Читать книгу Un chapitre de l'histoire des enfants trouvés - Léon Lallemand - Страница 11
Subventions et concessions royales.
ОглавлениеL’édit de 1670 portait confirmation expresse des donations antérieures, ainsi que de la part contributive mise à la charge des justiciers par les arrêts de 1667. Quatre ans plus tard, le 1er décembre 1674, le roi ayant par son édit du mois de février précédent réuni à la justice royale des Châtelets de Paris «toutes les hautes justices de l’archevêché, du chapitre de Notre-Dame et des abbayes, prieurés et chapitres dans la ville, fauxbourgs et banlieue de Paris», se chargea de l’acquittement des sommes dues de ce chef à l’hôpital des enfants trouvés, en portant la redevance à vingt mille livres, eu égard aux charges croissantes de l’établissement .
Cette libéralité maintenue jusqu’à la Révolution n’empêchait pas les dons extraordinaires dans les circonstances pressantes. Ainsi, le 9 mars 1767, comme il résultait de l’examen des états remis au contrôleur général qu’un secours de 120,000 livres était absolument nécessaire, le roi autorisa l’allocation annuelle de cette somme, indépendamment du secours de 150,000 livres déjà assigné le 1er janvier 1767 sur la caisse d’escompte et qui prit fin avec cette caisse en 1769 .
En vue de favoriser une maison d’une telle utilité, une part lui était attribuée également dans les droits perçus sur les objets entrant dans Paris.
L’arrêt du conseil (7 juin 1695) ordonne notamment qu’il sera opéré distraction au profit de l’hôpital des enfants trouvés sur l’octroi du vin (trente sols par muid), «la quatorzième partie de ce qui est touché par l’Hôtel-Dieu et la cinquième partie de ce qui est reçu pour l’hôpital général .» Au siècle suivant ces droits furent étendus à maintes reprises concurremment avec ceux établis pour l’hôpital général. Une des dernières déclarations faites dans ce sens est du mois de juin 1783 .
Un des moyens le plus fréquemment employés au siècle dernier pour constituer, en dehors des octrois, des revenus aux établissements hospitaliers, était la concession de loteries. Ce mode de subvention; qui tend à reparaître en ce moment dans des proportions désastreuses, est condamné par l’expérience et la science économique. L’argent ainsi recueilli en vue d’un gain trompeur sert pour une forte part à solder les intermédiaires; il est prélevé sur l’épargne du pauvre; en outre l’espoir d’une chance favorable, continuellement entretenue par la fréquence des tirages, détruit chez lui toute idée de travail et de prévoyance, seul véritable moyen d’améliorer son sort.
Quoi qu’il en soit, la loterie était un moyen usité et les enfants trouvés eurent la leur.
Sur la demande faite en 1717 par M. de Mesmes, premier président du parlement de Paris et l’un des chefs de l’administration de l’hôpital général, basée sur les dépenses croissantes de la maison, le Roi, de l’avis de Monseigneur le duc d’Orléans, accorda une loterie à vingt-cinq sols le billet dont on devait retirer cinq sols au profit de l’établissement «digne d’une charité et d’une attention particulières » .
Cette disposition fut ensuite modifiée avant d’avoir été exécutée et la loterie ne commença en réalité qu’au mois de mai 1721. Le billet étant fixé à 20 sols avec 15% de bénéfice pour les enfants trouvés ce qui produisait annuellement, en moyenne, plus de 240,000 livres.
Un arrêt du conseil d’Etat attribua en outre à l’hôpital les lots non reclamés .
Cette situation prospère continua jusqu’en 1755, où les abbés et chanoines réguliers de Sainte-Geneviève dont l’église menaçait ruine obtinrent du roi que les billets des trois loteries qui se tiraient alternativement chaque mois dans la ville de Paris en faveur de l’église Saint-Sulpice, des enfants trouvés et de plusieurs communautés religieuses seraient augmentés d’un cinquième et fixés à 24 sols, «pour être le produit de la moitié de cette augmentation appliqué sans déduction d’aucun frais à la reconstruction de la dite église .»
Cette mesure fut désastreuse et les recettes baissèrent dans des proportions énormes.
«Les sages et pieuses intentions de Sa Majesté (disent les administrateurs de la maison de la Couche ), pour la reconstruction d’une église précieuse aux habitants de la ville de Paris, la vénération et la confiance que ces habitants ont de tout temps eues dans la patrône de cette ville, sembloient promettre qu’ils redoubleroient leur ardeur et leur empressement à faire le fonds de ces loteries et à l’augmenter; mais le public, attentif à son interrest particulier et à ce qui peut luy être avantageux... plusieurs dès le premier mois de l’établissement de cette augmentation ont borné leur interret, d’autres ont cessé de s’interresser à ces loteries, ce qui depuis la dite augmentation des quatre sols a occasionné une diminution considérable... plus de 144,000 livres par année.»
Des palliatifs furent essayés sans succès, et en 1762 l’hôpital devait à l’abbaye de Sainte-Geneviève pour les sept années écoulées depuis l’établissement de cette augmentation une somme totale de 584,238 I. 17 s. qu’il était dans l’impossibilité de payer, la réduction des recettes coïncidant avec une augmentation du chiffre des admissions, et les administrateurs ayant appliqué cet argent au fur et mesure des besoins à la subsistance des enfants et à leur placement en nourrice dans les provinces .
L’abbaye ainsi lésée se pourvut au Conseil, qui, en présence du texte formel de la concession, ne put que rendre des arrêts ordonnant le paiement (9 décembre 1754, 20 janvier 1762), les directeurs formèrent opposition le même jour, et répandirent un mémoire exposant leur triste situation financière. Des secours royaux comblèrent en partie le déficit, ainsi que nous l’avons vu plus haut, et en 1776 la question perdit de son intérêt par la suppression de toutes les loteries et la création d’une seule dite loterie royale de France, à laquelle était unie celle précédemment accordée aux enfants trouvés . La part faite à l’hôpital, basée sur la moyenne des dix premières années et qui ne devait être alors que de 97,602 I. 5 s. 4 d., fut, sur les réclamations des directeurs, et afin de venir en aide à la maison, augmentée et portée à 140,234 1. 17 s. 8 d. .
Ces loteries occasionnaient, en dehors de la part réservée pour les lots, des frais très élevés: bureaux de placements dans les provinces, remises, etc. Au moment le plus florissant de l’institution, alors qu’elle produisait 240,000 livres par an de bénéfices, il fallait placer 1,600,000 billets à 20sols, pour obtenir cette somme; que d’argent inutilement employé, au détriment de la fortune publique et de l’épargne du peuple!