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PREMIÈRE PARTIE.

Table des matières

LES SOURCES.

M. l’abbé Gramidon fait une fort longue énumération des sources auxquelles il a puisé. Il me permettra de ne pas la prendre complétement au sérieux. A vrai dire, il n’a guère étudié que deux ouvrages: l’un, pour le combattre: c’est celui dont je suis l’auteur infortuné ; l’autre, pour le défendre et l’exalter: c’est celui dont la Révérende Mère Prieure de Meaux est l’heureux éditeur. Tout le reste lui a été fourni de seconde main. Il ne semble même connaître que par des extraits le livre du P. Louis de Sainte-Thérèse, dont la Mère Élisabeth, ainsi que je vais le dire, avait discrètement caché le nom, et dont il ne transcrit le titre que d’une manière incomplète et inexacte. Je crois donc nécessaire de donner au lecteur quelques renseignements sur cette nouvelle édition de la Vie de saint Jean de la Croix, afin qu’il puisse apprécier à leur valeur les documents sur lesquels s’appuie M. Gramidon.

En 1727, le P. Dosithée de Saint-Alexis, Carme déchaussé, publia une fort bonne vie de saint Jean de la Croix, suivie d’une «Histoire abrégée de ce qui s’est passé de plus considérable dans la Réforme du Carmel .» Dans cette histoire (livre X, chap. IX-XVI), le P. Dosithée raconte l’établissement du Carmel en France, et rend hommage, chemin faisant, aux vertus des Carmélites de France et à celles du P. de Bérulle.

Que fait la Révérende Prieure de Meaux? Elle copie scrupuleusement le P. Dosithée jusqu’au chap. xv, p. 313, où elle commence à insérer de nouveaux documents, sans prévenir que ce n’est plus le P. Dosithée qui parle, et elle omet toute la fin de ce chapitre, qui a bien sa valeur. Après avoir fait allusion aux troubles de l’Ordre et à la décision du Saint-Siége, d’après laquelle les Carmélites en France devaient demeurer exemptes de la juridiction des Carmes déchaussés, et celles qui voudraient être sous l’Ordre devaient passer en Flandre, le P. Dosithée ajoute: «Les choses sont restées de la sorte

«jusqu’à présent, et quoique les Carmélites de France

» aient introduit certains changements dans leur ma-

» nière de vivre, comme par exemple à l’égard du nom-

» bre de Religieuses dans chaque monastère qui ne

» devroit jamais excéder celui de vingt et un, on doit

» leur rendre ce témoignage qu’elles ont toujours con-

» servé jusqu’à présent le véritable esprit de sainte

» Thérèse ce qui les fait admirer de tout le monde, qui

» est tous les jours de plus en plus édifié de la ferveur

» avec laquelle elles tendent à la perfection de leur

» état.» Tel n’est pas l’avis de la Mère Prieure de

Meaux, comme le prouvent ses circulaires nombreuses. Aussi a-t-elle supprimé tout ce passage. En d’autres termes, la Révérende Mère Élisabeth de la Croix ne publie la vie de saint Jean de la Croix, par le P. Dosithée de Saint-Alexis, que pour y insérer des documents qui n’ont nul rapport à saint Jean de la Croix, qui ne sont pas dus à la plume du P. Dosithée, et qui sont absolument contraires à son esprit.

Il est bien vrai que, dans un court avertissement placé en tête du troisième volume, la Mère Prieure de Meaux écrit ces paroles: (Ceux qui aiment le Carmel)

«liront avec joie les documents historiques, si rares et

» si précieux, que nous avons la consolation de sauver

» de l’oubli, et qui remettront la vérité dans tout son

» éclat et son vrai jour.» Mais ces documents, où en commence, où en finit l’insertion? Quel est leur auteur? Quelle est leur valeur? Voilà ce qu’oublie de dire la Prieure de Meaux, omission d’autant plus singulière que, dans l’avertissement du premier volume, elle nomme un autre auteur auquel elle compte faire des emprunts en ce qui concerne la vie de saint Jean de la Croix, le P. Pierre de Saint-André.

Je vais tâcher de réparer l’omission de la Mère Élisabeth de la Croix. «Les documents si rares et si précieux» qu’elle publie, se trouvent tout au long dans un volume in-folio de 184 pages, divisé en trois sections et soixante-trois chapitres. Il a pour titre: Abrégé de l’establissement des Carmélites de France . Cet abrégé est la suite d’un autre ouvrage du même format et publié à Paris, chez Angot, en 1665, sous le titre d’Annales des Carmes déchaussés de France et des Carmélites qui sont sous le gouvernement de l’Ordre. L’auteur est le P. Louis de Sainte-Thérèse, Carme déchaussé, visiteur général.

L’Abrégé de l’establissement se termine brusquement, pour un motif que la Révérende Mère Prieure de Meaux ne nous donne pas, mais que nous apprend le P. Lelong: «Cet abrégé n’a pas été entièrement imprimé »,

dit-il, «parce que le supérieur de l’auteur ne voulut

» rien avoir à démêler avec les Carmélites de France.»

Le document si rare, que la Révérende Mère Prieure de Meaux se fait une joie d’offrir aux amis du Carmel, est donc un ouvrage qu’en plein dix-septième siècle le général des Carmes, soucieux de garder la paix, faisait défense à un de ses Religieux de publier.

Si du moins, puisqu’elle tient «à sauver de l’oubli» le travail du P. Louis de Sainte-Thérèse, la Mère Elisabeth le publiait intégralement! Malheureusement elle traite le P. Louis de Sainte-Thérèse comme le P. Dosithée de Saint-Alexis, elle n’y prend que ce qui lui plaît.

C’est ainsi qu’après avoir poussé le scrupule de la fidélité jusqu’à copier les éloges décernés par le P. Louis au fameux Palafox, et qui ne seront certainement pas ratifiés par le R. P. Bouix, la Mère Prieure de Meaux fait des suppressions de nature à égarer complétement le jugement du lecteur.

L’ouvrage du P. Louis de Sainte-Thérèse est en effet divisé, comme je l’ai déjà dit, en trois sections. La troisième contient les chapitres suivants:

CHAPITRE LIX. Des visiteurs desdites Religieuses.

CHAP. LX. Urbain VIII rétablit le visiteur triennal et en adjoint un deuxième.

CHAP. LXI. Des trois supérieurs des Carmélites de France establis par Clément VIII.

CHAP. LXII. Diversité de manuels et de constitutions parmy les Carmélites de France.

CHAP. LXIII. Règlements faits pour les Carmélites de France par leurs supérieurs et Souverains Pontifes.

De ces chapitres, la Révérende Mère Prieure de Meaux ne cite rien. Ce ne sont plus des documents rares et précieux. Pourquoi? Parce que le seul énoncé de ces chapitres prouverait combien sont légitimes l’existence et le gouvernement du Carmel de France, que les Souverains Pontifes ont réglé et surveillé avec tant de soin.

Telles sont les pièces que la Révérende Mère a eu la consolation de sauver de l’oubli. On voit quel fonds un lecteur sérieux peut faire sur des documents dont on ne donne ni la source, ni l’auteur, ni la totalité. Ces documents, je ne les discute pas en eux-mêmes. On peut voir ailleurs quelle importance il convient d’y attacher. Je vais du reste y revenir en parlant du volume de M. Gramidon.

Les Carmélites de France et le cardinal de Bérulle

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