en Suisse peuvent présenter leur demande d’asile directement aux autorités du canton de séjour de leurs parents (art. 8 al. 4 OA 1). Les enfants de 14 à 18 ans sont également attribués au canton de séjour de leurs parents, mais doivent déposer leur demande d’asile dans un CEP.5

C’est le SEM qui est compétent pour traiter la demande d’asile. Il décide de l’octroi ou du refus de l’asile et se prononce sur la question du renvoi de Suisse (art. 6a [59]LAsi) et, le cas échéant, aussi sur l’octroi d’une admission provisoire. Si la demande d’asile est remise à une autre autorité – incompétente –, elle doit être transmise d’office au SEM.6

Lors du dépôt de la demande d’asile, les requérants doivent être informés de leurs droits et de leurs devoirs (art. 19 al. 3 LAsi). Nous y reviendrons au pt 7.4 et dans le chap. XII, pt 3.

Dès que la procédure d’asile est ouverte, le requérant reçoit un livret N. Ce document légitime sa présence en Suisse pendant la procédure et reste valable jusqu’à ce que celle-ci prenne fin. Si nécessaire, le livret N est renouvelé de six mois en six mois.

Selon la jurisprudence constante des autorités de recours en matière d’asile (CRA jusqu’en 2007, puis TAF), le dépôt d’une demande d’asile relève d’un « droit strictement personnel relatif ».7 Les droits strictement personnels au sens de l’art. 19b al. 2 CC sont des droits qu’une personne capable de discernement peut exercer sans le consentement de son représentant légal même si elle n’est pas majeure. Ils sont absolus lorsqu’ils excluent toute représentation et relatifs lorsque leur titulaire, incapable de discernement – par exemple un jeune enfant –, peut se faire représenter.8 Si une personne capable de discernement ne dépose pas personnellement sa demande d’asile, il est possible de réparer le vice au cours de la procédure. « Une réparation peut par exemple intervenir lorsque le contenu d’une demande d’asile déposée par représentation est confirmé lors d’une audition orale ou, en cas d’absence d’audition, par le dépôt d’une prise de position, rédigée ou au moins signée personnellement, portant sur le catalogue de questions du SEM. Il serait ainsi choquant que des personnes gravement malades ou en danger de mort se voient refuser le dépôt d’une demande d’asile par représentation parce que l’on retiendrait abstraitement que le signataire n’agirait pas dans le cadre de sa sphère strictement personnelle. »9

En Allemagne, la pratique veut qu’on envoie généralement les mineurs non accompagnés d’abord dans un office d’assistance aux jeunes qui les prend en charge (mesures de protection à court terme). Un tuteur/assistant est immédiatement nommé et une procédure de clarification est introduite pour définir quelles mesures correspondraient le mieux à l’intérêt supérieur de l’enfant. Dès la fin du premier entretien avec le mineur non-accompagné (MNA), il est décidé si une [60]demande d’asile doit être déposée.10 Ces mesures semblent appropriées pour sauvegarder les intérêts de l’enfant ; compte tenu du caractère primordial de la prise en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant dans toutes les mesures étatiques qui le concernent, il semble même qu’il faille s’en inspirer (voir art. 3 CDE).11

3.2 Demandes multiples

Lorsqu’une nouvelle demande d’asile est déposée dans les cinq ans qui suivent l’entrée en force d’une décision d’asile et de renvoi, il s’agit d’une demande multiple au sens de l’art. 111c LAsi. Elle doit être présentée par écrit et être motivée.12 Le requérant n’est alors pas hébergé dans un CEP (pt 4). Si la demande est faite oralement dans un CEP, elle n’est ni prise en considération ni enregistrée. Le requérant reçoit uniquement un aide-mémoire lui indiquant que tant qu’il n’a pas déposé de demande d’asile écrite, il a le statut d’étranger sans autorisation de séjour et que les autorités du canton compétent lors de la précédente procédure d’asile peuvent éventuellement exécuter le renvoi dans son pays d’origine. Ce document lui signale aussi qu’il peut s’adresser au canton compétent13 parce qu’il n’a pas accès au CEP.14 L’art. 111c LAsi constitue une lex specialis par rapport à l’art. 18 LAsi, car la demande multiple est soumise à des exigences de forme spécifiques.15

Dès que la demande écrite parvient au SEM, elle est enregistrée dans le SYMIC16 et le canton compétent en est avisé. L’exécution du renvoi est alors suspendue d’office (art. 42 LAsi).17

Les obstacles d’ordre formel ne sauraient entraîner que des personnes persécutées ne puissent plus invoquer leurs motifs de fuite. Il est tout à fait concevable que des requérants qui reviennent en Suisse après un retour accompli dans leur pays d’origine – le pays persécuteur potentiel – aient de nouveaux motifs d’asile, mais qu’ils ne puissent pas les faire valoir de manière adéquate faute de connaissances linguistiques et juridiques. Comme le nouveau droit continue d’exiger que toutes les demandes soient examinées [61]avec diligence,18 le SEM est tenu, dans ces cas, de donner au requérant l’occasion de préciser et de compléter sa demande ou de l’entendre sur cette demande.19 A notre avis, tel devrait toujours être le cas lorsque les arguments du requérant sont, à première vue, de nature à fonder la qualité de réfugié.

3.3 Relation avec la procédure relevant du droit des étrangers

Après le dépôt d’une demande d’asile au sens de l’art. 18 LAsi, le requérant ne peut plus engager une procédure visant à l’obtention d’une autorisation de séjour relevant du droit des étrangers sauf s’il y a droit (art. 14 al. 1 LAsi)20 ou si le canton lui accorde une autorisation pour cas de rigueur au sens de l’art. 14 al. 2 LAsi. Si une procédure visant à l’octroi d’une autorisation de séjour est en cours au moment du dépôt de la demande d’asile, elle devient sans objet (art. 14 al. 5 LAsi).21 A l’instar de l’art. 14 al. 1, cette règle ne s’applique pas si le requérant bénéficie d’un droit à l’octroi d’une autorisation. La séparation des procédures vient surtout du fait que c’est la Confédération qui est compétente pour la reconnaissance de la qualité de réfugié et pour l’octroi de l’asile (art. 6a al. 1 LAsi), alors que ce sont les cantons qui octroient les autorisations relevant du droit des étrangers (art. 40 al. 1 LEtr).22

En revanche, si le requérant d’asile est déjà au bénéfice d’une autorisation de séjour, celle-ci reste valable et peut même être prolongée selon les dispositions relevant du droit des étrangers (art. 14 al. 6 LAsi). Cette hypothèse peut se réaliser par exemple si des changements dans la situation politique du pays d’origine d’une personne séjournant en Suisse sont tels que cette personne pourrait être persécutée en cas de retour. La demande d’asile doit alors être déposée dans l’un des cinq centres d’enregistrement et de procédure, mais les requérants concernés pourront séjourner dans leur canton de domicile jusqu’à la fin de la procédure d’asile.23

3.4 Excursus : entrée illégale

Les personnes qui cherchent à obtenir l’asile et qui se trouvent à la frontière, à proximité ou à l’intérieur du pays, sont envoyées par l’autorité cantonale ou fédérale dans un CEP. Cette autorité relève l’identité complète du requérant, avise le [62]CEP le plus proche et établit un laissez-passer pour que le requérant puisse s’y rendre. Une fois sur place, celui-ci doit s’annoncer au plus tard le jour ouvrable suivant (art. 8 OA 1). En 2014, il y a eu au total 23’765 demandes d’asile dont 19’111 (soit 80 %) qui ont été déposées directement dans un CEP.24 En raison de son importance pratique, la procédure au CEP fait l’objet d’un point séparé (voir pt 4).

La majorité des requérants entre en Suisse en contournant les contrôles douaniers. L’entrée légale pour chercher protection en Suisse est rendue difficile notamment par le fait que les personnes persécutées ne disposent souvent pas de documents de voyage ni de visas. En outre, dans les pays touchés par la guerre ou la guerre civile, les structures étatiques ne sont souvent plus en mesure d’établir ou de délivrer les papiers en question.

En Suisse, le seul fait d’entrer illégalement dans le pays n’engendre pas d’inconvénients de procédure pour les requérants d’asile. Si ceux-ci sont reconnus comme réfugiés, ils bénéficient de l’art. 31 CR selon lequel aucune sanction pénale ne saurait être appliquée aux réfugiés en cas d’entrée ou de séjour irrégulier dans le pays d’accueil. Mais il faut que la personne vienne directement d’un territoire où sa vie ou sa liberté au sens de l’art. 1 CR était menacée, qu’elle s’annonce sans retard aux autorités et leur expose les motifs pouvant justifier son entrée et/ou son séjour irréguliers. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une personne se rend « immédiatement » du pays persécuteur en Suisse également lorsqu’elle n’a fait que passer par d’autres pays dans le but de venir en Suisse le plus rapidement possible.25

De même, de l’avis du HCR, il y a aussi « arrivée directe » d’un pays persécuteur lorsque le requérant a traversé de manière ininterrompue des Etats tiers. Dans ses recommandations, le HCR a du reste répété à diverses reprises que la seule entrée illégale ne pouvait pas rendre la demande d’asile abusive ou infondée et a invité la communauté des Etats à ne pas prévoir de restrictions d’accès à la procédure pour les personnes en situation irrégulière.26

L’examen de l’existence d’un motif valable justifiant l’entrée illégale exige une prise en considération de toutes les circonstances de la fuite. Il arrive souvent qu’un tel motif découle déjà de la crainte fondée de persécution.27

[63]Selon la jurisprudence,28 cela ne vaut toutefois que pour les personnes reconnues comme réfugiés par le droit interne. Si la personne n’obtient pas la qualité de réfugié, le Tribunal fédéral estime que l’art. 31 par. 1 CR ne trouve pas application. Un état de nécessité au sens des art. 17 et 18 CP n’entre pas non plus en considération, les conditions requises pour admettre un tel état, licite ou excusable, étant plus restreintes que celles permettant de justifier l’entrée au sens de l’art. 31 par. 1 CR. Dans un tel cas, une poursuite pénale selon l’art. 115 al. 1 let. a LEtr serait donc possible. Si une expulsion intervient immédiatement, il peut cependant être renoncé à toute poursuite (art. 115 al. 4 LEtr). La pratique des cantons est très variable sur ce point.

Cette interprétation semble cependant trop restrictive au vu de l’objectif de protection de l’art. 31 CR. Compte tenu de l’issue imprévisible de la procédure d’asile, les personnes dont la demande ne semble pas dépourvue de toute chance de succès devraient pouvoir se prévaloir de motifs de justification lorsque les conditions de l’art. 31 par. 1 CR sont remplies. La quotité de la peine prévue par la loi, à savoir une peine privative de liberté jusqu’à un an ou une peine pécuniaire, méconnaît, à notre sens, la situation déjà difficile des requérants d’asile. Des personnes ayant fui leur pays d’origine pour un motif ou un autre ne disposent en général pas d’assez d’argent pour pouvoir s’acquitter d’une peine pécuniaire. Quant à elle, la privation de liberté semble être une sanction disproportionnée pour une entrée illégale. Lorsqu’une demande d’asile suit le « comportement délictueux » d’une entrée illégale, la personne part subjectivement de l’idée que son entrée en Suisse est justifiée par les motifs invoqués à l’appui de sa demande d’asile. La punissabilité dépend d’une décision administrative – c’est-à-dire de la décision sur la demande d’asile – dont le résultat ne peut toutefois en règle générale pas être prévu à l’avance par le requérant. C’est pourquoi, on peut se demander si une éventuelle faute peut être retenue sous l’angle du droit pénal. La question de l’existence d’une intention se pose du reste en des termes semblables. Selon le principe de culpabilité (nulla poena sine culpa, pas de peine sans culpabilité), il faut renoncer à une sanction pénale d’autant plus que, si elles existent, la faute et les « conséquences de l’acte » sont toujours peu importantes (art. 52 CP).

3.5 Demande d’asile présentée à l’aéroport (art. 22 s. LAsi)

La procédure à l’aéroport est régie par des dispositions spéciales. Celles-ci ne sont actuellement applicables qu’aux seuls aéroports de Zurich-Kloten et de Genève-Cointrin ; si une demande d’asile est présentée dans un autre aéroport suisse, il y a transfert du requérant dans le CEP le plus proche et la procédure « normale » est suivie. En cas de dépôt de la demande à Zurich-Kloten ou à Genève-Cointrin, la police de l’aéroport en informe immédiatement le SEM. La police de l’aéroport de Zurich (Flughafenpolizei) ou le SEM (à Genève) collecte ensuite les données personnelles du requérant, relève ses empreintes digitales et le [64]photographie ; d’autres données biométriques peuvent encore être saisies (art. 22 al. 1 LAsi).

La personne qui demande l’asile est interrogée sur son identité et sa nationalité. Ses relations avec la Suisse sont également clarifiées, tout comme l’itinéraire suivi et les circonstances du départ. L’autorité compétente peut faire appel à un interprète. L’audition fait l’objet d’un procès-verbal.

Le SEM examine s’il est compétent pour mener la procédure d’asile en tenant compte des accords d’association à Dublin (art. 22 al. 1bis LAsi). S’il arrive à la conclusion que la Suisse n’est pas compétente, il rend une décision de non-entrée en matière et ordonne le renvoi du requérant (art. 31a al. 1 let. b LAsi en relation avec les art. 44 ss LAsi). Cette décision doit être notifiée dans les 20 jours suivant le dépôt de la demande d’asile, faute de quoi il faut autoriser l’entrée en Suisse du requérant d’asile et l’attribuer à un canton (art. 23 al. 2 LAsi).29

3.5.1 Autorisation d’entrer en Suisse

L’entrée en Suisse est autorisée lorsque la Suisse est compétente en vertu du Règlement Dublin III et que le requérant semble être exposé à un danger relevant du droit des réfugiés ou être menacé de traitements inhumains dans le pays d’où il est directement arrivé. Il en va de même s’il rend vraisemblable que ce pays l’obligerait, en violation de l’interdiction du refoulement, à se rendre dans un pays où il risque d’être exposé à un tel danger (art. 22 al. 1ter LAsi).

Le SEM peut autoriser l’entrée en Suisse pour des motifs humanitaires même si la compétence de la Suisse n’est pas donnée en vertu du Règlement Dublin III (art. 11a al. 3 OA 1). Il peut aussi le faire si le requérant d’asile a des relations étroites avec des personnes vivant en Suisse (art. 11a al. 2 let. a OA 1) ou si la Suisse est compétente, sur la base du Règlement Dublin III, pour mener la procédure d’asile et que le requérant n’est pas arrivé directement de son pays d’origine ou de provenance à la frontière suisse, mais rend vraisemblable qu’il a quitté ce pays pour un [65]motif inscrit à l’art. 3 al. 1 LAsi et est arrivé sans retard à la frontière suisse (art. 11a al. 2 let. b OA 1). Cependant, l’art. 11a OA 1 est formulé de manière potestative (« peut »). Cela signifie que les personnes concernées n’ont pas un droit à l’octroi d’une autorisation d’entrée, mais que la décision relève du pouvoir d’appréciation du SEM. La légalité et l’adéquation de la décision peuvent être revues par le TAF (art. 108 al. 4 LAsi).

3.5.2 Refus (provisoire) de l’entrée en Suisse

Lorsque la compétence de la Suisse pour mener la procédure d’asile est donnée, mais que les autres conditions d’entrée ne sont pas remplies, le requérant se voit refuser provisoirement l’entrée. Le SEM lui assigne alors un lieu de séjour et lui fournit un logement adéquat. En règle générale, la personne est assignée à la zone de transit de l’aéroport. A Genève, sont prévues 30 places à cet effet et à Zurich 60. La durée de ce séjour est de 60 jours au plus. Le requérant y est soumis aux mêmes règles que celles qui régissent les CEP, à savoir celles de l’ordonnance du DFJP relative à l’exploitation des logements de la Confédération dans le domaine de l’asile (voir pt 4.1).

La décision d’assignation doit être notifiée au requérant dans les deux jours qui suivent le dépôt de la demande d’asile ; il faut préalablement accorder au requérant le droit d’être entendu et lui donner l’occasion de se faire représenter (art. 22 al. 2, 3 et 4 LAsi). L’assignation à l’aéroport comme lieu de séjour restreignant de fait la liberté de mouvement du requérant à la zone de transit, il faut que la personne ainsi concernée ait également la possibilité, en vertu des règles de la CEDH applicables en la matière, de faire contrôler cette privation de liberté par un juge.30 Tant que la demande d’asile n’a pas fait l’objet d’une décision (art. 23 LAsi), le refus de l’entrée en Suisse peut être attaqué devant le TAF (art. 108 al. 3 LAsi). Le TAF examine la privation de liberté en tant que « juge de la détention » souvent parallèlement à la question de l’admissibilité du refus de l’entrée en Suisse et tient compte notamment des circonstances, de la durée et du type d’hébergement, de la possibilité d’accès à des soins médicaux et des possibilités de contact avec le monde extérieur.31

Si l’entrée sur son territoire n’est pas autorisée malgré la compétence avérée de la Suisse, la procédure à l’aéroport suit son cours. L’art. 22 al. 6 LAsi renvoie aux art. 23, 29, 30, 36 et 37 LAsi pour la réglementation et les garanties de procédure, qui correspondent ainsi à celles de la procédure ordinaire.

[66]3.5.3 Durée du séjour

Si une décision d’asile ou de non-entrée en matière ne peut pas être rendue dans les 20 jours à l’aéroport, le requérant d’asile est attribué à un canton (art. 23 al. 2 LAsi).

La durée du séjour de 20 jours devrait, dans la plupart des cas Dublin, s’avérer insuffisante pour mener à bien la procédure de détermination de la compétence.

Au total, le requérant d’asile peut être retenu 60 jours au plus à l’aéroport ou dans un autre lieu de séjour attribué dans la zone de transit. Après une décision de renvoi entrée en force, il est cependant encore possible de le placer en détention en vue du refoulement (sur ce type de détention, voir chap. XVI, pt 3.2.4 ss).

Il faut relever que toutes les décisions rendues dans le cadre de la procédure à l’aéroport peuvent être notifiées directement au requérant d’asile lui-même (même s’il est représenté). Cette règle contenue à l’art. 13 al. 3 LAsi déroge à la règle générale de l’art. 11 al. 3 PA sur la représentation en justice.32

3.5.4 Requérants d’asile mineurs non accompagnés dans la procédure à l’aéroport

Selon la loi, si le requérant d’asile est un mineur non accompagné (MNA), l’autorité cantonale désigne une personne de confiance pour la durée de la procédure à l’aéroport (art. 17 al. 3 let. a LAsi), pour autant que des actes de procédure déterminants y soient accomplis. Davantage d’informations au sujet des particularités dans la procédure pour MNA se trouvent dans le chap. XVIIII, pt 3.

La désignation d’une personne de confiance33 devrait intervenir dès que possible, c’est-à-dire avant l’accomplissement de tout acte de procédure à l’aéroport. Le MNA doit être accompagné tout au long de la procédure, y compris lorsque celle-ci ne comprend pas d’audition approfondie. Une éventuelle décision de non-entrée en matière et de renvoi (p. ex. rendue sur la base de l’art. 31a al. 1 let. b LAsi en relation avec les art. 44 ss LAsi) doit pouvoir être vérifiée et éventuellement attaquée par le MNA avec l’aide de la personne de confiance. Cela vaut également pour la décision incidente d’assignation d’un lieu de séjour à l’aéroport. Le MNA ne subit pas de préjudice juridique du fait de la règle de l’art. 13 al. 3 LAsi qui prescrit la remise des décisions directement aux requérants d’asile, car cette règle est corrigée, [67] en ce qui le concerne, par le fait qu’un délai de recours ne court qu’après la notification de la décision attaquée au MNA et à la personne de confiance ; selon l’art. 53a OA 1, le délai ne commence à courir qu’à partir de la date de la notification qui intervient le plus tard.

Malgré cette amélioration pour les MNA, il n’empêche que les conditions de la procédure à l’aéroport (en particulier la détention34) ne correspondent aucunement à l’intérêt supérieur de l’enfant, de telle sorte que l’entrée devrait être toujours immédiatement autorisée et la procédure « normale » ordonnée pour les enfants, qu’ils soient accompagnés ou non.

3.6 Visa humanitaire

3.6.1 Abolition de la procédure à l’ambassade

Jusqu’à fin septembre 2012, existait la possibilité de déposer une demande d’asile auprès d’une ambassade suisse à l’étranger. Cette possibilité a été supprimée dans le cadre des modifications déclarées urgentes de la loi sur l’asile.35 Cette décision a été confirmée le 9 juin 2013 en votation populaire à une majorité de 78.4 %.

La seule voie légale, et surtout sûre, à disposition des requérants d’asile voulant demander protection en Suisse a ainsi été coupée. Les personnes persécutées sont désormais exposées à de nouveaux risques par les dangers du voyage. En particulier les femmes et les enfants courent le danger de subir des atteintes à leur intégrité.36

La procédure à l’ambassade contribuait beaucoup à l’entrée en Suisse dans la sécurité.37 Dans de nombreux cas, elle a permis des regroupements familiaux qui n’auraient pas été possibles par la seule application des principes de la LEtr.

Au cours des débats sur la suppression de la procédure à l’ambassade, il a souvent été question du maintien de la possibilité d’obtenir un visa humanitaire auprès d’une représentation suisse à l’étranger. Toutefois, le visa humanitaire ne remplace pas la procédure à l’ambassade de manière adéquate. Nous y reviendrons au pt 3.6.4.

[68]3.6.2 Base juridique du visa humanitaire

L’art. 5 par. 4 let. c du Code frontières Schengen en relation avec l’art. 25 du code des visas prévoit la possibilité d’un visa à validité territoriale limitée pouvant être accordé par l’Etat membre concerné notamment pour des motifs humanitaires.38

Selon la directive du SEM,39 un visa pour motifs humanitaires peut être accordé à une personne lorsqu’il y a manifestement lieu d’admettre que les circonstances concrètes dans lesquelles elle se trouve dans son pays d’origine ou de provenance l’exposent à une mise en danger à la fois directe, sérieuse et concrète de sa vie et de son intégrité corporelle. En outre, la personne doit se trouver dans une situation de détresse particulière nécessitant impérativement une intervention de l’autorité et justifiant l’octroi d’un visa d’entrée. A titre d’exemples, on peut citer le cas de guerre imminente ou déclarée ou d’une mise en danger individuelle directe en raison d’une situation concrète. Le cas d’espèce doit faire l’objet d’un examen attentif. En outre, la directive pose la présomption que les personnes se trouvant déjà dans un pays tiers ne courent plus de danger.

Les bases juridiques du droit suisse pour l’octroi d’un visa humanitaire se trouvent dans l’ordonnance sur l’entrée et l’octroi de visas (OEV). Selon l’art. 2 al. 4 OEV, le visa autorise une entrée en Suisse pour une durée de 90 jours. Il s’agit certes d’un visa Schengen, mais il n’est valable que pour la Suisse. Des difficultés pratiques particulières apparaissent quand il n’existe pas de vol direct et que l’entrée en Suisse doit se faire en passant par un autre Etat Schengen. Les Etats concernés refusent souvent d’établir un visa de transit, car ils craignent que les personnes ne se rendent finalement pas en Suisse comme prévu.

Après l’entrée en Suisse, la personne peut y déposer une demande d’asile et suivre la procédure ordinaire. Si elle ne le fait pas, elle doit quitter la Suisse avant l’échéance des 90 jours du visa.

[69]La demande de visa humanitaire en pratique

La demande de visa humanitaire doit être déposée dans une représentation suisse à l’étranger. Une liste de toutes les représentations se trouve sur le site du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) sous la rubrique « Représentations ».

Le formulaire (Schengen) peut être téléchargé sur Internet et rempli ; on peut l’obtenir en de nombreuses langues.40 Au chiffre 21 « Motifs », il faut indiquer « autres » et préciser qu’il s’agit d’une demande de visa pour des motifs humanitaires en ajoutant des indications détaillées sur la situation concrète dans l’espace réservé à cet effet, si possible déjà avec des moyens de preuve. En principe, aucun émolument n’est prélevé, sauf, selon la directive du SEM, si la demande de visa est manifestement infondée ou si elle est répétée avec les mêmes motifs. Le caractère manifestement infondé d’une demande relève du pouvoir d’appréciation qui ne fait guère l’objet d’un contrôle en pratique, car la plupart des requérants ne disposent pas des moyens de payer un émolument. Une procédure d’opposition auprès du SEM, qui seule peut aboutir à une décision susceptible de recours, nécessite en principe une avance de frais de 200.- chf.41

Il est possible que la personne soit convoquée pour un entretien à l’ambassade. La directive indique cependant qu’aucune mesure d’instruction poussée n’est nécessaire et qu’il ne s’agit en particulier pas de mener une audition telle que prévue en droit d’asile. Il suffit de se baser sur une première estimation de la représentation. Cela signifie que la mise en danger doit être très clairement mise en évidence déjà au moment du dépôt de la demande de visa, car aucune mesure d’instruction détaillée ne doit être accomplie par les autorités. Voir aussi le devoir de collaborer des requérants pour plus d’informations à ce sujet.

3.6.3 Examen de la demande

Lorsqu’il existe des motifs humanitaires justifiant l’octroi d’un visa, aucune autre condition d’entrée ne doit être remplie. En effet, l’absence de documents de voygage valables (art. 3 al. 4 OEV) et de moyens financiers suffisants ne sont pas des motifs de non-entrée en matière sur la demande de visa humanitaire. De même, la condition de la garantie d’un retour à l’échéance du visa42 ainsi que l’obligation de conclure une assurance maladie n’ont pas cours s’il existe des motifs humanitaires (art. 10 al. 3 let. b OEV). D’autres dispositions spéciales pour le visa humanitaire se [70]trouvent à l’art. 11b al. 2 OEV (recevabilité de la demande de visa) et à l’art. 12 al. 4 OEV (conditions pour l’octroi et le refus du visa).

Les motifs invoqués pour l’obtention d’un visa humanitaire sont examinés par la représentation à l’étranger. Si celle-ci ne les considère pas comme suffisants, elle rejette la demande de sa propre compétence au moyen du formulaire prévu par le droit de Schengen.

Au contraire, si elle reconnaît que les motifs sont suffisants ou si elle a des doutes, elle saisit les données de la demande avec photo et empreintes digitales dans le système national des visas ORBIS et transmet la demande de visa au SEM. La représentation joint à la demande une brève prise de position sur les conditions d’entrée en Suisse sous forme de note et envoie le dossier au SEM (annexe à ORBIS ou courrier diplomatique).

Le SEM examine la demande et accorde le visa s’il considère les motifs suffisants pour un visa humanitaire. La représentation suisse à l’étranger en est informée. Elle établit le visa permettant la venue du requérant en Suisse.

Au contraire, si le SEM rejette la demande, il établit une note qu’il insère dans ORBIS, saisit les motifs du rejet et retourne la demande à la représentation compétente qui refuse le visa.

Si le visa humanitaire est refusé, le requérant peut faire opposition dans les 30 jours au SEM (art. 6 al. 2bis LEtr). En cas de nouveau rejet, le recours au TAF est ouvert.

Si le visa humanitaire est accordé, la Confédération peut, selon l’art. 53 al. 3 OA 2, prendre en charge les frais nécessaires à l’entrée directe en Suisse et une demande dans ce sens peut être déposée. Toutefois, il n’existe pas un droit à la prise en charge de ces frais.

3.6.4 Problématique du visa humanitaire

Le visa humanitaire est censé garantir que des personnes menacées directement dans leur vie ou dans leur intégrité corporelle puissent trouver protection en Suisse malgré l’abrogation de la procédure à l’ambassade.43 Toutefois, les conditions d’octroi d’un visa humanitaire sont plus restrictives que celles de l’ancienne procédure à l’ambassade.44 Le fait de retenir qu’une personne qui se trouve déjà dans un pays tiers n’est plus en danger est hautement problématique lorsqu’il n’y a pas ou plus d’ambassades [71]ouvertes dans le pays en crise. Si la personne en danger fuit dans un Etat voisin et qu’elle dépose une demande de visa humanitaire à l’ambassade suisse qui s’y trouve, il lui sera objecté qu’au moment de sa demande, elle ne réside pas dans une zone en crise et qu’elle n’est dès lors plus en danger.45 En pratique, une telle situation met en échec le sens du visa humanitaire. En effet, les personnes provenant de pays frappé par la guerre civile ou qui subissent d’autres crises, violences ou catastrophes, n’ont guère de chances d’obtenir un visa humanitaire pour leur permettre de fuir en Suisse légalement. Les ressortissants d’un pays où il n’y a pas ou plus de représentation suisse sont pratiquement exclus de la procédure de visa humanitaire.

Dans un arrêt concernant une femme de 80 ans originaire de la ville syrienne de Homs, le Tribunal administratif fédéral a jugé que la présence personnelle auprès de la représentation n’était pas une condition impérative pour le dépôt d’une demande de visa humanitaire.46 Cette décision laisse espérer une approche plus flexible du visa humanitaire.

A titre de comparaison, entre 2006 et 2012, environ 377 entrées en Suisse en moyenne par année ont été autorisées dans le cadre d’une procédure à l’ambassade47 alors qu’en 2013, seuls 35 visas humanitaires ont été accordés. En 2014, 84 cas, dont environ 20 en lien avec la guerre en Syrie, ont été recensés.

4 Les centres d’enregistrement et de procédure (CEP)

4.1 Généralités

Au début de leur séjour en Suisse, les requérants d’asile sont en règle générale logés dans un CEP. Au moment de la mise sous presse, cinq CEP sont en service. Ceux-ci sont situés à Altstätten, Bâle, Chiasso, Kreuzlingen et Vallorbe. Le nombre de places disponibles dans chacun de ces centres varie entre 134 (Chiasso) et 400 (Bâle), pour atteindre un total d’environ 1200 places.48 En incluant les sites délocalisés, quelque 3000 personnes au total se trouvent dès lors dans des structures [72]d’hébergement de la Confédération. La composition de celles-ci change sans cesse au gré des nouveaux arrivants.

Les CEP sont gérés par le SEM qui peut toutefois charger des tiers49 de tâches ne relevant pas de la puissance publique pour assurer le fonctionnement des centres (art. 17 OA 1).

Les CEP sont ouverts du lundi au vendredi de 8h00 à 17h00. En dehors de ces heures, les requérants d’asile ne sont accueillis qu’en cas de circonstances particulières. Les CEP et les autres centres de la Confédération sont réservés aux requérants d’asile et aux personnes à protéger. Ils ne sont en principe pas ouverts au public.50

Le séjour dans les CEP dure 90 jours au maximum (art. 16 al. 2 OA 1). Selon l’art. 16a OA 1, en cas de situation particulière due à l’augmentation passagère ou durable du nombre de demandes d’asile, des « sites délocalisés gérés par la Confédération »51 peuvent être ouverts afin de garantir l’hébergement des requérants d’asile. Le séjour y dure jusqu’à ce que les autorités cantonales disposent des infrastructures nécessaires, mais au maximum douze mois. Au sujet du choix de localisation des centres, il faut veiller à ce qu’ils ne se trouvent pas dans des endroits totalement reculés empêchant tout contact social et rendant pratiquement impossible l’accès à une représentation juridique en raison de leur éloignement. Si tel était le cas, il pourrait y avoir une restriction disproportionnée à la liberté des personnes concernées, voire même une mesure équivalant à une privation de liberté.52

4.2 Fonction des CEP

Au CEP, la demande d’asile est enregistrée ; les requérants d’asile remplissent une fiche avec leurs données personnelles et un questionnaire détaillé sur leur état de santé, ils sont photographiés et leurs empreintes digitales sont prélevées. Celles-ci sont comparées électroniquement avec les données dont disposent le SEM, la police fédérale et les corps de gardes-frontières ainsi qu’avec les données d’Eurodac. Les documents de voyage ou autres documents attestant de l’identité du requérant sont versés au dossier. Les requérants qui n’ont pas de documents de voyage valables sur [73]eux sont priés d’en déposer dans les 48 heures. Ils doivent confirmer par écrit avoir reçu cette injonction. Ils reçoivent une notice les informant de leurs droits et de leurs devoirs dans le cadre de la procédure (voir art. 19 al. 3 LAsi ; plus de détails au pt 7.4 et au chap. XII, pt 3). Pendant leur séjour au CEP, les requérants doivent en principe se tenir à la disposition des autorités (art. 16 al. 1 OA 1). Au CEP, ils sont en règle générale sommairement interrogés sur leur identité, l’itinéraire suivi et leurs motifs de fuite (audition sommaire, art. 26 al. 2 LAsi). L’audition sommaire constitue la base de la décision sur la suite de la procédure, à savoir s’il faut envisager une procédure de réadmission dans un Etat tiers, une procédure Dublin (pt 7.1.2) ou une procédure en Suisse. En présence d’indices selon lesquels la minorité alléguée d’un requérant ne correspondrait pas à la réalité, une expertise de détermination de l’âge peut être ordonnée (art. 17 al. 3bis LAsi ; autres informations au sujet des requérants mineurs au chap. XVIIII, pt 3). Cette décision est également déterminante pour savoir si l’attribution du requérant à un canton est effectuée ou si la procédure peut être menée à terme dans le CEP. Le point 7 examinera de plus près la procédure de première instance.

4.3 Règlement intérieur

Selon l’art. 18 OA 1, l’exploitation du CEP est réglée par une ordonnance édictée par le DFJP.53 Cette ordonnance s’applique aussi aux centres spécifiques visés à l’art. 26 al. 1bis LAsi, aux centres de la Confédération exploités dans le cadre de phases de test, aux sites délocalisés gérés par la Confédération ainsi qu’aux logements situés dans les aéroports de Genève-Cointrin et de Zurich-Kloten (art. 1). Elle porte principalement sur les points suivants :

 Art. 3 : la fouille des requérants par du personnel (de sécurité) de même sexe est autorisée. Les documents de voyage, les objets dangereux, les valeurs patrimoniales, les appareils électroniques bruyants, l’alcool, les drogues, les armes, etc. sont saisis. Les armes interdites et les drogues sont remises à la police.

 Art. 4 : les requérants sont logés dans des dortoirs non mixtes. Il est tenu compte des besoins particuliers des familles, des enfants et des personnes avec un handicap.

 Art. 5 : pendant leur séjour, les requérants ont accès aux soins médicaux de base.

 Art. 6 : les requérants peuvent être contraints d’accomplir des travaux ménagers.

 Art. 6a et 6b : des programmes d’occupation sont proposés aux personnes de plus de 16 ans (sauf dans les logements aux aéroports), mais ces personnes n’ont pas un droit à y participer.

 [74]Art. 7 : des téléphones publics sont à la disposition des requérants, de même qu’un télécopieur si ce mode de communication est nécessaire pour prendre contact avec un conseiller juridique ou un représentant légal. Le courrier postal est transmis aux requérants.

 Art. 9 : les aumôniers ont accès au centre pendant les heures d’ouverture et les mandataires pendant les heures de visite.

 Art. 10 : les visiteurs qui peuvent rendre vraisemblable qu’ils ont des liens avec un requérant peuvent être reçus, avec l’accord de la direction, dans des locaux prévus à cet effet.

 Art. 12 : l’autorisation de sortie requise pour quitter le centre peut être refusée lorsque le requérant doit se tenir à disposition de l’autorité pour l’exécution de la procédure d’asile (c’est-à-dire lorsque des opérations concrètes de procédure doivent être accomplies), lorsqu’il est tenu d’exécuter des tâches ménagères ou lorsqu’il n’a pas respecté les consignes. Si la sortie est refusée pendant plus d’un jour, le refus doit, sur demande, faire l’objet d’une décision susceptible de recours.54

4.4 Excursus : centres spécifiques

Avec les modifications urgentes de la loi sur l’asile du 28 septembre 2012 (projet 3), la possibilité d’héberger les requérants d’asile « récalcitrants » dans des centres spécifiques a été ancrée à l’art. 26 al. 1bis LAsi. Une personne peut ainsi être assignée à un centre spécifique lorsqu’elle menace la sécurité et l’ordre publics ou, par son comportement, porte sensiblement atteinte au fonctionnement du CEP ; une précision de ces conditions se trouve à l’art. 16b OA 1. L’assignation à un centre spécifique ne peut être attaquée que par un recours contre la décision finale (art. 16b al. 5 OA 1) et la durée maximale de séjour est de 140 jours (art. 16c OA 1). Le fait que l’hébergement dans un tel centre ne puisse pas être remis en cause plus tôt est problématique sous l’angle de l’Etat de droit en particulier, car l’hébergement en question revêt le caractère d’une mesure pénale et peut constituer une atteinte grave à la liberté de mouvement et à la liberté personnelle des requérants concernés (voir aussi chap. XIII, pt 1.3).55 Actuellement, deux centres fédéraux spécifiques sont prévus, mais les lieux d’implantation ne sont pas encore connus.56

[75]5 Phase test à Zurich

Le 6 janvier 2014 a débuté, à Zurich, le projet pilote destiné à tester et évaluer préalablement en pratique les changements qui devraient être introduits dans la procédure d’asile dans le cadre de la restructuration du domaine de l’asile adoptée en septembre 2015.

Ce projet a pour base légale l’art. 112b LAsi qui permet, dans le cadre de phases de test, de déroger, sur certains points et à certaines conditions, à la LAsi et à la LEtr. L’efficacité et la nécessité de ces phases de test ont été très controversées au Parlement. Des objections de fond relevant de l’Etat de droit ont été soulevées contre le projet d’article 112b précité auquel il était reproché d’ouvrir la voie à des violations du principe de l’égalité de traitement et du droit à un recours effectif. Des doutes ont aussi été émis au sujet des compétences élargies attribuées par cet article au Conseil fédéral d’une part et des exigences de précision pour une telle délégation d’autre part.57 Finalement, l’art. 112b LAsi a été adopté à la conférence de conciliation du 26 septembre 2012 avec une restriction : la durée de la phase de test a été fixée à deux ans au lieu de trois comme pour les autres mesures d’urgence. La base du projet pilote est l’ordonnance du 4 septembre 2013 sur la réalisation de phases de test relatives aux mesures d’accélération dans le domaine de l’asile (ordonnance sur les phases de test, OTest, RS 142.318.1).

L’art. 8 OTest exige que la phase de test soit évaluée. L’idée est de pouvoir se prononcer le plus objectivement possible sur de nouvelles règles de procédure avant de les introduire éventuellement dans la loi. Concrètement, la première évaluation a été faite par le SEM qui a chargé quatre organismes externes (mandats 1 à 4) d’une analyse tant quantitative que qualitative.58 L’évaluation de la phase de test a eu une importance particulière notamment parce que le projet de restructuration du domaine de l’asile adopté s’appuie en grande partie sur les dispositions de [76]l’OTest et sur les premières expériences faites dans le centre pilote.59 Les mesures urgentes datant de 2012 ont été prolongées le 26 septembre 2014 jusqu’au 28 septembre 2019.60 Par décision du Conseil fédéral du 5 juin 2015, l’OTest a été prorogée jusqu’au 28 septembre 2019 au plus tard.61 La prorogation est due aux résultats positifs de l’évaluation intermédiaire et à la reprise de parties essentielles des dispositions de l’OTest dans le projet de restructuration du domaine de l’asile.62

Sur la base de ces données juridiques, de nouvelles modalités procédurales sont expérimentées dans le traitement des demandes d’asile au centre de procédure de la Confédération de Zurich (« centre de test »). Le but aussi bien de la restructuration du domaine de l’asile que des mesures mises en place au centre de test est de réaliser des procédures d’asile et une exécution éventuelle de décisions négatives à la fois rapidement et dans le respect des principes de l’Etat de droit. Les personnes doivent obtenir la protection à laquelle elles ont droit et une aide pour s’intégrer dans les meilleurs délais en Suisse. La rapidité de la procédure devrait réduire aussi la tendance à déposer des demandes d’asile manifestement infondées et ainsi renforcer la crédibilité du domaine de l’asile dans son ensemble.63 Les requérants d’asile ne devraient pas subir de préjudices du fait de leur « participation aux phases de test » (art. 6 OTest).

Un « point clé » de cette nouvelle procédure accélérée64 est l’institution de la consultation et de la représentation juridiques gratuites pour chaque requérant d’asile pendant la procédure, d’autant plus que cette dernière se déroule sans représentation des œuvres d’entraide. Selon l’art. 24 OTest, le but de la consultation est d’informer les intéressés sur le déroulement de la procédure et sur leurs droits et obligations. Au cours de l’entretien, une représentation juridique est accordée à tous les requérants d’asile qui n’y renoncent pas expressément (art. 25 al. 2 OTest). [77]La prise en charge du mandat de représentation intervient par la signature d’une procuration par le requérant. Selon l’art. 25 al. 2 OTest, le représentant légal participe à toutes les phases de la procédure ; il informe par ailleurs aussi rapidement que possible le requérant sur les chances d’aboutissement de sa demande d’asile. Selon l’art. 25 al. 3 OTest, la représentation juridique prend fin soit à l’entrée en force de la décision en cas de procédure accélérée ou de procédure Dublin, soit au moment où il est décidé de continuer la procédure hors phases de test (« procédure étendue »). S’il estime qu’un recours serait voué à l’échec, le représentant légal peut déposer son mandat avant l’entrée en force de la décision, mais doit le communiquer aussi rapidement que possible à l’intéressé (art. 25 al. 4 OTest).65

Le principe de la procédure de test est qu’il soit statué rapidement dans tous les cas qui permettent une décision rapide. Dans cet esprit, les dossiers sont attribués soit à la procédure Dublin soit aux autres procédures déjà au moment de la phase préparatoire au sens de l’art. 16 OTest. Dans le cadre d’une procédure Dublin, la phase préparatoire dure dix jours au plus ; elle peut s’étendre jusqu’à 21 jours dans les autres types de procédures (art. 16 al. 1 OTest). Les procédures Dublin se poursuivent ensuite conformément aux règles de la LAsi et du RD III (à ce sujet, voir chap. VII, pt 2.2).

Dans les autres procédures, une audition a en principe lieu (sauf dans les cas de renonciation et de retrait). Le SEM décide ensuite si la procédure peut être menée dans les huit à dix jours (art. 17 OTest – « procédure accélérée ») ou si le cas doit être transféré en « procédure hors phases de test » (art. 19 OTest) parce qu’une décision sur l’asile nécessite plus de temps. Le représentant légal peut aussi demander le renvoi à la procédure étendue.66

Pour chaque cas dans lequel le SEM prend la décision à l’interne de ne pas entrer en matière sur la demande d’asile ou de la rejeter, il doit notifier un projet de décision au représentant légal attribué. La notification intervient pas voie de remise (art. 13 al. 1 OTest).67 Le représentant légal a la possibilité de prendre position dans [78]les 24 heures. Le dépôt tardif de cette prise de position est considéré comme une renonciation (art. 27 al. 2 OTest).


Illustration 1 : Centre de procédure à Zurich – phase de testSource : SEM

Le délai pour recourir contre les décisions de non-entrée en matière est de cinq jours ouvrables comme dans la procédure ordinaire (art. 108 al. 2 LAsi). En revanche, les recours contre les décisions matérielles rendues dans le cadre d’une procédure accélérée au sens de l’art. 17 OTest doivent être déposés dans le délai de dix jours fixé à l’art. 38 OTest (en dérogation à l’art. 108 al. 1 LAsi).68 La jurisprudence ne donne pas encore une idée claire et générale de la façon dont le TAF juge la procédure prévue par l’OTest. En effet, les cas tranchés jusqu’en mai 2015 ont essentiellement porté sur des questions particulières et des détails spécifiques.69

Conformément aux exigences de l’art. 112b al. 4 LAsi, l’OTest mentionne toutes les dispositions légales auxquelles elle déroge, soit exactement les articles de la LAsi et de la LEtr.

[79]Le détail de ces dérogations signalées dans l’ordonnance est le suivant :


Illustration 2 : Spécifités de la procédure test

L’OTest ne mentionne pas d’autres dispositions. Une dérogation à d’autres lois, en particulier à la PA, mais aussi au CC (en ce qui concerne la désignation nécessaire et sans retard d’un tuteur ou d’un curateur pour les mineurs non accompagnés dans le canton de résidence) ou au CO (en ce qui concerne le fondement du mandat entre représentation juridique et requérant d’asile) serait inadmissible de par la teneur de l’art. 112b LAsi. La portée des dérogations admissibles est limitée aux questions concernant la réalisation de la procédure d’asile de première instance et de la procédure de renvoi ainsi qu’à son financement.

6 Attribution à un canton

Au plus tard après 90 jours dans un CEP,70 les requérants d’asile sont attribués à un canton et y sont hébergés et assistés. L’attribution intervient selon un mode aléatoire dans le cadre de la clé de répartition fixée à l’art. 21 OA 1 en fonction [80] de la population des cantons. La répartition doit tenir compte des intérêts dignes de protection des requérants (art. 22 OA 1). La décision d’attribution peut être attaquée auprès du TAF seulement en cas de violation du principe de l’unité de la famille (art. 27 al. 3 LAsi en relation avec l’art. 107 al. 1 LAsi) ; il s’agit ainsi d’assurer le respect des art. 8 et 13 CEDH. Même les requérants d’asile déboutés ayant des relations familiales ont un droit à être attribués dans le même canton que les membres de leur famille.71 La notion de famille dépasse ici celle de famille nucléaire (conjoints et enfants mineurs). De manière analogue à celle de l’art. 8 CEDH, elle s’étend au-delà du noyau familial pour comprendre notamment le cercle des oncles et tantes et des neveux et nièces pour autant qu’il existe entre les membres une relation proche, authentique et effectivement vécue.72

Les personnes frappées d’une décision de non-entrée en matière ou d’une décision négative sont également réparties dans les cantons et le canton désigné est compétent pour l’exécution de leur renvoi (art. 44 à 48 LAsi) ainsi que pour l’octroi de l’aide d’urgence.

Les personnes dont le renvoi peut être exécuté depuis le CEP sont attribuées au canton du lieu de situation du CEP (art. 21 al. 3 OA 1). Si la procédure est terminée, mais que le renvoi ne peut pas encore être exécuté, l’attribution intervient en vue de l’exécution. Si elle n’est pas terminée, les requérants d’asile sont attribués à un canton pour y séjourner pendant la procédure (art. 27 al. 2 LAsi). Les cantons désignent l’endroit où doit se présenter le requérant au plus tard dans les 24 heures après avoir quitté le CEP (art. 23 OA 1).

Dans le canton auxquels ils sont attribués, les requérants d’asile sont logés, en règle générale d’abord de manière collective, et reçoivent l’aide sociale nécessaire. Le canton de séjour est aussi compétent pour fournir les autres prestations d’assistance ainsi que pour ordonner d’éventuelles mesures de contrainte (voir à ce sujet chap. XVI).

En ce qui concerne les requérants d’asile mineurs, il y a lieu d’examiner dans le cas concret, au moment de l’attribution au canton, comment leur bien peut le mieux être pris en considération. Selon l’art. 17 al. 3 let. c LAsi, lorsqu’il s’agit d’un mineur non accompagné, les autorités cantonales compétentes doivent prononcer sans tarder des mesures tutélaires ou nommer une personne de confiance [81]si la tutelle prévue à l’art. 327a CC ne peut pas être organisée immédiatement par l’autorité de protection de l’enfant (art. 7 al. 2 OA 1) (voir chap. XVIIII, pt 3).73

7 Le déroulement de la procédure de première instance

7.1 Phase préparatoire

La phase préparatoire commence par le dépôt de la demande d’asile et dure au maximum trois semaines (art. 26 al. 1quater LAsi). Pendant cette phase, il s’agit de récolter des informations permettant de définir la suite de la procédure. Cette suite peut consister en une procédure Dublin, une procédure nationale ou, éventuellement, une procédure de réadmission dans un Etat tiers.

7.1.1 Entretien de conseil

Selon l’art. 25a LAsi, l’entretien de conseil doit servir à clarifier s’il existe une demande d’asile au sens de l’art. 18 LAsi et si celle-ci peut être suffisamment motivée. Si tel n’est pas le cas et que la personne concernée retire sa demande, celle-ci est classée sans décision formelle (sur le classement sans décision formelle, voir chap. VI, pt 4.4) et le renvoi est ordonné. L’entretien de conseil a lieu lors de l’audition sommaire, normalement sans représentation des œuvres d’entraide ni participation du représentant légal. Il existe ainsi le danger que les requérants d’asile ne puissent pas évaluer correctement la portée de l’entretien ou qu’ils ne comprennent pas qu’ils sont définitivement liés par un retrait de leur demande d’asile. Toutefois, selon les renseignements fournis par le SEM, l’entretien fait l’objet d’un procès-verbal, ce qui peut contribuer à ce que l’entretien ne soit pas utilisé comme une occasion de pousser les requérants à retirer leur demande. L’accès à une procédure d’asile respectant les principes de l’Etat de droit doit être garanti.

[82]En l’absence d’audition sommaire, l’entretien de conseil doit avoir lieu immédiatement avant l’audition sur les motifs d’asile. Tel peut être le cas dans l’hypothèse d’une procédure de réexamen ou de demande multiple.

7.1.2 Audition sommaire

L’audition sommaire74 est l’élément principal de la phase préparatoire. Le requérant y est invité à fournir les premières indications sur sa personne et sur ses motifs d’asile. Après les salutations et l’explication sur les droits et les devoirs du requérant, les participants sont brièvement présentés. En principe, il s’agit de collaborateurs du SEM, du requérant d’asile, et normalement d’un interprète. Le procès-verbal est établi par l’auditeur et il n’y a pas de représentation des œuvres d’entraide. Le requérant peut se faire accompagner par une personne de son choix, mais celle-ci doit ne pas être elle-même requérante d’asile. Il est interrogé sommairement sur son identité, son origine, ses séjours, ses relations, ses documents d’identité et sur son itinéraire de fuite. Ensuite, il lui est demandé de présenter brièvement et de manière succincte les motifs de sa demande d’asile.

Lorsqu’au vu des informations recueillies, il semble possible qu’un autre Etat Dublin soit responsable du traitement de la demande d’asile, le droit d’être entendu est accordé au sujet de cette éventuelle compétence de l’Etat concerné. En pratique, ce droit d’être entendu est accordé pour chaque Etat entrant en ligne de compte, car l’examen de la compétence proprement dit n’a pas encore commencé. Cela signifie que le requérant d’asile est interrogé sur ce qui plaiderait en défaveur d’un retour et de l’examen de la demande d’asile dans l’un des Etats Dublin éventuellement responsable. Or, ce point est problématique sous l’angle du droit à l’information (art. 4 RD III). En effet, pour tenir compte des exigences de l’entretien personnel (art. 5 RD III) et du droit d’être entendu, il faudrait d’abord déterminer quel Etat Dublin est responsable et requis pour que le requérant puisse correctement être informé et s’exprimer au sujet d’une situation concrète.75

A la fin de l’audition, le procès-verbal est imprimé et retraduit. Le requérant d’asile confirme son exactitude par une signature sur chaque page. Il est possible d’y apporter des corrections ou des compléments, mais il faut les signaler comme tels.

Lorsque des persécutions de nature sexuelle sont invoquées, l’équipe des fonctionnaires menant l’audition sommaire ne doit certes pas être modifiée, mais si elle [83]n’est pas de même sexe que le requérant, il faut en tenir compte lors de l’évaluation des déclarations faites. En revanche, pour l’audition au sens de l’art. 29 LAsi, l’art. 6 OA 1 prévoit une équipe de même sexe que le requérant en cas de persécution sexuelle. La directive du SEM précise : si un homme requérant invoque des événements pertinents de nature spécifique au sexe, il faut lui accorder le droit d’être entendu au sujet de la composition de l’équipe des fonctionnaires menant l’audition.76 En ce qui concerne les femmes, une équipe de femmes est automatiquement composée.77 Il serait toutefois souhaitable qu’un droit d’être entendu soit également accordé aux femmes au sujet de la composition de l’autorité menant l’audition.

En annexe au procès-verbal de l’audition sommaire, figurent deux déclarations de consentement soumises à la signature du requérant d’asile. La première concerne l’accord donné au SEM pour demander à des Etats tiers et à des organisations internationales ainsi qu’à toute autorité suisse certaines informations et documents ayant un lien avec la procédure d’asile. Elle contient aussi l’accord du requérant sur le contrôle de l’authenticité des documents d’identité et sur la communication du résultat du contrôle aux autorités mentionnées. En signant la seconde déclaration, le requérant délie le personnel médical du secret médical pour autant que les informations soient importantes pour la procédure d’asile. Si le requérant refuse de signer les déclarations, il est renvoyé à son devoir de collaborer, ce qui signifie pratiquement qu’il est contraint de donner son accord dans l’intérêt d’une issue favorable de la procédure.

7.1.3 Etablissement des faits médicaux

L’art. 26bis LAsi exige des requérants d’asile qu’ils fassent valoir immédiatement après le dépôt de la demande d’asile, mais au plus tard lors de l’octroi du droit d’être entendu (chap. XII, pt 2) ou de l’audition sur les motifs d’asile (pt 7.2.2) les atteintes à leur santé déterminantes pour la procédure d’asile qui leur étaient déjà connues au moment du dépôt de la demande d’asile. Si des allégations sont faites plus tard au sujet de l’état de santé, celles-ci doivent être prouvées à moins que le requérant ait des motifs excusables pour justifier ce retard.78

[84]Dans ce contexte, il s’agit de relever que les conséquences psychiques du vécu lié à la fuite ne refont souvent surface qu’après une phase de calme et dans un contexte de sécurité physique. Pour les spécialistes, une invocation tardive d’événements traumatisants plaide pour leur vraisemblance, car les personnes concernées ne peuvent en règle générale en parler qu’après un long processus de maîtrise de soi et dans l’atmosphère intime d’une thérapie.79 Ce point devrait être pris en considération par le SEM lorsqu’il estime que des problèmes médicaux sont invoqués tardivement, sachant qu’un tel retard doit dans ce cas de figure être considéré comme « excusable » au sens de l’art. 26bis al. 3 LAsi.

La connaissance d’une atteinte à la santé au sens de l’art. 26bis al. 1 LAsi devrait être envisagée de manière analogue aux voies de droit extraordinaires, dans le cadre desquelles la « découverte » d’un vécu traumatisant est interprétée comme la « disparition de l’empêchement » (par exemple première thématisation dans le cadre d’une thérapie).80 La connaissance d’une dégradation de l’état de santé d’une personne au sens de l’art. 26bis al. 1 LAsi doit, en raison de l’état de fait comparable, également être interprétée à la lumière de cette jurisprudence.81

[85]7.2 Phase d’instruction

7.2.1 Décisions sans audition ordinaire

Dans certains cas, il n’y a pas d’« audition ordinaire » au sens de l’art. 29 LAsi. En plus des cas de NEM (voir chap. VII, pt 4.2), cette situation concerne quelques cas où une décision matérielle doit de facto être rendue.

Selon l’art. 36 al. 1 phr. 2 LAsi, il est possible de renoncer à une audition en cas de tromperie sur l’identité du requérant d’asile (let. a), si la demande s’appuie de manière déterminante sur des moyens de preuve faux ou falsifiés (let. b), ou en présence d’autres violations graves et fautives de l’obligation de collaborer (let. c). La tromperie sur l’identité et la violation grave et coupable de l’obligation de collaborer étaient, jusqu’en février 2014, des motifs autonomes de non-entrée en matière (en vertu de l’art. 32 al. 2 let. b et c aLAsi). Ces critères ont été abondamment interprétés dans la jurisprudence relative à ces dispositions.82 L’art. 36 al. 1 let. a LAsi requiert une tromperie sur « les noms, prénoms et nationalités, l’ethnie, la date et le lieu de naissance, ainsi que le sexe »83 constatée sur la base de mesures d’identification ou d’autres moyens de preuve. Il y a par exemple un cas d’application de l’art. 36 al. 1 let. c LAsi lorsque la personne concernée ne collabore pas à la saisie de ses empreintes digitales ou qu’elle ne participe pas, fautivement, à une audition ou à une audition complémentaire.84 Comme troisième sous-catégorie, l’art. 36 al. 1 let. b LAsi mentionne la demande d’asile qui s’appuie de manière déterminante sur des moyens de preuve faux ou falsifiés. Dans tous les cas, les autorités doivent être convaincues de l’existence des conditions requises et portent la charge de la preuve à cet égard.85

Le droit d’être entendu selon l’art. 36 al. 1 LAsi est accordé au requérant après l’audition sommaire. Cependant, l’existence d’éventuels risques au sens de l’interdiction du refoulement prévue par la CR et par la CEDH doit être complètement clarifiée dans ce cadre.

[86]La garantie du droit d’être entendu peut certes en principe être donnée oralement ou par écrit. Sous la forme écrite, cette garantie est toutefois problématique à notre avis lorsque le requérant ne parle aucune des langues officielles. Dans ce cas, celui-ci n’est en effet pas en mesure de profiter du droit d’être entendu même si le contenu du document lui est traduit. Le fait que les œuvres d’entraide offrent des consultations juridiques gratuites ne remplace pas, à notre avis, l’obligation des autorités de garantir le droit d’être entendu sous une forme accessible à son bénéficiaire.

Dans tous les autres cas a lieu une audition ordinaire sur les motifs d’asile au sens de l’art. 29 LAsi.

7.2.2 Audition sur les motifs d’asile

7.2.2.1 Généralités

L’audition approfondie permet de déterminer la suite à donner à la procédure d’asile. Cela suppose que les faits déterminants pour la décision – concernant la qualité de réfugié et les éventuels obstacles à l’exécution du renvoi – doivent être complètement recueillis. En matière de preuve, il est fait application des règles de l’art. 7 LAsi et c’est selon elles que la qualité de réfugié doit au moins être rendue vraisemblable (sur la vraisemblance, voir chap. XII, pt 5).

Le SEM peut charger l’autorité cantonale de l’audition si cette mesure permet d’accélérer sensiblement la procédure (art. 29 al. 4 LAsi).

Les personnes suivantes sont présentes à l’audition sur les motifs d’asile au sens des art. 29 s LAsi : le requérant d’asile, un auditeur du SEM, en règle générale l’interprète prévu d’office – pour autant que le requérant ne s’y oppose pas expressément – et un représentant d’une œuvre d’entraide autorisée (art. 30 al. 1 LAsi). En outre, un secrétaire assiste en règle générale aussi à l’audition pour rédiger le procès-verbal.

Le requérant d’asile peut se faire accompagner d’un mandataire et/ou d’un interprète de son choix (art. 29 al. 2 LAsi). Toutefois, ces personnes ne doivent pas être elles-mêmes des requérants d’asile.

7.2.2.2 Représentant des œuvres d’entraide (ROE)

L’institution de la représentation des œuvres d’entraide est une particularité de la procédure d’asile suisse. Elle existe depuis 1968 et doit contribuer, grâce à l’observation de l’audition des requérants d’asile par des représentants de la société civile, à un déroulement équitable et transparent de la procédure.

[87]Au début de l’audition, le rôle du ROE est expliqué au requérant et il est demandé explicitement à ce dernier s’il accepte la participation du ROE à l’audition. Si le requérant y consent, le ROE observe l’audition, peut poser des questions complémentaires et suggérer d’autres mesures d’instruction comme par exemple une expertise médico-légale pour assurer la preuve de traces de torture, ou une audition complémentaire. Par ailleurs, le ROE peut apporter des objections au procès-verbal par exemple au sujet du climat de l’audition ou de son déroulement.86 Au cours de l’audition, le ROE peut rédiger des notes manuscrites. Ces notes ne seront toutefois remises au requérant ou à son mandataire qu’après la fin de la procédure de première instance (art. 26 al. 2 OA 1). A la fin de l’audition, le ROE confirme sa participation par une signature, non pas sur le procès-verbal, mais sur une feuille séparée sur laquelle il peut apporter ses observations et ses remarques. Le ROE est soumis au secret vis-à-vis des tiers.

Deux heures avant l’audition, le ROE peut consulter les procès-verbaux des auditions précédentes. Cette règle garantit que le ROE ait une idée, avant l’audition, du contexte de la demande d’asile et des motifs de fuite, ce qui lui est indispensable pour remplir son rôle.

Le ROE ne jouit pas des droits de partie à la procédure.87 La présence d’un représentant des œuvres d’entraide est censée renforcer la confiance quant à l’objectivité de l’audition et augmenter la légitimité de la procédure.88

Cependant, la présence du ROE ne doit pas être considérée comme une règle impérative découlant des garanties du droit d’être entendu. Selon la jurisprudence, l’absence d’une ROE, qui ne découle pas d’un choix du requérant, constitue certes un vice de procédure, mais ne conduit pas impérativement à l’invalidation de l’audition.89 Pour permettre aux œuvres d’entraide d’assurer leur rôle dans la procédure, les dates des auditions doivent leur être communiquées à temps (art. 30 al. 3 LAsi) ; « à temps » signifie en règle générale cinq jours ouvrables avant l’audition (art. 25 al. 1 OA 1). Si la convocation parvient à temps aux œuvres d’entraide et que celles-ci n’y donnent pas suite ou ne comparaissent pas en temps voulu, l’audition déploie son plein effet juridique malgré l’absence du ROE (art. 30 al. 3 LAsi et art. 25 OA 1).

[88]7.2.2.3 Le déroulement de l’audition

L’audition se déroule en règle générale selon un schéma de questions que l’on trouve en annexe de la directive du SEM relative à la procédure d’asile (non accessible au public) et qui comprend les points suivants :

 Introduction : salutations, présentation des personnes présentes, explications sur les devoirs du requérant durant la procédure (voir chap. XII, pt 3).

 Questions préliminaires : données personnelles (relations de famille et de parenté à l’étranger et en Suisse, cursus scolaire, indications concernant le service militaire, l’activité professionnelle, les séjours à l’étranger et les mandataires éventuellement consultés) pour autant que la première audition n’ait pas été complète sur ces points ou que des questions importantes pour la décision restent ouvertes.

 Motifs d’asile : le requérant est d’abord invité à présenter spontanément ses motifs ; suit, au moyen de questions précises, une clarification des faits présentés : précisions concrètes, dissipation des malentendus, chronologie des événements, localisation et circonstances des principaux événements, questions sur les pays et questions spécifiques au cas particulier, approfondissement de certains éléments (activité politique, méthodes de persécution, explications relatives aux divers moyens de preuve, etc.). Il est ensuite donné une nouvelle fois au requérant l’occasion de dissiper les malentendus. En vertu de la maxime inquisitoire et de la garantie du droit du requérant d’être entendu, l’autorité a le devoir de procéder à une clarification complète des faits en ce qui concerne la qualité de réfugié et les obstacles à l’exécution du renvoi (voir chap. XII, pt 2).

 Fin de la clarification des faits : à la fin, l’autorité pose des questions pour clarifier les circonstances du départ. Elle invite, le cas échéant, le requérant à se prononcer sur les contradictions importantes contenues dans son exposé des faits, puis elle lui demande s’il a pu aborder tous les éléments importants à l’appui de sa demande d’asile.

 Information sur la suite de la procédure et sur le droit d’être entendu concernant le renvoi : le requérant est informé sur la suite de la procédure ainsi que sur les conséquences juridiques possibles. Il lui est donné l’occasion de se prononcer sur un éventuel renvoi et il a la possibilité d’indiquer tous les motifs qui n’ont pas encore été invoqués, mais qui lui paraissent importants (par exemple des motifs d’ordre humanitaire qui s’opposeraient au renvoi tels que des motifs médicaux). Il est enfin informé des autres devoirs de collaborer, en particulier de son devoir de se tenir à disposition des autorités pendant la procédure et d’annoncer ses changements d’adresse.

 Retraduction et approbation (par signature) du procès-verbal.

[89]7.2.2.4 Procès-verbal

Un procès-verbal de l’audition est établi. Il doit être signé par toutes les personnes présentes, sauf le ROE (voir art. 29 al. 3 LAsi). Les indications relatives à la personne du requérant (identité, formation, profession, service militaire, situation de famille) peuvent être résumées mais, sur tous les points pouvant avoir une incidence pour l’asile, les questions et les réponses doivent être verbalisées mot à mot. Le procès-verbal doit aussi indiquer des éléments de communication non verbale, par exemple lorsque le requérant est pris par l’émotion. Il doit enfin mentionner les éventuelles corrections apportées par le requérant ainsi que les questions du ROE qui n’ont pas été autorisées.

A l’issue de l’audition, les déclarations verbalisées sont retraduites dans la langue du requérant. Leur exactitude doit être attestée par la signature du requérant à chaque page (ou par un signe pour les personnes ne sachant pas écrire).

7.2.2.5 Excursus : interprètes

Comme peu de requérants d’asile maîtrisent une des langues officielles, le SEM fait appel à un interprète pour les auditions.90 Il ne peut y être renoncé que si le requérant affirme qu’il dispose de suffisamment de connaissances d’une langue officielle et qu’il est donc en mesure d’être interrogé et entendu dans cette langue.91

L’interprète a pour tâche de traduire mot à mot toutes les questions et les réponses. La formulation ne peut être ni résumée, ni transformée. La traduction doit se faire à la première personne pour que les déclarations du requérant d’asile soient restituées de la manière la plus authentique possible. L’interprète doit se comporter de manière neutre et ne saurait en aucun cas émettre des jugements de valeurs ou des opinions personnelles au cours de la traduction. Il est soumis au secret de fonction comme toutes les personnes qui assistent à l’audition.

La collaboration à une audition sur les motifs d’asile ne peut être raisonnablement exigée du requérant d’asile si l’audition est conduite dans une langue qu’il ne comprend pas. Le refus de participer à une telle audition ne constitue pas une violation de l’obligation légale de collaborer.92

L’interprète ne doit ni avoir, ni établir une relation étroite avec le requérant. De part et d’autre, aucune question personnelle ne doit être posée.

[90]Le choix des interprètes doit être prudent et n’intervenir qu’après un examen approfondi. Des connaissances linguistiques marquées sont bien entendu exigées. Il est toutefois également important pour la traduction que l’interprète connaisse le contexte socioculturel pour pouvoir comprendre certaines déclarations du requérant et les expliquer au besoin.93 Il faut aussi être particulièrement attentif à l’origine de l’interprète, afin d’éviter les cas où des éléments de l’audition, par exemple des noms de compagnons de lutte, sont transmis au gouvernement du pays d’origine, ce qui peut avoir des conséquences catastrophiques pour les personnes concernées sur place. Il ne devrait être fait aucune concession quant aux exigences requises, même en période de carence d’interprètes dans une langue déterminée.

L’existence d’une multitude de dialectes parlés dans une région pose souvent des problèmes de traduction. D’une part, il n’est guère possible de recruter des interprètes appropriés pour chaque dialecte et d’autre part, le SEM ne connaît parfois pas (encore) l’origine exacte du requérant.

Pour répondre aux exigences élevées auxquelles ils sont soumis, les interprètes doivent avoir quitté leur pays d’origine depuis un certain temps au moment de leur engagement au SEM et peuvent parfois même avoir grandi en exil. Cette circonstance peut entraîner des difficultés en ce qui concerne la langue et les coutumes. L’exemple du Tibet le montre particulièrement bien : les Tibétains qui vivent en Europe parlent le tibétain d’exil et ne comprennent pas toujours suffisamment les dialectes parlés au Tibet. En outre, la langue parlée au Tibet est en constante évolution de sorte qu’une personne qui vit depuis longtemps dans un autre pays ne connaît pas certaines expressions ou vocables empruntés au chinois.

Les erreurs de traduction ne peuvent guère être constatées, car c’est la même personne qui traduit l’audition et qui retraduit le procès-verbal à la fin, usant des mêmes expressions.94

Une traduction présentant des défauts entraîne une consignation inexacte, ce qui peut affecter la clarification des faits.95 Dans ce cas, on peut reprocher au SEM une violation de son devoir d’instruction et également du droit d’être entendu du requérant d’asile.96

[91]Si, par exemple, le même mot est utilisé dans plusieurs sens ou que des expressions univoques ne sont pas toujours traduites de la même manière, cela peut déboucher sur des traductions variables et d’autres divergences, en particulier si – comme tel est en règle générale le cas – des interprètes différents sont engagés pour l’audition sommaire et l’audition sur les motifs d’asile. De telles divergences sont parfois considérées comme des « contradictions » entre les deux interrogatoires et sont retenues comme telles au détriment du requérant pour mettre en doute la vraisemblance de ses allégations.

7.3 Langue de la procédure

Selon l’art. 16 al. 1 LAsi, les requêtes adressées aux autorités fédérales peuvent être déposées dans n’importe quelle langue officielle. En vertu de la Constitution fédérale, les langues officielles sont l’allemand, le français et l’italien. Les décisions et décisions incidentes du SEM sont en principe rendues dans la langue officielle du lieu de résidence du requérant (art. 16 al. 2 LAsi). A titre exceptionnel, le SEM peut s’écarter de ce principe en présence d’une des situations prévues à l’art. 16 al. 3 LAsi. En plus des motifs d’efficacité de la procédure (al. 3 let. a), il est aussi prévu que le SEM puisse déroger à la règle lorsque le requérant ou son mandataire maîtrise une autre langue officielle. Le droit fondamental à la liberté de la langue (art. 18 Cst.) ne permet pas aux requérants d’asile d’exiger que la procédure se déroule dans la langue officielle de leur choix. En tant que lex specialis, l’art. 16 al. 2 LAsi a la primauté sur la règle générale de l’art. 37 PA.97

Les requêtes écrites adressées au SEM doivent également être rédigées dans l’une des trois langues officielles. Toutefois, il peut être dérogé à cette règle lorsqu’un requérant d’asile n’a pas les moyens financiers de faire traduire sa demande.98 Dans ce cas, le SEM doit traduire la requête à ses frais.99 Lorsqu’une décision est notifiée oralement selon l’art. 13 al. 1 et 2 LAsi, les passages importants de la décision (état de fait, considérants, dispositif et indication des voies de recours) doivent être traduits dans une langue que le requérant d’asile comprend.100

[92]7.4 Obligations à observer dans le cadre des auditions

7.4.1 Obligation de tous les participants de garder le secret

Toutes les personnes présentes à l’audition, à l’exception du requérant d’asile, sont soumises à l’obligation de garder le secret. Les violations du secret de fonction et de l’obligation de garder le secret (pour les ROE en vertu de l’art. 30 al. 4 LAsi), sont punissables pénalement (art. 293 et 320 CP). Le secret de fonction et l’obligation de garder le secret impliquent en particulier l’obligation de ne pas communiquer les données aux autorités du pays d’origine ou de provenance (art. 97 al. 1 LAsi). Cependant, si la qualité de réfugié n’a pas été reconnue en première instance, les données nécessaires aux autorités compétentes pour organiser le départ, énumérées exhaustivement par la loi, peuvent être transmises aux autorités du pays d’origine (art. 97 al. 2 et 3 LAsi).

La possibilité de procéder à un échange de données avec les autorités du pays d’origine à la suite du rejet de la qualité de réfugié en première instance déjà est problématique du fait que ce rejet n’est pas encore définitif. Une procédure de recours pourrait aboutir à son annulation et à la reconnaissance de la qualité de réfugié de l’intéressé.

7.4.2 Obligation de collaborer

Le requérant d’asile est soumis à l’obligation de collaborer (voir art. 8 LAsi). Il doit décliner son identité et remettre à l’autorité ses documents de voyage et pièces d’identité ainsi que les éventuels moyens de preuve en sa possession ou, s’ils sont disponibles et accessibles, s’efforcer de les obtenir afin de les remettre à l’autorité. Il doit, lors de l’audition, exposer de manière détaillée et complète les motifs pour lesquels il demande l’asile en Suisse. L’obligation de collaborer, comme pendant de la maxime inquisitoire, est traitée en détail au chap. XII, pt 3.

7.4.3 Obligation de dire la vérité

Les déclarations du requérant d’asile doivent être conformes à la vérité. L’asile accordé sur la base de fausses indications peut être révoqué (voir art. 63 al. 1 let. a LAsi ; sur la révocation de l’asile, voir chap. IX, pt 4.2).

Les mêmes principes s’appliquent aux documents. S’ils sont faux ou falsifiés ou si la personne les utilise de manière abusive, ils peuvent être confisqués ou remis à l’ayant droit (art. 10 al. 4 LAsi et art. 121 LEtr).

[93]7.5 Motivation des décisions

L’obligation de motiver (art. 35 PA) doit être qualifiée de corollaire du droit d’être entendu. Ce dernier exige entre autre que les arguments du requérant d’asile soient entendus par le SEM, qu’ils soient examinés avec diligence et qu’ils soient pris en considération de manière adéquate dans la décision. La motivation doit en être le reflet et permettre à la personne concernée de comprendre la décision et de l’attaquer objectivement le cas échéant.101 L’étendue de la motivation doit être adaptée à l’objet de la décision, aux circonstances de la procédure et aux intérêts de la personne concernée, les atteintes graves aux intérêts juridiquement protégés devant être motivées de manière plus détaillée que les autres.102 Cependant, la procédure d’asile touche toujours gravement les intérêts d’une personne de sorte que la motivation des décisions doit toujours être détaillée. Une violation de l’obligation de motiver peut entraîner la cassation de la décision.103

Plus le pouvoir d’appréciation des autorités est grand ou plus les notions juridiques à appliquer sont indéterminées, plus les exigences en matière de motivation des décisions sont élevées. Les décisions positives nécessitent certes une motivation moins détaillée que les décisions négatives, mais elles doivent aussi être dûment motivées, car la motivation en cas de révocation de la qualité de réfugié (voir chap. VIII, pt 4) peut jouer un rôle décisif et doit être ainsi compréhensible. Toutefois, en pratique, les décisions positives ne sont pas motivées. Les décisions de non-entrée en matière (voir chap. VII) peuvent n’être que sommairement motivées en vertu de l’art. 37a LAsi.

L’utilisation de considérants prérédigés dans les décisions du SEM est parfois problématique. Ils risquent d’enlever le caractère individuel de la motivation et ne correspondent pas toujours à l’intérêt personnel du requérant. Dans tous les cas, il n’est guère possible de saisir la complexité d’un état de fait dans un puzzle de considérants prérédigés avant de rendre une décision.

7.6 Notification et envoi des décisions

La notification des décisions administratives est réglementée de manière générale aux art. 34 ss PA.

[94]L’envoi de décisions rendues en procédure d’asile et de renvoi fait l’objet de règles spéciales à l’art. 12 LAsi.104 La notification est juridiquement valable si l’autorité envoie la décision à la dernière adresse connue du requérant d’asile ou de son mandataire et que son destinataire en prend possession. Après l’écoulement du délai postal de garde ordinaire de sept jours, la notification prend date valablement au dernier jour de ce délai, même si la décision est réceptionnée plus tard à la poste ou retourne à l’expéditeur comme non délivrée. La preuve de la notification en bonne et due forme incombe en principe à l’autorité. Une notification entachée de vices ne saurait entraîner aucun préjudice pour son destinataire (art. 38 PA). Lorsque la décision n’est pas du tout notifiée, elle ne déploie aucun effet. En cas d’une notification irrégulière, la protection qu’accorde le principe de la bonne foi varie en fonction de la situation. La jurisprudence exige que la personne concernée agisse pour clarifier sa situation juridique. S’il s’agit d’un mandataire, il devra agir avec une diligence toute particulière. Le droit à un recours effectif ne saurait toutefois être limité par une notification irrégulière de la décision, de sorte qu’un recours tardif est en règle générale, dans un tel cas, considéré comme recevable.105

L’art. 13 LAsi contient d’autres règles spéciales pour la procédure d’asile : celles de la notification orale et par télécopie. Normalement, la notification intervient, aussi en procédure d’asile, par écrit et envoi de la décision au requérant d’asile. Une notification orale peut cependant être indiquée lorsque la motivation ne pose pas de problèmes en soi parce que les faits pertinents peuvent être rattachés sans problème aux dispositions légales, par exemple dans les cas où un élément essentiel de la qualité de réfugié au sens de l’art. 3 LAsi n’est manifestement pas réalisé. Dans un tel cas, l’autorité doit remettre au requérant un extrait de procès-verbal qui restranscrit la notification orale et la motivation de la décision. Ce type de notification est utilisé surtout dans les CEP.

La notification peut se faire par télécopie lorsque la demande d’asile a été présentée à la frontière ou à l’aéroport (art. 13 al. 3 LAsi). Ce type de notification est également possible dans d’autres cas urgents (art. 13 al. 4 LAsi). Cependant, pour être juridiquement valable, la notification par télécopie suppose cumulativement que le cas soit urgent, que la télécopie soit signée, qu’une copie ait été remise à son destinataire et que celui-ci en confirme la réception. Si le requérant a un mandataire, il suffit de lui donner connaissance de la notification sans retard ; l’art. 11 al. 3 PA n’est pas applicable dans de tels cas. Il en va de même pour les décisions de [95]non-entrée en matière au sens de l’art. 31a al. 1 let. b LAsi (art. 13 al. 5 LAsi) qui concernent à titre primaire des procédures Dublin.

Ce n’est qu’au moment de la notification que le requérant a la possibilité de prendre connaissance de la décision le concernant. La date à laquelle elle se produit fait partir le délai de recours (sur les délais, voir chap. XIII, pt 3.1). Une notification de la décision par publication dans un journal officiel n’entre pas en ligne de compte dans la procédure d’asile en raison de l’intérêt de la personne concernée au maintien du secret.

7.7 Droit de consulter le dossier

Les personnes concernées ne peuvent s’exprimer efficacement sur leur cause et apporter des preuves appropriées que si elles ont accès au dossier sur lequel se base l’autorité.106 Par conséquent, les requérants d’asile ou, le cas échéant, leur mandataire ont le droit de consulter leur dossier. Lorsque la procédure est pendante, le droit de consulter le dossier est régi par les art. 26 ss PA et, lorsqu’elle est terminée, par les dispositions de la loi sur la protection des données (voir l’art. 2 LPD dont l’al. 2 let. c exclut expressément (et uniquement) les procédures administratives pendantes du champ d’application de la LPD).107

Pendant la procédure d’instruction, une requête visant à la consultation du dossier peut être refusée en application de l’art. 27 al. 1 let. c PA mais, après la clôture de l’instruction, l’autorité a l’obligation d’accorder le droit à la consultation du dossier. En principe, il n’y a pas de violation du droit d’être entendu lorsque le SEM retient un dossier qui lui a été demandé pour consultation longtemps à l’avance, pour ensuite – sans motifs pertinents – en transmettre les pièces juste avant l’expédition de la décision ; en revanche, cette pratique porte atteinte au principe de loyauté en procédure et va à l’encontre de l’économie de procédure.108

Pour que la personne concernée puisse s’exprimer de manière adéquate sur le dossier consulté, les autorités ont le devoir de verbaliser et de verser au dossier tous les actes d’instructions, interrogatoires et expertises ainsi que tout autre élément pouvant avoir une incidence sur la décision.109 Le dossier doit être organisé de manière ordonnée, accessible et complète et l’on doit voir qui l’a constitué et comment.110 Sont des pièces du dossier tous les documents mentionnés à l’art. 26 PA. Les pièces [96]internes à l’administration sont exclues du droit de consulter le dossier. L’étendue de ce droit ne se détermine cependant pas selon que l’autorité classe elle-même un moyen de preuve comme interne ou secret, mais en fonction de la signification objective de la pièce en cause dans le cas concret. Des rapports et expertises établis de manière interne à l’administration sur des questions litigieuses de fait ne sont pas considérés comme des documents internes.111 Selon la jurisprudence difficilement explicable du TAF, la remarque du collaborateur du SEM qui « demande » une décision positive ne fait pas partie de cette catégorie d’exceptions bien qu’elle influence de manière décisive le processus de décision.112

Le contenu essentiel des « expertises Lingua » (voir chap. XII) doit être révélé dans le cadre du droit de consulter le dossier.113 Il faut donner au requérant la possibilité de s’exprimer à ce sujet et de proposer des contre-preuves. Les notes et les notices d’entretien rédigées à l’occasion de « tests sur les pays » ou de l’utilisation des informations sur les pays d’origine sont des moyens de preuve en procédure d’asile.114

Le droit de consulter le dossier peut être limité lorsqu’il existe un intérêt prépondérant au maintien du secret de certains documents. Ce point doit être tranché sur la base d’une pesée concrète, attentive et étendue des intérêts contradictoires en cause dans le respect du principe de la proportionnalité.115 Le refus du droit de consulter le dossier doit être motivé.

[97]8 Aperçu du projet 2

8.1 Centres de la Confédération

Selon le message du Conseil fédéral, la « restructuration du domaine de l’asile »116 nécessiterait environ 3’600 places supplémentaires, du fait que l’ensemble de la procédure accélérée doit en principe se dérouler dans les centres de la Confédération. Pour répondre à ce besoin, il faudrait créer un centre de procédure dans chacune des six régions de la Suisse ainsi que deux centres de préparation au départ. De plus, l’ouverture de deux centres spécifiques est envisagée.

La durée de séjour dans les centres de la Confédération serait de 140 jours et devrait pouvoir être prolongée de manière « appropriée ». Il est dès lors important que les possibilités d’hébergement tiennent compte de la durée de séjour nouvellement prévue et, en particulier, des besoins des personnes vulnérables. Ces centres ne devraient pas être situés à des endroits totalement reculés pour garantir des contacts sociaux aux résidants et ne pas leur compliquer excessivement l’accès à une représentation juridique. Si cette règle n’est pas respectée, le placement des requérants dans les centres reviendrait à une restriction disproportionnée de leur liberté de mouvement, voire à une privation de cette liberté.117

8.2 Procédure accélérée et élargie

Les demandes d’asile ne nécessitant pas d’autres mesures d’instruction seront à l’avenir soumises à la procédure accélérée (art. 26c P-LAsi). Dans ces cas, il ne devrait plus y avoir d’attribution à un canton et les personnes concernées seraient logées dans un centre de la Confédération pendant toute la durée de la procédure d’asile et de l’exécution du renvoi. Les cas Dublin seraient aussi soumis à la procédure accélérée. Selon le message relatif à la modification de la loi sur l’asile, le Conseil fédéral part du principe qu’environ 60 % des demandes pourraient être traitées selon cette procédure.

Pour les autres cas – environ 40 % – qui nécessitent des compléments d’instruction et ne peuvent pas être tranchés immédiatement, il serait fait application de la [98]procédure élargie au sens de l’art. 26d P-LAsi. Les requérants d’asile seraient alors attribués à un canton et la procédure devrait être terminée dans le délai d’une année.

Les expériences faites dans le cadre des phases de test ont révélé les chiffres suivants pour l’année 2014 : 65.7 % des cas (y compris 31.4 % de procédures Dublin) ont pu être réglés en procédure accélérée. 22.2 % des requérants d’asile attribués au centre test ont passé en procédure étendue. 12.2 % des cas ont été classés ou liquidés d’une autre manière.118

8.3 Conseil et représentation juridique

A titre de mesure d’accompagnement de la procédure rapide, il est prévu aux art. 102f ss P-LAsi que les requérants concernés aient droit à un conseil et à une représentation juridiques gratuits. Cela est tout à fait bienvenu, car un soutien et un conseil adéquats peuvent notablement contribuer à la loyauté de la procédure. Selon l’expérience faite en phase de test, cet élément augmente notamment l’acceptation des décisions négatives par les intéressés.

1 TF, 2A 548/2003 du 26 novembre 2003, consid. 2.3.

2 ATF 121 II 59, consid. 3c.

3 RO 2012 5359 (modifications urgentes de la loi sur l’asile du 28 septembre 2012).

4 Abstraction faite de l’asile familial et du regroupement familial.

5 Directive du SEM III.1, ch. 1.1.1.6.

6 Art. 8 al. 1 PA.

7 JICRA 1996/5.

8 ATF 117 II 6, consid. 1b.

9 ATAF 2011/39, consid. 4.3.2, [Trad.].

10 Working Paper 26 du BAMF, Parusel Bernd, Unbegleitete minderjährige Migranten in Deutschland – Aufnahme, Rückkehr und Integration, 2009, p. 29. Voir aussi HCR, Safe and Sound – What States can do to ensure respect for the best interest of unaccompanied and separated children in Europe, octobre 2014.

11 Selon l’art. 1 CDE, toute personne de moins de 18 ans est juridiquement définie comme un enfant.

12 Les demandes multiples devraient être motivées suffisamment pour permettre à l’autorité de pouvoir statuer sans entendre préalablement le requérant (ATAF 2014/39, consid. 5.5).

13 Le canton compétent est celui qui l’était déjà lors de la procédure d’asile précédente.

14 Directive du SEM III.5, ch. 5.1.2.1.

15 ATAF 2014/39, consid. 4.3 s.

16 Système d’information central sur la migration dans les domaines de l’asile et des étrangers (en allemand : ZEMIS).

17 Directive du SEM III.5, ch. 5.1.2.1.

18 Voir message du 26 mai 2010 concernant la modification de la loi sur l’asile, FF 2010 4035, 4049.

19 Voir à ce sujet ATAF 2014/39, consid. 7.

20 P. ex. sur la base des art. 42 à 43 LEtr ou de l’art. 8 CEDH (ATAF 2013/37, consid. 4.4).

21 Il s’agit ainsi d’éviter que les procédures d’asile soient retardées ou que des renvois envisagés soient différés (ATF 128 II 200, consid. 2.1).

22 Caroni Martina et al., Migrationsrecht, 3e éd., Berne 2014, p. 232.

23 Voir www.sem.admin.ch/sem/fr/home/asyl/asylverfahren/asylgesuch/asylgesuch_im_inland.html (consulté le 31 juillet 2015).

24 SEM, Commentaire sur la statistique en matière d’asile 2014, p. 14.

25 ATF 132 IV 29, consid. 3.3, avec renvoi à TF, 6S. 737/1998 du 17 mars 1999, traité dans ASYL 1999/2, p. 22.

26 Bureau du HCR pour la Suisse et le Liechtenstein, Prise de position du HCR sur l’impunité de l’entrée irrégulière de réfugiés, mai 2013 ; voir aussi p. ex. Conclusions du Comité exécutif du HCR nos 44, 46 et 58.

27 Bureau du HCR pour la Suisse et le Liechtenstein, Prise de position du HCR sur l’impunité de l’entrée irrégulière de réfugiés, mai 2013.

28 ATF 132 IV 29, consid. 3 ss.

29 Le TAF (p. ex. dans son arrêt D-6502/2010 du 16 septembre 2010) ne voit aucun problème, à notre avis de manière choquante, à ce que des personnes se trouvant déjà hors de la zone de transit y soient renvoyées pour suivre la procédure à l’aéroport. Le refus (provisoire) d’entrée étant nécessaire dans le cadre de la procédure à l’aéroport (art. 22 al. 2 LAsi), une « annulation » de l’entrée est nécessaire pour pouvoir mener la procédure à bien. Le refus d’entrée au sens de l’art. 13 CFS ne peut être prononcé que préalablement à l’entrée sur le territoire (voir art. 13 par. 4 CFS selon lequel les autorités veillent à ce qu’un ressortissant « ne pénètre pas » sur le territoire). Le CFS ne prévoit pas la possibilité de refuser l’entrée ultérieurement. Le renvoi d’une personne vers la zone de transit après son entrée dans le pays – c’est-à-dire après son passage au poste-frontière – exige une décision de renvoi. La pratique qui consiste à attribuer une personne à un hébergement dans un aéroport sans décision formelle est ainsi contraire au droit Schengen.

30 Cedh, Mubilanzila Mayeka et Kaniki Mitunga c. Belgique du 12 octobre 2006, no 13178/03 et Amuur c. France du 25 juin 1996, no 19776/92 ; voir aussi Trechsel Stefan, Die Unterbringung von Asylsuchenden zwischen Freiheitsbeschränkung und Freiheitsentzug, in : ASYL 2014/3, p. 3 ss.

31 Voir JICRA 1997/19.

32 ATAF 2010/1, consid. 2.2.3.

33 La désignation d’une personne de confiance n’est qu’une mesure de remplacement lorsqu’une tutelle ou une curatelle selon le Code Civil ne peut pas être ordonnée à temps. Pour l’accompagnement et la représentation en droit d’asile, il serait préférable de nommer un représentant légal en raison des connaissances spécialisées d’une telle personne. Voir la prise de position de l’OSAR sur la restructuration du droit d’asile, 20 novembre 2014.

34 Le maintien d’une personne à l’aéroport pour l’examen de sa procédure d’asile doit être juridiquement qualifié de privation de liberté. La décision de refus (provisoire) d’entrée est donc constitutive d’une décision de privation de liberté, voir à ce sujet la jurisprudence du Tribunal fédéral et de la Cedh ; Trechsel Stefan, Die Unterbringung von Asylsuchenden zwischen Freiheitsbeschränkung und Freiheitsentzug, in : ASYL 2014/3, p. 3 ss.

35 RO 2012 5359.

36 Voir à ce sujet aussi la prise de position de l’OSAR sur les modifications des lois sur l’asile et sur les étrangers, 4 mars 2009.

37 Voir le rapport du Projet E.T. – Entering the territory, Exploring avenues for protected entry in Europe, mars 2012.

38 TAF, E-6862/2013 du 31 décembre 2013, consid. 3.4. ; voir aussi ATAF 2015/5.

39 Directive du SEM 322.126 sur les demandes de visa pour des motifs humanitaires, 25 février 2014.

40 Disponible sous : www.sem.admin.ch/sem/fr/home/themen/einreise/visumantragsformular.html (consulté le 31 juillet 2015).

41 Manuel des visas I et Complément SEM, 6e éd., 2 février 2015, p. 155.

42 TAF, E-6862/2013 du 31 décembre 2013, consid. 4.4.

43 Chancellerie fédérale, Explications du Conseil fédéral relatives à la votation populaire du 9 juin 2013, p. 23.

44 FF 2010 4035, 4048. Voir aussi sur ce point Stünzi Robin, Les mesures dissuasives et leurs limites : données empiriques et réflexions au sujet du nouvel art. 3 al. 3 LAsi et de la suppression des demandes d’asile en ambassade, in : ASYL 2014/4, p. 26 ss.

45 Voir TAF, D-5645/2014 du 22 janvier 2015 ; E-6587/2014 du 15 janvier 2015 ; E-5528/2014 du 13 novembre 2014.

46 TAF, E-6056/2014 du 20 février 2014 ; voir aussi Frehner Sarah ; Nufer Seraina, Die Rechtsprechung des Bundesverwaltungsgerichts im Bereich des Asylrechts 2014-2015, in : Achermann Alberto et al. (édit.), Annuaire du droit de la migration 2014/2015, Berne 2015, p. 241 ss.

47 Solidarité sans frontières, Factsheet Demandes d’asile à l’ambassade – Demandes d’autorisation d’entrée depuis l’étranger, octobre 2012.

48 Manuel Asile et retour du SEM, Article C1, Les centres d’enregistrement et de procédure, p. 4.

49 Actuellement, il s’agit notamment d’AOZ et ORS, chargés de l’encadrement des requérants d’asile et du fonctionnement des centres, ainsi que Securitas.

50 Art. 2 de l’ordonnance du DFJP du 24 novembre 2007 relative à l’exploitation des logements de la Confédération dans le domaine de l’asile (RS 142.311.23).

51 Segessenmann Thomas, Rechtsschutz in den Aussenstellen der Empfangs- und Verfahrenszentren des Bundes, in : ASYL 2015/1, p. 14 ss.

52 Voir aussi Trechsel Stefan, Die Unterbringung von Asylsuchenden zwischen Freiheitsbeschränkung und Freiheitsentzug, in : ASYL 2014/3, p. 3 ss.

53 Voir Ordonnance du DFJP relative à l’exploitation des logements de la Confédération dans le domaine de l’asile.

54 Sur la protection juridique dans les CEP, voir TF, 2A.151/2001 du 9 avril 2002, publié en partie dans ASYL 2002/2, p. 21 ss.

55 Voir aussi la prise de position de l’OSAR du 19 mars 2013, p. 15 ss.

56 Communiqué de presse du SEM du 28 mars 2014.

57 En outre, les questions d’une limitation de durée – qui se trouvait à l’al. 5 – et de l’urgence de la mesure ont fait l’objet d’intenses discussions au Conseil des Etats (BO 2012 CE 852 ss) et au Conseil national (BO 2012 CN 1657 ss). Une expertise non officielle de l’OFJ sur le projet d’art. 112b LAsi a finalement convaincu les Chambres d’accepter la disposition (voir l’intervention de la Conseillère aux Etats Egerszegi-Obrist, BO 2012 CE 853).

58 Au moment de la mise sous presse du présent manuel, seul le premier rapport d’évaluation intermédiaire publié en février 2015 était disponible. Il devait servir en particulier à informer les Chambres fédérales dans le cadre du processus parlementaire (voir le communiqué du SEM du 16 février 2015 auquel a été joint un résumé des résultats intermédiaires avec les rapports intermédiaires rendus dans le cadre des quatre mandats).

59 Voir message du 3 septembre 2014 concernant la modification de la loi sur l’asile (Restructuration du domaine de l’asile), FF 2014 7771, ainsi que les délibérations parlementaires relatives à la restructuration du domaine de l’asile (objet parlementaire 14.063).

60 FF 2014 7049, RO 2015 2047.

61 La prorogation a été décidée sous réserve d’une modification législative entrant en vigueur plus tôt, car, dans cette hypothèse, les mesures d’urgence perdraient leur validité au profit des nouvelles dispositions, voir al. 3 de la disposition transitoire relative à la modification du 26 septembre 2014, FF 2014 7049, RO 2015 1849.

62 Voir message du 3 septembre 2014 concernant la modification de la loi sur l’asile (Restructuration du domaine de l’asile), FF 2014 7771. Voir aussi les débats parlementaires concernant la prolongation de la phase de test dans BO 2014 CN 1039 ss et BO 2014 CE 758 ss.

63 A ce sujet, voir aussi SEM, Evaluation de la phase de test. Résumé des résultats intermédiaires, février 2015, p. 3.

64 Voir ce qualificatif de « point clé » dans le communiqué du 30 avril 2015 de la Commission des institutions politiques du Conseil des Etats dans la perspective d’une entrée en matière du parlement sur la modification proposée.

65 Concernant cette disposition combinée avec le bref délai de recours dans la procédure testée, la question s’est posée de savoir comment le droit à un recours effectif peut être réellement garanti si le représentant légal révoque son mandat pendant ce délai. Voir p. ex. la prise de position de l’OSAR de novembre 2014 sur la restructuration (commentaire de l’art. 102h P-LAsi) et Frei Nula ; Gordzielik Teresia, Schnell, aber fair ? – Kritischer Kommentar zum Entwurf einer « Testphasenverordnung », in : ASYL 2013/2, p. 21.

66 Voir TAF, E-1917/2014 du 20 mai 2014.

67 La « notification » que l’art. 13 OTest prévoit d’adresser « au prestataire chargé de fournir la représentation juridique » lorsqu’un représentant légal a été désigné au requérant d’asile n’a pas d’effets juridiques pour ce dernier, car la décision ne passe dans son domaine de responsabilité qu’au moment de la notification au représentant légal (ou au requérant lui-même).

68 A ce sujet, voir aussi TAF, D-2172/2014 du 1er mai 2014.

69 A ce sujet, voir le rapport intermédiaire du 1er décembre 2014 rendu dans le cadre du mandat no 4, p. 14, disponible sous : www.sem.admin.ch/dam/data/bfm/aktuell/news/2015/2015-02-16/eval-zwber4-f.pdf (consulté le 31 juillet 2015). Sur la pratique, voir aussi Frehner/ Nufer, in : Achermann et al. (édit.), op. cit., note 46, p. 241 ss.

70 Pour des questions pratiques, nous ne parlons ici que des CEP ; la même règle s’applique cependant par analogie après 140 jours dans un centre spécifique et après 60 jours dans un logement à l’aéroport.

71 Cedh, Agraw et Mengesha Kimfe c. Suisse du 29 juillet 2010, nos 24404/05 et 3295/06 : violation de l’art. 8 CEDH.

72 ATAF 2008/47, consid. 4.1.

73 Depuis le 1er juillet 2015, une personne de confiance doit dans tous les cas être désignée au moment déjà de l’audition sommaire et ce pas uniquement dans les cas Dublin (voir ATAF 2011/23, consid. 5.4). L’audition sommaire se déroulant généralement dans un CEP, la personne de confiance change après l’attribution à un canton. La question se pose de savoir si un tel changement est toujours compatible avec l’intérêt supérieur de l’enfant eu égard au rôle important tenu par la personne de confiance dans la procédure. En principe, il y a toujours lieu de désigner immédiatement un curateur ou un tuteur conformément aux dispositions du CC.

74 Diverses dénominations coexistent dans la loi (p. ex. audition sur les données personnelles). Nous utilisons dans le présent manuel celle d’audition sommaire, la plus courante dans la pratique (en allemand : Befragung zur Person – BzP). Dans l’OTest, la notion de « premier entretien » est employée.

75 TAF, E-4172/2014 du 18 août 2014.

76 Cette différence est faite parce que les auteurs de persécution liée au genre sont pour la plupart de sexe masculin, raison pour laquelle une équipe de même sexe telle que prévue par la loi n’est pas toujours opportune.

77 Manuel Asile et retour du SEM, Article C6, Audition sur les données personnelles, ch. 2.1, p. 5 s.

78 Le TAF (ATAF 2009/51) a confirmé la jurisprudence de la CRA (JICRA 2003/17) selon laquelle l’allégation d’un viol seulement au stade du recours ne plaide pas pour sa non vraisemblance.

79 Voir les expériences au Service ambulatoire de la CRS pour victimes de la torture et de la guerre de même que la jurisprudence du TAF (ATAF 2009/51). Voir aussi le Comité de l’ONU contre la torture qui se montre plus large en cas d’inepties ou d’allégations tardives si le recourant a manifestement été victime de torture (De Weck Fanny, Die Praxis des Ausschusses der Vereinten Nationen gegen die Folter, in : ASYL 2011/2, p. 9, avec renvoi à CAT, C.T. et K.M. c. Suède du 22 novembre 2007, no 279/2005, par. 7.6). Voir encore le protocole d’Istanbul et ses lignes directrices sur l’approche des victimes de la torture (UNHCHR, Manual on Effective Investigation and Documentation of Torture and Other Cruel, Inhuman, or Degrading Treatment or Punishment, Professional Training Series No.8/ Rev.1, New York/Genève 2004).

80 Manuel Asile et retour du SEM, Article H2, Voies de droit extraordinaires (y.c. frais de procédure), ch. 2.4.

81 L’absence d’i nvocation de tels faits ne peut pas être reproché à l’i ntéressé, voir p. ex. ATAF 2007/31, consid. 5.1.

82 Voir à ce sujet l’édition précédente du présent manuel, p. 121 ss.

83 Voir la définition correspondante de l’« identité » à l’art. 1a let. a OA 1.

84 Voir ATAF 2011/27, consid. 4 (empreintes digitales), JICRA 2000/8, consid. 5 ss (absence injustifiée à l’audition) et JICRA 2003/22, consid. 4 (non-respect d’une convocation) ; voir aussi les exemples dans l’édition précédente du présent manuel, p. 125 s. Parmi les exemples donnés, certains sont sans violation grave et coupable de l’obligation de collaborer. Aucune violation n’est constatée si le requérant d’asile ne participe pas à l’audition menée dans une langue qu’il ne comprend pas suffisamment bien (voir déjà JICRA 1993/36, consid. 3 s).

85 Au sujet de la tromperie sur l’identité, voir ATAF 2013/10, consid. 9.1. Le Tribunal précise que l’autorité doit être convaincue du fait et qu’il ne suffit pas qu’il soit hautement probable. Concernant l’obligation de preuve de manière générale dans ces cas, voir déjà JICRA 2005/16, consid. 2.3.

86 Voir sur le rôle de la ROE et sur la signification de ses objections : TAF, E-3637/2006 du juin 2008, consid. 4.

87 Gattiker Mario, La procédure d’asile et de renvoi, Berne 1999, p. 26.

88 Voir Cedh, M.A. c. Suisse du 18 novembre 2014, no 52589/13, par. 59 ; voir aussi le commentaire de Romer Adriana sur ce sujet, in : ASYL 2015/1, p. 28 s.

89 JICRA 1996/13.

90 Concernant l’audition sommaire : art. 19 al. 2 OA 1 ; concernant l’audition sur les motifs d’asile : art. 29 al. 1bis LAsi.

91 Manuel Asile et retour du SEM, Article B2, Langues officielles, p. 4.

92 JICRA 1993/36, consid. 3 et 4.

93 Les observations faites pas les ROE ne sont prises en considération que de manière limitée. Le TAF a p. ex. estimé dans un arrêt D-3753/2014 du 18 mai 2015 (consid. 4.2.1), que les critiques formulées par un ROE ne pouvaient pas être entièrement convaincantes, du fait que ce dernier ne maîtrisait pas la langue du requérant.

94 P. ex. un proverbe ou une expression toute faite peut perdre de son sens par sa traduction littérale, voire ne pas être compris correctement. De même, des gestes peuvent avoir divers sens. Si l’auditeur ne les comprend pas, il peut se les faire expliquer par l’interprète.

95 TAF, E-953/2014 du 6 mars 2014, consid. 5.1 ss.

96 TAF, D-6232/2009 du 11 mars 2010, consid. 5.

97 JICRA 2001/7.

98 Principe de l’égalité devant la loi, art. 8 al. 2 Cst.

99 Manuel Asile et retour du SEM, Article B2, Langues officielles, p. 4 s.

100 Manuel Asile et retour du SEM, Article B2, Langues officielles, p. 5.

101 ATAF 2008/47, consid. 3.2.

102 TAF, E-373/2012 du 10 novembre 2014, avec références citées.

103 JICRA 2004/38, consid. 7 ainsi que Kölz Alfred, Häner Isabelle, Bertschi Martin, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, Zurich 2013, ch. 1043 ss avec références citées ; ATAF 2015/9, consid. 9 sur le retour d’une famille kosovare en Hongrie (obligation de motiver les décisions relevant du pouvoir d’appréciation).

104 Concernant la notification des décisions de première instance aux mineurs, voir aussi chap. XVIIII, pt 3.2.4.

105 Voir Kneubühler Lorenz, ad art. 38, in : Auer Christoph et al. (édit.), Kommentar zum Bundesgesetz über das verwaltungsverfahren (VwVG), Zurich/Saint-Gall 2008, en particulier ch. 2 et 13 ss.

106 ATAF 2011/37.

107 TAF, D-2831/2008 du 30 mai 2008, consid. 4.5.2.

108 JICRA 2001/8, consid. 3.

109 ATF 130 II 473, consid. 4.2.

110 Rhinow René et al., Öffentliches Prozessrecht – Grundlagen und Bundesrechtspflege, 3e éd., Bâle 2014, no 341.

111 ATAF 2011/37, consid. 5.4.1.

112 Voir TAF, D-5779/2013 du 25 février 2015, consid. 4.1.

113 Pour protéger l’expert, il peut être opportun que ses données personnelles de référence, qui permettraient facilement de l’identifier, restent secrètes (JICRA 1998/34, consid. 9b). Toutefois, son curriculum vitae ainsi que ses qualifications doivent être communiqués, car selon la jurisprudence du TAF l’ « expertise lingua », qui constitue un renseignement de tiers au sens de l’art. 12 let. c PA, bénéficie d’une force probante accrue lorsque les exigences de qualifications, d’objectivité et de neutralité de l’expert sont remplies (TAF, E-4161/2014 du 10 avril 2015), voir chap. XII pour plus de références.

114 Le TAF a p. ex. admis que le SEM, en refusant l’accès aux investigations internes concernant la situation sécuritaire dans la province de Suleymaniya, bien que la décision de refus de l’asile et de renvoi s’appuyât essentiellement sur celles-ci, a violé le droit d’être entendu (TAF, D-5878/2014 du 7 janvier 2015, consid. 5).

115 Plus l’issue de la procédure dépend de la prise de position de la personne concernée au sujet du document concret et plus l’autorité se base sur un document en formant sa décision (au détriment de la personne concernée), plus il faut fortement tenir compte du droit de consulter le dossier (ATAF 2011/37, consid. 5.4.1).

116 Les considérations faites ici se bornent à un bref aperçu de la révision de la loi sur l’asile adoptée le 25 septembre 2015 concernant les domaines traités dans le présent chapitre. Pour plus de détails sur le projet 2, il faut se référer au message du 3 septembre 2014 concernant la modification de la loi sur l’asile (Restructuration du domaine de l’asile), FF 2014 7771, ainsi qu’à la prise de position de l’OSAR du 20 novembre 2014, disponible (en allemand) sous : www.osar.ch.

117 Voir pt 4.1, ainsi que Trechsel Stefan, Die Unterbringung von Asylsuchenden zwischen Freiheitsbeschränkung und Freiheitsentzug, in : ASYL 2014/3, p. 3 ss.

118 SEM, Evaluation de la phase de test – Résumé des résultats intermédiaires, février 2015, p. 10.

Manuel de la procédure d'asile et de renvoi

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