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IV.
LE CORBEAU ET LES COLOMBES.

Table des matières

Certain Corbeau plus vain encore

Que son ancêtre, tant fameux,

Et fier, dit-on, ainsi que l’aigle dont l’aurore

Eclaire le vol glorieux,

Aperçut un matin une troupe candide

De Colombes et Pigeonneaux,

Qui s’élançaient de l’herbe humide,

Cherchant à dépasser le sommet des ormeaux;

Il se dit: A leurs faibles ailes

Procurons des forces nouvelles;

Pauvres êtres chéris, j’en ai vraiment pitié!

D’où vint cette étrange amitié,

Cet étonnant souci, cette rage d’instruire?

Il veut faire parler de lui... le pauvre sire!

Et par monts et par vaux,

Aussitôt cris confus pareils à mille trombes,

Lancent au loin l’annonce: «Accourez tourtereaux,

Et vous aussi douces colombes,

Devant ses bons amis, Corbeau veut vous dresser

A bien vous élancer sur les plus hautes crêtes,

Jusqu’aux régions des tempêtes,

Et même à vous balancer

Sous le soleil en tous parages,

Au dessus des clochers, dans les plus hauts nuages.

A dix heures, demain,

Venez sur le rocher voisin;

Vos excellentes mères,

De vos grands succès, seront fières».

Trompant l’espoir de ce corbeau bouillant

L’appel n’eut pas un succès bien brillant:

Quelques Colombes de tout âge,

Des Pigeons par trop curieux,

Seuls se laissèrent prendre à tout ce vain tapage:

Ils sont là tout anxieux

Ecarquillant leurs yeux

Devant de noirs docteurs, aux serres bien cruelles!

Et le Corbeau lorgnant parmi les colombelles

Galamment lisse ses ailes;

Puis démontrant son savoir

(Sempiternel dévidoir!)

Préside ses amis, trop experts oiseleurs

Pour n’être pas de terribles censeurs...

Enfin, Pigeons, faucons, buses chacun se flatte

D’obéir à sa voix... L’on part vers les hauteurs...

L’oiseau prêche d’exemple et... se casse la patte.

Tous de rire en concert du trop fougueux Corbeau,

Et plus d’un joli fauconneau,

Profitant de l’instant, s’élance

Sur les naïfs tendrons

Epars aux environs...

Quelle danse!

Jurant qu’à ces leçons on ne l’y verrait plus

Le Corbeau tout honteux s’échappe l’aile basse...

Et maint élève tombe en de grands becs crochus:

«La faim vient en mangeant,» maman Colombe y passe!..

Un rien peut égarer et même pervertir

Notre tendre moitié dans sa frêle jeunesse.

Que le savoir éléve, on peut en discourir,

Mais pour grand’dame, ou non, un parfum de simplesse

Doit mieux convenir;

Et ne vaut-il pas mieux pour une jeune fille

Apprendre la sagesse au sein de la famille,

Plutôt que de courir

A «l’école supérieure»

Où tout se défleure

A plaisir,

Où la candeur et même l’innocence

Dit-on, peuvent d’avance

Périr!

baissons donc aux yankes de la libre Amérique

Leur «haut enseignement» comme leur république;

Ce qu’on estime bon dans tel ou tel pays,

Dans l’application, perd souvent de son prix.


Fables et contes

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