Читать книгу Encyclopédie de la photographie sur papier, collodion, verre négatif et positif, et sur toile - Adolphe Legros - Страница 9
ОглавлениеExposition à la chambre noire.
Il faut donner au modèle la pose qui lui convient le mieux, soit assis, soit debout; dans l’un ou l’autre cas, il doit toujours être parfaitement d’aplomb, et avoir la tête fixée au moyen de l’appareil que nous appelons appui-tête.
Ayant choisi par avance l’endroit le plus favorable pour la lumière, on place la chambre noire sur le pied qui la supporte; on la dirige bien en face de la personne ou de l’objet que l’on veut reproduire, et par le moyen d’une vis d’engrenage qui permet d’éloigner ou de rapprocher l’objectif, on amène son modèle au foyer; c’est-à-dire que sur une glace dépolie qui se trouve placée derrière l’objectif, on voit l’image pure et nette, mais renversée, de la personne que l’on va tirer. Il n’y a qu’un point où l’image offre toutes les conditions de netteté et de pureté désirables; si par le moyen de la vis de l’objectif, on l’éloigné un peu plus, un peu moins, on n’a plus qu’une image obscure et embrouillée, et par suite l’épreuve sortira fort mal. Quand ce sont des personnes dont on a le portrait à faire, le meilleur moyen de reconnaître si on a le foyer juste est de regarder le point des yeux, les poils de la barbe, les rides, enfin les plus petits détails. Quand on voit tout cela bien net, on est sûr que l’épreuve qu’on va tirer le sera convenablement.
Avant d’entrer en matière pour la pose, disons d’abord à l’artiste la chose principale: c’est que tous les objets soient, autant que possible, sur le même plan.
Maintenant que nous avons vu la disposition de l’appareil, voyons un peu celle du modèle; elle offre assez de difficultés, surtout si on a affaire à des personnes qui veulent choisir elles-mêmes leur pose, pose quelquefois excentrique et qui, le plus souvent, ne leur convient pas du tout.
Dans cette circonstance l’opérateur doit s’attacher à donner la pose qu’on lui demande, tout en la corrigeant et la mettant en rapport avec son appareil, afin de la rendre le plus agréable qu’il lui sera possible.
Les poses qui nous ont toujours paru les plus avantageuses sont celles-ci:
1° Un bras appuyé sur une table, la main. tombant sur la cuisse, à moitié fermée, de manière qu’il n’y ait que le petit doigt qui porte en plein sur le pantalon, l’autre bras descendant le long des côtes, en demi-cercle, de manière que la main vienne poser sur le milieu de la cuisse, absolument comme l’autre. On peut modifier cette pose en laissant tomber négligemment la main qui est sur la table, au lieu de la poser sur la cuisse; le goût doit seul guider l’opérateur pour ce qui est de semblables détails.
2° Une pose qui sied assez bien, surtout aux dames, est celle-ci: tenir un coude fixé sur une petite table, la tête portée par la main; l’autre bras sera disposé comme dans la pose précédente.
3° On peut placer une des mains dans le gilet, de manière que l’on ne voie que l’extrémité du poignet, le coude appuyé sur la table, l’autre bras comme précédemment.
Quelles que soient les poses, il faut toujours que la personne soit bien assise au fond de la chaise, le corps légèrement porté en avant et dirigé un peu obliquement, et la tête droite.
Quelque pose que l’on donne pour obtenir des yeux bien ronds et bien ouverts, il faut toujours que la personne ait le corps et la tête bien droits, sans cependant les porter en arrière, et faire regarder sur l’appareil, au-dessus de l’objectif; il est toujours très mauvais de faire regarder plus haut: le modèle semblerait regarder en l’air sans but, au lieu que regardant à la place que nous avons indiquée, il semblera porter le regard sur la personne qui est devant lui, ce qui donnera beaucoup plus d’expression au portrait.
Il faut aussi éviter de placer l’objectif plus bas que la tête de la personne; elle semblerait avoir la figure et surtout le nez tout épaté.
Faire un portrait complètement de face est un fort mauvais système, un portrait de 3/4 ou demi 3/4 est bien préférable. S’il s’agissait, par exemple, d’une personne ayant un gros nez, on la reproduirait avec un nez gros et épaté, qui naturellement lui semblerait désagréable, et il faudrait recommencer.
Il faut éviter de laisser prendre des poses pleines de raideur et de gêne, c’est un grand défaut; elles doivent toujours être naturelles, sans quoi le but est manqué ; on a quelque chose du modèle, mais la ressemblance n’est pas complète, il y manque la nature.
Il faut surtout ne pas laisser prendre au modèle un air triste et sévère, c’est ce qui arrive fréquemment chez certains artistes; il faut, au contraire, recommander de prendre un demi-sourire, un air de contentement dans l’ensemble de la physionomie, sans rire cependant, ce qui occasionnerait des rides dans la figure, qui serait affreuse.
Du reste, nous nous adressons surtout aux élèves, car un artiste expérimenté aperçoit du premier coup d’œil les plus petits défauts, auxquels il remédie de suite.
Éviter autant que possible les poses debout: elles fatiguent le modèle et lui donnent un air triste et maussade qui est fort disgracieux dans un portrait. Si cependant on est forcé de faire de ces poses, ce qui peut arriver, voici celles qui nous ont donné les meilleurs résultats:
1° Surtout si c’est pour une dame, la pose suivante doit être préférée: le corps un peu de côté, la tête bien droite de 3/4, demi 3/4, ou même de profil; une main sera appuyée sur le dossier d’une chaise ou sur une table, tenant un livre; l’autre main, tombant le long du corps, tiendra un éventail, un bouquet ou toute autre chose; si c’est un homme, on peut faire tenir des gants à la main.
2° On peut faire mettre une main dans l’habit, la jambe droite un peu plus allongée que l’autre, la tête et le corps de 3/4 ou demi 3/4; l’autre main tiendra le chapeau ou des gants. Si c’est un militaire, faire mettre la main sur la garde de l’épée, l’autre main tombante.
Ne pas faire, autant que possible, de portraits avec des chapeaux sur la tête, cela donne toujours une physionomie dure au modèle, et couvre une moitié de la figure d’une ombre que l’on n’aime pas généralement; on est donc obligé de l’atténuer en faisant la retouche, quand l’épreuve est finie.
Toutes ces dispositions étant prises, on retire la glace dépolie qui se trouve à la chambre noire, et on la remplace par le châssis qui contient la préparation.
A ce moment, donner l’ordre de rester dans l’immobilité la plus complète; le moindre mouvement, soit dans les yeux, la bouche ou toute autre partie, amène dans le portrait le plus grand désordre; il s’y forme quelque chose de brouillé et de confus, quelquefois même la partie qui a subi quelque mouvement se trouve doublement imprimée. Lorsque le châssis est dans la chambre noire et que le modèle est bien immobile, tirer la planchette qui couvre le châssis, et enlever la capsule qui bouche l’objectif: la glace préparée est soumise à l’effet des rayons lumineux.
Le temps de l’exposition dure plus ou moins, suivant l’intensité de la lumière, suivant que l’on a laissé le collodion sécher, et aussi selon le temps qu’on est resté dans le bain de nitrate d’argent.
Si la glace a séché longtemps, l’opération, comme nous l’avons déjà dit dans le chapitre précédent, sera beaucoup plus longue.
Si on est resté longtemps au nitrate d’argent, l’épreuve sortira grise; elle aura l’apparence d’avoir trop de pose, et pourtant les détails manqueront; c’est que les sels d’argent auront laissé un voile sur certaines parties de la glace collodionnée.
Si la glace est préparée dans les conditions que nous avons indiquées, la durée de la pose variera de 5 secondes à 1 minute sous une terrasse vitrée, et de 1 à 20 secondes à l’air libre; alors les changements ne tiendront qu’à la plus ou moins grande intensité de la lumière.
Par un temps ordinaire, il faut de 10 à 15 secondes.
Si le temps est recouvert de nuages blancs, l’opération ira très vite, attendu que ces nuages laissent passer la lumière très librement; si au contraire il fait un temps de brouillard avec de gros nuages gris, l’opération ira excessivement lentement. Si la durée de l’exposition a été trop longue, le portrait vient d’un ton grisâtre et uniforme, sans aucune vigueur, la figure et les habits tout du même ton. Si au contraire la durée de la pose a été trop courte, le portrait viendra rempli d’oppositions: des yeux tout noirs, des ombres de même et des lumières excessivement blanches, sans demi-teinte; les habits viendront tout d’un paquet, noirs, sans aucun détail. Dans l’un ou l’autre cas, le portrait est manqué, il faut le recommencer.
Lorsqu’on travaille dans une maison ou chambre, la pose est beaucoup plus longue, on ne peut rien fixer; beaucoup d’habitude est nécessaire pour réussir convenablement.
Voici pour le portrait. Maintenant, pour les monuments, paysages, gravures, lithographies, l’opération est plus de moitié moins longue, quoique avec la même lumière.
Les peintures, au contraire, ont beaucoup de peine à se fixer sur la préparation; la durée de la pose est d’autant plus considérable que les couleurs sont plus foncées; mais la pose est à peu près toujours plus longue que pour le portrait.
La disposition des objets sur le même plan doit aussi être l’objet d’une attention sérieuse; il faut veiller à ce que pas un ne dépasse l’autre; celui qui se trouverait en avant prendrait des proportions gigantesques, au lieu que ceux qui se trouveraient trop reculés tomberaient dans le défaut contraire.
Il faut aussi que tout se trouve, autant que possible, sur le milieu de la glace; les objets qui se trouveraient sur les côtés, ou ne sortiraient pas, ou sortiraient mal.
Si l’artiste fait un paysage, on comprend qu’il ne doit s’attacher à mettre au point que le premier plan, les plans secondaires étant destinés à faire le lointain.