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LETTRE CCCLIV

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A M. HOPPNER

Ravenne, 31 janvier 1820.

«Vous vous serez donné beaucoup de peine pour le déménagement de mes meubles, mais Bologne est le lieu le plus près où l'on puisse s'en procurer, et j'ai été obligé d'en avoir pour les appartemens que je destinais à recevoir ici ma fille durant l'été. Les frais de transport seront au moins aussi grands; ainsi vous voyez que c'était par nécessité et non par choix. Ici on fait tout venir de Bologne, excepté quelques petits articles de Forli ou de Faënza.

»Si Scott est de retour, rappelez-moi, je vous prie, à son souvenir, et dites-lui que la paresse seule est cause que je ne lui ai pas répondu: – c'est une terrible entreprise que d'écrire une lettre. Le carnaval est ici moins bruyant, mais nous avons des bals et un théâtre. J'y ai mené Bankes, et il a, je crois, emporté une impression beaucoup plus favorable de la société de Ravenne que de celle de Venise: – rappelez-vous que je ne parle que de la société indigène.

»Je suis très-sérieusement en train d'apprendre à doubler un schall, et je réussirais jusqu'à me faire admirer, si je ne le doublais pas toujours dans le mauvais sens, et quelquefois je confonds et emporte deux, en sorte que je déconcerte tous les serventi8, laissant d'ailleurs au froid leurs servite9, jusqu'à ce que chacun rentre dans sa propriété. Mais c'est un pays terriblement moral, car vous ne devez pas regarder d'autre femme que celle de votre voisin. – Si vous allez à une porte plus loin, vous êtes décrié, et soupçonné de perfidie. Ainsi, une relazione10 ou amicizia11 semble être une affaire régulière de cinq à quinze ans, qui, s'il survient un veuvage, finit par un sposalizio12; et en même tems elle est soumise à tant de règles spéciales, qu'elle n'en vaut guère mieux. Un homme devient par le fait un objet de propriété féminine. – Ces dames ne laissent leurs serventi se marier que lorsqu'il y a vacance pour elles-mêmes. J'en connais deux exemples dans une seule famille.

Note 8: (retour) Le lecteur a déjà dû remarquer, et à son défaut nous remarquerons une fois pour toutes, que nous laissons dans notre traduction les expressions italiennes dont Lord Byron aimait à se servir.

Note 9: (retour) Femme qui a un cavaliere servente.

Note 10: (retour) Liaison.

Note 11: (retour) Amitié.

Note 12: (retour) Mariage. (Notes du Trad.)

»Hier soir il y eut une loterie ****13 après l'opéra; c'est une burlesque cérémonie. Bankes et moi nous prîmes des billets, et plaisantâmes ensemble fort gaîment. Il est allé à Florence. Mrs J*** doit vous avoir envoyé mon postscriptum; il n'y a pas eu d'occasion de vous attaquer en personne. Je n'interviens jamais dans les querelles particulières, – elle peut vous égratigner elle-même la figure.

Note 13: (retour) Il y a dans le texte anglais un mot illisible, parce qu'il se trouvait sous le cachet. (Note de Moore.)

»Le tems ici a été épouvantable, – plusieurs pieds de neige-un fiume14 a brisé un pont, et inondé Dieu sait combien de campi15; puis la pluie est venue, – et le dégel dure encore, – en sorte que mes chevaux de selle ont une sinécure jusqu'à ce que les chemins deviennent plus praticables. Pourquoi Léga a-t-il donné le bouc? Le sot. – Il faut que j'en reprenne possession.

Note 14: (retour) Fleuve.

Note 15: (retour) Champs. (Notes du Trad.)

»Voulez-vous payer Missiaglia et le Buffo Buffini de la Gran-Bretagna? J'ai reçu des nouvelles de Moore, qui est à Paris; je lui avais auparavant écrit à Londres, mais apparemment il n'a pas encore reçu ma lettre. Croyez-moi, etc.»

Œuvres complètes de lord Byron, Tome 12

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