Читать книгу L'histoire de la Savoie - F. Christin - Страница 8
Lectures
ОглавлениеI.
Les habitations lacustres en Savoie.
«Longtemps après les hommes de l’âge de la pierre, remontant le cours du Rhône sur leurs frêles embarcations taillées dans des troncs d’arbres, arrivèrent les peuples de l’âge du bronze dont les établissements placés sur l’eau à une faible distance des rives, ont été retrouvés dans les lacs d’Annecy, du Bourget et du Léman, de même que dans ceux de la Suisse et de l’Italie. La découverte de ces habitations élevées sur pilotis et l’étude des vestiges recueillis à leur base ne remonte qu’à 1854 en Suisse et dans l’Europe centrale et à 1858 en Savoie, où la première exploration organisée par la Société Florimontane eut lieu sur le lac d’Annecy.
Les importantes collections formées dès lors permirent de se faire une idée assez complète de la vie, de l’industrie et des mœurs de ces populations établies au-dessus des eaux de nos lacs et de se représenter à peu près leur état social.
L’industrie des habitants des palafittes était très développée; ils fondaient et moulaient le bronze et pratiquaient l’élevage du bétail et la culture de quelques plantes, graminées et légumineuses. Leurs habitations, construites en branchages revêtus de terre glaise pétrie et ornée de dessins réguliers, s’élevaient sur des planches que portaient des pilotis enfoncés dans la vase, à quelque distance du rivage auquel elles étaient reliées par des ponts mobiles, ou au moyen de canots, ce qui assurait les femmes et les enfants contre toute invasion de l’homme ou des animaux lorsque les hommes s’éloignaient pour la chasse. Le foyer était établi sur des dalles au centre de la cabane, percée à la partie supérieure d’une ouverture pour le passage de la fumée.
Leurs armes, outils et ornements étaient en bronze, composé de cuivre et d’étain, artistement travaillés et enjolivés de traits, de dents de loups et de coquillages disposés avec goût. Tous ces objets étaient fondus par eux dans des moules en pierre ou en grès, dont on a retrouvé un grand nombre sur l’emplacement de la plupart des stations.
Leur poterie est d’une pâte fine. Les grandes dimensions de leurs vases et leur régularité indiquent l’emploi du tour à potier. Les surfaces en sont revêtues d’une ornementation symétrique de dessins, de lignes et de creux.
Les habitants des palafittes cultivaient deux espèces de blé, l’orge, le millet, les pois, les fèves, le lin dont on a retrouvé des tiges, des fragments d’étoffe et de filets. Ils récoltaient des pommes sauvages, coupées en quartiers et desséchées pour les conserver, et de grandes quantités de glands de chêne qui paraissent avoir été employés pour obtenir une liqueur fermentée.
A l’aide des ossements recueillis, on a pu déterminer les animaux domestiqués par eux: le chien, un cochon de petite espèce, la chèvre, le mouton à cornes droites, le bœuf, et, parmi les animaux sauvages, l’ours, le sanglier des marais, le cheval.
On présume que les populations de l’âge de bronze habitèrent pendant une longue période les rives de nos lacs; le très grand nombre d’objets de leur industrie, les restes des repas et les ossements d’animaux réunis dans nos musées en sont une preuve convaincante. Elles ne disparurent qu’à l’arrivée d’une race d’envahisseurs plus forte et munie d’armes plus puissantes. Des bords des lacs, une partie de ces tribus s’étaient successivement établies dans les vallées, mais leurs constructions primitives, placées sur les plateaux ou dans des positions faciles à défendre, ont disparu par suite des travaux de culture, ne laissant des traces que sur quelques points isolés où des objets en bronze ont été découverts à diverses époques.»
(Histoire de la Savoie.)
A. PERRIN.
II.
Passage d’Annibal en Savoie.
L’armée carthaginoise, venant d’Espagne, traverse le Rhône entre Orange et Valence. Pendant la traversée, qui est longue et dangereuse, un detachement de Carthaginois est envoyé en observation le long du Rhône. Il est surpris et détruit par les éclaireurs romains de l’armée de Cornélius Scipion, dont la mission était de surveiller Annibal. A cette nouvelle, l’armée punique hâte sa marche en remontant le cours du fleuve et, quatre jours après, elle arrive au confluent du Rhône et de l’Isère. Elle pénètre dans l’Ile, région fertile et bien peuplée, encadrée par ces deux fleuves.
C’est ici qu’Annibal prend contact avec les Allobroges. Ils le reçoivent non pas en ennemi, mais en arbitre. A ce moment, la nation allobroge était divisée en deux camps prêts à en venir aux mains, par suite d’un dissentiment survenu au sujet de l’élection d’un chef. Deux frères se disputaient le pouvoir. L’aîné sollicite l’appui d’Annibal qui appuie ses prétentions de toute l’autorité de son nom et de sa nombreuse armée. Par cette décision, Annibal s’attirait l’estime des vieillards, partisans de l’aîné, et, en même temps, se faisait un allié dont la généreuse reconnaissance lui fut très avantageuse. En effet, le nouveau chef non seulement lui offre des guides, mais il fournit à son armée les provisions de bouche nécessaires, renouvelle les vêtements et les chaussures des soldats et même leurs armes en grande partie hors d’usage. Comment Annibal poursuit-il sa route?
Nous sommes arrivés au point obscur du voyage d’Annibal qui a suscité tant de discussions. La difficulté du problème tient à diverses causes: l’opposition des récits de Polybe et de Tite-Live, l’absence de toute inscription, de tout monument pouvant servir à interpréter et à contrôler le texte de ces historiens, la fragilité des raisons tirées des traditions locales qui se retrouvent un peu partout dans les Alpes, enfin notre ignorance presque complète des routes gauloises, les seules qui existaient au temps d’Annibal.
Il faut cependant préférer le récit de Polybe l’Historien à celui de Tite-Live. Or, voici d’après Polybe la suite de l’itinéraire d’Annibal.
En quittant l’Ile, l’armée punique traverse avec sécurité la distance qui la sépare des Alpes. Les petits chefs allobroges de ces régions n’osent s’opposer à son passage par crainte des éléphants et de la cavalerie numide. Après une marche de dix jours le long d’un fleuve, les Carthaginois, arrivés aux Alpes, commencent à en gravir les premiers contreforts, mais au milieu des plus grandes difficultés. Car les chefs des tribus allobroges des Alpes occupaient toutes les hauteurs avec une nombreuse armée qui fait rouler des blocs de rocher sur l’armée punique impuissante à se défendre contre ces avalanches et contre ces ennemis toujours invisibles. Annibal réussit cependant à faire avancer son armée et à livrer aux assaillants un combat meurtrier. Neuf jours après avoir quitté la plaine, l’armée d’Annibal atteint le sommet des Alpes. Pour ranimer le courage de ses soldats éprouvés par tant de fatigues, le général carthaginois leur rappelle qu’au pied des Alpes ils vont trouver des ressources abondantes chez leurs amis et alliés, les Gaulois cisalpins.
D’après certains historiens, la route suivie ainsi par Annibal serait celle du cours de l’Isère, du Grésivaudan, de la Maurienne et du Mont-Cenis, ou la Tarentaise et le Petit-Saint-Bernard. D’autres prétendent qu’Annibal a remonté le Rhône jusqu’à sa source et a passé le Grand-Saint-Bernard.
D’après J. BURLET.
(La Savoie avant le christianisme.)