Читать книгу Réflexions sur le meilleur gouvernement - L. de Zeller - Страница 4

Оглавление

CHAPITRE I.

Table des matières

DE LA RELIGION.

«L’on ne voit aucun état fondé, dit J.-J. Rousseau,

» qu’il n’ait la religion pour base.»

Avant de développer quelques réflexions sur le meilleur gouvernement, il est donc nécessaire de parler de la religion, qui doit lui servir d’appui.

Rien ici-bas ne peut nous satisfaire; quelque fortune que nous ayons, de quelque dignité que nous soyons revêtus, nous ne sommes jamais pleinement heureux, et les faveurs de la fortune, même les dons de l’intelligence et du génie, laissent toujours un grand vide à remplir.

C’est à cause de ce vide, c’est par le besoin qu’elle éprouve pour d’autres biens,

Que l’âme se détache de cette terre et se porte vers les cieux;

Qu’en contemplant l’univers elle s’élève jusqu’à son principe moteur, source de toute puissance comme de toute espérance;

Et qu’elle lui demande la possession d’un bonheur dont elle a le pressentiment, et qu’elle ne saurait rencontrer dans ce monde.

Cette puissance de la pensée qui nous élève jusqu’à Dieu, ce besoin d’une autre vie, pourquoi les avons-nous?

La philosophie répond:

«Dieu, en dotant l’homme de la pensée, et en donnant

» surtout à cette pensée la faculté de s’élever jusqu’à lui,

» a voulu que l’homme restât en relation avec son Créateur.

» D’un autre côté, de même que la société est nécessaire

» (nous développerons cette vérité au 7e chapitre), est » la conséquence du besoin social que Dieu a mis dans le » cœur de tous les hommes; de même une autre vie doit » être la conséquence du besoin que Dieu leur en a donné.»

Si Dieu ne réservait aux hommes, après leur mort, que le sont des brutes, il était inutile de leur donner une pensée qui les élevât si haut; un simple instinct, mesuré sur leurs besoins terrestres, aurait suffi pour conserver leur existence; et la pensée de l’homme, renfermée dans ce cercle étroit, n’aurait pas présenté l’inconséquence d’une relation sans but entre l’homme et la Divinité.

Enfin si le besoin que Dieu a placé dans le cœur de l’homme pour une autre demeure que celle-ci ne devait jamais être satisfait la Divinité se serait plu à tenter et tromper ses créatures: ce que l’on ne peut dire sans blasphème.

La philosophie, par ces discours et mille autres, enseigne bien une nouvelle vie, l’immortalité de l’âme; mais, par ses éternelles controverses, par ses argumentations sans fin, elle détruit elle-même notre créance dans ces vérités consolantes, dans ces vérités nécessaires, pour ne plus laisser dans l’esprit qu’un doute affreux, le supplice de l’anxiété.

C’est de ce doute, de cette anxiété que la religion vient nous tirer.

Elle présente les titres de sa mission, puis proclame positivement:

Qu’une autre vie succédera à celle-ci;

Que le bonheur vers lequel tous les hommes aspirent sera le prix de la vertu, la réalisation de ce bien-être dont ils sentent les prémices dans la pratique d’une bonne action, dans le témoignage d’une conscience pure;

Et que de longues peines seront aussi le prix du crime, le prix des transgressions à la vertu, aux inspirations de la conscience.

Ainsi, dans les élans de l’homme vers le ciel, la religion s’empare de lui et fait son bonheur en le conduisant au terme de ses vœux.

Elle prépare aussi le bonheur social en donnant à la morale, à toutes les vertus sociales leur véritable sanction, en consacrant tous les principes sur lesquels l’édifice social doit se reposer, et sans lesquels il ne saurait subsister.

Sans la religion sans la morale qu’elle sanctionne, combien les lois humaines seraient insuffisantes pour garantir la société !

La justice des hommes est seulement répressive des attentats contre la société ; pour qu’elle punisse, il faut des preuves, des témoins; et dans la solitude, ou par des trames ourdies avec adresse, l’homme dépravé peut impunément commettre tous les forfaits.

La religion est au contraire toute préventive; elle suit l’homme partout, jusque dans sa pensée, lui montre Dieu l’observant sans cesse; et, par ses exhortations ses conseils, ses menaces par cette justice divine qu’elle fait toujours planer sur lui et à laquelle il est impossible d’échapper, non seulement elle prévient les crimes, mais elle en extirpe même jusqu’aux pensées les plus secrètes.

Si nous envisageons les inégalités de rangs, de fortunes, qui existent et sont inévitables dans la société, nous les voyons exciter la jalousie l’avidité, la haine des dernières classes, provoquer des troubles, recéler des orages révolutionnaires. Pour les prévenir, la politique professe que le respect à l’autorité, aux propriétés, est dans l’intérêt de tous; que la conservation de l’ordre social conserve, protège tous les intérêts.

Combien la religion est plus puissante quand elle enseigne que cette vie n’est qu’un passage; que si les honneurs, les richesses procurent quelques avantages, ils rendent souvent les devoirs de la vie plus difficiles à remplir; et que les vrais biens sont dans la vertu, dans la voie qui conduit à l’éternité ! Quelle source de résignation!

Mais la religion ne se borne point à consoler les malheureux par la perspective d’un meilleur avenir; elle crée la charité, elle inspire aux riches des sentiments de bienfaisance, les porte à secourir les pauvres, à partager avec eux une partie de leur fortune. Tout en faisant respecter le droit de propriété, l’un des premiers fondements de l’ordre social, elle procure des secours effectifs aux indigents; elle présente aux pauvres comme aux riches le ciel pour prix de leur résignation ou de leurs sacrifices, c’est-à-dire qu’après les avoir rendus heureux par la pratique de la vertu, elle augmente ce bonheur du plaisir de l’espérance.

Je ne m’arrêterai pas davantage sur la religion, sur sa nécessité pour la politique; il me suffit d’avoir reconnu cette nécessité. Je sens trop d’ailleurs mon insuffisance pour parler dignement sur un tel sujet.

Réflexions sur le meilleur gouvernement

Подняться наверх