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LES BOULANGERS

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Autrefois le peuple n'était guère charitable pour les gens des métiers; ceux dont il pouvait le moins se passer, qui lui rendaient presque quotidiennement des services, et auxquels il devait donner souvent de l'argent, étaient de sa part l'objet d'imputations de toutes sortes. Exagérant les défauts ou les méfaits de quelques-uns, il faisait volontiers rejaillir sur la corporation entière des reproches qui n'étaient mérités que par un petit nombre. Les meuniers, les tailleurs et les boulangers, placés au premier rang des artisans auxquels chacun avait affaire dans la pratique ordinaire de la vie, étaient aussi très particulièrement visés par les allusions blessantes, les dictons malveillants, méprisants ou moqueurs. Un proverbe hollandais prétend que cent boulangers, cent meuniers et cent tailleurs font trois cents voleurs: il est vraisemblablement ancien: au moyen âge on disait que si l'on mettait ensemble trois personnes de métiers mal notés, la première qui en sortirait serait à coup sur un boulanger.

Marteleys de ffeverys Beluterye de boulengers Mensonges de procours, Desléutés de pledours, Tous ceuz ne valunt un denier,

assure un dicton du XIIIe siècle; plus tard Rabelais blasonne aussi «les meuniers qui sont ordinairement larrons et les boulangers qui ne valent guère mieux».

En Angleterre, on nommait a baker's dozen, le nombre treize, que le vulgaire avait longtemps appelé la douzaine du diable; quand le diable eut fait son temps, on remplaça son nom par celui du boulanger, et le nombre treize devint la douzaine du boulanger.

Lorsque l'imprimerie commença à être répandue, on vit paraître des pamphlets en vers et en prose qui se font l'écho du mécontentement populaire, et traitent assez durement la profession. On a réimprimé de nos jours deux opuscules dont le titre indique le sujet et les tendances peu bienveillantes: La plainte du Commun contre les boulangers et ces brouillons taverniers et autres avec la désespérance des usuriers; la Complainte du commun peuple à rencontre des boulangers qui font du petit pain, et des taverniers qui brouillent le bon vin, lesquelz seront damnez au grand diable s'ils ne s'amendent. La «Farce du Savetier» formulait la même accusation:

AUDIN, savetier.

Je me plains fort des boulenjers

Qui font si petit pain.

Légendes et curiosités des métiers

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