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III
LA LUNE DE MIEL

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Table des matières

Un certain écrivain réaliste a dit: «Le mariage est un échange de mauvaise humeur le jour et de mauvaise odeur la nuit.»

Cette définition doit avoir une variante pour les parfumeurs.

M. Pythagore Graffinard était donc au comble de ses vœux. Il avait pour nouvelle épouse l’unique descendante des Quatre-Vents. Il était heureux en pensant que Rose, sa fille aimée, trouverait en elle une belle-mère affectueuse et dévouée. Mais, hélas! en ces circonstances, le mari propose et la femme dispose. Le Deus ex machinà porte une crinoline. En hymen, souvent, le féminin est plus noble que le masculin. C’est ce qui devait avoir lieu dans le ménage Graffinard.

Pendant les premières semaines, madame Aurore Graffinard parut accepter avec bonheur sa position. En effet, elle devait mentalement remercier le ciel d’avoir opéré si subitement un changement dans sa vie. De simple employée de parfumerie, elle passait à la tête d’une des meilleures maisons de la partie.

M. Graffinard, de son côté, était au septième ciel! Il adorait sa belle Aurore, et si par devoir il n’avait pas été voir sa fille à la pension, il ne se serait jamais souvenu qu’il avait déjà été marié. Il était aux petits soins pour sa femme, il semblait rajeunir.

Le mariage produit cet effet-là, pendant un certain laps de temps, sur divers individus.

M. Pythagore Graffinard, en échange de vieux parchemins nobiliaires que mademoiselle des Quatre-Vents lui avait apportés en guise de dot, lui donnait tout ce qu’elle pouvait désirer. Il lui avait acheté des bijoux, des cachemires, des robes de soie, des dentelles. Chaque nouveau cadeau produisait un nouvel effet sur l’esprit de cette jeune femme, qui, grâce à ses trente ans, avait trouvé un mari comme on n’en trouve pas souvent à cet âge.

Mademoiselle Aurore avait en perspective de mourir vieille fille, derrière un comptoir, quand M. Graffïnard fit attention à elle. Il est vrai qu’elle avait une réputation sans tache et des qualités féminines incontestables.

Les époux Graffinard étaient donc bien heureux.–Monsieur s’occupait activement de son commerce et Madame trônait dans le magasin.

Chaque dimanche, ces heureux époux se rendaient aux environs de Paris, à la pension de la jeune Rose. Madame Graffinard paraissait porter beaucoup d’affection à cette enfant. Pythagore en était ravi. Il se disait: «Ma fille aura un appui pour faire ses premiers pas dans la vie. Aurore lui inculquera des principes pleins de noblesse et de grandeur.»

La petite fille semblait aussi porter beaucoup d’amitié à sa nouvelle maman. Elle était contente de lui être agréable. C’était avec joie qu’elle lui annonçait qu’elle avait été la première de sa classe. Et madame Aurore Graffinard l’embrassait avec effusion, en lui disant avec un bon sourire:

–Mon enfant, le travail est la chose la plus importante de la vie. Quand on a de l’intelligence, c’est un crime d’être ignorante.

M. Graffinard sentait son cœur palpiter quand il entendait sa femme émettre de pareils préceptes. Il la regardait avec admiration et il se disait:

«Elle se ressent de son origine. Bon sang ne peut mentir! Ce vieux sang noble qui coule dans ses veines est comme les vieux vins d’un bon cru, il a gagné avec les années. C’est trop de bonheur pour moi, simple parfumeur, d’avoir mis la main sur une femme aussi accomplie: belle, noble et bonne! Jamais toutes les vertus réunies ne seront à la hauteur de sa moindre qualité.»

Quelquefois, après la visite à la pension, M. Graffinard disait à sa tendre compagne:

–Si nous allions prendre un peu l’air de la campagne. Qu’en dites-vous, ma colombe?

Madame, qui n’était pas encore blasée de sa nouvelle position, répondait:

–Volontiers, mon chéri. J’aime assez la brise des bords de la Seine ou le parfum des grands bois... Les hautes futaies et les cépées touffues ont bien leur charme.

Et l’on prenait le chemin de fer.

Le couple Graffinard revenait à minuit de Marly ou de Bellevue. Monsieur était content, et madame était heureuse. Ils avaient beaucoup marché, le soleil les avait bien caressés de ses plus chauds rayons, ils avaient mangé une bonne matelotte, sous une tonnelle garnie de lierre, de chèvrefeuille ou de vigne vierge. Ils arrivaient rue Saint-Denis, harassés, mais satisfaits de l’emploi de leur dimanche.

Si cette vie simple et aimante avait duré, notre parfumeur aurait pu croire au paradis sur terre; mais son bonheur ne pouvait pas survivre à la troisième année de son mariage. Plusieurs causes réunies contribuèrent au refroidissement de son amour conjugal. Nous allons en énumérer quelques-unes.

Nous avons dit que madame Aurore Graffinard portait beaucoup d’affection à la jeune Rose. Cette tendresse pour l’enfant de son mari changea tout à coup lorsque M. Graffinard parla de retirer sa fille de pension. Elle entrait dans sa seizième année, elle était jolie, frêle, élancée; il était donc tout naturel que son père songeât à la faire venir près de lui pour lui donner les premières notions du monde et s’occuper de son avenir.

Madame Graffinard, qui depuis quelque temps s’était laissé mordre par le serpent de la coquetterie, vit avec une certaine jalousie le retour de l’enfant sous le toit paternel.

Elle comprenait qu’elle perdait tous ses avantages en ayant à côté d’elle, dans le magasin, une belle jeune fille au printemps de la vie, quand elle, quoique toujours charmante, s’inclinait vers l’automne. On pouvait prendre Rose pour sa propre fille, et cela la vieillissait encore plus.

Madame Graffinard, dans le trimestre qui pré céda la sortie de pension de Rose, s’escrima pour des sujets futiles contre son mari, afin d’essayer ses forces. L’idée lui vint alors de porter culotte, si cela était possible.

Pythagore Graffinard, confiant dans l’amitié et la reconnaissance de sa femme, car il se re gardait comme ayant beaucoup fait pour elle, était loin de se douter des idées qui se heur taient dans la cervelle d’Aurore et dont l’explosion devait apporter un nouveau changement dans sa manière de vivre.

Un beau matin, en se levant, madame Graffinard demanda une grâce à son mari: c’est que désormais il consentît à faire deux lits.

Le parfumeur fut très étonné de cette demande. Il expliqua à sa femme l’avantage de coucher ensemble, la satisfaction qu’on éprouvait de ne pas être séparés; et puis, il ne voyait pas pourquoi ils feraient lit à part, puisque depuis leur bénédiction nuptiale ils avaient lit commun.

Madame Aurore Graffinard allégua que, dans sa noble famille, il était bon genre que Monsieur eût sa chambre et que Madame eût la sienne; elle lui expliqua que les goûts changeaient avec l’âge... qu’elle ne pouvait plus supporter l’essence de Catalpista, dont Monsieur imprégnait tous ses vêtements, depuis son foulard de tête jusqu’à ses chaussettes.

M. Graffioard fit remarquer judicieusement à sa moitié que si, lui, il. usait de l’essence de Catalpista, elle, elle abusait du baume des Tropiques, dont elle aspergeait toute sa toilette de nuit, et que, par amour pour elle, il s’était acclimaté à son parfum de" prédilection.

Madame Graffinard, ayant toujours son idée fixe, alla jusqu’à prétendre que la combinaison de l’essence et du baume formait une odeur qui viciait l’air de la chambre. Elle prétendit que ses digestions devenaient difficiles et qu’elle attribuait son malaise à la perturbation produite dans l’atmosphère qu’elle respirait.

M. Pythagore, pour ramener la paix dans le ménage, proposa de renoncer à l’essence de Catalpista et de se mettre au baume des Tropiques, mais cette concession ne faisait pas le compte d’Aurore. Elle s’opposa à tout sacrifice de la part de son mari et persista à vouloir faire deux lits.

Coucher seule était pour elle un commencement de liberté; c’était un premier pas vers la conquête de son indépendance, à laquelle elle songeait plus que jamais.

M. Graffinard, après avoir lutté avec le courageux entêtement d’un héros, fut obligé de céder. Il se fit monter un lit dans une chambre contiguë à celle de sa femme. Il demanda à laisser ouverte la porte de communication. Madame y consentit d’abord, mais au bout de quelques jours, elle dit à son mari:

–Mon ami, vous ronflez comme une locomotive: vous m’empêchez de dormir.

–Vraiment ma louloute?

–Oui, Pythagore.

–Eh bien! vous m’étonnez, car je ne m’en suis jamais aperçu.

–Mais moi, je m’en aperçois et j’en souffre. En vérité!

–Votre organe respiratoire est si bruyant qu’il trouble mon sommeil. Je me réveille en sursaut et je crois toujours être à un enterrement. Il me semble entendre le son lugubre de l’ophicléide religieux conduisant un mort à sa dernière demeure; c’est horrible!

–J’en frémis moi-même...

–Aussi, faute de repos, je deviens affreuse. Le matin, en me mirant dans la glace, je me fais peur. J’ai les yeux battus jusqu’au menton, j’ai l’air d’une garde-malade. Voyez plutôt.

–Vous êtes charmante, au contraire, s’écria le parfumeur; c’est votre miroir qui vous abuse.

–Je sais ce que je dis, mon ami. Il faut que désormais vous ayez la bonté de fermer la porte de votre chambre. La nuit est faite pour dormir.

–Vous n’avez pas toujours dit cela.

–Les idées changent avec l’âge.

–Vous avez trente-trois ans.

–Trente-deux, s’il vous plaît, monsieur Graffinard.

–Trente-deux, soit! cet âge est encore le printemps pour une jolie femme.

–Sans doute. Mais aujourd’hui j’ai le sommeil plus léger, le système nerveux plus sensible, plus impressionnable... Allez-vous donc m’en faire un crime?

–Du tout. Un galant homme doit être indulgent pour les petits caprices de sa femme… surtout quand elle est jolie.

–C’est de moi que vous parlez?

–Assurément.

–Vous voulez railler?

–Allons, Aurore, avez-vous la prétention de me faire accroire que vous avez des rides comme une sexagénaire? Il suffit que mes yeux s’arrêtent sur vos friands attraits pour être convaincu du contraire. Je ne vous ai jamais vue si fraîche, si appétissante que ce matin!

Et M. Pythagore Graffinard fit un mouvement pour saisir la taille élancée de sa femme.

–Pythagore, pas d’enfantillage! dit-elle en le repoussant doucement. Vous vous croyez donc toujours dans la lune de miel?

–Éternellement, ma chère.

–Soyez donc sérieux, quand je vous parle sérieusement.

–Avec quel ton vous me dites cela!

–Si vous ne voulez pas être raisonnable, je ferai poser un verrou à la porte.

–Vous n’auriez pas cette cruauté?

–Alors, tenez compte de mes prières.

–Pour vous prouver ma bonne volonté, ma chère Louloute, je fermerai ma porte à partir de ce soir et je ne ronflerai plus...

–A la bonne heure!

–Mais, en attendant, je vous demanderai une grâce.

–Laquelle?

–Laissez-moi déposer un baiser sur vos blanches épaules.

M. Grafiinard serra avec ivresse sa femme contre son cœur et l’embrassa avec toute l’ardeur d’un jeune marié.

Il brûlait toujours, lui; mais elle?

Il ne s’apercevait pas, le pauvre parfumeur, du changement notable qui s’opérait chaque jour dans l’esprit de sa femme.–Où madame Graffinard voulait-elle en venir?

L’esquif matrimonial qui portait le couple Graffinard continua ainsi à louvoyer avec des intermittences de beau temps, de pluies, de ra fales, de coups de soleil et de coups d’épingle. Cela dura trois mois, c’est-à-dire jusqu’à la sortie de pension de mademoiselle Rose. Alors la tempête commença à gronder dans le lointain, et bientôt, de l’horizon, vint s’abattre sur la tête de l’infortuné Pythagore.

Les causes atmosphériques de cet ouragan n’échapperont pas à la sagacité du lecteur, comme dirait ce bon M. Prudhomme, quand il saura que madame Graffinard ne se serait pas jetée au feu pour son mari, ni pour la jeune demoiselle de quinze ans dont elle était la belle-mère. Sa coquetterie et ses prétentions à la jeunesse souffraient beaucoup de la présence de Rose à la maison.

Madame Graffinard recevait un coup de poignard dans le cœur chaque fois qu’une pratique lui disait, en voyant Rose assise à côté d’elle au comptoir:

–Madame, vous avez là une bien jolie fille.

La modestie et la timidité faisaient rougir Rose, et madame Graffinard marmottait quelques mots inintelligibles de réponse, en tremblant de dépit et pâlissant de colère.

Le placide Pythagore était loin de se douter des combats furieux que les pensées se livraient alors dans le cerveau de sa femme... Ah! si Honoré de Balzac avait passé par là et s’il était entré dans le magasin, il aurait lu sur la physionomie de la parfumeuse les révoltes comprimées de ses sentiments; mais Graffinard n’était pas Balzac.

En quelques semaines, Aurore sentit que sa position n’était tenable qu’à la condition de sacrifier l’automne de sa vie au printemps de mademoiselle Rose Graffinard (style de parfumeur).

L’une allait-elle consentir à renoncer au monde parce que l’autre y entrait?

Aurore avait horreur de son rôle de belle-mère. Elle eût donné deux doigts de sa jolie main pour que Rose fût laide et qu’elle eût consenti à se retirer dans un couvent; mais la belle enfant sentait en elle, sans pouvoir encore se l’expliquer, que la femme qui n’est pas abrutie dès l’enfance par des parents stupides ou fanatiques, doit tenir sa place honorablement ici-bas, et ne pas arriver à l’imbécillité par l’abus des oraisons. Les êtres humains n’ont pas été créés pour être abêtis par le carcere duro des Pater et des Ave.

Mademoiselle Graffinard ne se contentait pas d’être une jolie personne, elle était encore intelligente, aimable et spirituelle.

Toutes ces qualités augmentaient journellement l’aversion de la belle-mère. Elle se crut encore assez douée de charmes pour défendre la position qu’elle occupait parmi les beautés du quartier. Le voisinage incessant de Rose lui donnait un grand désavantage, mais à force de soins et d’habileté, elle entra résolument en lutte.

Elle devint plus coquette, elle fit l’aimable et resta quelques heures seulement au magasin par jour. Elle se disait malade et se donnait du repos. La coquetterie lui défendait la fatigue et la jalousie l’éloignait de Rose.

A force de bander un arc, la corde finit par se rompre; à force de souffrir, on arrive à l’émeute et à la révolte. Vainqueur, on peut vivre au moins; vaincu, on meurt, et tout est dit.

Aurore voulait s’affranchir de cette position pénible; incapable de se résigner, elle avait résolu de se révolter. Elle voulait se révolter, vaincre et vivre dans une complète indépendance. Elle sentait que le sang noble des Quatre-Vents qui coulait dans ses veines n’avait pas dégénéré sous le plafond roturier d’un magasin de parfumerie.

Peu à peu elle devint froide et réservée avec mademoiselle Rose.

Quand elle parlait de cette charmante enfant, elle disait: «La fille de mon mari.» Elle ne perdait aucune occasion de faire remarquer qu’elle n’était pour rien dans sa venue au monde.

M. Graffinard ne voyait rien de tout cela, et Rose supportait sans se plaindre la manière d’agir de sa coquette belle-mère.

Enfin, il arriva un jour que madame Graffinard devint plus nerveuse, plus irritable, plus sévère pour la pauvre jeune fille. Elle refusa nettement de paraître à côté d’elle au magasin.

Le parfumeur regarda cela comme un caprice de jolie femme et ne souffla mot.

De concessions en concessions de la part de ce débonnaire de mari, la belle Aurore parvint à imposer ses volontés dans la maison. Puis elle se refusa de sortir avec Rose. Quand l’enfant désirait aller au spectacle, Madame disait: «Dites à votre père de vous y conduire.» Pour la promenade, même réponse.

Le parfumeur regarda cela comme un caprice de jolie femme et ne souffla mot.

Avec le temps, madame Graffinard se fortifia dans son camp retranché. Elle dormait la grasse matinée, passait deux heures à sa toilette, puis, sortait seule à travers la ville. En prenant goût à la liberté, elle devint plus fière et plus coquette. Elle se mit à suivre les modes, les toilettes tapageuses devinrent ses préférées. Elle doubla ses dépenses et, insensiblement, elle arriva à ouvrir des comptes illimités chez sa modiste et chez sa couturière.

Le parfumeur regarda encore cela comme un caprice de jolie femme et ne souffla mot.

Oamour, quand tu nous tiens! La passion de Pythagore pour la dernière descendante des Quatre-Vents tournait en faiblesse. Et quand il voulut mettre un frein à ses fantaisies, il n’était plus temps.

Madame ne tenait aucun compte des observations de Monsieur. Elle avait réponse à tout. Elle finit de convaincre le malheureux boutiquier qu’il devait regarder comme un grand honneur qu’elle eût consenti à descendre jusqu’à lui; si quelqu’un devait souffrir de cette mésalliance, c’était elle. Graffinard voulut invoquer les principes de89, mais elle l’envoya promener avec ses idées révolutionnaires.

–Ah! c’est ainsi, madame, s’écria un jour Pythagore, dans un moment de colère, eh bien! je vous couperai les vivres.

–C’est ce que nous verrons.

–Vous le verrez.

–Je ferai des dettes et vous les payerez.

–Je ne les payerai pas.

–Je vous en défie.

Ce dernier mot était un coup de massue sur la tête de l’ex-galant parfumeur. Il tenait à son honorabilité, à son crédit; il redoutait l’esclandre, il recula, sachant par expérience que ce que femme veut, le mari doit le vouloir.

Et madame se radoucissant tout à coup, lui dit avec une doucereuse voix:

–Croyez-vous donc, mon ami, qu’il soit bien agréable pour une femme de mon âge de passer ma vie à côté de votre grande fille? Il faut que vous ayez bien peu de perspicacité pour ne pas avoir deviné cela? Que ne la mariez-vous?

–Marier Rose?

–Oui.

–Déjà!

–Elle entre dans sa seizième année.

–C’est juste. Mais il faut lui trouver un parti sortable.

–Vous le chercherez.

–Mettre la main sur un bon gendre n’est pas chose facile.

–Il y a bien un merle blanc au Jardin des Plantes.

–Ce n’est pas une raison.

–Si, ce qu’on veut, on le peut.

–Je ne demanderais pas mieux... mais...

–Assez, monsieur Pythagore. Et je vous promets qu’avant trois mois Rose sera mariée...

–A la bonne heure!

–Alors vous reprendrez cette amabilité qui va au cœur et vous me rendrez tout votre amour.

–Pour le moment ne parlons pas des absents, répondit Aurore.

–Toujours railleuse, toujours fine et piquante, murmura Graffinard avec un sourire forcé.

–En attendant, je veux faire un tour au Bois...

–Au Bois?

–Vous n’avez pas remarqué que, depuis quelques jours, je n’ai plus d’appétit...

–Allez, allez, Aurore de ma vie, si le grand air est nécessaire à votre santé. Pendant ce temps, je vais penser à notre futur gendre.

Madame fit toilette, et, se prélassant dans une riche calèche de louage, partit pour le bois de Vincennes. Cette promenade lui était sympathique, il y avait un feuillage ombreux, de timides oiseaux qui voletaient et de hardis jeunes officiers qui avaient des œillades assassines comme la pointe de leur épée.

Il est temps de l’avouer à nos lecteurs, la charmante Aurore des Quatre-Vents avait toujours eu un faible pour l’habit militaire.

Tous les goûts sont dans la nature, se disait le parfumeur Graffinard, et il regardait encore cela comme un caprice de jolie femme et ne soufflait mot.

Une amie dévouée

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