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Paul d’Ivoi
LE CANON DU SOMMEIL
PREMIÈRE PARTIE. LES JOYEUX TRÉPASSÉS
XII. SOURIRES D’ÂMES

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Le silence le plus absolu dura pendant environ une demi-heure.

Je regardais ma compagne à la dérobée. Elle paraissait avoir oublié ma présence.

Le visage immobile, les yeux fixes, on eût dit qu’elle suivait en dehors d’elle-même une absorbante et douloureuse pensée.

Quel orage grondait, sous ce masque que n’agitait aucun frémissement. Oh, je ne doutais pas; elle songeait aux paroles que nous avions échangées tout à l’heure, à ces circonstances inconnues, qui la rivaient irrémédiablement à X. 323, à l’espionnage; à ces circonstances que j’avais pour ainsi dire promis de considérer comme quantités négligeables.

Qu’était donc son secret, pour qu’après mon affirmation, elle ne crût pas encore à la possibilité de ce que j’avais souhaité lui donner à entendre.

Elle me connaissait pourtant. J’avais l’intime conviction qu’elle me connaissait infiniment mieux que je ne la connaissais elle-même. Elle devait par conséquent ajouter foi entière à mon engagement. Dans le monde où je fréquente, on ne me demande jamais un écrit. On dit: la parole de Max Trelam est mieux qu’une signature, car certains contestent leur signature; lui ne conteste jamais la parole donnée. Je suis fier de cela, je l’avoue; car cette confiance méritée me rehausse à mes propres yeux et surtout elle me démontre que j’ai tenu l’ultime promesse faite à ma mère mourante, à ma chère jolie petite maman qui repose dans le cimetière de Twickenham, sous la stèle surmontée d’une urne funéraire qui marque le rendez-vous final où, Liddy Trelam rejoignit mon père Ralph Trelam, où je les rejoindrai moi-même un jour, et où je pense, en dépit des mauvais sceptiques destructeurs d’espoirs qu’ils ne remplacent par rien d’équivalent, où je crois que toute la famille sera unie, ainsi qu’au tennis où j’étais tout petit, entre mes chers regrettés, dans notre gentil cottage de Carlton-Bills.

Comme mon affection ouvre des parenthèses! j’avais commencé à parler de ma chère blonde, et douce et aimante maman, pour rappeler que nos dernières paroles, avant l’inévitable séparation, avaient été celles-ci:

– Max, mon chéri, je recommande. Soyez toujours droit, pour réjouir, chez Celui qui Est, votre père et votre mère qu’il rappelle à Lui.

– Je serai droit, mère aimée. Votre Max sera ainsi.

Et j’ai été cela. Et quand je séjourne à Londres, si pressé de besogne que je sois, je ne manque pas, dans chaque huitaine, de faire visite à mes morts inoubliés, dans leur résidence de Twickenham. Et j’ai la sensation très nette, très bonne, qu’ils ne sont pas loin de moi.

Le canon du sommeil

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