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LA MUSETTE

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Je suis triste comme une feuille d'automne.

Mon installation de trois mois n'était qu'une vague mystification. Demain, la plaine me verra de nouveau engendrer des triangles de mes jambes fatiguées.

C'était écrit que ce Bou-Amema introuvable serait partout au même moment.

Poussant une pointe à l'ouest; la rumeur l'annonce à l'est, et le petit journal *** contredit ces deux données, et le place aux antipodes.

C'est un rude Bou-Amema que ce révolté-là, et la multiplication des pains de l'Évangile devrait bien se voiler la face devant lui.

Plus nous marchons, plus il se sauve, en cela réside toute la guerre que nous faisons ici.

Le mode d'agir de ce guerrier est quelque peu original. Je me permets de vous instruire là-dessus.

Il arrive près d'une de nos tribus fidèles:

—Voulez-vous me suivre?…

—Hein!… vous refusez?… psitt… têtes coupées.

—Vous venez?… très-bien… troupeaux razziés.

Aimable alternative! cous hachés d'un côté et pillage de l'autre. Voilà où en sont nos Arabes fidèles.

Vis-à-vis des Européens, il est plus et même trop galant.

Il fusille les hommes, embrasse et viole les femmes, enlève les enfants, se moque des colonnes lancées à sa poursuite, et va tranquillement faire sa sieste dans ses utiles Ksours du Sahara.

Nous, les Français, nous sommes bons, archibons,—je ne dirai pas bêtes,—pour ce garçon-là, et je conseillerais de le fusiller et de le refusiller, si nous le pinçons, ce qui est problématique.

Enfin, vogue la galère, et va pour la poursuite!

Cela ne m'empêchera morbleu pas de continuer à édifier le chef-d'oeuvre du Voyage autour de ma tente, coûte que coûte.

Et moi qui voyageais si doucement! J'étais bien heureux dans ma tranquillité de sybarite! Que l'alfa de ma couche me semblait tendre!

Sauf les quelques milliers de puces qui me stimulaient, je passais de si belles nuits sans sommeil!

Les jours, se succédant, accumulaient dans mon âme une si abondante dose d'un ennui bienfaisant!

Comme la riante et boueuse rivière chantait bien, en courant gaiement, entre les roseaux de ses rives vaseuses!

Quelles luttes n'ai-je pas eu à soutenir contre les moustiques, assidus visiteurs de mes pénates!

Quel… Mais j'étais sur le point d'oublier le siroco du désert, le classique siroco du Sahara, le seul siroco qui existe.

Ingrat! j'allais oublier ses passages quotidiens.

Fidèle au rendez-vous, le siroco annonçait chaque soir son arrivée par un je ne sais quoi qui nous faisait immédiatement entrer sous la tente et fermer tout.

Et les scorpions! familiers du voisinage, ils habitaient les sacs, les couvertures, les habits et exigeaient une hospitalité soutenue qu'ils payaient d'un coup de dard!

Le majestueux cafard, grave, inoffensif et ne demandant que la vie sauve, venait aussi rouler sa boule dans notre camp!

Et les araignées! Et les tarentules! Et les mouches! Et les coléoptères de tous grades et de toutes espèces, camarades, à effets gradués d'embêtement, dont la présence savait si bien charmer mon réduit! Hélas! je vous quitte tous, et demain je pars!

J'implore votre sensibilité, cher lecteur, car c'est ici, je vous le dis en vérité, l'endroit où vous devez la faire entrer en scène.

Versez donc deux pleurs au moins, et ma musette vous en sera reconnaissante.

Ma musette est voisine de mon képi. Elle infléchit vers le nord-est.

Son ventre regorge d'un monde que je mettrai à découvert plus tard.

Je l'ai un peu négligée dans ce chapitre, mais j'ai des retours touchants, et je saurai bien me faire pardonner cet oubli apparent.

Je ne sais d'où vient la musette. Dès les temps les plus reculés, la musette existait. On l'appelait besace ou de tout autre nom.

La musette remplace avantageusement, chez l'humble militaire, l'élégante sacoche de nos officiers.

Les billets de banque et quelques luxueux articles de toilette encombrent la sacoche. Un morceau de pain, plus souvent un biscuit, accompagné de quelques grains de riz et de café, composent toute la cargaison d'une musette ordinaire.

On y ajoute cependant, dans certaines circonstances rares, du lard, des oignons, de l'ail; mais c'est du dernier luxe.

Quelques troupiers, très-belliqueux, arrangent leur musette en un étui long et effilé, dans lequel ils faufilent leurs cartouches.

La proximité de l'ennemi recommande cette mesure. Cependant, j'en suis encore à m'en demander l'urgence en face de Bou-Amema, qui ne nous a pas gâtés de son voisinage.

La musette se porte en bandoulière au moyen d'une banderole d'épaule. Trente centimètres de long sur vingt de hauteur sont les calculs de ses dimensions les plus en vogue.

La partie intérieure dépasse la partie extérieure d'une certaine longueur, qui se rabat et s'attache à deux boutons.

La toile est l'étoffe de sa confection. Voilà la musette.

La mienne n'entre pas dans la catégorie des musettes ordinaires, et je cache dans ses replis une longue liste d'objets, que je tâcherai de déchiffrer plus tard.

Il me faut, pour cela, un peu de recueillement. Là-dessus, croyez-m'en, passons au havre-sac.

Expéditions autour de ma tente: Boutades militaires

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