Читать книгу Histoire de l'abbaye de Saint-Maixent et sur ses abbés - Hilaire Ravan - Страница 19
828-855.
ОглавлениеSur la liste des abbés de Saint-Maixent figure à la suite de Rainaud, le religieux Abbon, élu par la communauté à une grande majorité. Ce serait lui qui, en 828, aurait reçu dans l’abbaye Pépin Ier, roi d’Aquitaine, qui y serait venu pour assister à la célébration des fêtes de Pâques. Aussitôt son arrivée à la ville, il fut conduit en pompe aux tombeaux de saint Maixent et de saint Léger. Cette cérémonie observée, Pépin prit un bain, conformément à l’usage du temps, puis il fut se revêtir de ses ornements royaux, à cause de la solennité de la fête, et assista aux offices du jour. A son retour de l’église, les moines se jetèrent à ses pieds et Gundacrus, leur prieur, portant la parole, lui exposa le triste état du monastère, qui jouissait anciennement des revenus de plus de quinze mille manoirs et se trouvait alors réduit au revenu du dixième de la dîme d’un millier; que les bâtiments du monastère étaient tombés en ruine et qu’on ne pouvait, faute de bois, réparer les charpentes. Touché de ces doléances, le roi d’Aquitaine ordonna qu’on rendrait aux religieux les domaines qui leur appartenaient, et que l’on fournirait à l’abbaye, en le prenant dans les forêts royales, tout le bois nécessaire pour la réparer.
Le passage de ce prince fut marqué par de nouveaux bienfaits. Les moines, se plaignant d’avoir perdu plusieurs menses ou revenus, le souverain vint à leur aide et répara le préjudice qu’ils avaient éprouvé. Ces actes de bienfaisance se trouvant rapportés dans une notice remarquable souscrite vers 830, par Ebles, comte de Poitou, nous allons en donner la traduction:
«Comme il est connu par la relation des anciens, Pépin, roi
«d’Aquitaine, fondateur de monastères, surnommé le Pieux, fils
«de l’empereur Louis-le-Pieux, après avoir opéré beaucoup d’œu-
«vres dignes de louanges qui lui méritèrent la vie éternelle, dési-
«rant accroître les dons des rois ses prédécesseurs, accorda sur
«ses propres biens, à Saint-Adjutor-Maixent, l’église Bracidu-
«nensis, qui est un bourg, l’église de Périgné, avec dix-huit
«paroisses, des terres et tout ce qui en dépend.
«Il donna aussi son propre alleu qui ensuite a été appelé
«Malcistais, avec des terres cultivées et incultes, et les églises
«qui furent ensuite bâties, le château n’existant pas encore. Après
«la mort de Pépin, le roi Charles-le-Chauve, son frère, voulant
«confirmer ce don, ordonna qu’une chapelle fût érigée au même
«lieu, en l’honneur de saint Maixent. Mais les fidèles de la con-
«trée, peu de temps après, édifièrent par son ordre, près de
«la même chapelle et dans le même alleu, une église en l’honneur
«de saint Pierre, chef des apôtres. Or, quelque temps après, les
«Normands se répandirent dans toute l’Aquitaine, dévastant tout,
«par la permission de Dieu; ils détruisirent presque entièrement
«le monastère royal de Saint-Adjutor, et la plupart des domaines
«acquis par les moines furent convertis en déserts et tombèrent
«dans l’oubli. Mais longtemps après, le très-noble Ebles, évêque
«de Limoges et comte de Poitou, touché de l’état de désolation
«d’un lieu si notable et animé d’un vif désir de le restaurer, du
«consentement de son frère Guillaume, duc d’Aquitaine, fit
«construire, d’abord un château dans l’enceinte du monastère,
«puis, recherchant avec soin les églises, les biens et tout ce que
«les rois ou les puissants et les autres fidèles avaient donné à ce
«monastère, non-seulement ce qui est désigné ci-dessus, mais
«encore beaucoup d’autres choses qu’il découvrit dans les chartes,
«et restitua le tout au monastère susdit et pria le duc d’Aquitaine
«et les principaux seigneurs du pays de souscrire cette charte.»
«Ebles y traça une croix de sa propre main, laissant cela pour
«servir de mémoire à la postérité.»
«Ont souscrit: Guillaume, duc d’Aquitaine, surnommé Tête
«d’Etoupes; Roger, Audouin, Geoffroi vicomte, Cadilnot
«vicomte, Ebles évêque très-noble et comte de Poitou.»
Ainsi que le démontre la charte dont nous venons de donner le sens, Pépin Ier ne fut pas le seul bienfaiteur de l’abbaye de Saint-Maixent, le comte Ebles, à l’exemple de ce monarque, ajouta lui aussi aux libéralités faites par le prince, plusieurs biens et domaines. Pépin II, également roi d’Aquitaine délivra, le 24 mars 848, des lettres patentes en faveur de ce même monastère et de toutes ses. dépendances.
Si les princes que nous venons de nommer se firent connaître par des actes de bienfaisance en faveur des religieux de Saint-Maixent, il importe aussi de signaler combien l’abbé et ses moines étaient animés du désir de faire le bien; c’est ainsi qu’en 850, ils donnèrent l’usufruit de quelques domaines à un homme du nom de Fausbert, à son frère et à ses enfants, à condition qu’après leur mort ces domaines leur retourneraient.
Au moment où cette abbaye, connue dans l’Europe chrétienne par l’austérité des mœurs de ses religieux et par leur fervente piété, jouissait de la splendeur et de la célébrité, tout-à-coup les Normands envahissent le Poitou. Ces auxiliaires des princes Aquitains, qui s’étaient montrés de loin sous Charlemagne, plus près sous Louis-le-Débonnaire, enhardis par les discordes de ses enfants, par l’impuissance où les réduisaient les guerres civiles, pénétrèrent en 853 dans l’intérieur du Poitou, qu’ils parcoururent et ravagèrent en toutes ses parties. Pour la seconde fois, l’irruption de ces hordes du Nord fut fatale à l’abbaye; elle fut pillée, dévastée par ces cruels barbares; c’est pourquoi les religieux de l’abbaye, ou mutilés ou mis en fuite, se retirèrent dans d’autres lieux et abandonnèrent tous leurs biens.
Pendant les malheureux événements qui signalèrent l’administration de l’abbé Abbon, les religieux de Saint-Maixent qui n’avaient jamais perdu de vue le monastère consacré à leurs prières, et dans la possession duquel ils avaient toujours espéré rentrer, se décidèrent enfin, après deux ans d’absence, à y retourner. Aussitôt après leur prise de possession, leurs premiers soins furent de réparer l’affreux désastre qui avait eu lieu, puis de procéder à l’élection de leur abbé.