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LE COMITÉ

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Table des matières

Monsieur le Président, Vidame du Merlerault.—Messieurs, vous devinez tous l'objet de notre réunion. Il vient de se produire un fait bizarre, absolument inouï, dans les annales du parti. Nous avions décidé sagement et prudemment que nous ne décrions pas notre drapeau à l'élection partielle qui va avoir lieu, le temps et les fonds nous manquant absolument. Et voici qu'à la stupéfaction générale, un jeune inconnu s'empare de cet étendard fleurdelysé qui a été confié à notre garde, et va-t-en guerre sans demander notre avis, sans prendre notre signal.

Le vicomte d'Escal.—Il eût attendu longtemps.

Le Président.—Sans doute. Nous n'avons pas habitude de confier à des gens sortis on ne sait d'où la représentation de nos intérêts et de nos opinions.

Le vicomte d'Escal—Parbleu, vous ne les confiez à personne.

Le Président.—Mieux vaut une abstention digne qu'une action irréfléchie.

Le vicomte d'Escal.—Il y a cinquante ans que vous vous abstenez dignement.

Le Président.—Mon cher vicomte, vous m'interrompez avec une opiniâtreté inconcevable. Je vous cède la parole.

Le vicomte d'Escal.—Merci, je l'accepte. Messieurs, voici en deux mots mon sentiment. Certainement, M. de Mérigue est blâmable d'avoir agi sans nous consulter, mais, outre qu'il ignorait probablement notre existence...

Le Président.—Un royaliste ne peut pas ignorer...

Le vicomte d'Escal.—Pardon! voilà que c'est vous qui m'interrompez, maintenant... je continue: nous nous trouvons en présence d'un fait accompli.

Monsieur de Prunières.—Hélas! oui, malheureusement.

Le vicomte d'Escal.—Comment, hélas? et d'un fait crânement accompli.

Le chevalier de Sainte-Gauburge.—Qu'importe la crânerie?

Le vicomte d'Escal.—Je la préfère à l'abstention digne. Je poursuis... d'un fait crânement accompli par un homme jeune et vaillant.

Monsieur de Saint-Benest.—C'est précisément là qu'est le mal!

Monsieur de Prunières.—Il vaudrait mieux qu'il fût vieux et prudent.

Monsieur de Saint-Benest.—Le candidat nous a manqué de respect.

Le vicomte d'Escal.—Il ne vous connaît pas.

Le chevalier de Sainte-Gauburge.—C'est une circonstance aggravante.

Monsieur de Saint-Benest.—Et puis, enfin, qui est-il? Qu'est cela, Mérigue? Sommes-nous certains qu'il soit né, seulement?

Le vicomte d'Escal.—Aussi vrai que vous êtes morts, vous autres.

Le Président.—Ne faisons pas d'esprit, cher vicomte, ce n'est pas dans les habitudes de nos réunions.

Le vicomte d'Escal.—Veuillez m'excuser, Monsieur le Président, une fois n'est pas coutume.

Le Président.—Je constate, Messieurs, qu'à l'exception de l'honorable vicomte préopinant, nous sommes tous unanimes à déplorer cette malencontreuse candidature, mais enfin, coûte que coûte, il faut prendre une décision.

Monsieur de Saint-Benest.—Une décision, y pensez-vous? déjà!

Le Président.—Hélas! oui, malheureusement.

Monsieur de Prunières.—Quelle fâcheuse aventure!

Le chevalier de Sainte-Gauburge.—Oh! que c'est grave, oh! que c'est grave!

Le Président.—Je vous propose, en premier lieu, de voter un blâme à M. Jacques de Mérigue, pour avoir posé sa candidature en dehors de notre assentiment. Le vicomte d'Escal est lui-même de cet avis. Que ceux qui sont d'un sentiment contraire veuillent bien lever la main. Personne ne lève la main. Le comité royaliste inflige un blâme à M. Jacques de Mérigue.

Le vicomte d'Escal.—Soutiendrez-vous, oui ou non, sa candidature?

Le Président.—La question est double. D'abord nous ne pouvons pas lui donner un centime.

Le chevalier de Sainte-Gauburge.—Pour ça, jamais! Il ne manquerait plus que ça.

Monsieur de Prunières.—D'abord, il n'y a que 35 francs dans la caisse.

Monsieur de Saint-Benest.—Pardon! c'est moi qui suis trésorier, il y a tout juste un louis.

Le vicomte d'Escal.—Versé entre nos mains par le tapissier royaliste de la rue Vanneau.

Le Président.—Là n'est pas la question. Je ne crois même pas utile de mettre en discussion une subvention pécuniaire que nous ne pouvons ni ne voulons accorder.

Monsieur de Saint-Benest.—Ça lui apprendra à ne pas nous consulter.

Le Président.—Maintenant, Messieurs, il faut boire le vin qui est tiré. Je vous demande de bien vouloir vous résigner à donner votre appui au candidat. Je crois que vous y consentirez tous et j'ai l'honneur de prier notre cher secrétaire, le chevalier de Sainte-Gauburge, de vouloir bien insérer au procès-verbal que: 1º Le comité vote un blâme à M. Jacques de Mérigue (à l'unanimité!); 2° Le comité ne fournit à M. Jacques de Mérigue aucune subvention pécuniaire (à l'unanimité!); 3° Le comité appuie la candidature de M. de Mérigue (à l'unanimité!) Mes chers collègues, la séance est levée.


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