Читать книгу Contribution à l'étude de l'acclimatement des Français en Algérie - René Ricoux - Страница 7

V

Оглавление

Table des matières

Nous allons jeter un regard d’ensemble sur ce tableau général, en tenant compte de ses trois grandes divisions:

a. Accroissement de la population, abstraction faite des sources qui l’ont produite: immigration, bénéfice des naissances sur les décès; — b. Les naissances comparées dans les deux grands groupes des nationalités, leur progression; — c. Les décès, leur nombre absolu pris dans chaque année et comparativement par nationalités.

a. — MARCHE DE LA POPULATION. — Depuis le jour de l’occupation, la population, sauf des oscillations insignifiantes, a toujours. été en croissant . Les Français occupent le premier rang aujourd’hui encore, et sont à eux seuls plus nombreux que. la somme. des autres nationalités.

On remarquera des écarts considérables dans le chiffre des populations, d’une année à l’autre. Il va s’élevant pendant plusieurs années consécutives pour tomber ensuite à un chiffre bien inférieur, puis la progression se manifeste de nouveau pour aboutir à une chute nouvelle.

L’explication de ce phénomène est facile. Ces chiffres sont officiels. Les recensements ont lieu tous les cinq ans; dans les années intermédiaires, pour établir la population, on ajoute les arrivées, on déduit les départs connus, et ce reste est aujouté au chiffre du recensement antérieur.

Or, Philippeville est un port de débarquement, une ville de passage, il est très-difficile de tenir une balance exacte, et en fait, les chiffres fournis chaque année, sont des plus fantaisistes. Quand la cinquième année revient, comme le recensement ne tient compte que des personnes réellement présentes, il dénonce un chiffre bien inférieur à celui de l’année précédente, mais ce chiffre est le seul régulier.

Ainsi, par exemple, de 1854 à 1861, le nombre des Français et des étrangers va croissant; arrive le recensement de fin 1862, et la population de descendre, puis elle se relève pour redescendre (avec une différence de près de deux milliers) en 1867. Même phénomène après 1871.

On peut se convaincre une fois de plus, par ces exemples, du manque de soin et d’intelligence qui préside à la confection des registres de la comptabilité humaine.

Comment corriger des renseignements si erronés et établis d’une façon aussi fantaisiste? Malgré nos efforts et nos recherches, il nous a été impossible de le faire; le mieux a donc été de conserver les chiffres officiels en les donnant pour ce qu’ils valent.

Un état de choses aussi irrégulier, ne va pas cependant sans conséquences. Les coefficients annuels de mortalité et de natalité que nous aurons à dresser dans les chapitres suivants, seront calculés sur les chiffres de la population; il en résultera que ces coefficients seront trop faibles, tant pour les naissances que pour les décès:

Il est vrai que l’erreur en moins, portant à la fois sur les décès et sur les naissances, il peut paraître que la relation de celles-ci à ceux-là n’est pas changée, puisque les deux termes sont soumis à une diminution équivalente.

Toutefois, il faut remarquer que la partie flottante de la population, cause de l’erreur, fournit beaucoup à la mortalité, et peu ou point à la natalité.

En sorte qu’il paraît légitime de conclure qu’en fait, la natalité devrait avoir un coefficient plus élevé, tandis que la mortalité qui frappe la population stable de la ville, est moindre que celle accusée par le coefficient, obtenu sur les chiffres officiels. D’où la conclusion que le rapport des naissances aux décès doit être, et est en réalité, plus avantageux que celui obtenu par le rapprochement des coefficients officiels.

b. — NAISSANCES. — Les naissances ont aussi généralement suivi une marche croissante: Les étrangers ont au total moins de naissances que les Français; mais dans les dernières années, bien que le chiffre de leur population reste sensiblement inférieur à la nôtre, ils tendent à fournir un plus grand nombre de naissances.

c. — DÉCÈS. — La marche des décès présente de grandes variations. A certaines époques: 1848-1849; — 1867-1868 (épidémies de choléra), les décès atteignent des chiffres effrayants, aussi bien chez les Français que chez les étrangers, comparativement au chiffre de leurs naissances.

Les décès des étrangers ont un total moins élevé et inférieur à celui de leurs naissances; le phénomène est inverse chez les Français.

Et cependant, les Allemands sont englobés dans la dénomination d’étrangers, et nous verrons plus loin, dans l’étude détaillée de la mortalité propre à chaque nationalité, combien les Allemands viennent en ligne désavantageuse.

Si l’on fait porter la comparaison sur la période tout entière des 36 années, et sur l’ensemble de la population prise en bloc, on trouve que les naissances atteignent à peine 10,000, tandis que les décès s’élèvent à 11,000.

Le fait est à signaler, malgré son apparence désavantageuse, mais sa signification réelle ne peut être ici déduite.

Quand nous aurons pénétré dans une analyse plus intime des éléments fournis par le tableau, il nous sera facile d’exposer leur valeur relative, qui ne peut être aperçue ici au milieu de renseignements bruts.

En attendant, il est un second fait intéressant aussi à signaler, et dont l’énoncé suffit pour corriger tout ce que le premier parait comporter d’inquiétant.

Depuis 35 ans, la proportion générale des décès, c’est-à-dire le rapport de l’ensemble des décès à l’ensemble de la population, tend à décroître. Cette amélioration de l’état sanitaire local est due, sans doute, à une existence mieux entendue, aux mesures d’hygiène publique mieux appliquées, en un mot, à toutes les causes qui facilitent l’acclimatement et constituent l’acclimatation.

Voici deux preuves de l’amélioration dont nous nous venons de parler, et que M. Bertillon, on l’a vu plus haut, a reconnue et formellement constatée. En prenant, d’une part, les deux premières années: 1839-1840, et de l’autre, les deux dernières: 1872-1873, on constate que dans la première de ces deux périodes, la mortalité générale était de 4,73 % (5,75 en 1839, et 3,71 pour 1840); tandis que dans la période contemporaine, la mortalité est descendue à 3,18 (3,26 pour 1872, et 3,1 pour 1873).

Ajoutons en regard que la natalité qui atteignait 2 % seulement en 1839, et 1,51 en 1840 (moyenne: 1,75), s’est élevée à 3,88 en 1872, et à 4,29 en 1873 (moyenne: 4,08).

Pour compléter la comparaison entre les deux époques de la création et du présent, nous dirons que les décès appartenant à l’armée, ne sont pas compris dans les chiffres du tableau, ni ceux des colons venus du dehors et qui sont morts dans les hôpitaux de Philippeville. Ces derniers sont portés dans les registres de leur commune respective, et nous ne discuterons, dans tout le cours de ce travail, que sur les chiffres propres à la commune de Philippeville avec ses annexes.

Or, les deux premières années de l’occupation ont été terribles pour l’armée.

«L’hôpital de Philippeville, dont la garnison n’était pas de

» 4,000 hommes, a compté, dit 1er janvier 1839 à la fin de l’année. » 122,901 journées, c’est-à-dire une moyenne de 340 malades par » jour. La proportion des décès y était plus forte que partout ailleurs, » elle était de 12,2 0/0; à Bouffarik, réputé le point le plus insalubre » de l’Algérie, elle n’était, à la même époque, que de 1 et 2,10 » seulement! Encore faut-il remarquer que sur 5,542 malades reçus » à l’hôpital de Philippeville, 932 avaient été transportés, par éva- » cuation, sur France ou sur d’autres points, et cependant 782 » étaient morts dans l’année! »

On voit quel pas immense a fait l’acclimatement.

En faut-il une autre preuve?

L’on sait que le caractère des races impropres à l’acclimatement est de fournir une mortalité considérable en temps d’épidémie;

Nous avons eu à subir deux épidémies cholériques assez désastreuses en 1848-49 et en 1867-68.

Les années 1848-49 accusent 972 décès; Le chiffre de la population à cette époque nous est inconnu officiellement, mais on peut l’estimer, et nous sommes plutôt au-dessus qu’au-dessous de la réalité, à 6,000 habitants; En adoptant ce chiffre, on constate que la mortalité générale a été de 8,1 % .

L’épidémie de 1867-68 a été moins terrible. Pendant ces deux années, il y a bien eu 1,061 décès, mais répartis sur une population d’environ 12,000 habitants. La mortalité n’est plus de 8,1 comme en 1848-49, elle est de 4,8 seulement.

On peut donc conclure que l’état sanitaire de notre localité ; si déplorable dans les premières années de l’occupation, va chaque jour s’améliorant.

Contribution à l'étude de l'acclimatement des Français en Algérie

Подняться наверх