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ОглавлениеCHAPITRE 7
Ice - Rose
4 jours plus tard...
Il me manque 2 000 euros. Depuis quelques jours, j'ai revendu pas mal de drogue et j'ai réussi à me faire un peu de fric. Mais il va me falloir un peu plus de temps pour que j'arrive à rassembler la somme promise à Oliver.
En parlant du loup, le voici s'en allant dans les bois. Il fait ça toutes les nuits, il s'en va au coucher du soleil et ne revient pas avant le lendemain matin. Il revient lorsque je pars en cours et je ne comprends pas pourquoi il ne profite pas d'un lit tant qu'il en a la possibilité. Ni même de la douche ou de la nourriture. Il a méchamment refusé lorsque je lui ai proposé de lui prendre un appartement en ville. Il ne semble pas prêt à sauter le pas, et quitter sa vie actuelle.
Je me suis longuement remise en question vis-à-vis de ma décision d'avoir fait entrer un étranger chez moi. Car, sous la précipitation, ça me paraissait une bonne idée, puis, en y réfléchissant, c'était plutôt fou comme choix. Je ne pouvais empêcher la petite voix dans ma tête qui me disait que je n'avais pas le droit de laisser cet homme dehors. Ça ne serait pas humain de faire un truc pareil. Il fallait que j'agisse, même si tout ça doit se passer derrière le dos de mes parents. S'ils apprenaient la situation, je suis sûre qu'ils me tueraient. Ils ne comprendraient pas ce qui m'a motivé à l'aider. Je ne suis pas totalement une peste et ils ne l'envisageraient jamais.
Je me pose tellement de questions sur Oliver que, plus curieuse que jamais, j'enfile un manteau avant de courir dans les escaliers et de partir le rejoindre dans la forêt. Je le suis de loin, veillant à ne faire aucun bruit afin qu'il ne me surprenne pas. Je veux vraiment savoir où il se réfugie lorsqu'il part dans les bois.
Oliver marche drôlement vite, je n'arrive pas à le suivre ; il semble être porté par le vent. Comment peut-il aller aussi vite tout en étant aussi discret ? Ses pas sont délicats tandis qu'il avance vers l'inconnu.
Il fait nuit noire et un vent léger vient caresser mes cheveux. La brise calme et cette chaleur lourde laissent penser qu'un orage se prépare. D'ailleurs, quelques gouttes me tombent dans les yeux et glissent sur mon visage. La future tempête n'a pas l'air de gêner Oliver, il garde la même allure et ne regarde jamais derrière lui. Comment peut-il être aussi confiant au beau milieu de la forêt, en pleine nuit ? Moi, je ne fais que balader mon regard sur chaque recoin, ayant peur que, finalement, la légende dise vraie, et que j'ai été assez idiote pour n'en faire qu'à ma tête pour suivre ce fou.
Soudain, je perds la trace d'Oliver.
Je ne vois rien. Mes pas sont brusques et indécis ; je ne sais absolument pas où je me trouve et où il est. Je commence à paniquer. Et si je ne retrouvais plus mon chemin ? Allais-je mourir ici ?
Le ciel grogne alors. Vais-je me faire foudroyer par un éclair ? Une lumière vive illumine la forêt et mon cœur semble s'arrêter. Oh mon dieu, je vais mourir foudroyée là, comme ça.
Et puis, d'instinct, je hurle :
- Oliver !
Je l'appelle un bon nombre de fois, comme s'il allait me sauver de là alors que c'est un inconnu, au final. Ce n'est pas parce que je lui ai proposé un toit qu'il me doit quelque chose. Il ne me doit absolument rien. Peut-être que, depuis tout ce temps, il attendait que je le suive, un soir, pour me tuer ?
Non, Rose. Rationnalise, merde !
Pourquoi te tuerait-il ? Oh non ! Il va me violer et ensuite me tuer. C'est peut-être un psychopathe. Au fond, je n'en sais rien, je ne le connais pas.
Soudain, une envie de pleurer me tiraille l'esprit, mais je décide de ne pas me laisser dominer par ma peur. Je vaux mieux que ça.
C'est à ce moment-là qu'un grognement se fait entendre. Mais il ne s'agit pas du tonnerre. Je n'ose même pas me retourner pour regarder. Je ferme les yeux un instant, comme si, en les rouvrant, j'allais me réveiller d'un affreux cauchemar. Je ne suis pas trempée jusqu'aux os, ni perdue au beau milieu d'une forêt déserte avec une bête prête à me réduire en charpie.
Je finis par me retourner, mais je ne vois que deux yeux fluorescents me fixer et, lorsqu'un éclair vient faire briller le ciel, c'est un loup blanc qui me fait face. Il me montre les crocs et ne semble vraiment pas apprécier ma présence. Il grogne à nouveau et je recule d'un pas, doucement. Qu'est-ce qu'un loup fait ici ?
Ma respiration est effrénée, je ne la contrôle plus, elle fait bouger ma cage thoracique à une vitesse folle. Je ne peux même pas crier tellement la peur me terrasse.
Le loup avance vers moi et je ne fais que reculer. Il va me sauter dessus, c'est sûr !
- Ice !
Une voix forte et sèche se fait entendre derrière moi. L'animal s'arrête net, il ne bouge plus d'un iota. Il finit même par s'assoir, la gueule refermée. Il me fixe toujours comme si j'allais être son repas du soir, mais il s'est instantanément calmé.
Lorsque je pivote vers la voix, c'est Oliver que j'aperçois entre deux éclairs. Mon Dieu, je n'ai jamais été aussi heureuse de le voir que maintenant.
- Je savais, tu me suivais, dit-il, puis il se met à ricaner. Je voulais savoir comment ça allait se passer avec Ice. Visiblement, t'as pas trop aimé la surprise.
Il est sérieux là ?
- Tu te fous de ma gueule ? Un orage menace ma tête, un loup veut me dévorer vivante, tout ça en pleine nuit et dans une forêt abandonnée, et toi, tout ce que t'as trouvé à faire, c'est de te marrer ? Mais c'est quoi ton problème, merde ?
Je m'avance vers lui et le pousse. Il ne bouge pas, évidemment, mais ça ne m'empêche pas de vouloir réessayer.
- J'ai eu la peur de ma vie, n'as-tu aucun cœur ?
Alors que je tente une seconde fois de l'atteindre, il me choppe les mains et me tire violemment vers lui. L'entaille encore présente dans ma paume me déclenche une vive douleur.
Son visage se retrouve à quelques centimètres du mien et son corps, seulement couvert du jean que je lui avais donné, est plaqué contre moi. Il baisse la tête vers moi et ses yeux prennent une teinte profondément clairs lorsqu'un éclair déchire le paysage.
- Ne porte jamais la main sur moi, Flocon. Jamais.
Dans ses yeux, une lueur de combativité y réside ; il n'hésiterait pas à me rendre chacun de mes coups. Mais, à la manière dont ses doigts ne se resserrent pas davantage autour de mes mains, je sens que, au fond, il n'a pas envie de me les rendre.
- Ne me fais plus jamais peur, Sauvage. Jamais.
Il fronce les sourcils à l'entente de ma supplique, ainsi que de ce surnom qui lui va mieux que n'importe quel autre. Malgré la pluie qui ruissèle sur son corps, le long de ses cheveux et sur sa bouche, il reste fort. Quand on le regarde, il semble si… invincible, rien ne semble pouvoir l'atteindre, et c'est ce que je vois aussi dans ses yeux : une rage de vaincre.
- Je ne suis pas ton ennemi, chuchotai-je dans un souffle.
Ces mots ont l'effet d'une véritable douche froide sur lui. Il se baisse davantage afin que nos yeux soient à la même hauteur.
- Tu te trompes. Tu es ce que je hais le plus au monde.
Je décide de laisser ma peur de côté et d'attraper ses longs cheveux pour le menacer, comme il le fait avec moi.
- Alors pourquoi c'est moi qui me fait agresser ?
Malgré ma remarque, il ne me lâche pas pour autant et ne dévie pas une seule seconde son regard de mes yeux, même lorsque son loup se met à grogner, comme pour dire qu'il faut que je lâche son maître.
- Humains, ils détruisent tout. Ils n'ont pas de cœur, pas d'âme. Je les déteste. Ils n'ont rien à m'apporter.
Je fronce les sourcils, comment peut-il avoir une aussi piètre estime des Hommes ? Je sais qu'il y a beaucoup de mauvais dans notre société - oh ça, oui ! - mais nous ne pouvons pas dire ça de tout le monde.
- Qu'as-tu vécu pour penser ça ?
- L'enfer.
- Je ne suis pas cet enfer, je suis Rose. Ne me jette pas la pierre, Sauvage, je ne suis pas responsable de ton passé.
Mes mains quittent ses cheveux pour venir se placer sur son torse. Il recule d'un bond, lâchant mes mains.
- Ne me touche pas.
- Oliver, soupirai-je.
- Ne me touche pas, répète-t-il.
Lorsque je tente de m'approcher, son loup vient s'interposer entre son maître et moi. Il me montre à nouveau les dents et je fais tout pour que mon cœur ne s'emballe pas à nouveau.
- N'approche pas, il va te tuer, me prévient Oliver.
- Tu ne le laisseras pas faire ça, j'en suis sûre.
- Je ne l'arrêterai pas.
- Moi, je crois que si, dis-je en faisant un pas.
Ce que je fais est complètement fou et je ne sais même pas pourquoi je le fais. Peut-être que les effets de la drogue de ce matin ne se sont toujours pas dissipés ?
J'ai juste envie de comprendre. Non, j'ai besoin de comprendre. Oliver a été démoli par la vie et il se retrouve là, seul, dans les bois. Pourquoi ? Quelle est son histoire ? J'ai ce besoin de connaître la vérité.
Foutue curiosité.
- Flocon, crache-t-il sévèrement pour m'empêcher de continuer ma route.
Mais si la vie m'a appris une chose, c'est qu'il faut placer un pas devant l'autre pour obtenir ce que l'on veut. Et c'est ce que je fais. J'avance.
Le loup, à seulement deux mètres de moi, s'active et se met à courir dans ma direction.