Читать книгу Les grandes dames - Arsène Houssaye - Страница 9

«L'AMOUR DONNERA LA MORT AUX PARISIS. «L'AMOUR DES PARISIS DONNERA LA MORT.

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«Tout s'évanouit; la fiancée ouvrit les yeux et remua les lèvres pour dire: Je reviens du Paradis: oh! mon ami, aimons-nous en Dieu.»

«Ils se marièrent, ils furent heureux; mais dix années après, Jehan de Parisis mourut de mort violente. «Depuis quatre siècles, tous les Parisis sont morts de mort tragique. De génération en génération, leur bonheur a été diminué d'un an.»

Octave avait conté cela très simplement, sans rien accentuer, ne voulant pas donner à cette histoire une couleur mélodramatique, mais il était demeuré sérieux comme si le souvenir des siens eût retrempé son âme.

Le prince voulut rire d'abord, mais il s'était pris à la légende comme à quelque roman de Balzac ou de Georges Sand. Il n'était plus gris. Monjoyeux, qui aimait le drame avec passion, était ému comme à un beau spectacle.

Les femmes dormaient toujours. On ne les réveilla pas. Le Prince remua les lèvres pour demander à Octave si les quatre siècles étaient passées. Il n'osa pas. Il se contenta de lui dire: «Eh bien! tu n'as pas envie de te marier, toi?—Non, répondit le dernier des Parisis.—Je commence à comprendre, dit Monjoyeux, pourquoi tu passes si vite à travers les passions: tu as toujours peur de te laisser prendre.—Non! dit Octave, j'ai bien plus peur qu'on se prenne à moi, si je dois porter malheur. Car pour moi, après tout, je suis bien sûr de n'aimer que quand je voudrai. Voir Naples et mourir! dit le proverbe: c'est-à-dire: Aimer et mourir! mais je ne dirai cela que quand je serai dégoûté de la vie. Maintenant n'allez pas vous imaginer que la légende des Parisis me préoccupe beaucoup. Toutes les familles en ont une pareille, le diable a fini son temps, je n'ai donc plus à payer la part du diable.

Le prince dit qu'il y avait une légende dans sa famille. «On ne croît plus à ces bêtises-là; mais quand le doigt de Dieu se montre on y pense bien un peu.»

Parisis se levant, dit adieu par un signe. «Tu ne viens pas au club, lui demanda le prince?—Non. J'ai compté aujourd'hui pour la première fois de ma vie; il ne me reste qu'un million, je ne jouerai plus.» Il se leva, et sortit. Puis rentrant aussitôt, et comme pour se moquer lui-même de sa légende: «Messeigneurs! Jehan de Parisis, fils de l'homme à la légende, est mort en 1468: s'il ne me reste plus qu'un million, il ne me reste plus que deux années à vivre: je suis riche.—Pauvre Parisis! murmura le prince, qui n'osait plus compter sa fortune.

Quand Octave eut refermé la porte, Monjoyeux dit au prince: «Ce que c'est que d'être bien né! on a des légendes de famille. Moi qui suis le fils d'une chiffonnière, quelle pourrait bien être la légende de mes ancêtres?»

Monjoyeux réfléchit. «J'ai aussi ma légende, moi! Je n'ai jamais eu d'autre berceau que le berceau primitif: le sein et le bras de ma mère; or, une bonne fée est venue à mon berceau qui m'a dit: «Tu seras roi!» Sans doute elle a voulu dire un roi de comédie, puisque j'ai joué, à Londres, des rois avec Fechter. Ah! si seulement ma mère m'avait vu sous cette royauté-là!»

Monjoyeux pencha la tête sur son verre; une larme tomba de ses yeux dans le vin de Champagne.

Les grandes dames

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