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B. LES PUBLICATIONS PERMISES
ОглавлениеNous venons de montrer les efforts faits par les Belges pour publier la vérité malgré tous les obstacles. Disons maintenant de quelle manière l'autorité occupante entend renseigner nos populations.
La documentation mise à notre disposition peut être classée en quatre groupes:
1° Les informations gratuites fournies par l'autorité allemande et par les particuliers;
2° Les imprimés d'origine allemande qu'on peut acheter en Belgique;
3° Les journaux et brochures, prétendument belges, soumis à la censure;
4° Les journaux hollandais tolérés par la censure.
1. Informations gratuites.
Il y a d'abord les affiches officielles, rédigées premièrement en allemand, français et flamand, mais depuis octobre 1914 en allemand, flamand et français. Elles sont censées nous tenir au courant des opérations militaires. Voici un article de La Vérité qui ne laisse aucun doute sur leur sincérité:
L'arsenal du mensonge.
Il est vraiment criminel de tromper la population belge en répandant de fausses nouvelles. LE GOUVERNEUR GÉNÉRAL.
Dans toute la machine militaire allemande, que les Alliés démolissent pièce par pièce, l'organe qui marche encore le mieux est l'arsenal du mensonge, établi à Berlin, avec succursale à Vienne.
Voulez-vous prendre sur le vif leur système d'informations truquées? Passez rue de la Chancellerie, près de Sainte-Gudule, à Bruxelles, ou bien rue des Paroissiens, à deux pas de là. C'est dans mon quartier; tous les jours je revois une vieille affiche qui fut placardée le 15 septembre et s'exprime en ces termes: «Berlin, 14 septembre (officiel).—Sur le théâtre de la guerre à l'ouest (France), ont lieu des opérations dont les détails ne peuvent encore être publiés et qui ont conduit à une bataille qui est favorable pour nous. Toutes les nouvelles répandues à ce sujet, par tous les moyens, par l'ennemi, et qui présentent la situation comme défavorable pour nous, sont fausses.» Or, cette bataille, engagée dix jours auparavant, est la grande victoire française de la Marne qui arrêta définitivement l'invasion18. Berlin savait alors la vérité et publiait le mensonge! A tout bulletin victorieux de Berlin, rappelons-nous la dépêche officielle du 14 septembre, où il y a autant de faussetés que de mots et où la partie adverse est accusée de répandre des mensonges. Toute la méthode germanique se trouve là!
18 [ Cette défaite, que les Allemands n'ont jamais déclarée, leur coûta, outre leurs morts et blessés, 65.000 prisonniers, 345 canons et plus de 3.000 véhicules avec 5.000 chevaux. La bataille dura du 6 au 12 septembre, entre 1.500.000 Allemands et 1.250.000 Français renforcés de 60.000 Anglais.]
Autre exemple: Si l'on se reporte aux informations que l'ennemi répandait dans la seconde moitié d'octobre, l'armée belge, décimée, disloquée, était en train de se reformer dans le nord de la France. Or, les Belges accomplissaient alors, de Nieuport à Dixmude, des exploits admirables: ils occupaient l'Yser, face à une armée supérieure en nombre d'hommes et de canons, combattaient jours et nuits et infligeaient aux Barbares une défaite décisive! Nous en racontons plus loin un épisode. Eh bien! il a fallu de longs mois pour que la vérité se fît sur ces journées glorieuses de notre campagne, dont les mensonges berlinois étaient parvenus à nous cacher le vif éclat!
Ce n'est pas tout. Récemment, l'affiche allemande nous manda la destruction d'un dirigeable italien. Mais ni l'affiche ni les journaux bruxellois sortant de Prusse ne soufflèrent mot de la destruction de deux zeppelins, l'un à Evere-lez-Bruxelles, l'autre à Saint-Amand-lez-Gand, pertes subies trois jours plus tôt!
Le 10 juin, Berlin avoua que ses troupes ont «abandonné» (hum!) les dernières maisons de Neuville, «qui est en possession des Français depuis le 9 mai». Or, cette conquête, accomplie depuis un mois plein, Berlin avait omis de nous en informer jusque-là! Au contraire, Berlin n'avait cessé de nous dire que l'offensive au nord d'Arras n'obtenait aucun succès!
Voilà quelques exemples typiques de la méthode d'information en usage à Berlin: 1) on dément une grande victoire des Français en les accusant de falsifier le vrai; 2) on déclare inexistante l'armée belge au moment même où elle fait une résistance invincible; 3) on passe sous silence des faits défavorables, dont des milliers de Belges furent les témoins réjouis; 4) on met un mois à avouer un échec, après l'avoir attribué à l'adversaire...
Il existe un «Bureau pour la diffusion des nouvelles allemandes à l'étranger», dont le siège se trouve à Dusseldorf. Il a installé chez nous des édicules où chacun peut lire le titre de l'officine: Büro zur Verbreitung von deutschen Nachrichten im Auslande. Avec un pareil organisme, et l'officielle Agence Wolff—sans oublier la presse à tout faire—nous sommes bourrés de mensonges et de notes tendancieuses...
Les concitoyens de Manneken-Pis crachent sur ces saletés—et la Belgique entière en fait autant.
(La Vérité, n° 6, p. 1, 21 juin 1915.)
Les renseignements relatifs aux combats de Champagne, en février 1915, sont du même acabit, ainsi que nous l'apprend l'extrait suivant d'un article de La Libre Belgique:
Les mensonges allemands.
Sur de grandes affiches bleues, placardées sur les murs de la ville, et relatives aux combats qui se sont livrés en Champagne, les Allemands avaient souligné, notamment, que deux faibles divisions rhénanes luttèrent contre six corps d'armée français. Or, voici ce que nous apprend le communiqué officiel français: «Les opérations militaires en Champagne ont eu pour résultat, depuis le 16 février, de nous faire avancer sur un front de 7 kilomètres et une profondeur de 2km 500.»
«L'ennemi employa quatre à cinq corps d'armée et demi. Dix mille cadavres ont été trouvés sur le champ de bataille, et nous avons fait deux mille prisonniers.»
D'après ce même communiqué, les deux faibles divisions rhénanes!!... étaient composées de 119 bataillons, 31 escadrons, 64 batteries de campagne et 20 batteries lourdes. Jusqu'au 3 mars, les Allemands ont encore amené 20 bataillons, parmi lesquels 6 bataillons de la Garde, 1 régiment d'artillerie de campagne et 2 batteries lourdes.
(La Libre Belgique, n° 9, mars 1915, p. 4, col. I.)
Où les nouvelles officielles allemandes atteignirent le summum de la véracité, ce fut lors des attaques d'octobre et novembre, 1914 dans la région d'Ypres. La Soupe se donna le plaisir de copier textuellement les affiches allemandes et de les publier19.
19 [ Voir Comment les Belges résistent..., p. 222, 223.]
Ces affiches officielles ne se contentent pas de nous combler de nouvelles authentiques sur les opérations militaires. Elles prennent également soin de nous informer de l'opinion publique à l'étranger. Que ces coupures de journaux sont sincères, il est à peine besoin de le dire.. Donnons-en un seul exemple, celui de la toute première affiche qui nous intéresse directement.
Jusqu'au 13 septembre 1914, les affiches placardées à Bruxelles n'avaient résumé que des articles de journaux au sujet de la France et de l'Angleterre. Le 14 septembre, nous pûmes lire deux extraits relatifs à notre pays:
Nouvelles publiées par le Gouvernement allemand.
Cologne, 12 septembre.
La Gazette de Cologne ayant reproduit dans son numéro de jeudi un article du Corriere della Sera d'après lequel le cardinal belge Mgr Mercier se serait prononcé défavorablement sur les Allemands, en les qualifiant de barbares, le cardinal von Hartmann, archevêque de Cologne, écrit à la Gazette de Cologne ce qui suit:
«Je m'empresse de vous dire, au sujet de l'article portant pour titre: «Le cardinal Mercier comme accusateur» (no. 1011 de la Gazette de Cologne) qu'au cours de sa présence récente à Rome, il a été interviewé par le correspondant du Corriere della Sera. Lorsque cette interview parut dans le journal, le cardinal a immédiatement contesté de la façon la plus énergique de s'être prononcé comme le Corriere le prétend. Aussi fit-il sur l'heure parvenir au ministre de Prusse près le Vatican, ainsi que par mon intermédiaire, à l'abbé von Stotzingen, une protestation qui devait être publiée dans l'Osservatore Romano.
«Je vous serais très obligé, Monsieur, de vouloir bien, dans l'intérêt de la vérité, publier cette déclaration dans la Gazette de Cologne.»
Francfort, 12 septembre.
La Gazette de Francfort apprend de Stockholm: La vérité au sujet de Louvain commence à percer même en Angleterre. Dans la Westminster Gazette, un ancien membre du Parlement écrit: «Lorsque la population urbaine tira tout d'un coup, de l'intérieur des maisons, sur les troupes allemandes, cet acte de folie devait nécessairement entraîner des conséquences justes. Le feld-maréchal Lord Roberts fit incendier pour des faits analogues des fermes de Boers.»
Le Gouvernement militaire allemand.
Voyons d'abord l'extrait daté de Cologne, disant que Mgr Mercier a accordé une interview à un rédacteur du Corriere della Sera. Cela est faux: ce n'est pas avec un rédacteur du Corriere della Sera.. journal à tendances libérales, que Mgr Mercier s'était entretenu à Rome, mais avec un collaborateur du Corriere d'Italia. qui est franchement catholique.
Plus ingénieusement falsifié est le second extrait. Un ancien membre du Parlement anglais aurait affirmé que la population de Louvain tira sur les troupes allemandes. Or, ce membre reproduit tout bonnement,—et il le dit de façon expresse,—les affirmations allemandes. La seule chose qu'il déclare lui-même c'est qu'une troupe allemande fut défaite près de Malines et qu'elle s'enfuit vers Louvain.
Voici l'article original de la Westminster Gazette ainsi que la traduction du deuxième alinéa. Nous croyons inutile de traduire aussi le premier: celui-ci répète un conte à dormir debout sur une prétendue menace d'agression de la part des Bruxellois. Nous qui n'avons pas quitté Bruxelles un instant pendant les mois d'août et de septembre 1914, pouvons certifier qu'il n'y a pas la moindre apparence de vérité dans cette histoire. D'ailleurs, vraie ou fausse, elle ne change rien à la falsification intentionnelle appliquée par la censure allemande au seul alinéa qui, soit résumé dans l'affiche. Ajoutons que les Allemands ne soufflent mot de la première partie de l'article, tant ils savent qu'ils se rendraient ridicules en racontant cela aux Bruxellois.
The Truth about Louvain.
To the Editor of the Westminster Gazette.
Sir,—In all British fairness some prominence might be given to the very narrow escape Brussels had from the terrible fate of Louvain, as described in the Daily Telegraph by its capable correspondent, Mr. Gerald Morgan. He states that, «accompanied by Richard Harding Davis», he was «permitted by the Germans to follow» their Army. A battle near Waterloo was expected, but it did not come off. Mr. Morgan and his friend returned to Brussels, and—I quote his exact words, as given in the Pall Mall Gazette—he «found the town on the verge of a turmoil. This was owing to General von Jarodzky's stupidity, and very nearly involved the town in the same rate which afterwards overwhelmed Louvain. He was left in the city with a brigade of 5.000 men. He moved 3.000 of these suddenly outside the city, and then as suddenly became alarmed for the safety of the remainder amongst so large a hostile population. He therefore marched the 3.000 camped outside hastily back again. It was reported that the Germans had been completely defeated in a great battle fought at Waterloo, and were fleeing in confusion. The inhabitants of Brussels wished to take up arms and finish off Jarodzky and any survivors, but fortunately the error was discovered in time». Now, this is exactly what the German generals declare to have happened at Louvain. We know as a certainty that a small German force was actually defeated outside Malines, and actually fled into Louvain on the very evening it was burned and devastated. The Germans allege that the townsfolk immediately started «to finish off the survivors», firing from the windows and house-tops. This insane act would rouse the devil in any soldiery, and may explain how, after a twenty-four hours' struggle, the unhappy town was a heap of ruins. Lord Roberts, the justest and gentlest of conquerors, most properly ordered widespread farm-burning in South Africa for the same offence. If you shoot without blame a soldier who tries to shoot you in the front, should you do less to an armed civilian who shoots you in the back?—Yours, etc.,
A LIBERAL Ex-M. P.
(Westminster Gazette, September 5th 1914.)
TRADUCTION.
Or, c'est exactement cela que les généraux allemands déclarent s'être passé à Louvain. Nous savons de façon certaine qu'une petite troupe allemande fut effectivement défaite en dehors de Malines, et qu'elle s'enfuit dans Louvain le soir même où la ville fut brûlée et dévastée. Les Allemands affirment que la population de la ville se mit immédiatement à «en finir avec les survivants», et qu'on tira des fenêtres et des toits. Cet acte de folie mettrait le diable au corps de toute troupe de soldats, et cela expliquerait comment, après un combat de vingt-quatre heures, la malheureuse ville n'était plus qu'un amas de ruines. Lord Roberts, le plus équitable et le plus doux des conquérants, ordonna à très juste titre l'incendie de nombreuses fermes en Afrique australe, pour le même délit. Si vous abattez à coups de fusil un soldat qui tente de vous tuer loyalement par devant, feriez-vous moins au civil armé qui vous tire un coup de fusil par derrière?
Votre, etc.
Un ancien membre libéral du Parlement.
On voit immédiatement que tout l'intérêt de l'affiche allemande s'effondre si le premier mot de la citation est inexact: Lorsque la population...
Or, le feuillet 3 du Bureau des deutschen Handelstages, Berlin, reçu par plusieurs maisons de commerce bruxelloises (voir plus loin, p. 43), reproduit aussi l'extrait de Frankfurter Zeitung; mais au lieu de dire: «Lorsque la population urbaine...», le feuillet de propagande dit: «Si la population de Louvain...», ce qui est conforme au texte anglais. Accès de sincérité digne d'être signalé pour son caractère exceptionnel.
La fausseté des affiches allemandes ne nous est en général démontrée que longtemps après leur publication. Mais une autre de leurs qualités, la niaiserie, nous frappe tout de suite. Voici, à titre d'exemple, la copie d'une affiche devant laquelle les Bruxellois s'égayaient le ll septembre 1914:
Nouvelles publiées par le Gouvernement allemand.
Berlin, 6 septembre.
L'ambassade d'Autriche-Hongrie publie la dépêche suivante qui lui a été transmise par le ministre des Affaires étrangères de Vienne: «L'information russe au sujet de la bataille de Lemberg et de la prise triomphale de cette ville est un mensonge. La ville ouverte de Lemberg a été abandonnée par nous, sans combat, pour des raisons stratégiques et humanitaires.»
Berlin, 8 septembre.
Le prince impérial, qui commandait en dernier lieu avec le grade de colonel une division de la Garde, a été promu par l'Empereur au grade de lieutenant-général.
Londres, 8 septembre (agence Reuter).
Une escadre allemande, composée de 2 croiseurs et 4 torpilleurs, a capturé 15 barques de pêcheurs anglaises, dans la mer du Nord, et conduit de nombreux prisonniers à Wilhelmshafen.
Le Times annonce que le croiseur allemand Dresden a fait couler un navire à charbon anglais sur la côte brésilienne. En outre, deux navires de transport anglais auraient touché à des mines.
D'après des informations viennoises, deux croiseurs anglais gravement endommagés se trouveraient dans le port d'Alexandrie; tous les deux montrent de fortes traces de coups de feu.
Rome, 8 septembre.
Le cardinal Mercier, archevêque de Malines, qui se trouvait ici, est reparti pour la Belgique avec un sauf-conduit en traversant les troupes allemandes. Cette protection a été obtenue pour le cardinal par le ministre de Prusse près le Vatican. Les informations contraires publiées par la presse française, anglaise et belge sont donc contraires à la vérité.
Breslau, 9 septembre.
Le commandant général du corps d'armée de Breslau publie ceci: «La landwehr silésienne a livré hier un combat victorieux à la Garde impériale du III° corps d'armée caucasien; nous avons fait prisonniers 17 officiers et 1.000 hommes.»
Vienne, 9 septembre (communication officielle).
On apprend au sujet des récents combats déjà relatés de l'armée autrichienne Dankl, contre laquelle l'ennemi (les Russes) avait amené par chemin de fer des renforts considérables, que l'armée commandée par le lieutenant-feld-maréchal Kestranck a repoussé avec de sanglantes pertes une forte attaque russe. A cette occasion, 600 nouveaux prisonniers ont été ramenés. A part cela, un calme relatif a régné hier sur le théâtre de la guerre russo-autrichien.
Le Gouvernement militaire allemand.
On reste rêveur devant les «raisons humanitaires» de l'armée autrichienne, qui se sont si éloquemment manifestées en Serbie, et devant l'activité de l'escadre allemande qui «capture quinze barques de pêche». Ce qui nous réjouit plus encore, ce fut d'apprendre que, malgré «les informations contraires publiées par la presse française, anglaise et belge», le cardinal Mercier est revenu de Rome «en traversant les troupes allemandes». Comme si nous n'avions pas tous lu le texte, imprimé et répandu en cachette, du sermon prononcé par le cardinal au Havre, pendant ce voyage de retour! Le Havre n'est pourtant pas sur le trajet de Rome à Malines, en traversant les lignes allemandes.
Enfin, ce qui nous amusait aussi dans cette affiche, c'est qu'elle ne soufflait mot de la bataille de la Marne, dont les péripéties nous étaient connues par les journaux français introduits en fraude.
Tant par ce qu'elle raconte que par ce qu'elle tait, cette affiche est un bon exemple des informations que l'autorité allemande fait placarder sur nos murs. Quelle opinion les gouvernants de l'Allemagne ont-ils donc de l'intelligence de leurs propres concitoyens, pour penser nous égarer par de semblables inepties.
Quand les affiches sortent du genre niais, c'est d'ordinaire pour tomber dans l'impudence, par exemple celle où von Hindenburg déclare que «plus la guerre est cruellement menée, moins elle le sera en réalité, parce que d'autant plus tôt elle sera finie» (20 novembre 1914), ou celle où M. Fox dit n'avoir pas remarqué de «cruauté inutile» (26 avril 1915):
Pfui!!!
Il faut rendre cette justice aux Allemands que certains commencent à avoir honte des atrocités commises par l'armée de la «Kultur». Ils se donnent une peine incroyable pour les nier ou les excuser. Ils sont vexés de voir que tout le monde, en dehors de leurs alliés, les massacreurs des Arméniens, les met au ban de la société. Eh quoi? Une «Kultur» si enviable, si vantée, si supérieure, produire des fruits pareils! Non, non, il ne faut pas se lasser de mentir et de démentir. Tous les témoignages tendant à innocenter les Allemands, si osés qu'ils soient, doivent être soigneusement recueillis et mis en lumière. Voici ce que le Freiherr von Bissing, gouverneur général de Belgique, qui est cependant au courant des cruautés des Gott mit Uns, a eu dernièrement l'impudence de faire placarder sur les murs de la capitale:
«Un certain Edward Fox, journaliste américain, homme sincère (oh! combien!), qui a parcouru les fronts à l'Est et à l'Ouest, n'a pu constater, en dépit de ses sérieuses recherches, un seul acte de cruauté inutile commis par les Allemands.»
Ce digne homme peut se vanter d'être un reporter de tout premier ordre! Par contre, il affirme que les Russes ont assassiné, violé, incendié partout, d'une façon impossible à décrire. Comment, un homme qui a de si bons yeux lorsqu'il s'agit des Russes, est-il aveugle comme une taupe lorsqu'il s'agit des Teutons? Par quel miracle d'illusion d'optique avons-nous pu croire, nous autres Belges, que nos villes ont été incendiées, nos fermes détruites, nos concitoyens fusillés, nos femmes, nos filles, nos religieuses outragées, nos maisons pillées? Nous aurons sans doute mal vu, car le Fox, qui est un animal clairvoyant, n'a rien constaté de semblable! Que le Freiherr von Bissing fasse placarder ses affiches menteuses en Allemagne ou dans les pays neutres, soit, il y trouvera peut-être quelque crédit; mais ici, en Belgique, à Visé, à Dinant, à Andenne, à Battice, à Tamines, à Termonde, à Aerschot, à Louvain et dans maints autres lieux, témoins des forfaits de la «Kultur»! Allons donc!
Le Freiherr s'en rend compte. Sachant bien qu'il ne lui est pas possible de nous faire prendre ses vessies pour des lanternes, il ajoute comme restrictif, au mot «cruautés», le mot «inutiles». Il y a donc des cruautés utiles. Dans son idée, ce mot sauve tout.—Vous vous plaignez d'atrocités? Elles étaient utiles, cher Monsieur. Les Gott mit Uns ont assassiné des hommes, des femmes, des vieillards inoffensifs: cruautés utiles! Ils ont outragé des femmes et des jeunes filles: cruautés utiles! Ils se sont emparés de civils innocents, les ont brutalement emmenés en captivité où ils ont été traités inhumainement: cruautés utiles! Que diriez-vous, Herr Baron von Bissing, si, en 1916, nos soldats allaient promener la torche en Allemagne? Appelleriez-vous ces représailles des «cruautés utiles»?
(La Libre Belgique, n° 21, mai 1915, p. 4, col. 1.)
D'autres affiches sont doublement instructives, en ce qu'elles nous révèlent l'existence de livres dont l'importation est prohibée: nous nous empressons alors de nous les procurer par fraude. Ainsi, celle du 21 juin 1915 nous annonçait l'apparition du livre La Guerre allemande et le Catholicisme:
Nouvelles publiées par le Gouvernement général allemand.
Cologne, 21 juin.
On mande à la Kölnische Volkszeitung:
Les cardinaux allemands von Bettinger (Munich) et von Hartmann (Cologne) ont adressé la dépêche suivante à l'Empereur: «Révoltés des diffamations dont la patrie allemande et sa glorieuse armée ont été l'objet dans le livre: La Guerre allemande et le Catholicisme, nous éprouvons le besoin d'exprimer à Votre Majesté la douloureuse indignation de tout l'épiscopat allemand. Nous ne manquerons pas d'adresser une plainte au Souverain Pontife.» L'archevêque de Cologne a reçu la réponse suivante: «Je vous remercie vivement, vous et le cardinal Bettinger, des sentiments d'indignation que vous m'avez exprimés au nom de l'épiscopat allemand au sujet des honteuses calomnies que certains écrivains répandent sur l'armée et le peuple allemands. Ces attaques, elles aussi, viennent se briser contre la force morale et la bonne conscience du peuple allemand défendant la juste cause, et elles retombent sur leurs auteurs.»
Le Gouvernement général en Belgique.
L'affiche fut commentée par La Libre Belgique:
Un livre.
Il a paru un livre qui s'appelle: La Guerre allemande et le Catholicisme.
Nous n'en savions rien.
C'est devant le mur que nous l'avons appris, vous savez le mur—chacun a le sien dans son quartier—où le Gouvernement militaire, vraiment trop bon, colle chaque matin des nouvelles savamment dosées à seule fin d'épater les Allemands avant tout, les Flamands ensuite et les Wallons enfin.
Donc, il a paru un livre qui a mis en colère deux kardinaux allemands et le Kaiser par-dessus le marché.
J'aurais donné gros pour avoir ce bouquin. Les librairies aussi voudraient l'avoir, mais ils ne l'ont pas, car nous vivons sous le régime délicieux d'une liberté inkomparable.
Eh! qui sait! peut-être que cette vieille Excellence de von Bissing songe à le mettre en vente, cet ouvrage qui a troublé Munich, Cologne et Berlin. Notre gouverneur fait installer, à ses frais évidemment, à tous les carrefours, dans tous les coins, sur toutes les places de Bruxelles des aubettes d'une élégance toute teutonne, où s'étalent des karicatures d'une finesse kolossale, des journaux austro-gothiques, des petits livres et des cartes postales illustrées à l'usage d'un public spécial qui a beaucoup de kulture et peu de marks.
Nous attendrons donc que le fameux livre nous arrive par la voie hiérarchique; car chacun sait que nous ne pouvons, nous, recevoir ni brochures ni journaux, pas même Ma Jeannette. Nous avons les Allemands, et ça doit nous suffire.
Mais ce livre! ce livre!
Qu'est-ce qu'il a bien pu dire pour mettre sens dessus dessous les cardinaux von Bettinger et von Hartmann qui se sont empressés de télégraphier à sa très luthérienne Majesté que ce livre les plongeait dans la désolation et qu'ils allaient se plaindre au Souverain Pontife?
Évidemment, les choses révélées doivent être énormes, énormes d'abord pour avoir réussi à faire rougir des Allemands, énormes surtout pour avoir pu indigner le sain des sains, le Kaiser.
Au fond, chacun le sait, l'Empereur se moque pas mal des catholiques et du catholicisme, puisque étant l'inkarnation de son dieu sur terre, il n'a pas de comptes à régler avec notre Dieu qu'il ignore. Mais, s'il se soucie peu des catholiques, en tant que catholiques, il s'en occupe en tant que chair à canon. Et comme il y en a pas mal de kilos dans l'Empire, ça compte.
Or, tous les Allemands, pêle-mêle, sont à la guerre. L'auteur du livre en question a des raisons de se plaindre de la façon dont cette soldatesque fait la guerre non pas au point de vue de la technique, mais au point de vue de la barbarie des procédés envers les catholiques. Si l'écrivain a jeté à tous les vents sa protestation, c'est qu'il a eu de sérieuses raisons de le faire.
Qu'a-t-il pu dire? Cherchons. Ne parlons pas de la France; nous avons, hélas! assez et trop à dire de ce qu'ont fait en Belgique les doux sujets du plus doux des souverains.
Systématiquement, ils ont essayé de démolir l'église métropolitaine de Saint-Rombaud à Malines. Ce n'est pas de leur faute, si nous n'avons pas à pleurer sur ses ruines. Une fois le coup fait, ils ont bien essayé de dire que c'étaient les Belges qui avaient bombardé la cathédrale (voyez cliché Reims). Ils ont depuis avoué leur bel exploit dans le n° 6 de l'Illustrirter Kriegskurier (encore un fameux spécimen de haute kulture, celui-là!). En effet ils y impriment ce charabia charmant: «Notre vue montre la cathédrale de la côté de Bruxelles, donc la côté laquelle a été exposée au bombardement des obus allemands. Comme on peut voir la cathédrale est restée presque intacte.»
Presque intacte! Est-ce regret? Est-ce ironie?
Hélas! elles ne sont pas presque intactes la collégiale de Saint-Pierre à Louvain, les nombreuses, les pauvres et jolies églises de nos campagnes. La stratégie n'exigeait pas leur disparition. Elles étaient si humbles... Elles furent cependant violées, souillées, spoliées, brûlées enfin par des flammes dont la violence était décuplée par les essences incendiaires que les soldats «à la conscience pure» lançaient sur les murailles. Qui dira ce que sont devenus les vases sacrés dont certains servirent à boire du champagne et d'autres à recevoir... hélas! n'insistons pas, car ce papier rougirait?
Qui dira ce que sont devenues les hosties consacrées, jetées sur le pavé foulées et piétinées, panis angelicus, non mittendus canibus? Qui dira le martyre des prêtres assassinés; de ce doux curé de Herent; des ecclésiastiques de Surice, Latour, Étalle, etc.; de ce tranquille scolastique de la Compagnie de Jésus, abattu parce qu'il avait écrit sur son agenda: «Nous revoyons les invasions des barbares»; de mon meilleur ami, un saint curé de campagne, mort des suites des brutalités que lui infligèrent des bourreaux puant l'alcool...
Et ces prêtres promenés nus devant leurs ouailles qui devaient, sous peine de mort, leur cracher au visage. Et ceux qu'on faisait galoper sur la place portant des harnachements de cheval...
Et dominant ce clergé martyr, notre vénérable et bien-aimé archevêque qu'on aurait bien voulu frapper au front; si on l'avait osé,—car tout est préméditation et calcul chez l'Allemand,—si on n'avait craint que la chute de ce vieillard n'ait un retentissement énorme dans les deux mondes...
Outrager Dieu, notre Dieu, qui est aussi le vôtre, Éminences de Munich et de Cologne, salir des temples, assassiner ses ministres, ce sont choses abominables, mais qui pâlissent presque, si j'ose dire, quand on songe avec quelle rage sadique les soudards ont violenté des femmes, d'humbles religieuses qui aujourd'hui lèvent vers le ciel, en baissant avec dégoût leurs yeux de vierges profanées, le fruit vivant, l'horrible preuve d'une bestialité qui déconcerte...
Est-ce de tout cela qu'ont rougi les cardinaux von Bettinger et von Hartmann? Est-ce de cela qu'ils vont se plaindre au Père commun des fidèles?
Ah! oui!
Ils font la roue devant Wilhelm II, I.R.!
Que veulent-ils donc? Qu'on mette à l'index le livre in odium auctoris?
Allons, un bon mouvement, Éminences.
Venez vous-mêmes, venez en Belgique, vous êtes chez vous. Les autos de la «Kommandantur» vous conduiront. Notre grand cardinal ira à pied. Vous daignerez bien l'attendre, n'est-il pas vrai, ce sage, ce saint, ce savant, ce patriote ardent, qu'un gratte-papier prussien, installé au ministère de la Justice, a osé appeler: un gamin!
Il vous mènera, pas à pas, là où il y eut des crimes sans nom, des stupres sans précédents, il vous dira des noms, des dates, il vous en dira tant et tant, et devant tant de témoins —lapides clamabunt!—qu'il vous faudra finir par baisser le front et que vous vous surprendrez à murmurer, les lèvres tremblantes, la prière que vous dites chaque matin au pied de l'autel:
Judica me, Deus, et discerne causam meam de gente non sancta ..ab homine iniquo et doloso erue me!
Jugez-moi, Seigneur, et ne confondez pas ma cause avec celle des impies, délivrez-moi de l'homme astucieux et injuste.
Hélas! vérité avant tout se traduit en allemand par Deutschland über Alles!
Si cependant vous vous décidiez à venir, Éminentissimes Seigneurs, ne mettez pas vos robes rouges, c'est inutile. Une noire, sous votre manteau, suffira. Quand vous aurez marché quelques heures, vos soutanes seront rouges, trempées du sang de nos martyrs...
Au fait, vous viendrez peut-être en grand uniforme, casque en tête, le revolver à la ceinture, comme vos aumôniers... C'est une idée. Mais alors, Mgr Mercier ne voudra pas marcher à vos côtés... On ne fait pas les enquêtes comme cela, chez nous.
FIDELIS.
(La Libre Belgique, n° 34, juillet 1915, p. 2, col. 2.)
Ils n'affichent pas seulement les produits de l'Agence Wolff. De temps en temps ils essaient d'abattre notre courage par des inventions personnelles.
Une calomnie.
Plusieurs milliers d'affichettes ont été placardées sur les murs de Bruxelles. Ces affichettes ont dû être imprimées en Allemagne, étant donné que les typos belges ne possèdent pas de caractères néo-gothiques du genre de celui qui a servi à l'impression.
En voici le texte:
Nous, mères et épouses belges, nous nous écrions: Assez de la tuerie, assez de sang innocent versé de nos maris, de nos fils, pour des nations étrangères. L'honneur belge est sauf. Nous, nous n'avons plus de larmes. Nous réclamons la paix ou l'armistice.
Au nom des femmes belges nous protestons. Pas une d'entre elles ne regrette les sacrifices qu'elle a faits. Celles qui pleurent, pleurent l'être cher disparu à jamais, mais à leurs larmes ne se mêle aucun honteux regret comme celui que voudrait leur prêter l'auteur de cette infâme affichette, aucun regret comme celui qu'il voudrait pouvoir glisser dans leur coeur. Non, les femmes belges savent que leurs époux, leurs fils et leurs fiancés ne se sont pas battus pour l'étranger. Le premier élan, le premier cri de tous les Belges a été celui-ci: «L'honneur le veut, nous devons opposer notre faiblesse à la force brutale du traître qui nous attaque, alors qu'il avait juré de nous protéger. Nous savons tenir un serment, nous, dût-il nous en coûter la vie.»
Mais, si à ce moment-là il était possible de se faire illusion, si l'on pouvait croire alors que seul l'honneur était en jeu et nous commandait d'héroïques sacrifices, comment peut-on maintenant encore parler de se «battre pour l'étranger», maintenant que tout le pays est envahi et que, sauf sur quelques arpents de terre, l'envahisseur barbare nous opprime et nous prive de toute liberté? Oui, nos soldats se battent pour leur pays, mais comme ce qui doublait leur force et leur courage aux premiers mois de la lutte c'était le sentiment de l'honneur à garder intact et de l'injustice à venger, ce qui les anime à l'heure actuelle c'est un sentiment aussi noble que celui-là et plus noble si possible que le patriotisme, c'est la conviction qu'ils servent, avec les peuples dont ils sont les Alliés, la cause sublime du Droit et de la Civilisation.
Répétons encore ce que nous avons déjà dit: il n'y a plus ni Belges, ni Français, ni Anglais, ni Russes, ni Serbes, ni Italiens; il n'y a plus que des Alliés. Les Belges qui se sont incorporés dans les contingents canadiens ou australiens, ceux qui sont au service de l'armée anglaise ou française, ceux qui travaillent dans les usines de munitions, ceux qui ont voulu prendre part à l'expédition dans les Dardanelles, l'ont bien compris. Ils ont compris que, sans ces alliés, il y a longtemps que notre pauvre pays eût été écrasé. Quant aux promesses faites par l'Allemagne dans son ultimatum, nul ne voudrait avoir la honte même d'y songer. On ne discute pas avec l'honneur; il commande, on obéit.
LIBER,
(La Libre Belgique, n° 35, juillet 1915, p. 3, col. 1.)
Craignant que les affiches ne suffisent pas à nous convaincre, l'Allemagne nous éclaire encore gratuitement de trois autres façons.
a) Le Gouvernement impérial fait distribuer des fascicules, en allemand, flamand et français, imprimés à Bruxelles sur les presses du Moniteur belge, entre autres: Conventions anglo-belges et le Discours du chancelier à la séance du Reichstag, le 2 décembre 1914.
b) Il n'y a pas que les publications officielles. Plusieurs organismes d'outre-Rhin éditent en plusieurs langues des feuillets de propagande qui sont glissés dans les lettres d'affaires. Les maisons belges ont surtout reçu des feuillets en français de Bureau des deutschen Handelstages, Berlin et de Kriegs-Ausschuss der deutschen Industrie, Berlin. Dans la plupart de ceux qui nous ont été envoyés pendant les douze premiers mois de la guerre, il était question de la violation de la neutralité belge et de l'incendie de Louvain. On voit tout de suite où le bât les blesse.
c) Enfin, il n'est pas un Belge ayant en Allemagne des relations de famille, ou simplement d'affaires, qui ne reçoive de nombreuses lettres destinées à apporter la conviction dans son esprit. Toutes ces missives répètent les mêmes choses, comme une leçon apprise; mais précisément afin d'effacer toute suspicion sur ce point, les correspondants ont soin d'indiquer qu'ils expriment leur sentiment personnel:
Leczyza, 8 janvier 1915.
Cher R...,
Quel changement depuis que nous nous sommes vus la dernière fois! Les Allemands en Belgique; moi, comme soldat, en Pologne! Comment te trouves-tu sous la domination allemande? J'espère que tu te plais sous le nouveau régime. Nous sommes certains de vaincre et que la Belgique restera allemande...
Cher R., écris-moi vite à l'adresse ci-dessus. Je me réjouirais tant de recevoir de bonnes nouvelles. Quel dommage que ton pauvre et beau pays ait tant souffert de la guerre! Louvain, Malines, Anvers, Bruges, ont tant souffert, dommage! Si la Belgique avait suivi l'exemple du Luxembourg! J'espère que tu vas bien ainsi que tes chers parents.
Lettre d'une nièce allemande à son oncle belge.
31 décembre 1914.
Cette année néfaste touche à sa fin et espérons que la nouvelle rétablira la paix; à toi aussi, à Jeanne et à tes petits enfants, mon mari et moi souhaitons toutes sortes de bonheur dans l'année à venir. Vous ne sauriez croire combien nous autres Allemands nous plaignons la pauvre Belgique, et les Belges verront bien aussi maintenant quelle faute ils ont commise en se rendant tributaires de l'Angleterre. Si la Belgique fût restée l'amie de l'Allemagne, il ne lui serait pas arrivé le moindre mal. Et le sort épouvantable qui lui est échu en partage, elle le doit à la collaboration brutale du peuple et même des femmes et des enfants à la guerre.
De cela nous avons nombre de preuves (nous-mêmes) par les récits des officiers et soldats allemands. Comme les Bruxellois sont sages en restant tranquilles. Nous espérons que cet état de choses restera tel.
Un soldat qui a été en quartier chez nous nous écrit de Staden, aux environs du canal de l'Yser, que le peuple belge ne désire pas le retour des Français ni des Anglais, car ceux-ci s'y sont conduits d'une façon indiciblement honteuse.
Ils ne reviendront pas, car l'Allemagne est invincible et vous ne sauriez vous figurer combien de réserves militaires nous avons encore. Dans tous les cas, le fait que par cupidité et par jalousie on tâche d'anéantir un peuple arrivé au comble de la civilisation et formant un État riche et florissant est sans précédent dans l'histoire.
Oui, l'Angleterre a réussi à indisposer contre nous les nations par la voie des journaux.
L'Angleterre nous dépasse en une chose seulement: elle sait mieux mentir.
Et quelle opinion mesquine se fait-elle des lecteurs de ses articles qui souvent ajoutent foi à tous ses mensonges et à toutes ses folies? A des lecteurs allemands on n'oserait pas raconter de pareilles sornettes.
Combien de fois notre magnifique Empereur n'a-t-il pas tendu à la France la main de la réconciliation, mais elle l'a repoussée par un sentiment de vengeance sotte et aveugle. Les Français et les Belges ne nous sont pas antipathiques. Pourquoi ne s'allient-ils pas à nous contre l'Angleterre cupide, rusée et perfide, qui veut subjuguer tout le monde? Nous ne comprenons pas encore qu'en France, on ne se rende pas compte de cela. C'est-à-dire qu'il y en a qui le comprennent, mais qui n'osent pas l'avouer par peur de je ne sais quoi.
Cher oncle, je te prie de m'excuser de m'être trop étendue en vous communiquant mon opinion sur la guerre, mais tout cela m'est personnel.
Nous sommes charmés que vous, Jeanne et les enfants se portent bien et que ceux-ci mettent tant de zèle à secourir les indigents.
L'Allemagne est encore loin de périr par la faim. Nous avons assez de pain, pommes de terre, etc., jusqu'à la prochaine récolte; notre stock de bétail est considérable.