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L'OR, LE POUVOIR, LA RENOMMÉE, L'AMOUR

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Après une spirituelle causerie avec la princesse de Metternich, où elle lui prouva que les femmes ne se masquaient que pour se démasquer le coeur, le duc de Parisis rencontra deux de ses amis, qui n'avaient pris, pour cette folie carnavalesque, que le petit manteau vénitien.

C'était Rodolphe de Villeroy, attendant comme lui depuis longtemps sa nomination de ministre plénipotentiaire; c'était le vicomte de Miravault, qui avait jeté l'ambition aux orties pour devenir riche: homme de son temps, qui déifiait l'or, parce que l'or déifie tout. «Ah! bonjour, mon cher Faust, tu cherches la science? Tu te rappelles le vers: Faust cherchait la science, il trouva Marguerite.—Moi, je cherche Marguerite. Sais-tu où elle est passée?—Elle passe son temps à dire qu'elle aime beaucoup, comme toutes les marguerites.—Non. La mienne dit qu'elle n'aime pas du tout.»

Octave s'empara d'un divan pour lui et ses amis.—«Asseyons-nous là, c'est le bon endroit. Les femmes vous marchent sur les pieds, mais les femmes sont si légères!—As-tu remarqué, dit M. de Villeroy au vicomte de Miravault, que Parisis ne trahit ras sa destinée? Il est né pour faire le malheur de toutes les femmes.—Excepté de la sienne, quand il en prendra une, ou quand il se laissera prendre.—Ne craignez rien, dit Octave; le piège à loup n'est pas encore tendu.—Prends garde, il y a des pièges à loup ici.—Et toi, Gaston, dit M. de Parisis, toi non plus, tu ne trahis pas ta destinée. Tu es si diplomate que tu n'en as pas l'air.—La diplomatie n'est qu'un chemin, ce n'est pas une carrière. Le vrai but, mon cher, c'est le pouvoir. Tu verras, quand je serai ministre,—non pas ministre à Rio ou à Tonkin, mais ministre des affaires étrangères,—tu verras si je trahis ma destinée qui est de gouverner les hommes!—Gouverner les femmes! dit Parisis! comme s'il fût convaincu de sa mission.—Vous êtes deux grands enfants, dit le vicomte de Miravault en montrant un napoléon: voilà la vraie royauté. Quand j'aurai sept ou huit cent mille de ces soldats-là, rangés en bataille, je serai maître du monde, maître de vos consciences, maître de vos femmes. Et moi, je ne tomberai pas du pouvoir, je ne verrai pas fuir les courtisans.—Vous poursuivez chacun une chimère, dit Parisis. Moi j'étreins la mienne.—Oui, mais toi tu te réveilleras un matin traînant la patte vers les Invalides de l'amour; car tu n'auras pas la suprême consolation d'être foudroyé au souper du commandeur. —C'est singulier, dit M. de Villeroy, nous sommes peut-être ici, après tout, les trois hommes les plus sérieux de cette fête: car nous avons tous les trois notre théorie et notre volonté. Moi, je m'appelle le Pouvoir.—Parce que tu n'es rien.—Toi, dit Miravault à Octave, tu t'appelles l'Amour, parce que tu l'as tué.—Toi, tu t'appelles l'Argent, parce que tu n'en as pas.»

Un homme déguisé en diable à quatre écoutait aux portes. «Vous oubliez un ami qui s'appelle la Gloire,—La Gloire, dit Octave, ne vaut pas le diable.—C'est le diable à quatre, dit M. de Miravault en reconnaissant Monjoyeux.—Oui, c'est le diable à quatre, reprit Parisis en serrant la main du nouveau venu. Tu as voulu me surprendre en me disant que tu ne viendrais pas.—Oui, répondit Monjoyeux, j'ai voulu te voir au milieu de tes femmes et de tes mauvaises actions.» Et il prit sa part du divan.

«Donc, reprit Octave, RODOLPHE DE VILLEROY aspire au POUVOIR;—Le second, MIRAVAULT, veut régner par l'ARGENT;—Le troisième, MONJOYEUX, tente les chimères de la GLOIRE;—Le quatrième, OCTAVE DE PARISIS, ne veut tenter que la FEMME.»

Villeroy tordit sa moustache: «Eh bien! nous verrons dans un an ou dans dix ans qui est-ce qui se sera trompé.—Tous les quatre,» dit M. de Parisis.—Et il se leva pour entraîner ses amis au buffet. «Allons prendre des forces pour conquérir le monde.»

Les grandes dames

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