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IV

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Une dizaine de jours plus tard, les deux amis se retrouvèrent; mais cette fois-ci ce fut dans un des salons dorés de l’hôtel Smithers. Mrs Smithers et sa fille étaient parties en automobile pour la journée, et un coup de téléphone de Blanche avait prévenu le jeune homme qu’elle l’attendrait seule chez leurs amies.

—Eh bien, cher collègue, dit-il, en serrant la main de la jeune fille, l’affaire a donc traîné de votre côté? Du mien, c’est allé tout seul; je n’attendais qu’un signe de vous.

D’un geste, miss Lambart lui indiqua un fauteuil en face du sien.

—Ce signe, je n’ai pu vous le faire que ce matin. J’ai eu un rude combat à livrer.

—Un combat? De quoi parlez-vous? On ne veut donc pas de mon prétendant?

—Mrs Smithers en voudrait, vous le devinez bien,—elle eut un pâle sourire—mais il paraît que Catherine a d’autres visées.

—Comment? Cette petite sotte?—il fronça les sourcils—et alors?

Blanche hésitait toujours, jouant d’une main distraite avec les glands de soie qui bordaient les revers de son corsage. Enfin elle dit:

—Et alors, malgré moi, j’ai pris parti pour Catherine, je l’ai défendue contre sa mère!

Le Fanois la regarda d’un œil étonné.

—Mais que veut-elle donc, cette enfant? Je n’y suis plus.

—Mais si, vous y êtes, mon ami, car c’est vous qu’elle veut!

Elle lui lança cette parole sur un rire moqueur, comme si elle lui jetait un défi au visage.

Le jeune homme se leva vivement de son siège. Sa figure avait pâli, et il caressait distraitement sa moustache, comme pour cacher une contraction nerveuse de ses lèvres.

—Comment? Qu’entendez-vous par là? balbutia-t-il.

—C’est comme je vous le dis. Catherine prétend n’épouser que l’homme qu’elle aime, et c’est vous qu’elle aime.

Il restait debout devant elle, appuyant les deux mains sur le petit guéridon surchargé de bronzes qui les séparait.

—C’est moi, c’est moi? répétait-il.

Blanche eut un petit rire moqueur.

—Voyons, cela vous étonne à ce point?

—A ce point et au delà!—Il la regarda brusquement.—Comment, vous croyez?...

—Mais non, mais non! Je sais très bien que vous avez joué cartes sur table. Seulement, ce n’est pas la première fois, n’est-ce pas, que l’on s’éprend de vous sans que vous y soyez pour quelque chose?

Il haussa les épaules avec un geste de mépris; puis il se détourna, arpenta une ou deux fois la pièce, et revint se placer en face de la jeune fille.

—Mais la mère ne consentirait sans doute jamais? demanda-t-il brusquement.

Une vive rougeur baigna le visage de Blanche Lambart, et elle se leva aussi.

—Alors, vous, vous consentez? dit-elle, le regardant bien dans les yeux.

Il rougit aussi et se mit à tordre ses gants entre ses doigts nerveux.

—Moi, moi? Je n’en sais rien, je demande seulement...

—Eh bien, l’affaire est bouclée. J’ai obtenu le consentement de Mrs Smithers.

Il la regarda, ébahi.

—Vous l’avez obtenu? Comment donc? C’est incroyable!

—Mais non. Au fond, c’est une bonne femme. Elle adore sa petite Catherine, pour rien au monde elle ne consentirait à la rendre malheureuse. A nous deux, Catherine et moi, nous avons eu vite fait de vaincre ses résistances. Catherine fera un mariage d’amour, et c’est elle, Mrs Smithers, qui fera le grand mariage.

Le Fanois poussa un dernier cri d’étonnement.

—Comment, elle? C’est elle qui voudrait épouser Sestre?

—Oh! je ne crois pas qu’elle aspire à remplacer sa fille. Mais nous trouverons bien quelqu’un d’un âge plus convenable. Vous vous en chargerez, n’est-ce pas? Vraiment, elle n’est pas trop mal depuis qu’elle a maigri et qu’elle porte des robes foncées.

Blanche s’interrompit vivement.

—J’entends sonner, les voici qui reviennent.

Et, comme Le Fanois regardait autour de lui, cherchant un moyen de s’évader sans être vu, elle reprit en souriant:

—Non, restez. Vous savez que, dans ce milieu, on se dispense de formalités; et j’ai promis à Catherine de vous retenir.

Elle ajouta doucement, en le quittant:

—Elle vous aime follement; soyez bon pour elle, n’est-ce pas?

Les metteurs en scène

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