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LE LOUP PLAIDANT CONTRE LE RENARD
PAR-DEVANT LE SINGE.
Un loup disoit que l’on l’avoit volé:
Un renard, son voisin, d’assez mauvaise vie,
Pour ce prétendu vol par lui fut appelé.
Devant le singe il fut plaidé,
Non point par avocats, mais par chaque partie.
Thémis n’avoit point travaillé,
De mémoire de singe, à fait plus embrouillé.
Le magistrat suoit en son lit de justice.
Après qu’on eut bien contesté,
Répliqué, crié, tempêté,
Le juge instruit de leur malice,
Leur dit: Je vous connois de longtemps, mes amis;
Et tous deux vous paîrez l’amende:
Car toi, loup, tu te plains, quoiqu’on ne t’ait rien pris;
Et toi, renard, as pris ce que l’on te demande.
Le juge prétendoit qu’à tort et à travers
On ne sauroit manquer, condamnant un pervers.
Quelques personnes de bon sens ont cru que l’impossibilité et la contradiction qui est dans le jugement de ce singe étoient une chose à censurer: mais je ne m’en suis servi qu’après Phèdre, et c’est en cela que consiste le bon mot, selon mon avis.