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NAISSANCE DE PIERRE D'IBERVILLE.

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C'est au milieu de cette réunion de chrétiens exemplaires, de gentilshommes choisis, de militaires intrépides que s'élevaient les enfants des familles principales de Montréal: Le Ber, Saint-André, de La Porte, Decelles de Sailly, de Jacques et de Charles Le Moyne, de Montigny, de Belestre, de d'Ailleboust de Musseaux, de Prud'homme, de Tessier, de Louvigny, de Le Noir Rolland.

La famille qui se distinguait entre toutes par ses enfants, tant par leur nombre que par leurs heureuses dispositions, c'était celle de Charles Le Moyne, marié à la fille adoptive des Primot. Il y avait là. douze enfants pleins de force et de bonnes qualités. Le troisième, Pierre d'Iberville, se faisait remarquer dès sa jeunesse. Il annonçait un esprit vif et hardi, et il était d'une force extraordinaire pour son âge.

Voici l'ordre des naissances de ces enfants, auxquels Le Moyne, pour les distinguer, donna des noms empruntés aux localités des environs de Dieppe, en souvenir de la patrie absente:

«En 1650, Charles de Longueuil; en 1659, Jacques de Sainte-Hélène; en 1661, Pierre d'Iberville; en 1663, Paul de Maricourt; en 1668, Joseph de Sérigny; en 1669, François de Bienville; en 1670, anonyme; en 1673, Catherine-Jeanne; en 1676, Louis de Châteauguay; en 1678, Marie-Anne; en 1680, Jean-Baptiste de Bienville, deuxième du nom; en 1681, Gabriel d'Assigny; en 1684, Antoine de Châteauguay.»

Ils se distinguèrent par leur mérite et leur dévouement; cinq moururent au service du roi: Sainte-Hélène fut tué au siège de Québec en 1690; de Maricourt mourut de fatigue au pays des Iroquois en 1704; de Bienville 1er fut tué par les sauvages en 1691; de Châteauguay 1er fut tué à la prise du fort Nelson en 1686; d'Assigny mourut des fièvres dans l'expédition du golfe du Mexique en 1700.

Charles de Longueuil fut gouverneur de Montréal; de Bienville, deuxième du nom, fut gouverneur de la Louisiane pendant quinze ans; Antoine de Châteauguay devint gouverneur de la Guyane. Catherine-Jeanne fut mariée au sieur de Noyan, capitaine de la milice; Marie-Anne fut mariée en 1699 au sieur de La Chassoigne, gouverneur des Trois-Rivières.

Voici donc une famille qui est un précieux témoignage de l'état des choses sous l'ancien régime; une famille modeste, mais élevée avec les soins qu'inspire la religion, et qui, grâce à ce secours, fournit tant de sujets remarquables. Le gouvernement était juste appréciateur du mérite, et il n'hésitait pas à mettre les petits-fils d'un humble aubergiste au premier rang, quand il les en voyait dignes.

Nous trouvons sur les registres de Notre-Dame l'acte de naissance de Pierre d'Iberville, notre héros, et nous le transcrivons ici:

Le 20 juillet 1661, ai baptisé Pierre, fils de Charles Le Moyne et de Catherine Primot, sa femme. Le parrain, Jean Grevier, au nom de noble homme Pierre Boucher, 10 demeurant au cap près des Trots-Rivières; et marraine, Jeanne Le Moyne, femme de Jacques Le Ber, marchand.

Signé: PÉROT, curé de Montréal.

Note 10: (retour) C'est ce Pierre Boucher qui a donné une notice intéressante sur la Nouvelle-France. Il devint gouverneur des Trois-Rivières et est l'ancêtre de personnages remarquables: La Vérendrie, qui explora le Nord-Ouest; la soeur d'Youville, fondatrice des soeurs Grises, et enfin M. de Boucherville, premier ministre de la province de Québec de 1874 à 1878.

Tandis que les jeunes filles allaient recevoir l'enseignement de la soeur Bourgeois et de Mlle Mance, les jeunes gens étaient formés par les messieurs du Séminaire, et principalement par M. Souart et M. Pérot.

M. Souart avait organisé une école formée sur le modèle des maîtrises de France, et les enfants, malgré l'éloignement, recevaient l'instruction telle qu'on la donnait dans les meilleures écoles de la mère patrie.

M. Souart était un maître consommé. M. Pérot nous a laissé, dans les registres de la paroisse, des témoignages précis de sa capacité: on remarque une écriture d'une délicatesse comparable à la gravure, une rédaction irréprochable, une connaissance par faite de la langue.

Ceux d'entre les jeunes gens qui, après quelques années d'études, montraient des inclinations pour l'état ecclésiastique, étaient envoyés au collège des Jésuites de Québec; les autres s'exerçaient pour la profession militaire et étudiaient les lettres et les mathématiques. Cette école de M. Souart, étant aussi une maîtrise, devait concourir au service religieux. Les enfants servaient la messe; de plus, ils étaient formés au chant religieux et aux cérémonies ecclésiastiques, comme cela se passe dans toute maîtrise.

On observait le règlement de la paroisse de Saint-Sulpice de Paris pour l'instruction religieuse et la préparation à la première communion. M. de Queylus avait pratiqué cet enseignement à la cure de Saint-Sulpice, ainsi que M. de Fénelon, et ils le continuaient à Montréal, tandis que le frère de M. de Fénelon, le futur archevêque de Cambray, remplissait les mêmes fonctions à la cure de Paris, à laquelle il était attaché.

Le catéchisme dont on se servait venait de Paris; il avait été composé sous la direction de M. Olier, et il a été conservé jusqu'à ce jour en Canada, presque sous la même forme, d'après la rédaction d'un prêtre de Saint-Sulpice, M. Languet, qui devint plus tard archevêque de Sens.

Voici les noms des enfants qui firent la première communion, vers 1674, avec Pierre d'Iberville:

Robutel de Saint-André, Aubuchon, Louis Descaries, Antoine de La Porte, Pierre, Paul et Jean Le Moyne, Paul et Nicolas d'Ailleboust de Manthet, Urbain Tessier, Gabriel de Montigny, Pierre Cavelier, Benoît et Jean Barret, Jacques Le Ber, Zacharie Robutel, et Duluth.

Ces noms sont précieux à conserver, ce sont les noms d'enfants nés sur le sol canadien dès les premiers temps, et qui, à différents titres, ont acquis des droits à la notoriété nationale.

Ainsi Jean, Pierre et Paul Le Moyne allèrent à la baie d'Hudson en 1686.

D'Ailleboust de Manthet parcourut le Nord-Ouest et, dans un mémoire remarquable, fit connaître les richesses de la Louisiane.

Gabriel de Montigny accompagna Pierre d'Iberville à Terre-Neuve en 1686; Jean Barret suivit M. de La Salle dans ses expéditions et périt dans un naufrage.

Duluth explora le lac Supérieur.

Ces enfants s'instruisaient de la religion en même temps qu'ils s'initiaient aux exercices militaires, comme il convient dans une place de guerre. Le dimanche, ils revêtaient les habits de choeur et aimaient à prendre part aux cérémonies; et ensuite, aux jours de congé, ils prenaient le costume des jeunes sauvages et s'en allaient aux environs, avec des arcs et des flèches, chasser le gibier, qui était d'une abondance extraordinaire.

Pierre d'Iberville qui, d'après les mémoires du temps, se distinguait au milieu de tous par sa piété et son heureux caractère, était singulièrement remarquable par un tempérament infatigable et son habileté dans les exercices corporels.

Les écrits et les mémoires qu'ils a laissés et qui sont pleins d'intérêt et du style le plus noble, font voir qu'il avait bien profité des enseignements de M. Souart.

Pierre passa sa jeunesse dans la maison de son père, sur la rue Saint-Joseph. On peut voir encore, près de la sacristie de Notre-Dame, quelques corps de bâtiment de la maison des Le Moyne, et dans le jardin du Séminaire, il restait encore, il y a quelques années, des arbres très anciens qui avaient pu ombrager ses premiers jeux.

Le futur héros était grand pour son âge, d'une figure ovale et agréable, teint clair, très blond, avec des cheveux abondants, digne fils du baron de Longueuil, que les sauvages avaient nommé l'alouette, à cause de son teint et de ses cheveux blonds. Son maintien était noble, mais tempéré par beaucoup de modestie et de douceur.

Il était de ceux dont on a pu dire qu'ils plaisaient au premier regard, mais qu'on les aimait en les connaissant davantage. Ses manières étaient aisées, agréables, et son commerce plein d'ouverture et conciliant.

Il montrait, dès sa jeunesse, tous les signes de ce caractère obligeant et généreux qui le fit tant aimer de ses soldats qu'ils l'auraient suivi jusqu'au bout du monde, disaient-ils; enfin, il avait ce coeur tendre, plein de pitié pour le malheur qui le fit remarquer et adorer des nations sauvages.

Pendant qu'il demeurait chez son père, il put être témoin de différents événements notables: la construction de l'église paroissiale, la division et la dénomination des rues de la ville, et enfin, l'entrée dans Montréal, d'une partie des troupes que le roi avaient envoyées dans la Nouvelle-France. Ces troupes venaient se fixer dans la ville et aux environs pour défendre les colons, Cet événement dut lui faire une grande impression.


Histoire du Chevalier d'Iberville (1663-1706)

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