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CHAP. V.

Table des matières

Prisonnier.

Pour parler de mon arrestation, il est nécessaire que je reprenne la chose de plus haut. On a vu, dans le chapitre précédent, que de peur d’être arrêté rue Poupée, je m’étais sauvé en Corse au sein de ma famille qui me reçut avec des marques de joie. Mes exploits leur étaient déjà connus, et ces bons paysans ne se lassaient pas d’entendre le recit des belles affaires que j’avais eues en France.

Après avoir passé deux mois au sein de ma famille, je partis de nouveau pour Paris. En passant par Lyon, j’eus le malheur de rencontrer quelques frères d’armes qui, au lieu de me laisser partir pour ma destination, avaient tous les jours une nouvelle fête, une nouvelle partie de plaisir à donner à celui qu’ils regardaient toujours comme leur héros-spadassin.

Un jour, un peu échauffé par tous les agréments que mes amis me procuraient, je fis une visite au vieux capitaine de gendarmerie et à sa fille, à qui j’avais donné, par ordre de son père, quelques leçons d’escrime. Je ne saurais, même aujourd’hui, après si longtemps, trouver des mots pour peindre la réception que le père et la fille me firent. Tous deux, en me voyant, se jetèrent dans mes bras avec des témoignages d’amitié et des caresses que je n’avais pas reçus de ma famille.

La fille surtout ne pouvait se lasser de me serrer dans ses bras. Et sur une observation que j’en fis, elle me répondit avec une énergie virile en présence de son père:

— Je veux vous embrasser; je ne vous embrasserai jamais autant que je vous aime. C’est mon père qui l’a voulu! Il est donc nécessaire que je vous embrasse et que je vous aime pour lui prouver que je suis contente de son ouvrage!

Lecteur, celui qui de vous eût résisté, me jette la pierre!.. Ces baisers, ces caresses d’une beauté de 18 ans se renouvelaient vingt fois par jour! Qui aurait résisté ?.. Pas même Joseph!.. S’il résista à la femme de Putiphar, — c’est qu’elle était vieille! Je suis certain qu’il n’aurait pas laissé son manteau chez Louise....

Quelques jours après nous succombâmes!.. Ce fut un jour, entr’autres, où elle fit le récit d’un voyage qu’elle avait fait avec son père au fort Calvuire, sur le terrain du duel.

— C’est mon père qui m’a dit: c’est ici où il a tué le premier, plus loin le second et là le troisième.

Et en disant ces mots, Louise me sauta au coup sans vouloir s’en détacher.... Hélas! trois fois hélas! après tant de fleurs, tant de roses! que d’épines!

Un mois après tant de joie, une femme que j’avais connue à Paris et qui me savait marié en Corse, me dénonça au commissaire de police Pellegrin. Celui-ci, pour se venger des antichambres que je lui faisais faire chez le capitaine, écrivit en Corse. Dès qu’il eut reçu la réponse, et malgré les prières de M. Meunier, il me fît arrêter et condamner à deux ans de prison — pour avoir, moi, homme marié, séduit et trompé une jeune fille sans expérience.

Grâce à la protection de M. Charles Abbatucci, je fus grâcié, trois mois après, et employé officieusement à l’Elysée, avec le général Piat, à l’organisation de la Société du 10 décembre — et au coup d’Etat — l’année suivante.

Mémoires de Griscelli, agent secret

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