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[99]VI Examen de la demande d’asile : déroulement et issues procédurales

Marie Khammas

1 Généralités

Chaque demande d’asile déposée en Suisse est examinée en première instance par le SEM selon un schéma d’examen qui répond aux exigences légales de la LAsi, de la LEtr et de leurs ordonnances. L’examen de la demande se conclut par une décision d’asile qui détermine la situation juridique du requérant en fonction de l’ensemble des aspects procéduraux et matériels du cas. Une fois entrée en force, la décision d’asile aura une influence déterminante quant au droit de la personne à rester ou non en Suisse, à son statut juridique, à ses droits et obligations ou encore aux modalités de recours contre cette décision.

Au terme de la procédure, un requérant d’asile peut se voir notifier les décisions suivantes selon les conclusions de l’autorité :

 une décision de reconnaissance de la qualité de réfugié avec octroi de l’asile (pt 3.1),

 une décision de reconnaissance de la qualité de réfugié, de refus de l’asile avec admission provisoire en tant que réfugié (pt 3.3.2),

 une décision de rejet de la qualité de réfugié avec admission provisoire en tant qu’étranger (pt 3.3.3),

 une décision de non-entrée en matière avec ou sans admission provisoire (pt 3.2.1),

 une décision de rejet de la qualité de réfugié avec décision de renvoi exécutoire (pt 3.2.3).

La première partie du chapitre expose le raisonnement juridique mené par les autorités lors de l’examen d’une demande d’asile. Les questions abordées de manière systématique lors de chaque étape de l’examen feront l’objet d’un examen plus approfondi dans les chapitres suivants. L’articulation entre les questions de forme et de fond, d’asile et de renvoi est exposée ici dans les grandes lignes. La deuxième partie du chapitre donne un aperçu des décisions d’asile et des issues procédurales auxquelles l’autorité peut conclure, selon qu’elle entre en matière sur la demande,[100] constate la qualité de réfugié, octroie l’asile, prononce l’admission provisoire ou l’exécution du renvoi.

2 Examen d’une demande d’asile

L’examen d’une demande d’asile se déroule en trois temps. La première étape consiste à déterminer si l’autorité entre en matière sur la demande (pt 2.1). La seconde étape comprend l’examen matériel de la demande permettant de déterminer si le requérant est un réfugié et si l’asile doit lui être octroyé (pt 2.2). Alors que la procédure d’asile au sens strict du terme se conclut soit par une décision d’octroi de l’asile, soit par une décision de renvoi, la troisième étape consiste à examiner si l’exécution du renvoi est possible, licite et raisonnablement exigible en vertu de l’art. 83 LEtr (pt 2.4). L’articulation entre les trois étapes de la procédure est déterminante pour comprendre le statut juridique auquel sera soumis le requérant d’asile au terme de la procédure. Pour un aperçu général de la procédure d’examen, voir le schéma d’examen de la demande d’asile.


Illustration 1 : Schéma d’examen de la demande d’asile

[101]Processus d’examen d’une demande d’asile

I. L’autorité entre-t-elle en matière sur la demande d’asile ?

 Si non, l’autorité rend une décision de non-entrée en matière, prononce le renvoi et poursuit par l’examen des obstacles à l’exécution du renvoi (→ étape III)1

 Si oui, l’autorité procède à l’examen des motifs d’asile (dit examen sur le fond) (→ étape II)

II. Le requérant a-t-il la qualité de réfugié ? Faut-il lui accorder l’asile ?

a. Le requérant remplit-il les conditions de reconnaissance de la qualité de réfugié selon ses déclarations (motifs d’inclusion et d’exclusion) ?

 Si non, l’autorité rejette la demande d’asile sans reconnaissance de la qualité de réfugié, prononce le renvoi et poursuit par l’examen des obstacles à l’exécution du renvoi (→ étape III)

 Si oui, l’autorité examine si les déclarations sont vraisemblables (→ II-b)

b. Les déclarations du requérant d’asile sont-elles vraisemblables ?

 Lorsque les motifs sur lesquels se fondent la qualité de réfugié ne sont pas vraisemblables, l’autorité rejette la demande d’asile, prononce le renvoi et poursuit par l’examen des obstacles à l’exécution du renvoi (→ étape III)

 Lorsque la qualité de réfugié est rendue vraisemblable, l’autorité examine s’il existe un motif d’exclusion de l’asile (→ II-c)

c. Existe-t-il un motif d’exclusion de l’asile ?

 Si oui, l’autorité reconnaît la qualité de réfugié sans octroyer l’asile, prononce le renvoi et poursuit par l’examen des obstacles à l’exécution du renvoi (→ étape III)

 Si non, le réfugié obtient l’asile

III. L’exécution du renvoi est-elle possible, licite et raisonnablement exigible ?

 Si oui, le renvoi doit être exécuté.

 Si non, la personne est admise à titre provisoire en tant que réfugié ou étranger (selon examen étape II-a/b), en l’absence de motif d’exclusion au sens de l’art. 83 al. 7 LEtr.

[102]2.1 L’entrée en matière

L’autorité saisie d’une demande d’asile doit en premier lieu déterminer si elle est tenue d’examiner le contenu matériel de la demande. Comme toute requête de droit administratif, les demandes d’asile doivent remplir certaines conditions formelles comme préalable à leur recevabilité. Ainsi, lorsqu’une demande ne remplit pas les conditions générales de recevabilité du droit administratif, ou se heurte à un motif de non-entrée en matière prévu par la loi sur l’asile, l’autorité ne peut pas examiner les conclusions matérielles qui lui sont soumises, ni donc se prononcer sur leur bien-fondé. Elle ne rend pas une décision sur le fond et ne s’exprime pas sur les motifs invoqués, mais n’entre tout simplement pas en matière.

Les conditions générales de recevabilité du droit administratif exigent que (a) le requérant ait la capacité d’être partie et d’ester en justice, (b) ait un intérêt juridiquement protégé, (c) que l’autorité saisie soit compétente, (d) que le mandataire soit en possession d’une procuration, (e) qu’il n’y ait pas de décision entrée en force dans la même cause et (f) que les délais et la forme du recours soient respectés.2 Outre ces aspects généraux du droit administratif, la loi sur l’asile connaît des motifs propres de non-entrée en matière énoncés à l’art. 31a LAsi. En règle générale, et sous réserve explicite de l’interdiction de refoulement (al. 2), le SEM n’entre pas en matière dans les cas suivants :

 la personne peut se rendre dans un Etat tiers en application de la réglementation sur les Etats tiers (art. 31a al. 1 let. a et c à e, voir chap. VII, pt 2.1) ;

 un Etat tiers est compétent pour l’examen de la demande en vertu des accords de Dublin (art. 31a al. 1 let. b, voir chap. VII, pt 2.2) ;

 la demande ne peut être considérée comme une demande d’asile au sens de la loi sur l’asile,3 notamment lorsqu’elle est déposée exclusivement pour des raisons économiques ou médicales (art. 31a al. 3 LAsi, voir chap. VII, pt 3.2) ;

 le requérant a été frappé d’une décision d’asile négative et de renvoi entrée en force dans un Etat membre Dublin et peut être renvoyé directement dans son pays d’origine ou de provenance (art. 31a al. 1 let. f en lien avec art. 31b LAsi4, voir chap. VII, pt 3.1).

[103]En présence d’un motif de NEM, le renvoi d’une personne peut en principe être exécuté sans que l’autorité ne procède à un examen matériel des motifs d’asile invoqués. La décision de non-entrée en matière ne présume ainsi en rien du besoin de protection d’un requérant d’asile, ni de sa qualité de réfugié. Elle constate simplement que la personne peut se rendre dans un Etat tiers et qu’un tel examen peut ou doit être mené par cet Etat. A titre exceptionnel, l’autorité peut refuser d’entrer en matière sur la demande et renvoyer la personne directement vers son Etat d’origine, lorsque la demande est dépourvue de tout motif relevant de l’asile (art. 31a al. 3 LAsi).5

La décision de non-entrée en matière s’accompagne systématiquement d’une décision de renvoi (art. 44 LAsi) qui clôt formellement la procédure d’asile au sens strict du terme. A l’exception des cas Dublin, l’examen de la demande se poursuit toutefois dans le cadre de la procédure de renvoi afin de déterminer si le renvoi peut être exécuté conformément aux dispositions du droit des étrangers, ou s’il convient d’octroyer une admission provisoire (pt 2.3, voir aussi chap. VII, pt 2.1.3).

2.2 La procédure d’asile proprement dite

Lorsque l’autorité entre en matière, elle accède à la demande du requérant d’asile et procède à un examen dit matériel des motifs d’asile. L’autorité doit alors se prononcer sur la qualité de réfugié et sur l’octroi de l’asile comme mesure de protection du réfugié. Pour ce faire, elle procède en trois étapes et répond successivement aux questions suivantes6 :

a. Les critères de reconnaissance de la qualité de réfugié sont-ils remplis (art. 3 LAsi, art. 1A CR) ?

b. Les déclarations du requérant sont-elles vraisemblables (art. 7 LAsi) ?

c. Y a-t-il un motif d’exclusion de l’asile (art. 53 et 54 LAsi) ?

La qualité de réfugié – La procédure d’asile doit permettre de déterminer si une personne est un réfugié au sens de la Convention relative au statut des réfugiés (art. 1A CR repris à l’art. 3 LAsi). La reconnaissance formelle de la qualité de réfugié exige l’examen de plusieurs critères qui doivent être cumulativement remplis. Est ainsi reconnue comme réfugié la personne qui, dans son Etat d’origine ou dans le pays de sa dernière résidence, est exposée à de sérieux préjudices ou [104]craint à juste titre de l’être en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social déterminé ou de ses opinions politiques. La jurisprudence suisse exige que les critères suivants soient cumulativement remplis :

1) Le requérant doit se trouver en dehors de l’Etat d’origine et avoir rompu toute relation avec les autorités.

2) Absence de volonté ou incapacité de protection de l’Etat d’origine.

3) Présence d’une crainte fondée de persécution.

4) Intensité et caractère ciblé de la persécution (« sérieux préjudices »).

5) Persécution fondée sur l’un des cinq motifs conventionnels.

6) Pas d’alternative interne de protection.

Dans de rares cas, la Convention de Genève permet d’exclure une personne de la qualité de réfugié, lorsque celle-ci a notamment commis un crime grave avant d’être admise comme réfugié (art. 1F CR). Sur l’exclusion de la qualité de réfugié (art. 1D-F CR et art. 3 al. 3 et 4 LAsi), il est renvoyé au chap. VIII, pt 3.

Vraisemblance – Les déclarations de l’intéressé doivent être substantielles, ses allégations plausibles, son récit ne doit pas présenter de contradictions majeures et la crédibilité personnelle du requérant ne doit pas être entachée par un comportement contraire à l’obligation de collaborer du requérant. Un doute sur la vraisemblance du récit ne devrait pas permettre à l’autorité d’éluder entièrement l’examen sur la qualité de réfugié (voir chap. XII, pt 5).

Octroi de l’asile – La reconnaissance de la qualité de réfugié est une étape déterminante de la procédure et fait systématiquement l’objet d’un point distinct du dispositif. L’autorité reconnaît alors formellement le besoin de protection du requérant. En réponse à ce besoin, la Suisse octroie généralement l’asile qui comprend la protection et le statut accordés en raison de la qualité de réfugié (art. 49 LAsi en lien avec art. 2 al. 2 LAsi). Le réfugié au bénéfice de l’asile reçoit alors une autorisation de séjour (permis B) qui lui confère des droits et obligations propres à son statut (voir chap. XV, pt 2).

Motifs d’exclusion de l’asile – Les Etats gardent une certaine marge d’appréciation quant à la forme et à l’étendue de la protection qu’ils entendent offrir aux réfugiés. En Suisse, l’asile est généralement octroyé au réfugié, à moins que celui-ci en soit indigne en raison d’actes répréhensibles, d’une atteinte ou d’une compromission de la sûreté de la Suisse (art. 53 LAsi – motif d’indignité), ou qu’il ne soit devenu réfugié qu’en raison d’un comportement ultérieur à sa fuite (art. 54 LAsi – motifs subjectifs postérieurs à la fuite). Un réfugié peut donc être exclu de l’asile malgré un besoin avéré de protection. Dans ce cas, l’autorité reconnaît la qualité de réfugié, mais rejette la demande d’asile et prononce le renvoi. L’exécution du renvoi d’un réfugié étant illicite (car contraire au principe de non-refoulement), ce dernier sera,[105] en principe, admis en Suisse à titre provisoire (pt 3.3.2). Il ne bénéficiera pas de l’ensemble des droits conférés par l’asile en droit suisse, mais pourra se prévaloir de ceux reconnus par la Convention de Genève (voir chap. X, pt 3 et chap. XV, pt 3).7

Rejet de l’asile et décision de renvoi – La demande d’asile est rejetée lorsque le réfugié est exclu de l’asile ou que le requérant n’a pas la qualité de réfugié. Ce rejet s’accompagne systématiquement d’une décision de renvoi dont l’exécution devra être examinée sous l’angle du droit des étrangers, dans le cadre de la procédure de renvoi.

2.3 La procédure Dublin

Les décisions de transfert Dublin font figure d’exception quant au cheminement procédural. Le TAF estime en effet qu’il n’y a pas lieu de procéder à un examen distinct des obstacles à l’exécution du renvoi lorsque celui-ci est prononcé en vertu des accords de Dublin. L’examen des motifs pouvant amener l’autorité à renoncer au transfert (en application de la clause de souveraineté de l’art. 17 RD III en lien avec l’art. 29a al. 3 OA 1) inclut d’emblée l’ensemble des éléments qui doivent être pris en considération dans le cadre de l’examen relatif à l’exécution du renvoi.8 Sur les procédures Dublin, voir chap. VII, pt 2.2.

2.4 La procédure de renvoi

La décision de renvoi prononcée suite à la non-entrée en matière ou au rejet de l’asile met fin à la procédure d’asile au sens strict, mais pas à l’ensemble de la procédure. L’examen se poursuit afin de déterminer si d’éventuels obstacles s’opposent à l’exécution du renvoi (à l’exception des cas Dublin). Celle-ci doit être possible, licite et raisonnablement exigible conformément aux dispositions de la LEtr (art. 83 et 84 LEtr). Tout étranger engagé dans une procédure de renvoi, qu’il ait déposé ou non une demande l’asile, est ainsi soumis aux mêmes dispositions concernant l’exécution du renvoi.

[106]Obstacles à l’exécution du renvoi – Conformément à l’art. 83 LEtr, le SEM admet provisoirement l’étranger dont l’exécution du renvoi est impossible, illicite ou inexigible. On parle d’impossibilité du renvoi lorsqu’un obstacle technique empêche son exécution, indépendamment de la volonté de la personne de se soumettre à la mesure.9 L’exécution du renvoi est illicite lorsqu’elle contrevient aux engagements internationaux de la Suisse, notamment en raison d’une atteinte au principe de non-refoulement ou aux dispositions de la CEDH. L’inexigibilité de l’exécution du renvoi est prononcée, quant à elle, pour des motifs d’ordre humanitaire, lorsqu’un renvoi exposerait l’étranger à une situation de danger concret, en raison notamment d’une situation de violence généralisée ou de problèmes de santé (voir chap. X).

Exécution du renvoi vs admission provisoire – Lorsqu’un obstacle s’oppose à l’exécution du renvoi, la personne est mise au bénéfice d’une admission provisoire (livret F avec ou sans statut de réfugié), s’il n’existe aucun motif d’exclusion de l’admission provisoire au sens de l’art. 83 al. 7 LEtr. Cette admission provisoire n’est pas une autorisation de droit des étrangers au même titre que le sont les autorisations de séjour (permis B) ou d’établissement (permis C). La mesure se substitue simplement à la décision de renvoi et autorise son titulaire à rester en Suisse tant que le renvoi ne peut être exécuté. Lorsque l’exécution du renvoi est possible, licite et raisonnablement exigible, le requérant d’asile débouté est invité à quitter la Suisse et informé des mesures de contrainte auxquelles il s’expose en cas de non respect de l’injonction (voir chap. XVI).

3 Décisions d’asile et conséquences juridiques

3.1 La décision d’octroi de l’asile

Lorsque l’autorité entre en matière, que les conditions de la qualité de réfugié sont remplies et qu’il n’y a pas de motif d’exclusion de l’asile, la personne obtient l’asile. La décision n’est généralement pas motivée et ne fait que constater la qualité de réfugié et octroyer l’asile. Le réfugié reconnu est alors autorisé à s’installer durablement en Suisse et reçoit une autorisation de séjour délivrée par son canton d’attribution (permis B ; art. 34 LEtr en lien avec l’art. 60 LAsi). Le réfugié bénéficie de mesures d’intégration dans son canton et peut déposer une demande de permis d’établissement au plus tôt cinq ans après l’octroi de l’autorisation de séjour, en cas de bonne intégration (permis C, art. 34 al. 4 LEtr). Le statut de réfugié est régi par la législation [107]applicable aux étrangers, à moins que ne priment des dispositions particulières de la LAsi ou de la Convention de Genève (art. 58 LAsi). Pour plus d’informations sur le statut juridique des réfugiés au bénéfice de l’asile, il est renvoyé au chap. XV, pt 2.

Sur l’ensemble des demandes d’asile qui ont fait l’objet d’un examen sur le fond au cours des dernières années, plus de 20 % des requérants ont été reconnus comme réfugiés et ont obtenu l’asile.10 Les principaux pays de provenance des réfugiés résidant en Suisse en 2014 étaient l’Erythrée, la Turquie, le Sri Lanka, l’Irak, la Bosnie-Herzégovine et la Syrie.11

L’asile n’est en principe pas limité dans le temps et dure tant que la personne reste en Suisse. Le réfugié ne doit pas chercher à entrer en contact avec les autorités de son pays, sans quoi il s’expose au retrait de l’asile. Les autorités suisses se substituent à l’Etat d’origine du réfugié et deviennent responsables de sa protection. Pour les questions liées à la révocation ou à l’extinction de l’asile, il est renvoyé au chap. IX, pt 4.

3.2 La décision de renvoi

L’autorité prononce systématiquement le renvoi lorsqu’elle constate l’existence d’un motif de non-entrée en matière ou qu’elle refuse l’asile, soit à un réfugié, soit à une personne dont la qualité de réfugié n’est pas avérée. Ce point figure de manière distincte dans le dispositif de la décision du SEM : « Vous êtes renvoyé de Suisse ». Cette injonction ne signifie pas encore que la personne doive véritablement quitter la Suisse, mais uniquement qu’elle ne peut rester sous la protection de l’asile.

Le renvoi est prononcé dans trois cas de figure : suite à une décision de NEM (pt 3.2.1), en absence de la qualité de réfugié (pt 3.2.3), ou en présence d’un motif d’exclusion de l’asile (pt 3.2.2). Sur l’exécution du renvoi, il est renvoyé au chap. XVI, pt 1.

3.2.1 Non-entrée en matière

Depuis l’entrée en vigueur du Règlement Dublin en décembre 2008, près de 50 % des demandes d’asile déposées en Suisse se sont soldées par une décision de NEM, [108]dispensant le autorités d’examiner le bien-fondé des motifs d’asile invoqués. Environ deux tiers de ces décisions NEM se fondent sur la désignation d’un Etat tiers compétent en application du Règlement Dublin, proportion qui s’est encore renforcée depuis l’abrogation au 1er février 2014 de plusieurs motifs de NEM.

Les décisions de NEM s’accompagnent toujours d’une décision de renvoi (art. 44 LAsi), généralement exécutoire, indépendamment de savoir si la personne a la qualité de réfugié. La décision de renvoi fixe un délai de départ de 24 heures, prolongeable si la situation le requiert.12 Dans l’ensemble, la procédure de non-entrée en matière se distingue par la rapidité des délais de traitement (cinq jours ouvrables, art. 37 al. 1 LAsi) et de recours (cinq jours ouvrables, art. 108 al. 2 LAsi) qui rend théoriquement possible l’exécution du renvoi depuis un centre de la Confédération, sans attribution cantonale.

La décision de NEM

 Rendue dans les cinq jours ouvrables qui suivent le dépôt de la demande ou l’approbation de l’Etat Dublin responsable (art. 37 al. 1 LAsi). En pratique, ce délai d’ordre est rarement tenu.

 Droit d’être entendu, mais pas d’audition sur les motifs d’asile au sens de l’art. 29 LAsi, à l’exception des cas exigeant d’examiner la présence ou non d’une demande d’asile (art. 36 LAsi), voir chap. V, pt 7.2.

 Sommairement motivée (art. 37a LAsi), voir chap. V, pt 7.5.

 Assortie d’une décision de renvoi (art. 44 LAsi).

 Exige en règle générale un examen séparé des obstacles à l’exécution du renvoi, voir chap. X ; pour les cas Dublin, voir chap. VII, pt 2.2.

 Délai de recours de cinq jours ouvrables (art. 108 al. 2 LAsi), voir chap. XIII.

 Des mesures de contrainte peuvent être prononcées à certaines conditions, voir chap. XVI, pt 3.1.

3.2.2 Réfugiés exclus de l’asile

Lorsque l’autorité relève un motif d’exclusion de l’asile (motif d’indignité ou motifs subjectifs postérieurs à la fuite), le réfugié n’obtient pas l’asile et se voit notifier une décision de renvoi. L’exécution du renvoi d’un réfugié étant illicite, ce dernier sera mis au bénéfice d’une admission provisoire (voir pt 3.3.2).

[109]3.2.3 Absence de qualité de réfugié

Lorsque le requérant n’a pas la qualité de réfugié, l’autorité prononce le renvoi, voire son exécution. Les règles procédurales applicables à une décision de renvoi exécutoire varient selon que la personne est originaire ou non d’un Etat présumé sûr (au sens de l’art. 6a al. 2 let. a LAsi). Pour les requérants qui proviennent des autres Etats, la décision de rejet de l’asile est soumise aux règles procédurales ordinaires. Elle doit être motivée de manière à ce que la personne concernée puisse la contester utilement (chap. V, pt 7.5). Le délai de recours est de 30 jours. Un recours sur la qualité de réfugié ou sur l’octroi de l’asile peut être déposé même lorsque la personne a été admise à titre provisoire. Le délai de départ fixé dans la décision de première instance est, en principe, de huit semaines.13

Les décisions de renvoi vers un Etat présumé sûr (« safe country ») font l’objet d’une procédure matérielle accélérée (« procédure en 48 heures ») depuis le 1er février 2014.14 La présomption de sécurité n’exempte pas les autorités d’examiner les éventuels indices de persécution invoqués par le requérant d’asile. La motivation de la décision matérielle peut par contre être sommaire. Les délais de traitement et de recours sont similaires à ceux prévus pour les décisions de non-entrée en matière : le délai de recours tout comme le délai de traitement du recours au TAF sont de cinq jours ouvrables (art. 108 al. 2 et 109 al. 1 LAsi).

3.3 La décision d’admission provisoire

Lorsque l’exécution de la décision de renvoi est impossible, illicite ou raisonnablement inexigible, l’autorité admet provisoirement le requérant (art. 83 al. 1 LEtr). Le statut de l’admission provisoire (livret F) n’est pas une autorisation du droit des étrangers à l’instar des permis B et C, mais une simple mesure de substitution à l’exécution du renvoi. La personne est en théorie tenue de quitter le pays alors que la Suisse ne peut ou ne doit pas exécuter le renvoi. En pratique, les personnes admises à titre provisoire restent généralement en Suisse pour une durée prolongée, tout comme les personnes au bénéfice de l’asile. Jusqu’au début des années 2000, les Sri Lankais représentaient une part importante des personnes admises provisoirement. Ils ont été suivis par des personnes originaires de Serbie, puis de Somalie et d’Erythrée, alors que ces dernières années, ce sont principalement [110] les ressortissants d’Afghanistan, d’Iran et de Syrie qui ont été mis au bénéfice de l’admission provisoire.15

Le séjour des personnes admises à titre provisoire est réglé aux art. 83 à 88 LEtr, 74 OASA et 16 à 26a OERE. D’importantes distinctions sont faites selon que la personne est reconnue comme réfugié ou comme étranger admis à titre provisoire. Seule la première peut se prévaloir des droits conférés par la CR et bénéficie de ce fait d’un bien meilleur statut.

3.3.1 Non-entrée en matière et admission provisoire

Chaque année, plusieurs dizaines de personnes se voient notifier une décision de NEM, puis mis au bénéfice de l’admission provisoire en raison d’un obstacle à l’exécution du renvoi. L’examen dissocié du besoin de protection au sens du droit d’asile d’une part, et du droit des étrangers d’autre part, conduit à une problématique propre au système Suisse : une personne admise à titre provisoire peut être autorisée à rester en Suisse sans que ses motifs d’asile ne soient examinés par une autorité compétente. Ces cas de figure restent cependant marginaux par rapport au nombre de demandes traitées.

3.3.2 Réfugié admis provisoirement

En 2014, 9367 personnes ont été admises à titre provisoire, parmi lesquelles 2494 en tant que réfugiés exclus de l’asile. Les dispositions relatives à l’exclusion de l’asile ont été appliquées en premier lieu aux ressortissants du Tibet (République populaire de Chine), d’Erythrée, de Syrie, du Sri Lanka et d’Iran. Cela s’explique dans la quasi-totalité des cas par l’existence de motifs subjectifs postérieurs à la fuite (voir chap. IX, pt 3.3). Les diasporas de ces pays étant fréquemment surveillées par les services secrets du pays d’origine, toute personne engagée – ou suspectée de l’être – auprès de l’opposition en exil encourt un risque de persécution et devient de ce fait un réfugié. L’exclusion de l’asile vise alors à « punir » les personnes qui ne s’engageraient politiquement qu’au motif d’acquérir la qualité de réfugié. La continuité des convictions ou orientations déjà affichées avant le départ étant particulièrement difficile à démontrer, ces mesures touchent avant tout les communautés de pays [111]dont l’opposition politique est active en Suisse, à l’instar notamment des Iraniens, des Sri Lankais et des Syriens. Sont également exclues de l’asile les personnes dont la qualité de réfugié ne se fonde que sur le départ illégal du pays. Cette situation touche, en Suisse, essentiellement les Erythréens et les Tibétains dont la socialisation en Erythrée ou en Chine n’est cependant pas mise en doute.

3.3.3 Etranger admis provisoirement

Il se peut qu’une personne ne remplisse pas les critères de la qualité de réfugié, sans pour autant que l’on puisse la renvoyer dans son pays d’origine. 6873 personnes ont obtenu en 2014 une admission provisoire, sans reconnaissance de la qualité de réfugié.16 La plupart de ces admissions provisoires sont octroyées en raison de l’inexigibilité de l’exécution du renvoi. Les « réfugiés de la violence » ayant fui une situation de guerre ou de violence généralisée peuvent alors rester en Suisse au bénéfice d’une admission provisoire lorsque la situation sécuritaire est telle que l’on ne saurait raisonnablement exiger qu’ils retournent dans leur pays. En pratique, les ressortissants d’Afghanistan, de Somalie, d’Irak ou de Syrie représentent une part importante des étrangers admis en Suisse à ce titre. D’autres aspects humanitaires, tels que l’état de santé de la personne, l’accès aux soins ou les possibilités de réintégration sociale et économique peuvent également conduire à l’inexigibilité de l’exécution du renvoi, particulièrement en présence d’un cumul d’éléments défavorables au renvoi (chap. X, pt 3).

Lorsque l’autorité prononce l’admission provisoire sans reconnaître la qualité de réfugié, l’intéressé peut recourir contre le rejet de l’asile selon les modalités de recours ordinaires.

3.4 Reconnaissance du besoin de protection (taux de protection)

Le taux d’octroi de l’asile ne suffit pas à reconnaître le besoin de protection des personnes qui déposent une demande d’asile en Suisse. Si l’on admet l’admission provisoire comme étant une forme de protection au même titre que l’asile, on constate que 76.6 % des demandeurs d’asile dont les demandes ont été traitées sur le fond (à l’exclusion des décisions de non-entrée en matière) ont reçu une protection en 2014 à l’issue de la procédure.17 Le SEM détermine quant à lui le taux d’octroi d’une protection par rapport à l’ensemble des décisions rendues en première instance (y compris les décisions de NEM) et arrive à un taux de reconnaissance de 58.3 % en 2014.

[112]4 Aspects procéduraux de la décision

4.1 La décision d’asile et son dispositif

La décision formelle – Le SEM est en principe tenu de statuer par décision sur toute demande d’asile déposée en Suisse.18 La décision se divise en trois parties : la première relate l’état de fait sur lequel se fonde l’examen de la demande, la seconde se prononce sur la qualité de réfugié et l’octroi de l’asile, voire sur les éventuels motifs de non-entrée en matière et la troisième partie se concentre le cas échéant sur l’examen d’éventuels obstacles à l’exécution du renvoi. L’ensemble des conclusions figure dans le dispositif en fin de décision, qui énumère les constatations développées dans les considérants. Les éléments centraux de la décision sont repris dans une lettre d’accompagnement qui n’a pas de valeur légale à proprement parler.

Le dispositif – L’autorité se prononce successivement et séparément sur les éléments essentiels de la décision que sont l’entrée en matière, la qualité de réfugié, l’octroi de l’asile, le renvoi et l’exécution du renvoi le cas échéant. Elle désigne si nécessaire un canton d’attribution, ou un canton responsable de l’exécution du renvoi. Ce n’est qu’au moment de la reconnaissance formelle du statut de réfugié que la personne peut se prévaloir des droits qui découlent de la qualité de réfugié, excluant toute application rétroactive.19

4.2 Délais et stratégies de traitement

Délais de traitement – En procédure de première instance, le SEM doit en principe rendre une décision dans les dix jours ouvrables qui suivent le dépôt de la demande (art. 37 al. 2 LAsi).20 Pour les décisions NEM, le délai d’ordre est de cinq jours ouvrables à compter du dépôt de la demande ou de l’approbation d’une requête de (re)prise en charge par un autre Etat Dublin (al. 1). Les délais d’ordre de la LAsi [113]sont applicables par analogie aux demandes de réexamen.21 Le non-respect de ces délais n’a toutefois pas de conséquence juridique sur la procédure.22 En dépit de la volonté marquée de l’ensemble des acteurs de la procédure, les incitations législatives ne suffisent visiblement pas à réduire les délais de traitement en pratique. D’importants changements sont toutefois attendus avec l’introduction des procédures cadencées actuellement expérimentées au centre test de la Confédération à Zurich (chap. V, pt 5).

Stratégie de traitement – La loi sur l’asile impose au SEM une stratégie de traitement des demandes qui tienne compte de la situation dans les Etats de provenance, du caractère manifestement fondé ou non des demandes, ainsi que du comportement des requérants (art. 37b LAsi). Le SEM a également une obligation de diligence particulière lorsque le requérant est un mineur non-accompagné ou lorsqu’il se trouve en détention (art. 37b en lien avec art. 17 al. 2bis LAsi). La stratégie de traitement du SEM consiste souvent à prioriser les demandes d’asile pouvant être rapidement rejetées. Le traitement prioritaire des demandes émanant de personnes provenant de régions en conflit au cours de l’année 2014 a eu pour effet positif de réduire nettement le nombre de dossiers en suspens en première instance, avec de surcroît l’avantage considérable de fixer les demandeurs sur leur sort et de favoriser leur intégration.23

Les coûts d’une durée de procédure excessive : La durée des procédures engendre des coûts notables, non seulement pour les autorités, mais également pour les requérants d’asile. Alors qu’une part de ces coûts se laisse facilement déduire des frais d’entretien et administratifs engendrés tout au long de la procédure, une autre partie, plus difficilement quantifiable, se rapporte aux coûts sociaux et économiques de la « désintégration » des demandeurs d’asile. L’incertitude sur l’avenir, et les problèmes de santé qui l’accompagnent, ralentissent considérablement le processus d’intégration, engendrant des coûts qui se répercutent alors sur le système de santé et des assurances sociales. Sur les coûts de la procédure d’asile et la répartition des frais entre cantons et Confédération, il est utile de se référer au rapport final du groupe de travail sur la restructuration, Planification générale de la restructuration du domaine de l’asile, du 18 février 2014.24

[114]4.3 Déni de justice et retard injustifié

L’obligation de célérité – Le requérant peut se prévaloir du traitement de sa demande « dans un délai raisonnable » en vertu des garanties de procédure de l’art. 29 al. 1 Cst. Un recours pour déni de justice peut être déposé auprès de l’autorité de recours lorsque le SEM s’abstient de rendre une décision sans en avoir le droit ou tarde à le faire (art. 46a PA). On parle de déni de justice formel (Rechtsverweigerung) lorsque l’autorité refuse expressément de statuer alors qu’elle en a l’obligation ou lorsqu’elle ne statue que partiellement. Le déni de justice matériel peut être, quant à lui, constaté en cas de retard injustifié (Rechtsverzögerung), lorsque l’autorité tarde sans droit à statuer ou décide à tort de suspendre la procédure.

Le délai raisonnable – Le délai au-delà duquel l’inaction de l’autorité contrevient à son obligation de statuer dépend de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce. Il s’apprécie au cas par cas sur la base d’éléments objectifs, tels que le degré de complexité de l’affaire, le temps qu’exige l’instruction de la procédure, l’enjeu que revêt le litige pour l’intéressé, ou encore le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes. L’importance du bien juridique défendu doit être prise en considération, tout comme les répercussions que peut avoir une attente excessive sur la santé du requérant.25 Il doit également être tenu compte des délais d’ordre de la LAsi (art. 37 et 37b LAsi). Dans des circonstances concrètes et objectives, le SEM peut justifier une prolongation de la procédure, mais ne peut s’appuyer sur des motifs liés à une organisation déficiente, à un manque de personnel ou à une surcharge structurelle.26 Il n’est pas important de savoir s’il a commis une faute, mais uniquement de déterminer s’il a agit dans un délai raisonnable.

Le TAF a estimé que l’autorité administrative a contrevenu à son devoir de célérité dans les cas suivant (déni de justice matériel)27 :

 Procédure ordinaire :

 Plus de deux ans se sont écoulés depuis le dernier acte de procédure sans que la requérante érythréenne n’ait été convoquée à l’audition sur les motifs [115]d’asile. La pénurie d’interprète en tigrigna ne justifie pas l’inactivité du SEM.28

 Aucune mesure d’instruction reconnaissable n’a été entreprise pendant 25 mois.29

 Demande de réexamen30 :

 dans le cadre de la seconde demande de réexamen d’une femme éthiopienne accompagnée de son nouveau-né et traumatisée par les viols subis, le TAF a estimé qu’il était opportun de conclure rapidement la procédure de réexamen. Les quatorze mois d’inactivité du SEM depuis le dépôt de la demande de réexamen violent l’obligation de célérité.

 Procédures d’ambassade et autorisations d’entrer en Suisse :

 Au vu de la situation délicate des requérants d’asile érythréens au Soudan, le délai de 17 mois dépasse clairement le délai raisonnable pour statuer sur l’entrée en Suisse.31

 L’attente de 11 mois pour la remise d’un formulaire type relatif aux motifs d’asile, malgré les demandes répétées des requérants, viole l’obligation de diligence de l’autorité.32

Mineurs non accompagnés – L’obligation de célérité prend une importance particulière dans le cadre des procédures de mineurs non accompagnés. L’incertitude quant à l’issue de la procédure fait peser sur le mineur une pression psychique considérable et la durée excessive de la procédure peut avoir des répercutions néfastes sur son intégration, en raison notamment des difficultés d’accès à la formation. Au moment de l’impression, le TAF n’avait pas encore défini de portée propre à la nouvelle disposition de l’art. 17 al. 2bis LAsi qui impose au SEM une diligence particulière dans le traitement prioritaire des demandes de MNA.33 En l’espèce, il a admis le déni de justice dans les cas de MNA suivants :

 Déni de justice constaté le 19 mars 2015 pour une demande d’asile déposée le 22 février 2011 par trois frères et sœurs MNA. Le SEM a cessé ses échanges avec le HCR en vue de la clarification de l’état de fait en mars 2013 et n’a pas réagit aux demandes répétées des requérants envoyées dès le mois de mai 2014.34

 [116]Déni de justice constaté le 10 janvier 2014, dans le cas d’un mineur devenu non accompagné au moment du décès de son père survenu après le dépôt d’une demande d’asile en novembre 2010. Malgré de nombreux rappels adressés au SEM, le garçon n’avait pas été entendu sur ses motifs d’asile plus de trois ans après le dépôt de la demande.35

 L’absence de mesures de traitement d’une demande d’un MNA afghan pendant 24 mois a été jugé contraire à l’obligation de diligence de l’autorité.36 Le même constat a été tiré dans une autre affaire, alors que l’autorité est restée inactive pendant deux ans et demi.37

Déni de justice formel – Lorsque le SEM refuse indûment de statuer sur une question de droit ou ne statue que partiellement, le TAF admet un déni de justice formel et renvoie généralement le dossier à l’autorité inférieure. Dans un cas d’espèce, le SEM a contrevenu à son devoir de statuer en refusant de se prononcer sur la demande d’asile d’un mineur qu’il a traité conjointement à la demande de réexamen de ses parents.38 C’est également indûment que le SEM a éludé la demande de réexamen d’un requérant visant à inclure son épouse dans le statut d’asile.39

Exigences formelles – Le recours pour déni de justice matériel peut être déposé en tout temps (art. 50 al. 2 PA), quand bien même le requérant n’aurait pas encore été entendu sur ses motifs d’asile. Le requérant doit avoir un intérêt digne de protection au moment du dépôt de la requête et pouvoir démontrer la bonne foi de sa démarche.40 Les mesures entreprises pour inciter le SEM à statuer au plus vite ne sont pas une condition formelle d’entrée en matière, mais il convient d’en tenir compte. Dans le cadre d’un recours pour déni de justice formel, la jurisprudence du TF exige que le recours soit déposé dans les 30 jours qui suivent le refus de l’autorité de se prononcer sur la question.41 Quant au mémoire de recours, il doit répondre aux exigences de forme générales prescrites par la PA (art. 52 PA).

Conséquences juridiques – Lorsque le TAF entre en matière sur le recours, il n’examine pas le fond de l’affaire, mais se détermine uniquement sur le caractère raisonnable de la durée de la procédure. Si le déni de justice est admis, il renvoie généralement le dossier à l’autorité inférieure qu’il exhorte à statuer dans les meilleurs [117]délais. L’examen de la demande se poursuit idéalement plus rapidement, bien que le Tribunal ne fixe généralement pas de délai contraignant pour agir.42

Délais de traitement du TAF – En tant qu’autorité de surveillance administrative,43 le Tribunal fédéral peut recevoir des plaintes lorsque le TAF s’abstient indûment de rendre une décision ou tarde à le faire (art. 71 PA). Cette dénonciation ne confère aucun droit au dénonciateur qui ne dispose pas des droits de partie (art. 71 al. 2 PA). Le Tribunal fédéral examine alors uniquement si le cours de la procédure devant le TAF correspond au déroulement régulier d’une affaire. Les critères développés par la jurisprudence dans le cadre du recours pour retard injustifié s’appliquent par analogie.44 En pratique, une procédure de trois ans et neuf mois (45 mois) ne correspond objectivement pas au déroulement ordinaire d’une affaire.45 Le TAF a également été condamné pour violation du devoir de célérité dans le cadre d’une procédure d’asile (menée en parallèle à une procédure d’extradition) ayant duré 21 mois, dont 9 d’inactivité complète,46 ainsi que dans le cadre d’une demande de révision durant laquelle aucune mesure d’instruction n’a été prise pendant 21

mois.47

4.4 Classement sans décision formelle

Conformément au droit administratif général, une demande est radiée du rôle lorsqu’elle devient sans objet ou qu’un intérêt juridique fait défaut.48 Cela arrive notamment lorsque le requérant d’asile retire sa demande dans la perspective d’une autre autorisation de séjour, par exemple à la suite d’un mariage, ou lorsque le requérant est devenu introuvable. Lors de la révision du 14 décembre 2012,49 Le législateur a introduit de nouveaux motifs de classement propres aux procédures d’asile. Le SEM est ainsi autorisé à classer une demande sans décision formelle dans les cas suivants :

 [118]Le requérant, sans raison valable, ne respecte pas son obligation de collaborer ou ne se tient pas à la disposition des autorités compétentes en matière d’asile pendant plus de vingt jours, sous réserve de la Convention de Genève (art. 8 al. 3bis LAsi ; voir chap. XII, pt 3.2)

 Suite à l’entretien de conseil, le requérant retire une demande d’asile qui n’est pas conforme à la loi ni suffisamment justifiée (art. 25a LAsi)

 La demande de réexamen (art. 111b LAsi) ou la demande multiple (art. 111c LAsi) est infondée ou présente de manière répétée les mêmes motivations (voir chap. XIII, pt 7.2 s).

Ces nouveaux motifs de classement poursuivent des objectifs punitifs (en cas de violation du devoir de collaborer ou de demandes dites abusives) ou d’économie de procédure qui dépassent largement le cadre jusqu’ici admis du classement des demandes devenues sans objet. Or, en renonçant à l’examen matériel des motifs d’asile, la décision de classement est susceptible d’avoir de graves conséquences pour les personnes touchées. Elle doit donc répondre à des exigences procédurales strictes pour assurer sa conformité aux principes généraux du droit et aux engagements internationaux de la Suisse.50 Cela requiert l’existence de voies de contestation auprès d’une autorité judiciaire, l’examen subséquent d’éventuels obstacles à l’exécution du renvoi par une autorité de préférence fédérale et la possibilité de rouvrir un dossier, voire de déposer une seconde demande d’asile suite au classement.

Voies de contestation – La possibilité de contester un classement sans décision formelle n’est pas encore totalement clarifiée. Le classement d’une demande doit selon nous pouvoir être contesté conformément aux dispositions des art. 105 ss LAsi, dans le respect des garanties de procédure de l’art. 29 Cst. et du droit à un recours effectif de l’art. 13 CEDH.51 Par le classement de la demande, l’autorité prive le requérant de l’examen de ses motifs d’asile et de la possibilité de se voir accorder une protection. L’intérêt juridique défendu est de haute importance et [119]l’appréciation de l’autorité soulève des questions de droit complexes.52 Ainsi, à titre d’exemple, le caractère suffisamment fondé ou non d’une demande de réexamen ne peut être soumis à la seule appréciation de l’autorité administrative, au risque de contrevenir aux droits fondamentaux des personnes concernées (voir chap. XIII, pt 7.2).53

La proportionnalité d’une décision de renvoi sans examen préalable des motifs d’asile ou des obstacles à l’exécution du renvoi doit à notre sens également être soumise au contrôle juridictionnel d’une autorité de recours lorsqu’elle fait suite à une violation du devoir de collaborer. Déterminant quant aux droits et aux obligations dont peuvent se prévaloir les requérants, le classement constitue à notre sens une décision au sens de l’art. 5 PA et devrait à ce titre pouvoir être contesté directement auprès de l’instance de recours. Le SEM ne partage toutefois pas cet avis.54 Dans l’attente d’une clarification du TAF sur la nature juridique de la décision de classement, la possibilité de demander une décision en constatation au SEM conformément à l’art. 25 PA subsiste et permet d’assurer l’exercice du droit au recours.55

Examen des obstacles à l’exécution du renvoi – Le renvoi ne peut être exécuté sans qu’il ne soit procédé à un examen préalable des obstacles qui s’y opposeraient (art. 83 et 84 LEtr). Dans le cadre de procédures de droit des étrangers, il revient actuellement aux cantons d’examiner en dernier lieu l’existence d’obstacles à l’exécution du renvoi selon la LEtr. Cette solution semble toutefois insatisfaisante au vue de la grande variabilité des pratiques cantonales et du manque d’expertise des autorités de police quant à la situation qui prévaut dans les pays d’origine.56 La possibilité laissée aux cantons de proposer l’admission provisoire au SEM (art. 83 [120]al. 6 LEtr) ne remplit pas les exigences légales nécessaires à garantir le respect du principe de non-refoulement.

Garanties procédurales – Le requérant d’asile doit être entendu sur les motifs qui s’opposeraient au classement préalablement à la décision du SEM de classer le dossier (droit d’être entendu au sens de l’art. 29 Cst.). La décision de classement doit ensuite être communiquée par écrit afin que le requérant puisse s’y opposer utilement.57 A noter également les problèmes de systématique de la loi apparus lors de l’introduction hâtive des dispositions58 qui prévoient de manière contradictoire le classement de la demande en cas de violation non qualifiée du devoir de collaborer et l’absence d’audition sur les motifs d’asile lorsque la violation est qualifiée de grave.59

Réouverture ou nouvelle demande – La réouverture de la procédure, voire le dépôt d’une nouvelle demande d’asile, doit être possible dès qu’apparaissent des indices de mise en danger qui – en application d’un degré de preuve moindre – ne sont pas manifestement infondés. L’art. 8 al. 3bis LAsi réserve précisément l’application de la Convention de Genève comme palliatif au délai de carence de trois ans prévu avant le dépôt d’une nouvelle demande d’asile. La réouverture d’une procédure ne devrait toutefois pas être limitée au champ d’application de la Convention de Genève, mais s’étendre à toute personne pouvant faire valoir un besoin de protection au sens de l’asile ou de l’admission provisoire. L’art. 35a LAsi prévoit expressément la réouverture de la procédure lorsque la Suisse est compétente pour l’examen d’une demande d’asile en application du Règlement Dublin III. La réintroduction de cette disposition (sous une forme modifiée) répond aux exigences de l’art. 18 par. 2 RD III qui impose en effet que l’examen d’une demande d’asile soit mené jusqu’à son terme par l’Etat membre compétent.60 Or le classement contrevient à l’obligation d’examiner une demande de protection pour laquelle la Suisse [121]est désignée compétente, que le cas ait fait l’objet d’une procédure Dublin formelle ou non.61

Sur le plan formel, la réouverture de la procédure doit faire l’objet d’une décision incidente (art. 29b OA 1). Une audition sur les motifs d’asile a lieu s’il n’y en a pas eu précédemment ou si le requérant invoque des faits qui se sont produits après le classement. Il n’y a en revanche pas de nouvelle audition lorsque, dans le cadre de l’exercice de son droit d’être entendu, le requérant fait valoir des motifs d’asile sur lesquels il a déjà été auditionné. Au moment de la réouverture, l’autorité procède alors à l’examen de l’ensemble des points énumérés dans ce chapitre, sans que le classement n’ait d’influence sur le déroulement de la procédure.

1 Lorsque la NEM est prononcée en application du Règlement Dublin III (art. 31a al. 1 let. b LAsi), l’examen distinct des obstacles à l’exécution du renvoi n’est pas requis, car déjà inclus dans la décision NEM-Dublin, voir à ce sujet chap. VII.

2 Manuel Asile et retour du SEM, Article B1, Les conditions de recevabilité, ch. 2.1.1.

3 Selon l’art. 18 LAsi, « est considérée comme une demande d’asile toute manifestation de volonté par laquelle une personne demande à la Suisse de la protéger contre des persécutions », sur cette notion voir chap. V, pt 2 et chap. VII, pt 3.2.

4 Arrêté fédéral du 26 septembre 2014, FF 2014 7119 ; message du 9 avril 2014, FF 2014 3225 et FF 2014 3265. Voir également le rapport explicatif relatif à l’ordonnance portant sur l’adaptation d’ordonnances en raison de nouveautés en lien avec l’acquis de Dublin/Eurodac, janvier 2015, et RO 2015 1847, 1871.

5 La loi fédérale du 14 décembre 2012 (entrée en vigueur le 1er février 2014) a considérablement simplifié les motifs de non-entrée en matière (abrogation des art. 32 à 35 aLAsi). Un examen matériel des motifs d’asile est généralement nécessaire avant tout renvoi vers l’Etat d’origine.

6 Contrairement aux exigences du droit des réfugiés, le SEM commence par se prononcer sur la vraisemblance des déclarations du requérant, généralement avant de déterminer si la personne est un réfugié au sens de l’art. 3 LAsi (voir chap. XII, pt 5).

7 Art. 59 LAsi : « Quiconque a obtenu l’asile en Suisse ou y a été admis provisoirement au titre de réfugié est considéré, à l’égard de toutes les autorités fédérales et cantonales, comme un réfugié au sens de la présente loi et de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ».

8 « Il ressort de la systématique du Règlement Dublin II que la non-entrée en matière sur la demande d’asile et le renvoi (ou transfert) forment une seule et même décision indissociable. Il n’y a pas de place pour un véritable examen séparé des conditions empêchant l’exécution du transfert, une fois qu’il a été décidé que la clause de souveraineté de l’art. 3 par. 2 du Règlement Dublin II ne s’appliquait pas », ATAF 2010/45, consid. 10.2.

9 L’exécution du renvoi reste techniquement possible même si elle est limitée à un retour sur une base volontaire. Les cas d’impossibilité sont très rares en pratique. Voir chap. X, pt 4.

10 A la différence des statistiques présentées par le SEM, l’OSAR (tout comme le HCR) estime que le taux d’octroi de l’asile doit être calculé par rapport au total des demandes traitées sur le fond, à l’exclusion des cas de non-entrée en matière. « Vivre ensemble » propose chaque mois une compilation statistique corrigée des données du SEM, disponible sous : www.asile.ch/vivre-ensemble/documentation/statistiques/ (consulté le 31 juillet 2015).

11 SEM, Commentaire sur la statistique en matière d’asile 2014, p. 9, disponible sous : www.sem.admin.ch/dam/data/bfm/publiservice/statistik/asylstatistik/jahr/2014/stat-jahr-2014-kommentar-f.pdf (consulté le 31 juillet 2015).

12 Un délai de deux semaines peut être imparti lorsque la procédure a duré plus de six mois, en respect du principe de proportionnalité (directives du SEM III.2, ch. 2.2.3).

13 Voir directives du SEM III.2, ch. 2.2 sur l’exécution du renvoi et le délai de départ.

14 Jusqu’au 1er février 2014, la LAsi prévoyait un motif de non-entrée en matière pour les personnes provenant de pays sûrs, à moins que la personne ne puisse faire valoir des indices de persécution (art. 34 aLAsi). Ce motif de non-entrée en matière a été abrogé par la révision législative du 12 décembre 2012.

15 Sur le statut des personnes admises à titre provisoire, voir CSDH, « Admission provisoire » : entre admission et exclusion, entre provisoire et indéfini – Etat des lieux et examen de quelques aspects critiques dans une perspective des droits humains, Newsletter CSDH no 21 du 29 janvier 2015 (disponible sous : www.skmr.ch/frz/domaines/migration/nouvelles/admission-provisoire.html [consulté le 31 juillet 2015]), qui renvoie à l’étude du Forum suisse pour l’étude des migrations et de la population (SFM), Aufenthaltsverläufe vorläufig Aufgenommenerin der Schweiz. Datenanalyse im Auftrag der Eidgenössischen Kommission für Migrationsfragen EKM, Neuchâtel, décembre 2014, publié à la suite du Postulat de la CIP-N 14.3008 déposé le 14 février 2014 au Conseil national.

16 SEM, Commentaire sur la statistique en matière d’asile 2014, op. cit., note 11, p. 7.

17 Vivre ensemble, Statistiques de l’asile, op. cit., note 10.

18 L’obligation de statuer du SEM découle de l’art. 29 Cst., qui confère à toute personne touchée dans un intérêt juridique ou de fait digne de protection le droit à ce que sa demande soit traitée et jugée par une autorité compétente (voir Tanquerel Thierry, Manuel de droit administratif, Bâle 2011, ch. 1490). L’autorité peut à titre exceptionnel renoncer à rendre une décision, à condition que la loi l’y autorise. C’est le cas lorsque l’autorité décide de classer une demande d’asile sans décision formelle (voir pt 4.4).

19 Malgré la nature déclarative de la reconnaissance de la qualité de réfugié, la loi ne prévoit pas d’effet rétroactif des droits découlant de la qualité de réfugié. A titre d’exemple, seuls les enfants encore mineurs au moment du dépôt de la demande de regroupement familial peuvent prétendre à l’asile familial au sens de l’art. 51 al. 1 LAsi (voir chap. XVIIII, pt 1). De même, la taxe spéciale prélevée sur le revenu des requérants d’asile n’est pas remboursée rétroactivement lorsque la qualité de réfugié est reconnue.

20 Egalement lorsque des mesures d’instructions complémentaires simples sont nécessaires, notamment le contrôle de documents versés au dossier.

21 FF 2010 4035, 4085.

22 Le message du Conseil fédéral relativise explicitement la portée des délais d’ordre en légitimant les dépassements dus aux mesures d’instruction nécessaires ou au manque de ressources du SEM, spécifiquement en période de fort afflux migratoire (message du 26 mai 2010 concernant la modification de la loi sur l’asile, FF 2010 4455, 4076). Voir à ce sujet le commentaire de Longchamp Céline, in : Nguyen Minh Son ; Amarelle Cesla (édit.), Code annoté de droit des migrations, Volume IV : Loi sur l’asile, Berne 2015, ad art. 37 LAsi.

23 Voir SEM, Commentaire sur la statistique en matière d’asile 2014, op. cit., note 11, p. 4.

24 Disponible sous : www.ejpd.admin.ch/dam/data/bfm/aktuell/news/2014/2014-03-28/beragna-f.pdf (consulté le 31 juillet 2015).

25 TAF, E-3810/2012 du 21 octobre 2012, consid. 6.3 et E-5783/2012 du 20 novembre 2012, consid. 5.3, qui fait état de la pression psychique à laquelle sont soumis une mère et ses enfants dans l’attente d’une décision du SEM à la représentation suisse de Colombo.

26 Dans un arrêt E-6980/2013 du 8 janvier 2014 (parmi d’autres), le TAF renvoie à la jurisprudence du TF et rappelle que les « temps morts » sont inévitables dans toute procédure, mais qu’une organisation déficiente, un manque de personnel ou une surcharge structurelle ne peuvent justifier la lenteur excessive d’une procédure. Chaque cas doit faire l’objet d’un examen individuel.

27 Pour d’autres exemples récents, voir Nguyen Minh Son (édit.), Actualité du droit des étrangers – Jurisprudence et analyse.

28 TAF, D-5658/2014 du 13 novembre 2014.

29 TAF, E-4929/2013 du 13 septembre 2013.

30 TAF, D-6098/2013 du 6 décembre 2013.

31 Voir notamment : TAF, D-410/2014 du 25 mars 2014 ; et dans le cas similaire d’un MNA : TAF, D-1643/2014 du 14 avril 2014 et TAF, E-5595/2013 du 12 novembre 2013 ; l’inactivité de quinze mois viole le principe de célérité dans le cas de deux enfants mineurs au Soudan : TAF, D-45/2011 du 9 février 2011.

32 TAF, E-6470/2012 du 5 mars 2013.

33 Voir Interpellation Moret 14.4304 déposée le 12 décembre 2014 au Conseil national et la réponse du Conseil fédéral le 18 février 2015.

34 TAF, E-7448/2014 du 19 mars 2015, consid. 5.

35 TAF, E-6700/2013 du 10 janvier 2014, consid. 6.2.

36 TAF, D-5539/2013 du 8 octobre 2013.

37 TAF, D-196/2014 du 4 mars 2014.

38 TAF, E-1158/2014 du 17 mars 2014.

39 TAF, E-5523/2013 du 3 mars 2014.

40 Art. 6 PA en relation avec l’art. 48 PA : le requérant doit être particulièrement touché et avoir un intérêt digne de protection (actuel et concret), voir ATAF 2009/9, consid. 3, et ATAF 2008/15, consid. 3.2.

41 TAF, D-6098/2013 du 6 décembre 2013, qui renvoie à TF, 2P.16/2002 du 18 décembre 2002.

42 Dans des cas exceptionnels, l’autorité de recours peut renvoyer l’affaire à l’autorité inférieure avec des instructions claires quant aux délais et conclusions de la décision à rendre selon l’art. 61 PA, voir p. ex. TAF, E-6681/2010 du 4 novembre 2010.

43 Art. 1 al. 2 LTF et art. 3 al. 1 LTAF.

44 ATF 136 II 380, consid. 2 et TF, 12T_1/2007 du 29 mai 2007, consid. 3 (parmi d’autres).

45 TF, 12T_1/2007 du 29 mai 2007.

46 TF, 1C_195/2012 du 15 octobre 2012.

47 TF, 12T_3/2011 du 21 décembre 2011.

48 Application par analogie de l’art. 72 PCF : « Lorsqu’un procès devient sans objet ou que les parties cessent d’y avoir un intérêt juridique, le Tribunal, après avoir entendu les parties, mais sans autres débats, déclare l’affaire terminée et statue sur les frais du procès par une décision sommairement motivée, en tenant compte de l’état de choses existant avant le fait qui met fin au litige ».

49 RO 2013 4375 ; RO 2013 5357 ; FF 2010 4035 ; FF 2011 6735.

50 Sont principalement touchés les art. 33 CR et 3 CEDH qui consacrent le principe de non-refoulement, l’art. 18 RD III qui oblige l’Etat membre désigné compétent à mener la procédure d’asile jusqu’à son terme et l’art. 13 CEDH qui exige une voie de recours effective. L’art. 35 PA consacre quant à lui le droit de recevoir une décision motivée.

51 Selon la doctrine et la jurisprudence, la décision de classement (« Abschreibungsbeschluss ») doit être attaquable selon les voies de droit ordinaires indépendamment de la question de savoir s’il s’agit d’une décision (« Verfügung ») au sens de l’art. 5 PA. Voir à ce sujet Nufer Seraina, Die Abschreibung von Asylgesuchen nach dem neuen Art. 8 Abs. 3bls AsylG, in : ASYL 2014/2, qui renvoie à : Kölz Alfred ; Häner Isabelle ; Bertschi Martin, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 3e éd., Zurich 2013, ch. 866 ; ATAF 2009/11, consid. 2.2 ; en comparaison avec TF, 1P.343/2006 du 19 juin 2006, consid. 1.4. Sur le recours effectif de l’art. 13 CEDH, voir Hruschka Constantin ; Motz Stephanie, Das Recht auf eine wirksame Beschwerde, in : ASYL 2014/1, p. 6.

52 ATAF 2014/39.

53 Le TAF a reconnu le caractère infondé du classement d’une seconde demande d’asile déposée par une ressortissante sri lankaise, postérieurement à son transfert Dublin vers la France. La recourante avait, depuis le moment de la première décision, donné naissance à son enfant dont le père et respectivement mari se trouvait légalement en Suisse. Le SEM a nié à tort l’existence d’un fait nouveau et a classé la demande sans décision formelle ; TAF, D-3019/2014 et D-3033/2014 du 27 août 2014.

54 Le SEM estime que seul le rejet d’une demande de réouverture d’une procédure d’asile peut être considéré comme une décision au sens de l’art. 5 PA, voir Manuel asile et retour du SEM, Article E5, Radiation du rôle, ch. 2.5.4.1.

55 Toute personne ayant un intérêt digne de protection peut demander au SEM une décision en constatation, qui constate l’existence d’une situation juridique préexistante, contrairement à la décision formatrice qui crée, supprime ou modifie les droits et obligations (art. 25 PA).

56 La jurisprudence du Tribunal administratif zurichois exige de soumettre l’examen de la légalité de l’exécution du renvoi à la compétence du SEM lorsque l’on ne peut d’emblée exclure l’existence d’obstacles à l’exécution du renvoi (arrêt VB.2011.00746 du 25 janvier 2012). Cette pratique n’est toutefois pas répandue et la plupart des cantons procèdent eux-mêmes à l’examen des obstacles aux renvois.

57 Contestation par voie d’opposition ou par voie de recours dans les 30 jours qui suivent la notification du classement (art. 108 al. 1 LAsi). Voir à ce sujet Nufer, op. cit., note 51.

58 Absente du projet du Conseil fédéral (FF 2010 4109), la formalisation du classement sans décision formelle dans la loi sur l’asile a été adoptée par les Chambres fédérales à la session d’hiver 2012 sur proposition de la CIP-N (dépliant de la session d’été 2012, objet 10.052, 16 mai 2012).

59 Voir chap. XII, pt 3.2 sur les conséquences de la violation de l’obligation de collaborer. Le Manuel Asile et retour du SEM (Article E5, Radiation du rôle) soulève également la contradiction.

60 L’art. 35a aLAsi (abrogé par la loi fédérale du 14 décembre 2012) a en effet été réintroduit sous une forme modifiée qui ne concerne explicitement que les cas d’application du Règlement Dublin (arrêté fédéral du 26 septembre 2014, FF 2014 7111, RO 2015 1841).

61 Dans un arrêt de principe, le TAF a estimé en revanche que la décision de NEM ne contrevient pas à l’obligation de mener une procédure jusqu’à son terme conformément aux exigences du Règlement Dublin (ATAF 2013/10).

Manuel de la procédure d'asile et de renvoi

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