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V
L’ARRESTATION

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Table des matières

Cependant Jacques n’était pas mort. Au moment où il se jetait au-devant du coup qui menaçait son père, il avait été frappé d’une balle à la poitrine, était tombé, puis l’avalanche des soldats avait passé sur lui. Il était resté sous les débris de la barricade, confondu parmi les blessés et les mourants. Il avait d’ailleurs perdu connaissance. Au bout de quelques heures, la fraîcheur de la nuit le tira de ce long évanouissement. Ce fut alors que, n’ayant pas les perceptions plus nettes que dans un rêve, il vit deux gardes nationaux qui se penchaient vers lui et le soulevaient dans leurs bras. Il crut, à sa grande surprise, reconnaître en eux ceux de ses camarades qu’il aimait le plus après Michel: Dornès et Frégard.

C’étaient eux, en effet. Les hardis jeunes gens après s’être procuré les uniformes qui leur permettaient de circuler librement, étaient revenus sur le lieu du combat. Ils pensaient que Jacques pouvait n’avoir point succombé à sa blessure. Ils le trouvèrent respirant encore, le déposèrent sur un brancard d’hôpital et se mirent en marche avec leur fardeau. Dornès, qui était étudiant en médecine, devait le recueillir chez lui.

Ils franchirent sans difficulté divers postes de soldats ou de gardes nationaux; mais, aux environs même du logis de Dornès, ils crurent s’apercevoir qu’ils étaient suivis. Un homme, qui rasait les murailles, était sur leurs traces. Ils continuèrent à marcher et arrivèrent à la porte de la maison. Là, sous peine qu’on ne les vît entrer, il fallait prendre un parti.

L’homme étant assez loin, ils firent mine de s’arrêter pour se reposer quelques instants. Puis Frégard, mettant sous son bras son sabre dégainé, marcha vers l’espion. Mais, dès que celui-ci le vit s’avancer, il s’en fut tranquillement du côté opposé à celui par où venait le jeune homme. Frégard, pensant alors qu’il s’était mépris, s’arrêta. L’inconnu fit halte également et reprit son attitude de curieux. Frégard, plus rapidement alors, s’achemina vers lui; l’homme, hâtant le pas, s’éloigna de nouveau. Ce fut bientôt une sorte de poursuite, mêlée de temps d’arrêt. Frégard ne s’aventurait qu’à regret à pourchasser le fuyard, mais, dès qu’il ralentissait le pas, l’homme suspendait aussi la célérité de sa course. Inquiet et irrité, l’étudiant voulut avoir raison de cet adversaire et se lança à fond de train. Or, soit que ses buffleteries de garde national et son sabre le gênassent, soit que l’inconnu eût des ailes aux talons, l’intervalle entre eux demeura le même.

Cependant Frégard, ayant de la sorte mené son homme assez loin, songea à rebrousser chemin. A peine l’eut-il fait que ce fut au tour de l’inconnu de le suivre à la piste, vite ou lentement, selon l’allure que prenait le jeune homme. Ce dernier, extrêmement dépité de l’aventure, mais ne pouvant toutefois s’empêcher d’en rire, se décida à prendre chasse pour tout de bon. S’il lui arrivait de se jeter dans une patrouille, il aurait la ressource assez plausible de se dire poursuivi par un gros d’insurgés. Il détala donc par trois ou quatre rues, croisa ses voies et pensa qu’il avait dérouté celui qu’il commençait à prendre pour son ombre, tant cette ombre fuyait avec un admirable sentiment de la distance, quand il allait au-devant d’elle et le suivait ardemment quand il tentait de la laisser derrière lui.

Frégard s’applaudit d’autant plus de sa manœuvre qu’il ne retrouva plus Dornès ni le blessé dans la rue, et qu’après un dernier regard autour de lui, il put se glisser, sans avoir été vu, par la porte entre-bâillée de la maison. Cette porte, dont chaque locataire avait la clef, ouvrait sur une allée qui aboutissait à l’escalier. C’était dans cette allée que Dornès, assez embarrassé, attendait le retour de son ami. Tous deux, soulevant Jacques dans leurs bras, le montèrent à la chambre en mansarde qu’occupait Dornès.

Là, ils l’étendirent sur le lit et purent examiner la blessure. Si grave qu’elle fût, elle ne parut pas mortelle au futur médecin.

Toutefois, après que tout danger immédiat eut disparu, la convalescence ne se fit que lentement. Le blessé avait tous les secours de la science et tout le dévouement de l’amitié; mais, dans cette étroite chambre, écrasée sous les toits, échauffée par un soleil d’été, il manquait d’air et d’espace. Avec des précautions, il eût pu descendre l’escalier, monter en voiture, être conduit au grand jardin du Luxembourg. Mais Dornès et Frégard n’osaient se hasarder à rien de pareil. Ils craignaient que la police ne fût à la recherche de Jacques, et, tout d’abord, un jeune homme, blessé se montrant en public après ces sinistres journées, devenait sus

pect.

Eux-mêmes n’étaient point encore tout à fait rassurés sur leur propre compte. Ils s’imaginaient parfois qu’on les épiait, et le souvenir de l’inconnu qui les avait si obstinément surveillés et suivis leur revenait à l’esprit.

Ils se contentaient donc de passer les soirées avec leur ami, laissant pénétrer dans la chambre, par la fenêtre ouverte, la fraîcheur de la nuit et la clarté des étoiles. Ils le tenaient au courant des événements politiques et lui faisaient espérer qu’il pourrait bientôt sortir sans danger. Ils lui avaient appris sinon la mort de Michel, dont ils n’étaient point certains, du moins sa disparition. Jacques les avait alors priés de s’informer auprès d’Huguenin s’il avait revu son fils. Le vieil ouvrier leur avait fait part de sa rencontre avec le colonel de Breslac et des incidents qui l’avaient accompagnée. Pour lui, c’était bien Jacques qui était mort, et Michel était peut-être vivant. Les jeunes gens ne l’avaient point détrompé. Ils n’avaient pas voulu lui enlever l’espérance qui lui restait, et, de plus, le décès constaté de Jacques était provisoirement une sûreté pour leur ami.

Cette certitude que Michel avait péri fut cruelle pour Jacques. Il l’aimait comme un frère, et il lui sembla d’abord que le moitié de sa vie l’abandonnait. En revanche, il se rappelait avec une sorte d’ivresse et avec la foi enthousiaste de la jeunesse qu’il avait sauvé son père. Il ne croyait pas possible que le ressentiment du colonel subsistât encore, que ce dévouement ne lui eût pas ouvert les yeux, n’eût pas mis à néant son injustice et ses doutes. Ne se sentait-il pas, lui, porté d’un irrésistible élan vers ce père qui l’avait méconnu, qu’il ne pouvait cesser d’aimer, pour qui il eût sacrifié mille existences! Il se rappelait le regard qu’il avait échangé avec lui au moment même où il était tombé. Certes, son père lui était rendu.

Cependant il hésitait à lui écrire. Il voulait aller le voir, se jeter dans ses bras, le bien convaincre qu’il existait. Ce n’était, selon lui, que de cœur à cœur et dans les bras l’un de l’autre qu’ils pourraient se ressaisir et oublier le passé.

A ce désir tout juvénile d’un éclat de tendresse et de pardon, il se mêlait aussi quelque prudence. la scène où son père s’était rencontré en face d’Huguenin, la constatation d’identité qu’on avait faite de lui, Jacques, avec le cadavre de Michel; son ensevelissement, où le colonel avait cru pleurer le fils que la fatalité tout d’abord, et la mort ensuite lui avaient enlevé, donnaient à réfléchira Jacques. On pouvait n’en point croire son écriture; il fallait, pour triompher de tout obstacle, sa présence vraie, toute vivante d’émotions et de souvenirs, qui terrassât les apparences mensongères et sinistre

Il n’était pas jusqu’à une plaisanterie de Dore et de Frégard qui n’inquiétât le jeune homme.

–Qui sait, lui avaient-ils dit, si ce n’est pas le chel et non Jacques, que nous avons là devant no Vous vous ressembliez tellement tous deux, que pères s’y méprendraient. Mais, en tout cas, que sois Jacques ou Michel, nous t’aimons pour deux.

Jacques attendait donc avec impatience son complet rétablissement. Déjà un peu moins faible, par les matinées un peu moins chaudes du mois de septembre, il se promenait par la chambre essayant ses forces. Comme il était, pendant la journée, livré à lui-même par l’absence de ses amis, il se hasardait, quand il était fatigué de travailler ou de lire, à la fenêtre de la mansarde. avait là tout un horizon de toits et de cheminée mais aussi un spectacle attrayant pour un jeune homme de son âge.

C’étaient des fenêtres toutes fleuries où se montraient des jeunes filles. Les unes travaillaient toute la journée, s’accompagnant de temps à autre de quelque chanson dont les notes arrivaient jusqu’à Jacques. D’autres n’étaient là que le matin de très bonne heure ou à la nuit tombante. La première chose dont elles s’occupassent était leur leurs; puis c’était Jacques, à qui elles avaient pris l’habitude de souhaiter le bonjour ou le bonsoir.

Ce garçon encore si pâle, dont les cheveux noirs et longs encadraient la physionomie spirituelle et mélancolique, les intéressait et les intriguait quelque peu. Comme tout se sait plus ou moins en un pareil voisinage, le bruit courut parmi elles que c’était un républicain blessé des journées de juin qui se cachait là et que la police le cherchait depuis longtemps. Il se cachait bien peu en tout cas. Elles lui auraient presque recommandé la prudence si elles eussent pensé qu’il courût le moindre risque d’être trahi; mais il n’avait rien, à coup sûr, à redouter d’aucune d’elles.

Jacques ne s’ennuyait plus. Il s’ennuya bientôt moins encore. Un beau jour, juste en face de sa mansarde, il aperçut une femme jeune et jolie, très élégante en ses simples vêtements et qui n’avait point l’air d’une ouvrière. Que faisait-elle là? Le plus souvent, elle lisait en regardant Jacques à la dérobée. Elle parut bientôt faire attention à lui, et l’accueillait d’un sourire quand il se montrait.

Jacques eut envie de pousser plus loin l’aventure et en chercha les moyens. Il s’amusait à combiner avec l’inconnue des signaux de télégraphie aérienne qu’elle comprenait à merveille. Une fois, cependant il fut tout surpris de découvrir derrière la jeune femme, sous le rideau même de la fenêtre, un homme qui se cachait et qui l’observait.

C’était si extraordinaire qu’il en fit part à ses amis. Il avouait, d’ailleurs, qu’il pouvait s’être trompé. Dornès et Frégard lui recommandèrent la prudence, et, s’alarmant en même temps, lui conseillèrent d’aller, dès le lendemain, voir son père. Il était maintenant assez fort pour sortir, et il valait mieux pour lui se placer sous la protection immédiate du colonel que de rester dans cette douteuse cachette.

Jacques leur promit de le faire, et, ne songeant plus guère à l’inconnue, ne se préoccupa plus que de son entrevue du lendemain avec M. de Breslac. Il y avait là de si graves intérêts pour le jeune homme qu’il en eut un peu de fièvre et demeura éveillé fort avant dans la nuit. Il venait à peine de s’endormir que l’on frappait à coups légers à sa porte. Il s’éveilla, ne répondit pas d’abord, et, bien qu’on fit silence au dehors, perçut confusément qu’il y avait plusieurs personnes sur le palier. Les coups étaient frappés avec plus d’autorité, et une voix retentit en disant:

–Au nom de la loi, ouvrez!

Le premier mouvement de Jacques fut de s’échapper par la fenêtre. Il y courut, mais, en l’ouvrant, vit un agent de police qui sauta dans la chambre. La porte, au même instant, était enfoncée, ou plutôt cédait à une forte pression. Plusieurs agents entrèrent, tandis que celui qui paraissait être leur chef, dit à Jacques:

–Vous êtes l’étudiant Michel Huguenin, insurgé de juin; je vous arrête.

–Je ne suis pas Michel, fit le jeune homme, je suis Jacques de Breslac. Mon père est colonel, et.

Vous direz tout cela au commissaire qui vous interrogera, fit l’agent. Habillez-vous et partons.

Jacques obéit, et, tout en s’habillant, se remit un peu. La situation, pour être inquiétante, n’avait rien de désespéré. Son père viendrait tout au moins à son appel, et la vérité se ferait. Il comptait sans les événements. Après avoir traversé Paris en fiacre, il ne fut pas même écroué, mais conduit directement à des voitures cellulaires qui partaient pour Brest. Il y en avait plusieurs où l’on faisait monter tout un convoi de déportés. Comme il réclamait, on lui montra son nom sur une liste. Michel Huguenin avait été condamné par contumace. Il réclamerait, du reste, une fois arrivé à Brest, car on n’avait, à Paris, ni le temps ni le pouvoir de l’écouter.

Il entendit aussi, par les gens qui étaient là, que le bâtiment qui devait les emporter à Cayenne était en rade du port de guerre et tout prêt à partir. Il fut poussé dans la voiture et renfermé dans un des étroits compartiments; puis le convoi s’ébranla et se mit à rouler.

Le voyage devait durer trois jours et trois nuits, et la première heure de ce lent supplice commençait.

Jacques, sur sa banquette de bois, manquant d’air, faible encore de sa blessure, en proie à toute l’horreur de cette subite détresse, ne savait plus où ressaisir sa pensée et se sentait devenir fou. Il eut une de ces impuissantes colères qui s’exhalent en efforts de tout genre, en cris et en pleurs. On le menaça de le bâillonner et il se tut.

Peu à peu, l’affaissement plus que le calme se fit en lui. Ses nerfs se détendirent, il pleura, et les larmes le soulagèrent. Il s’habitua par degrés au voyage, au roulement de la voiture, à la chaleur du jour et à la fraîcheur de la nuit. Il eut faim, et il mangea. Le sommeil le prit, et lui donna momentanément l’oubli. La colère, l’angoisse, le découragement le ressaisissaient bien quelquefois, mais l’indomptable espérance de la jeunesse s’y mêlait et les dominait. Il n’avait plus que la hâte d’arriver à Brest. Il était impossible que, là, on ne lui permît pas d’écrire, qu’il n’eût pas le temps de se réclamer du colonel. Le malheur qui l’avait frappé n’était pas sans remède.

Il était si faible lors de son arrivée à Brest, qu’il s’évanouit en descendant de la voiture cellulaire. On dut le porter à l’hôpital. Là, sa jeunesse, sa douceur, sa physionomie expressive et touchante lui attirèrent des sympathies. Le commissaire de l’hôpital, qui consentit à le recevoir et auquel il conta son histoire, lui promit de faire parvenir sa lettre, non point au colonel, ce qui ne se pouvait pas, mais hiérarchiquement à l’autorité compétente à Paris. Il l’apostillerait favorablement et la réponse ne serait pas plus de quelques jours à venir. D’ici là, Jacques serait gardé à l’hôpital et n’embarquerait pas. Il était, en outre, probable que la Cérès–c’était le nom du bâtiment réservé aux déportés appareillerait à la première heure. Il y avait donc une double chance pour que Jacques ne partît pas et fût sauvé.

Il l’espérait et cette espérance lui rendit le courage et les forces.

Au bout du deuxième jour, le commissaire de l’hôpital le fit demander. Au moment d’entrer dans le cabinet de ce fonctionnaire, Jacques était pâle et son cœur battait avec force. Du premier coup d’œil, il s’alarma de l’attitude de son protecteur. Elle était sévère, plus froide qu’attristée. Auprès du commissaire, il y avait un petit homme, remuant et chétif à la fois, les yeux cachés sous ses lunettes, et qui fit un pas au-devant de Jacques en le regardant avec une curiosité vive et scrutatrice.

–Monsieur, dit le commissaire à Jacques, la personne que vous voyez est venue tout exprès de Paris pour constater votre identité.

–Ah! fit seulement Jacques.

Et, de toute la franchise de ses traits, de toute la sincérité de son regard, comme s’il lui eût été possible de s’affirmer irrésistiblement ainsi, en se projetant hors de lui-même, il s’offrit à l’examen de l’inconnu.

–J’en étais sûr, fit alors celui-ci. Cet homme, monsieur le commissaire, n’est point Jacques de Breslac. Il s’appelle bien Michel Huguenin, et est le fils d’un forgeron qui a d’ailleurs reconnu, en même temps que le colonel de Breslac, le cadavre de Jacques. A la rigueur, ces jeunes gens se ressemblant, les deux pères, surtout en face d’un corps défiguré, ont pu se tromper; mais, moi qui connaissais Jacques et Michel, je ne me trompe pas. Je vous le répète, cet homme, qui n’a un intérêt que trop évident à se faire passer pour le fils du colonel, est le nommé Michel Huguenin, un insurgé des plus dangereux.

–Vous vous trompez, murmura Jacques d’une voix sourde, vous vous trompez.–Monsieur, continua-t-il en s’adressant au commissaire, qu’on me conduise à Paris, qu’on me mette en présence de mon père, de mon frère, de deux amis qui m’ont soigné, ils me reconnaîtront. Je vous jure que je ne mens pas.

Il y avait tant d’animation et de désespoir sur son visage, un tel accent de vérité dans ses paroles, que le commissaire semblait hésiter. Tout au moins contemplait-il le malheureux jeune homme avec une involontaire pitié.

Quant à l’agent envoyé de Paris, il demeurait tout à fait indifférent et froid. Il avait constaté l’identité du déporté, sa mission était accomplie. Il avait ouvert sa tabatière et humait lentement une prise de tabac.

–Monsieur le commissaire, dit-il, si vous ne pensez point que j’aie quelque chose de plus à faire ici, je vais me retirer. Je dois repartir pour Paris dans le plus bref delai et rendre compte de ce que vous aurez décidé.

–Ainsi, fit le commissaire, qui ne se déterminait point encore à trancher la question, vous n’avez aucune espèce de doute.

–Non, répondit l’agent en souriant, et il prolongea ce sourire, paraissant mettre ainsi le commissaire en demeure de prendre un parti.

–C’est bien! fit le commissaire. Et il sonna.

Un gardien entra.

Le commissaire lui montra Jacques.

–Vous allez, dit-il, conduire cet homme bord de la Cérès.–La Cérès part ce soir, continue t-il d’une voix plus basse en s’adressant à l’age

Mais Jacques l’avait entendu.

–Ah! monsieur, s’écria-t-il, vous non plus me croyez pas. J’avais mis tout mon espoir en vous et vous m’abandonnez.

–J’ai fait pour vous ce que je pouvais faire répondit le commissaire, je ne puis plus rien maintenant.–Allez, dit-il au gardien, et qu’on exécute mes ordres.–Quant à vous, monsieur, poursuivi il en se tournant vers l’agent, vous pouvez partir Vous direz au préfet de police que le prisonnier est en route pour Cayenne.

L’agent salua le commissaire et se retira.. Quand il eut refermé la porte, il put, dans la longueur du corridor, apercevoir Jacques que l’on emmenait Deux gardiens s’étaient joints au premier pour prevenir toute résistance de la part du déporte Toutefois l’infortuné Jacques ne songeait à rien de semblable. La tête basse, les bras ballants, la de marche chancelante, anéanti, il s’en allait comme un homme ivre. Il fût peut-être tombé si ses conducteurs ne l’eussent soutenu.

–Hé! hé! fit l’agent en le suivant des yeux e le ferai surveiller là-bas. Et si Jacques de Breslac revient jamais de Cayenne, il aura de la chance. En attendant, voilà de la besogne joliment faite. Le blé est en terre, il n’y a plus qu’à le laisser germer.

Et, rassujettissant sur son nez ses lunettes, qu’il avait légèrement soulevées pour mieux voir Jacques, voûtant ses épaules et prenant cependant une allure à la fois circonspecte et rapide, il sortit de l’hôpital.

La jeunesse d'un désespéré

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