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CHAPITRE PREMIER.
DES PLUS ANCIENS MONUMENTS DE LA PEINTURE.

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Table des matières

Si l'expérience démontrait qu'après des tempêtes réitérées qui, à diverses époques, ont changé en désert la face d'un vaste terrain, il est une partie dans laquelle est toujours revenue fraîche et vigoureuse une végétation spontanée, tandis que les autres sont demeurées stériles, malgré toutes les peines du cultivateur, il faudrait avouer que ce sol est privilégié de la nature.

Les nations les plus célèbres ont une époque brillante. L'Italie en a trois. La Grèce vante l'âge de Périclès, la France le siècle de Louis XIV.

L'Italie a la gloire de l'antique Étrurie, qui, avant la Grèce, cultiva les arts et la sagesse, l'âge d'Auguste, et enfin le siècle de Léon X, qui a civilisé l'Europe.

Les Romains, trop occupés de leur ambition, ne furent pas artistes; ils eurent des statues, parce que cela convient à l'homme riche. Aux premiers malheurs de l'Empire, les arts tombèrent. Constantin faisant relever un temple ancien, ses architectes placèrent les colonnes à l'envers. Vinrent les Barbares, ensuite les papes. Saint Grégoire le Grand brûla les manuscrits des classiques, voulut détruire Cicéron, fit briser et jeter dans le Tibre les statues, comme idoles, ou du moins images de héros païens[61]. Arrivèrent les siècles neuvième, dixième et onzième, de la plus ténébreuse ignorance.

Mais comme, durant le triste hiver qui détruit les familles brillantes des insectes, les germes féconds qui doivent les reproduire se cachent sous terre et attendent pour naître le souffle réchauffant du printemps, ainsi, aux premiers regards de la liberté, l'Italie se réveilla; et cette terre du génie enfanta de nouveaux grands hommes.

Elle a eu des peintres même dans les siècles les plus barbares du moyen âge. Voyez à Rome les portraits des papes que saint Léon fit peindre à fresque au cinquième siècle dans l'église de Saint-Paul. L'église de Saint-Urbain, aussi à Rome, est un autre monument de ces temps reculés. Il est encore possible de distinguer sur les murs quelques figures qui représentent des scènes prises dans l'Évangile, dans la légende de saint Urbain et dans celle de sainte Cécile.

Comme on ne trouve rien dans cet ouvrage qui rappelle la manière des peintres qui, à cette époque, florissaient à Constantinople, qu'en particulier les têtes et les draperies sont traitées d'une façon différente, il est naturel de l'attribuer au pinceau italien. On y lit la date de 1011.

Pesaro, Aquilée, Orvietto, Fiesole, gardent des monuments du même genre et de la même époque. Mais on ne peut prendre aux artistes de ces premiers siècles qu'un intérêt historique. Pour trouver quelque plaisir devant leurs ouvrages, il faut aimer déjà depuis longtemps ceux des Corrége et des Raphaël, et pouvoir distinguer dans ces peintres gothiques les premiers pas que fit l'esprit humain vers l'art charmant que nous aimons. Nous ne pouvons tout à fait les passer sous silence; ils s'écrieraient avec le grand poëte, leur contemporain:

Non v'accorgete voi che noi siam vermi

Nati a formar l'angelica farfalla?

Le Dante.

Vers l'an 828, les Vénitiens, fiers de posséder les reliques de saint Marc, qu'ils avaient enlevées à l'Égypte, voulurent élever sous son nom une église magnifique. Elle brûla en 970, fut rebâtie, et enfin ornée de mosaïques vers 1071[62]. Ces mosaïques furent exécutées par des Grecs de Constantinople.

Ces peintres, dont les ouvrages exécrables vivent encore, servirent de modèles aux ouvriers italiens qui faisaient des madones pour les fidèles, qui les faisaient toutes sur le même patron, et ne représentaient la nature que pour la défigurer. On peut, si l'on veut, dater de cette époque la renaissance de la peinture; mais l'art ne s'éleva pas au-dessus d'un simple mécanisme[63].

[61] Jean de Salisbury, Léon d'Orvietto, Saint-Antonin, Louis II, roi de France; Lettres de saint Grégoire lui-même sur Job.

[62] On lit dans l'intérieur de ce monument singulier:

Historiis, auro, forma, specie tabularum,

Hoc templum Marci fore dic decus ecclesiarum.

La beauté des caractères place cette inscription au onzième siècle.

[63] Le soleil de la civilisation brillait alors à Bagdad, à la cour de calife Moctadar. Lorsqu'il reçut, en 917, une ambassade de Constantinople, on vit s'élever au milieu d'un de ces salons resplendissants de pierreries dont les contes arabes nous ont conservé l'image, un arbre d'or et d'argent. Après avoir laissé le temps d'admirer le naturel de son feuillage, il s'ouvrit de lui-même pour se diviser en douze rameaux. A l'instant, des oiseaux de toutes les sortes allèrent se percher sur ses branches; ils étaient d'or ou d'argent, selon la couleur de leur plumage, avec des yeux de diamants; et chacun faisait entendre le chant qui lui est propre.

Histoire de la peinture en Italie

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