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LA GYMNASTIQUE A LA MAISON 1. Utilité de la Gymnastique de chambre.

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Mens sana in corpore sano, «ce n’est que dans un corps sain que peut habiter une âme saine», vieil adage dont la vérité n’a jamais été démentie. L’homme ne peut arriver à son développement complet, à une santé parfaite, qu’en exerçant régulièrement ses diverses facultés, de façon à les diriger vers un fonctionnement harmonique de son organisme. Toute force se développe, s’accroît, s’améliore, par l’activité et l’exercice; une force, au contraire, qui n’est pas exercée, s’affaiblit et finit par disparaître.

Dans les conditions simples, primitives, de la vie, les nécessités de l’existence donnent lieu à un certain équilibre dans l’exercice des forces du corps et de l’âme. Les peuples pasteurs et agriculteurs ne sont exposés ni aux fréquentes émotions ni aux efforts épuisants de l’esprit, et leurs forces corporelles trouvent dans la diversité de leurs travaux une occasion suffisante de s’exercer.

Il en est tout autrement des travaux d’un ouvrier, obligé de produire le plus facilement, le plus vite et le meilleur marché possible, et de développer ainsi au plus haut degré une aptitude corporelle spéciale, d’autant plus spéciale que la division du travail s’étend davantage. L’ouvrier doit donc avoir soin dans son travail de restreindre la dépense de ses forces corporelles et de limiter le nombre de ses organes actifs, afin de pouvoir travailler plus longtemps et d’éviter autant que possible l’excitation que le fonctionnement énergique d’une partie de ses muscles produit nécessairement sur l’ensemble de l’organisme, afin d’éviter particulièrement l’exagération de l’activité cardiaque et pulmonaire, de l’activité des organes digestifs, car cette augmentation de dépense des forces engendre une fatigue plus rapide, sans que le travail à fournir y gagne le moins du monde. L’excitation du cœur et des poumons a, au contraire, pour résultat de produire un échauffement préjudiciable au travail; l’augmentation de la faim et de la soif a un effet contraire à l’économie, et la satisfaction trop fréquente de ces deux sensations constitue aussi une cause de trouble pour le travail. Mais si une grande partie des forces de l’ouvrier doit rester à l’état de repos, s’il est obligé, pour pouvoir travailler plus longtemps et avec plus d’attention, d’éviter l’excitation de l’ensemble de l’organisme, particulièrement l’excitation de la respiration et de la circulation, si importantes pour la santé, il résultera évidemment de ce défaut d’exercice un trouble des forces restées inactives ou insuffisamment exercées. Le travail professionnel de l’ouvrier, précisément parce qu’il est spécial, n’est donc jamais favorable au développement physiologique de l’ensemble de l’organisme, et il agit d’une manière d’autant plus défavorable qu’il est plus spécial, c’est-à-dire qu’il s’exerce dans des limites plus étroites.

Que l’on considère en outre, et c’est bien souvent le cas dans les conditions sociales à notre époque, que les occupations d’un marchand, d’un industriel, exigent une prompte activité intellectuelle, une attention des plus soutenues, et provoquent parfois de rudes émotions; que les fonctions d’un employé entraînent souvent une activité épuisante; que celui qui s’adonne aux études scientifiques soumet sa pensée à des travaux excessifs; et l’on verra que, dans ces cas, pendant que les facultés intellectuelles s’exercent avec une activité exagérée, les forces du corps restent plus ou moins inactives. La vie organique languit et s’altère quand on néglige le corps, et cette langueur étend peu à peu ses ombres sur la vie de l’âme et sur l’activité de la pensée. Le défaut d’activité musculaire, la vie sédentaire, résultat des occupations journalières, déterminent aussi à un haut degré, par suite d’une stimulation insuffisante, un affaiblissement de l’activité du cœur ainsi que des organes respiratoires et digestifs. De là, comme conséquences immédiates, la pauvreté du sang, des troubles de la respiration, le retard des évacuations intestinales, des stases sanguines dans les vaisseaux du bas-ventre (hémorroïdes). Ces troubles exercent à leur tour une influence extrêmement fâcheuse sur le système nerveux; il se manifeste un état très accentué de faiblesse nerveuse, des troubles psychiques (hypocondrie, mélancolie), qui détruisent toute ardeur, toute joie, et qui mettent l’individu dans l’impuissance de jouir de la vie et de s’adonner à une activité profitable.

C’est ici que s’impose, encore plus que chez l’ouvrier adonné à un travail spécial, la nécessité de soigner le corps, pour éviter le dépérissement de l’individu tout entier. Or ce résultat, ce rétablissement de l’harmonie de toutes les forces de l’être humain, principe et condition de toute santé, de toute activité, peut être obtenu au moyen d’exercices appropriés. Parmi ces exercices on a conseillé la promenade, les voyages, l’ascension des montagnes , l’équitation, l’exercice consistant à fendre et à scier du bois, et bien d’autres encore. Mais la promenade n’exerce que quelques groupes musculaires, et, si l’on veut qu’elle agisse d’une manière tant soit peu efficace, il faut lui sacrifier beaucoup de temps; il en est de même de l’équitation. Les voyages, les excursions dans les montagnes, qui produisent une action très stimulante et rafraîchissante, ne peuvent que rarement, et pour peu de temps d’ailleurs, être entrepris par les personnes occupées; il ne reste donc, comme exercice exigeant peu de temps, peu coûteux et pouvant partout être mis en usage, que l’emploi d’une gymnastique méthodique, laquelle d’ailleurs a sur les autres, exercices corporels l’avantage de mettre en jeu tous les muscles, de convenir à toutes les conditions et de pouvoir être exactement mesurée et contrôlée dans ses effets.

Les exercices méthodiques du corps ont été très en usage chez les anciens Grecs et au moyen âge. La gymnastique grecque employait les exercices de la course, du saut et de la lutte, le jet du disque et de l’épieu avec des formes méthodiques très diverses, et dans le but de favoriser, chez les jeunes gens, le développement du corps, de le rendre sain, vigoureux et agile; à la fin du moyen âge aussi, ces exercices ont été employés dans le but de conserver aussi longtemps que possible l’ardeur juvénile.

Les anciens médecins, Hippocrate, Galien, Antyllus, se faisaient une idée très nette des effets diététiques de leur gymnastique en général et des effets particuliers produits par chacun de leurs exercices. Ils les recommandaient donc contre divers états morbides: contre l’obésité, par exemple, ils conseillaient la lutte et le jeu du korykos, sorte de grosse balle lourde, qu’on lançait au plafond d’une chambre; pour favoriser le développement des organes respiratoires, ils conseillaient la marche, la course, les exercices de la voix (déclamation et chant); pour stimuler agréablement l’organisme, sans le fatiguer, et pour donner au corps de l’agilité, ils conseillaient le jeu de la petite balle, qui avait l’avantage de nécessiter des mouvements rapides et variés.

Lorsque, au moyen âge, à l’époque de la Renaissance, les langues anciennes, les arts, les sciences de l’antiquité, commencèrent, après une longue nuit intellectuelle, à briller comme des phares lumineux aux yeux des érudits, l’ancienne gymnastique fut aussi exhumée des débris de l’antiquité et recommença à être employée dans le but d’obtenir des résultats diététiques et thérapeutiques déterminés.

C’est alors que Hieronymus Mercurialis publia, en 1569, à Venise, la première édition de son ouvrage De Arte Gymnastica, ouvrage très savant, orné de nombreuses gravures, et qui, dit l’auteur, ne s’adresse pas seulement aux médecins, mais encore à toute personne qu’intéressent l’étude des choses anciennes et l’art de conserver la santé.

A notre époque, il s’est fondé dans tous les pays civilisés des sociétés de gymnastique, qui ont pris à tâche de répandre le goût des exercices méthodiques du corps. La gymnastique a pénétré aussi dans les écoles de l’un et l’autre sexe. Le développement physique de la jeunesse est considéré aujourd’hui comme un objet important de l’éducation.

On considère comme avantageux de se livrer plusieurs ensemble aux exercices gymnastiques. On ne peut nier, en effet, que la gymnastique pratiquée en communauté avec d’autres personnes ne présente l’avantage d’entretenir la bonne humeur, de stimuler le corps et l’esprit et de rendre par suite plus profitables les exercices eux-mêmes.

Mais il est bien des circonstances qui empêchent l’ouvrier très occupé, le marchand, l’employé, le savant, de prendre part régulièrement aux travaux d’une société de gymnastique; ou bien encore c’est une personne âgée, faible, valétudinaire, ou une personne habituée à une vie retirée, qui hésitent à se mêler aux bruyants ébats d’une jeunesse vigoureuse.

Les femmes d’un âge mûr, auxquelles pourtant un exercice méthodique serait si utile pour l’entretien de leur force et de leur santé, ne peuvent guère non plus prendre part à ces exercices faits en commun.

Les enfants qui ne fréquentent pas les écoles sont aussi privés de l’avantage de participer aux exercices gymnastiques qui s’y pratiquent, et il arrive souvent aussi qu’ils ne sont pas en situation de faire partie d’autres sociétés de gymnastique régulièrement constituées.

Dans tous les cas de ce genre, une gymnastique méthodique pratiquée chez soi offre des avantages, qui, sans remplacer complètement ceux d’exercices réguliers faits en société, sont pourtant capables d’éviter les inconvénients qui résultent d’une négligence complète des exercices du corps.

La gymnastique à la maison, à la chambre et au jardin

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