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CHAPITRE II

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Table des matières

Affaire Le Mousnier. — Grandier est accusé d’avoir été l’instigateur de l’assassinat de René Bernier, curé du bourg des Trois-Moutiers. — Conduite du lieutenant criminel Hervé. — Scévole de Sainte-Marthe se retire à Loudun. Son amitié pour Urbain Grandier. — Le procureur du roi Louis Trincant. — Mort de Sainte-Marthe. — Son oraison funèbre. — Succès de Grandier.

LOIN de chercher à calmer ses ennemis, le nouveau curé de Loudun ne faisait que les irriter chaque jour davantage. S’il eût mis plus de modestie dans ses succès et moins de morgue dans ses rapports avec quelques-uns de ses collègues, peut-être aurait-il fini par imposer silence à la calomnie. Mais la nature impétueuse et violente de Grandier ne savait point faire de concessions. Il trouvait malheureusement dans son entourage des gens qui le poussaient à ces intempérances de langage. Une des scènes les plus scandaleuses dont fut témoin l’enceinte même de l’église Saint-Pierre est celle qu’il eut avec René Le Mousnier, chanoine de Saint-Léger-du-Château. Ce personnage brutal et querelleur, avait déjà eu maille à partir avec Maurat, doyen des chanoines de Sainte-Croix, qu’il avait battu à la sortie de l’église. Le pauvre doyen, homme doux et paisible, connu dans tout Loudun pour sa proverbiale bonté, avait cru de sa dignité de porter plainte contre le trop bouillant Le Mousnier. Devant les juges ecclésiastiques, le chanoine de Saint-Léger fut sévèrement blâmé et invité à respecter davantage l’habit qu’il portait. Grandier, dans cette triste affaire, avait pris vivement le parti de son ami et collègue Maurat; mais, comme toujours, il ne sut point calculer la portée de ses paroles et poursuivit Le Mousnier de ses railleries les plus amères. Le chanoine de Saint-Léger riposta par de grossières injures, et alla colporter par la ville quelques petites infamies sur le curé. La querelle commençait à prendre des proportions inquiétantes pour l’honneur et la dignité des deux adversaires, quand Grandier crut le moment favorable d’en entretenir au prône ses paroissiens et de les faire juges de ses démêlés avec Le Mousnier. A cette époque les prédicateurs se gênaient peu pour transformer la chaire en tribune. Dans leur église, les prêtres pouvaient attaquer impunément leurs adversaires, se livrer aux plus violentes diatribes, sans pour cela scandaliser l’auditoire: les mœurs du temps s’accommodaient volontiers de cette manière d’agir. Grandier usa largement de cette tolérance en attaquant Le Mousnier, qu’il dépeignit sous les couleurs les plus défavorables. Le chanoine assistait ce jour-là à l’office. Malgré sa dernière affaire avec Maurat, son naturel violent reprit le dessus. Quand le sermon fut terminé, il alla attendre Grandier au pied de la chaire, l’apostropha grossièrement, et, sans respect pour le lieu où il se trouvait, se livra sur lui à des voies de fait. De violents murmures éclatèrent parmi les fidèles, qui témoignèrent hautement de leur indignation. Mais Grandier, qui n’était point homme à pratiquer le pardon des injures, rendit au centuple les coups que Le Mousnier lui portait: ce fut une véritable scène de pugilat. Le chanoine, il faut le dire, n’était pas de force à lutter avec un tel adversaire. Il dut reculer honteusement et, de plus, porta seul toute la responsabilité de cette scène scandaleuse. L’affaire avait eu trop de témoins pour en rester là. Grandier, très versé dans la chicane, beau parleur, trouvant une nouvelle occasion d’humilier son ennemi, l’assigna devant le présidial de Poitiers. Il démontra sans peine que tous les torts étaient du côté de Le Mousnier, et obtint contre lui une sentence qu’il fit exécuter avec la dernière rigueur (21 avril 1620).

Ce triomphe devait être pour lui la cause de nouvelles difficultés. Sur ces entrefaites, Me René Bernier, curé du bourg des Trois-Moutiers, eut une violente altercation avec Grandier au sujet de son oncle Le Mousnier. Cette fois la scène se passa dans la sacristie et sans témoins. Bernier, qui, comme son digne parent, était d’humeur batailleuse, se rua sur le curé et le frappa brutalement. Grandier, dont la colère décuplait les forces, empoigna son agresseur et le jeta à la porte. Celui-ci n’eut rien de plus pressé que d’aller raconter à son oncle sa mésaventure et ils avisèrent ensemble au moyen de prendre une éclatante revanche. Le hasard se chargea bientôt de le leur fournir.

A quelque temps de là, le curé des Trois-Moutiers étant venu passer la journée à Loudun, regagnait son presbytère à une heure avancée de la soirée. Les environs de Loudun, à cette époque, étaient assez mal fréquentés et les agressions nocturnes s’y renouvelaient souvent. Toutefois, Bernier n’avait pas cru devoir prendre de précautions, pensant que les voleurs n’auraient pas grand profit à arrêter un pauvre curé de campagne. Déjà il avait parcouru sans accident la plus grande partie du chemin, quand, arrivé au bas de la côte située à peu de distance du bourg, il fut attaqué par une bande d’individus qui le dévalisèrent après l’avoir blessé assez grièvement. Il eut cependant la force de se traîner jusqu’à sa demeure et, dès le lendemain, s’empressa de faire connaître à son oncle l’aventure dont il avait été victime. Toutes les recherches que l’on fit pour découvrir ces détrousseurs de grand chemin n’ayant amené aucun résultat, Le Mousnier eut l’infernale idée de rendre Grandier responsable de ce crime. Il alla même jusqu’à l’accuser d’avoir soudoyé des gens pour attaquer son neveu et le faire assassiner. Le lieutenant criminel Hervé, aveuglé par sa haine contre le curé de Saint-Pierre, accueillit avec empressement ces déclarations. Il fit enquête sur enquête, chercha tous les moyens de compromettre Grandier, mais ne put y parvenir. Celui-ci prouva jusqu’à l’évidence l’indignité des manœuvres employées pour le perdre. Tout l’odieux de cette calomnie retomba sur ses auteurs et le lieutenant criminel, justement décrié à Loudun, en fut pour ses frais de procédure. Quant à Le Mousnier et à son neveu, ils y perdirent le peu de considération qui leur restait dans la ville .

Malgré ces mesquines tracasseries et ces haineuses rivalités, l’esprit indépendant de Grandier, sa nature franche et loyale, sa charité et son dévouement lui avaient conquis de sérieuses sympathies et tout ce que Loudun comptait d’hommes considérables et estimés avait pris sa défense. Les Réformés eux-mêmes aimaient ce prêtre qui s’était posé en adversaire des moines et dont la tolérance en matière de religion contrastait si étrangement avec l’intolérance de ses collègues. Avec Grandier, «ceux de la Prétendue Religion Réformée,» comme on les appelait ironiquement, n’avaient point à redouter les persécutions dont le clergé était si prodigue à leur égard. Le nouveau curé les laissait vivre à leur guise, ayant pris pour principe de ne point s’occuper de leurs affaires. Les protestants venaient souvent dans l’église Saint-Pierre entendre ses sermons, et plus d’une fois ils se retirèrent sous le charme de cette voix éloquente qui faisait plus pour le bien de la religion que les violences dont la chaire avait été l’écho jusqu’alors.

Mais ce qui contribuait le plus à honorer le curé aux yeux des Loudunais, c’était l’amitié que lui portait Scévole de Sainte-Marthe. Ce nom de Sainte-Marthe exerçait un véritable prestige dans la ville, et les sympathies de cet illustre citoyen n’étaient pas acquises au premier venu. Le rôle qu’il avait joué depuis Henri II jusqu’à Louis XIII, ses talents comme poète et historien, les hautes fonctions dont il fut chargé et qu’il remplit si dignement, son désintéressement, sa fidélité à ses rois en avaient fait une illustration vraiment française. Loudun était fière de le compter au nombre de ses enfants et jamais citoyen ne se montra plus digne de l’estime et de la vénération de ses compatriotes. Aussi combien devait être grande la reconnaissance de la vieille cité !

Dans les plus mauvais jours de cette épouvantable guerre religieuse, Scévole n’avait-il pas sauvé du pillage Loudun qui refusait d’ouvrir ses portes au duc de Joyeuse? Déjà le chef de l’armée catholique se préparait à la traiter en cité rebelle, quand la municipalité fit appel au patriotisme et à l’éloquence de Sainte-Marthe, pour fléchir, par son intervention, le vainqueur irrité. Au, nom de sa ville natale en péril, Scévole accourt, se présente devant lui, et, par la séduction de son langage autant que par l’ascendant de sa réputation, parvient à arracher la grâce de ses concitoyens.

. Pour honorer cette belle conduite, la ville décerna à son libérateur le glorieux titre de Père de la Patrie .

Les importantes fonctions dont Sainte-Marthe fut chargé l’éloignèrent pendant de longues années de Loudun; mais il n’oublia jamais la cité où il laissait de si impérissables souvenirs. «De

«même que Cicéron, pour avoir gouverné la République romaine,

«n’avoit jamais mis Arpinum en oubli, jamais ses charges et ses

«honneurs n’avoient effacé Loudun de sa mémoire .»

Parvenu à une extrême vieillesse , Scévole dut songer à goûter un repos qu’il avait si grandement mérité. Il vint donc en 1618 à Loudun habiter le bel hôtel qu’il s’était fait construire et qu’on pouvait encore admirer il y a quelques années.

Il ne reste rien aujourd’hui de l’antique demeure de Sainte-Marthe. Une construction bourgeoise et prétentieuse, très confortable, il est vrai, a remplacé l’élégant portail de la Renaissance qui formait l’entrée principale de cet hôtel. La maison elle-même, avec ses hautes et larges fenêtres encadrées par des colonnes groupées deux par deux et surmontées de lucarnes dominant la toiture de leurs pilastres et de leurs frontons, n’a point trouvé grâce devant la pioche des démolisseurs. Et cependant ce vieil hôtel rappelait aux Loudunais la belle époque qui l’avait vu bâtir en même temps que le souvenir du grand patriote qui y était mort!

La maison de Sainte-Marthe devint bientôt le rendez-vous d’une société brillante et lettrée. Le futur fondateur de la Gazette de France, Théophraste Renaudot, vint y passer cinq mois. Il y rencontra Urbain Grandier et eut avec lui de longs entretiens qui le mirent à même d’apprécier toutes ses belles qualités. Renaudot conserva toujours un profond souvenir de ses relations avec le curé de Saint-Pierre et plus tard, il fut pour lui un véritable ami dans le malheur lorsque tant d’autres l’abandonnèrent.

Les fils de Scévole, les savants continuateurs de la Gallia Christiana, l’astronome Ismaël Boulliau, bien jeune alors, le bailli de Loudun, Guillaume de Cerisay de la Guérinière, magistrat intègre et réputé dans toute la contrée; Charles Rogier, conseiller au baillage, poète à ses heures ; Daniel, son frère, médecin justement honoré à Loudun, formaient chez Sainte-Marthe une véritable cour d’esprit où les lettres, les arts et les sciences étaient commentés avec une grande éloquence et une profonde érudition. Grandier était l’âme de ces réunions par sa parole vive, facile et ses ingénieux aperçus. Le grave de Thou vint aussi à Loudun visiter Sainte-Marthe. Singulière coïncidence! le fils du grand historien devait, quelques années plus tard, être victime comme Grandier de la vengeance du cardinal.

Les plus grandes illustrations de la France accoururent chez Sainte-Marthe. «Sa maison, nous apprend Urbain Grandier, ordi-

«nairement fréquentée de plusieurs gens d’honneur et de vertu,

«a été une belle eschole où chacun pouvoit apprendre les règles

«de bien vivre et la pratique des vertus plus enviées.»

Le prince de Galles se détourna exprès de sa route pour venir à Loudun «meü par la même curiosité qui porta jadis la

«Reyne de Saba à visiter le grand Salomon lequel avoit étonné

«tout l’univers du bruit de sa renommée .»

Mais celui qu’affectionnait le plus Sainte-Marthe après Grandier, c’était le procureur du roi, Louis Trincant, qui, dans la suite, devait jouer un si triste rôle. Trincant était considéré comme l’enfant de la maison. Les fils de Sainte-Marthe le traitaient en frère: «Né la même année qu’eux, enfans de pères

«qui ont vécu toute leur vie en grande amitié, nous avons,

«dit-il dans ses mémoires , dès le commencement de notre

«puberté demeuré ensemble, faict nos études sous les mêmes

«maîtres, suivi le parlement de Tours et de Paris et enfin séparés,

«avons toujours entretenu notre sincère amitié par lettres fami-

«lières et fréquentes tellement qu’il y a plus de cinquante-deux

«ans que nous vivons de la sorte.»

Le procureur du roi était considéré à Loudun. Magistrat d’un grand savoir, poète et historien , il avait été nommé en 1614 député du Tiers-État aux États généraux et s’était acquitté avec honneur de son mandat.

Catholique ardent, il fut de bonne heure un adversaire acharné des doctrines nouvelles. Les Réformés, qu’il ne ménageait guère, le détestaient. Son caractère et son esprit fin et délié devaient nécessairement plaire à Grandier; en effet, ces deux hommes se lièrent ensemble d’une étroite amitié que la présence du vieux Scévole ne faisait encore que resserrer. Tant que vécut ce dernier, cette amitié ne se démentit pas un seul instant.

Mais les infirmités vinrent accabler le vieillard, faisant pressentir une catastropha prochaine. Cependant, grâce aux soins de ses deux excellents amis qui jusqu’à la fin l’entourèrent d’une piété presque filiale, Scévole vécut quelque temps encore. On voyait que cette belle intelligence avait peine à quitter le monde où la retenaient tant d’amitiés et de tendresses.

Dès les premiers jours du mois de mars de l’année 1623, ses facultés intellectuelles baissèrent sensiblement. Le 29 du même mois, de grand matin, le curé de Saint-Pierre fut appelé près de lui en toute hâte. On disait que le vieillard n’avait plus que quelques heures à vivre. Grandier, en effet, trouva Sainte-Marthe presque inanimé et paraissant ne pas avoir conscience de ce qui se passait autour de lui. Il eut alors, pour le réveiller, l’ingénieuse idée de lui murmurer à l’oreille quelques-unes de ses plus belles poésies sacrées. Tout aussitôt, le vieux poète se sent revivre; il revient à lui, reconnaît son curé et peut de cette main amie recevoir les derniers sacrements. Quelques heures après, Sainte-Marthe s’éteignait sans souffrance au milieu des siens, dans les bras d’Urbain Grandier, qui n’avait point voulu l’abandonner.

Le bruit de cette mort se répandit bien vite dans Loudun et y causa une affliction générale: on s’arrêtait et on pleurait. En même temps chacun voulait savoir l’heure et le jour des honneurs funèbres, pour accompagner à sa dernière demeure celui qui tout à la fois avait été le sauveur et le plus glorieux enfant de la cité.

La ville de Loudun tout entière prit le deuil. On fit à Scévole de magnifiques funérailles. Les magistrats, les officiers de la ville, un concours immense de peuple, accouru de tous les points de la province, firent cortège à la dépouille de Sainte-Marthe jusque dans l’église Saint-Pierre-du-Marché, où ses obsèques furent célébrées par Urbain Grandier, que l’émotion et une sincère douleur empêchèrent de parler .

Le 11 septembre de cette même année, la vaste enceinte de l’église Saint-Pierre se trouvait trop petite pour contenir la foule qui se pressait à un service célébré en l’honneur de Sainte-Marthe. De Poitiers, de Chinon, de Çhâtellerault, étaient venues de nombreuses députations apporter un dernier et respectueux hommage au grand poète. Urbain Grandier monta en chaire et prononça, au milieu du recueillement général, l’oraison funèbre de l’illustre défunt. Dès les premiers mots, il sut communiquer à son auditoire l’émotion qui s’était emparée de lui. En larges traits, il retraça la vie de son ami; jamais, dans aucun de ses sermons, il ne s’était élevé à pareille hauteur; il fut tout à la fois éloquent, ému et passionné. L’amitié lui inspira les pensées les plus touchantes et le récit de la délivrance de la patrie arracha des larmes de reconnaissance à tous les assistants.

«Messieurs, s’écriait-il dans un véritable mouvement d’enthou-

«siasme, au récit d’une telle action, ne vous sentez-vous point

«obligés de bâtir dans votre esprit un temple vivant à la mémoire

«de celui qui, comme un ange gardien de son pays, a détourné

«d’une main officieuse le coup fatal qui alloit tomber sur le corps

«de votre ville. Et toi, peuple de Loudun, autant de fois que tu

«verras le lierre rampant sur tes vieilles murailles, tu dois conce-

«voir une religieuse souvenance de celui qui te les a conservées.»

Il fit ensuite un chaleureux éloge des dignes fils de Sainte-Marthe, qui continuaient les traditions de leur père, et qui, plus tard, devaient si grandement honorer leur ville natale. Il sut également flatter l’amour-propre du procureur du roi en faisant une allusion délicate aux vers que le nom de Sainte-Marthe avait inspiré à Trincant.

Nous ne voulons point ici analyser cette oraison funèbre. Nous dirons seulement que c’est un monument curieux de cette éloquence du temps, plein de traits d’esprit et de jeux de mots, qui préludait par la recherche et l’effort à la grandeur simple et naturelle du siècle de Louis XIV .

Aujourd’hui, une pareille magnificence de langage, un tel éclat dans les expressions paraîtraient à coup sûr exagérés. Grandier se conforma au goût de son temps; mais nous devons lui savoir gré de s’être montré bien supérieur dans ce genre d’éloquence à tous ses prédécesseurs.

La péroraison mérite surtout d’être conservée. Elle est touchante et grave et remua profondément la foule déjà impressionnée par ce lugubre appareil, ces lumières et ces tentures qui ornaient la nef de Saint-Pierre.

«Telle a été la vie de Sainte-Marthe, Messieurs, telle a été sa

«mort; mort à la vérité pleine de regrets, mais vie beaucoup plus

«féconde en consolations. Car celuy là ne doit point être regretté

«dont l’extrême vieillesse a franchi de bien loin le terme ordinaire

«de la vie de l’homme; qui de plus a porté sa réputation au-

«delà des plus ambitieux souhaits et qui enfin, par la constance de

«sa vie au bien et par les circonstances de sa mort, nous a donné

«juste sujet de désirer, espérer et croire que son âme vit

«heureuse au ciel pendant que son corps repose dans le sein de

«notre commune mère, en attendant le jour solennel auquel,

«suivant le divin et infaillible oracle, il rajeunira pour ne plus

«vieillir, et renaîtra pour ne plus mourir.»

Cette oraison funèbre mit le comble à la réputation de Grandier comme orateur; de toutes parts les témoignages les plus flatteurs d’admiration lui furent adressés. Abel de Sainte-Marthe qui avait eu tant à se louer des bons soins, de la piété filiale et du dévouement sans bornes dont le curé avait entouré les derniers moments de son père, lui consacra une pièce de vers latins pour en éterniser le souvenir. Le procureur du roi, Louis Trincant, si délicatement flatté dans cette oraison voulut, lui aussi, s’acquitter envers Urbain Grandier, et lui envoya le compliment suivant:

Ce n’est pas sans grande raison

Qu’on a choisi ce personnage

Pour entreprendre l’oraison

Du plus grand homme de son âge;

Il falloit véritablement

Une éloquence sans faconde

Pour louer celuy dignement

Qui n’eut point de second au monde.

Ce succès eut pour résultat de ramener à Grandier quelques personnes prévenues et passionnées; pendant un certain temps ses adversaires furent réduits au silence et n’osèrent rien entreprendre. Ses talents, sa belle conduite, son dévouement pour le plus illustre citoyen de Loudun avaient suffi pour opérer ce miracle,


Urbain Grandier et les possédées de Loudun

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