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VI

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Aussitôt que le filleul a tué le brigand, les murs se dressent de nouveau, et le salon reprend son aspect ordinaire. La porte s’ouvre et le parrain entre. Il s’approche de son filleul, le prend par la main, le fait descendre du trône, et dit:

— Tu n’as pas obéi à mes ordres: la première mauvaise chose que tu as faite, c’est d’avoir ouvert la porte défendue; la deuxième mauvaise chose que tu as faite, c’est d’être monté sur le trône et d’avoir pris mon sceptre dans ta main; la troisième mauvaise chose que tu as faite, c’est de t’être mis à juger les gens. L’ourse a une fois repoussé le morceau de bois, elle a dérangé ses oursons. Elle l’a repoussé une autre fois, elle a tué le guide. Une troisième fois elle l’a repoussé, elle s’est tuée elle-même. C’est ce que tu as fait aussi.

Et le parrain fit monter le filleul sur le trône, et prit le sceptre entre ses mains. Et de nouveau les murs tombèrent, et de nouveau l’on vit.

Et il dit, le parrain:

— Regarde maintenant ce que tu as fait à ton père. Voilà que Wassili a passé un an en prison. Il y a appris tout le mal, et il est devenu tout à fait enragé. Regarde, voilà qu’il vole des chevaux chez ton père, et, tu le vois, il met le feu à la maison. Voilà ce que tu as fait à ton père.

Dès que le filleul eut vu mettre le feu à la maison de son père, le parrain lui voila ce spectacle, et lui ordonna de regarder un autre endroit.

— Voilà, dit-il, le mari de ta marraine. Depuis un an qu’il a quitté sa femme, il s’amuse avec d’autres, tandis qu’elle, après avoir lutté, lutté, a fini par prendre un amant. Et la maîtresse s’est perdue tout à fait. Voilà ce que tu as fait à ta marraine.

Le parrain voila aussi ce spectacle, et montra au filleul la maison des siens. Et il aperçut sa mère: elle pleurait sur ses péchés, et se repentait, et disait: «Il valait mieux que le brigand me tuât alors: je n’aurais pas fait tant de péchés.»

— Voilà ce que tu as fait à ta mère. Le parrain voila aussi ce spectacle, et lui dit de regarder en bas. Et le filleul aperçut le brigand: le brigand était tenu par deux gardes devant la prison. Et il dit, le parrain:

— Cet homme a tué neuf âmes. Il devait lui-même racheter ses péchés. Mais tu l’as tué, et tu t’es chargé de tous ses péchés: c’est maintenant à toi d’en répondre. Voilà ce que tu t’es fait à toi-même… Je te donne un délai de trente ans: va dans le monde, rachète les péchés du brigand. Si tu les rachètes, vous serez libres tous les deux; mais si tu ne les rachètes pas, c’est toi qui iras à sa place.

Et le filleul dit:

— Mais comment racheter ses péchés?

Et le parrain lui répondit:

— Quand tu auras détruit dans le monde autant de mal que tu en as fait, alors tu rachèteras tes péchés et ceux du brigand.

Et le filleul demanda:

— Mais comment détruire le mal?

— Marche tout droit du côté où le soleil se lève, dit le parrain. Tu trouveras un champ, et dans le champ, des gens. Observe ce que font les gens, et apprends-leur ce que tu sais. Puis, marche plus loin, remarque tout ce que tu verras. Le quatrième jour tu arriveras dans une forêt; dans la forêt, tu trouveras un ermitage; dans l’ermitage demeure un vieillard. Raconte-lui tout ce qui est arrivé. Il t’enseignera. Quand tu auras fait tout ce que le vieillard t’aura ordonné, alors tu rachèteras tes péchés et ceux du brigand.

Ainsi dit le parrain. Il reconduisit le filleul hors du palais et ferma la porte.

Tous les Contes de Léon Tolstoi (151 Contes, fables et nouvelles)

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