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LA CHAINE
ОглавлениеIl semblerait qu’aussitôt son installation, le port d’Aliénor, comme nous l’avons appelé pour le distinguer du vieux port, fût flanqué, à son entrée, de deux tours. L’ancienneté de l’une d’elles, Saint-Nicolas, est légendaire; c’était, dans la croyance populaire, l’œuvre de Mélusine, cela veut dire pour nous, l’œuvre des comtes de Poitou. L’autre, la tour de la Chaîne, existait en 1209, si nous en croyons un vieux texte. L’ancienneté en est indiscutable si nous nous en référons à quelques sculptures utilisées lors de la reconstruction des tours, et qui peuvent appartenir au roman du XIIIe siècle. Quant à la reconstruction, elle remonterait pour la tour de la Chaîne de 1382 à 1390, et pour la tour Saint-Nicolas, quelquefois aussi appelée tour de la Chaîne, à l’année 1384. La Tour de la Chaîne était accompagnée, du côté du Perrot, d’une tourelle nommée la petite tour de la Chaîne.
Le nom de la Chaîne venait d’une chaîne fixée à la tour Saint-Nicolas, et qui laissait le goulet ouvert ou fermé, suivant qu’on la tendait ou la lâchait, au moyen d’un treuil placé dans une salle basse des tours du Perrot. L’ingénieur Masse a laissé un dessin très précis de cette installation au XVIIe siècle.
La dernière chaîne du goulet est conservée au Musée de la Rochelle (rue Gargoulleau). Sa grosseur était, à ces époques éloignées., un objet d’étonnement, et Rabelais en a conservé plaisamment le souvenir en narrant que c’était l’une d’elles qui servait à lier Pantagruel enfant:
«Craignant, Gargantua, qu’il se gastat, feit faire quatre grosses chaînes de fer pour le lier, et feit faire des arcs boutants à son berceau bien afustés. Et de ces chaînes, en avez une à La Rochelle, que l’on lève, au soir, entre les deux grosses tours du havre...»
Tous les ans, lors de la nomination des maires, on élisait parmi les pairs, trois prud’hommes que le maire répartissait entre les trois tours. Leurs attributions étaient définies. Ils étaient chargés tout à la fois d’empêcher de passer les navires qui n’avaient pas payé les droits de coutumes, de percevoir eux-mêmes certains droits, de faire désarmer les navires étrangers ou français et de faire démolir leurs châteaux (les bourgeois étaient dispensés de ce désarmement); de faire lever la chaîne et de la faire abaisser, à la fermeture ou à l’ouverture des portes.
Quant au désarmement, il se faisait généralement à la tour de la Lanterne, au moyen d’un instrument nommé garrot qui a laissé son nom à la tour.
ENTRÉE IDÉALE DU PORT, XVe SIÈCLE