Читать книгу Dictionnaire de la langue verte - Alfred Delvau - Страница 10

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 CABERMON, s. f. Cabaret,—dans l'argot des voleurs.

 CABESTAN, s. m. Officier de paix,—dans le même argot.

 CABILLOT, s. m. Soldat,—dans l'argot des marins.

 CABO, s. m. Chien,—dans l'argot du peuple, qui a contracté le vieux mot Clabaud.

On dit aussi Cabe.

 CABOCHE, s. f. Tête,—dans l'argot du peuple, qui s'éloigne bien du κεφαλη [grec: kephalê] grec et du caput latin, mais ne s'éloigne pas du tout de la tradition: «D'autant plus qu'il n'avoit pas beaucoup de cervelle en sa caboche,»—disent les Nuits de Straparole.

«Biau sire, laissiés me caboche,

Par la char Dieu, c'est villenie!»

disent les poésies d'Eustache Deschamps.

On dit aussi Cabosse.

 CABOCHON, s. m. Coup reçu sur la tête, ou sur toute autre partie du corps.

 CABOTIN, s. m. Mauvais acteur,—le Rapin du Théâtre, comme le Rapin est le Cabotin de la Peinture.

 CABOTINAGE, s. m. Le stage de comédien, qui doit commencer par être sifflé sur les théâtres de toutes les villes de France, avant d'être applaudi à Paris.

 CABOTINE, s. f. Drôlesse qui fait les planches au lieu de faire le trottoir.

 CABOTINER, v. n. Aller de théâtre en théâtre et n'être engagé nulle part.

 CABOULOT, s. m. Boutique de liquoriste tenue par de belles filles bien habillées, qui n'ont pour unique profit que les deux sous du garçon.

Ce mot a une vingtaine d'années. Au début, il a servi d'enseigne à un petit cabaret modeste du boulevard Montparnasse, puis il a été jeté un jour par fantaisie, dans la circulation, appliqué à toutes sortes de petits endroits à jeunes filles et à jeunes gens, et il a fait son chemin.

 CABRER (Se), v. réfl. Se fâcher,—dans l'argot des bourgeois.

 CABRIOLET, s. m. Petit instrument fort ingénieux que les agents de police emploient pour mettre les malfaiteurs qu'ils arrêtent hors d'état de se servir de leurs mains.

 CABRION, s. m. Rapin, loustic, mauvais farceur,—dans l'argot des gens de lettres, qui se souviennent du roman d'Eugène Sue (Les Mystères de Paris).

 CACA, s. m. Evacuation alvine,—dans l'argot des enfants; Vilenie,—dans l'argot des grandes personnes qui connaissent le verbe Cacare.

Faire caca. Ire ad latrinas.

 CACADE, s. f. Reculade, fuite honteuse,—dans l'argot du peuple, qui a eu l'honneur de prêter ce mot à Voltaire.

 CACHE, s. f. Endroit où l'on se cache. Argot des enfants.

>Jouer à cache-cache. Jouer à se cacher.

 CACHEMIRE, s. m. Torchon,—dans l'argot ironique des faubouriens.

Donner un coup de cachemire sur une table. L'essuyer.

 CACHEMIRE D'OSIER, s. m. Hotte,—dans l'argot des chiffonniers.

Ils disent aussi Cabriolet, et Carquois d'osier.

 CACHE-MISÈRE, s. m. Vêtement ample, boutonné jusqu'au menton et dissimulant tant bien que mal l'absence de la chemise. Argot du peuple.

 CACHEMITE, s. f. Cachot,—dans l'argot des voleurs.

 CACHER, v. a. et n. Manger,—dans l'argot des faubouriens.

 CACHET DE LA RÉPUBLIQUE, s. m. Coup de talon de botte sur la figure. Argot des voyous.

 CACHET DE M. LE MAIRE, s. m. Tache breneuse à la chemise. Argot du peuple.

 CACHOTTERIE, s. f. Mystère fait à propos de choses qui n'en valent pas la peine. Même argot.

 CACHOTTIER, s. m. Homme sournois, mystérieux, qui ne confie rien à personne.

 CADAVRE, s. m. Synonyme de corps. Même argot.

Se mettre quelque chose dans le cadavre. Manger.

 CADAVRE, s. m. Secret qu'on a intérêt à cacher,—faute ou crime, faiblesse ou malhonnêteté. Argot des gens de lettres.

Savoir où est le cadavre de quelqu'un. Connaître son secret, savoir quel est son vice dominant, son faible.

 CADÈNE, s. f. Chaîne de cou,—dans l'argot des voleurs, dont les pères ont jadis fait partie de la Grande Cadène qui allait de Paris à Toulon ou à Brest.

 CADET, s. m. Outil pour forcer les portes. Même argot.

 CADET, s. m. Les parties basses de l'homme, «la cible aux coups de pied». Argot du peuple.

Baiser Cadet. Faire des actions viles, mesquines, plates.

Faubouriens et commères disent fréquemment, pour témoigner leur mépris à quelqu'un ou pour clore une discussion qui leur déplaît: «Tiens, baise Cadet!»

 CADET, s. m. Synonyme de Quidam ou de Particulier.

Tu es un beau cadet! Phrase ironique qu'on adresse à celui qui vient de faire preuve de maladresse ou de bêtise.

 CADET DE HAUT APPÉTIT, s. m. Grand mangeur, ou dépensier.

 CADET DE MES SOUCIS (C'est le). Phrase de l'argot du peuple, qui signifie: Je ne m'inquiète pas de cela, je m'en moque.

 CADICHON, s. m. Montre,—dans l'argot des voleurs.

 CADRAN, s. m. Le derrière de l'homme,—dans l'argot des voyous.

Ils disent aussi Cadran humain ou Cadran solaire.

 CAFARDE, s. f. La lune,—dans l'argot des voleurs, qui redoutent les indiscrétions de cette planète assistant à leurs méfaits derrière un voile de nuages.

 CAGE, s. f. Prison,—dans l'argot du peuple, qui a voulu constater ainsi que l'on tenait à empêcher l'homme qui vole de s'envoler.

Cage à chapons. Couvent d'hommes.

Cage à jacasses. Couvent de femmes.

Cage à poulets. Chambre sale, étroite, impossible à habiter.

 CAGE, s. f. Atelier de composition,—dans l'argot des typographes.

Ils disent aussi Galerie.

 CAGETON, s. m. Hanneton,—dans l'argot des voleurs, qui savent qu'il est impossible de mettre ce scarabée en cage, et qui voudraient bien jouir du même privilège.

 CAGNE, s. f. et m. Personne paresseuse comme une chienne,—dans l'argot du peuple.

C'est aussi le nom qu'il donne au cheval,—pour les mêmes raisons.

 CAGNOTTE, s. f. Rétribution tacitement convenue qu'on placesous le chandelier de la demoiselle de la maison. Argot des joueurs du demi-monde.

 CAGOU, s. m. Voleur solitaire,—dans l'argot des voleurs.

 CAHIN-CAHA, adv. Avec peine, de mauvaise grâce,—dans l'argot du peuple, fidèle à l'étymologie: qua hinc, qua hac.

 CAILLASSE, s. f. Cailloux,—dans le même argot.

 CAILLÉ, s. m. Poisson,—dans l'argot des voleurs.

 CAILLE COIFFÉE, s. f. Femme éveillée, un peu plus amoureuse que son mari ne le voudrait,—dans l'argot du peuple, qui connaît les mœurs du Coturnix.

 CAILLOU, s. m. Figure grotesque,—dans l'argot des voyous.

Signifie aussi Nez.

 CAISSE D'ÉPARGNE, s. f. La bouche, dans l'argot du peuple, qui a l'ironie amère, parce qu'il sait que les trois quarts du salaire sont absorbés par ce gouffre toujours ouvert.

Il l'appelle aussi, en employant une image contraire, Madame la Ruine.

 CAISSON, s. m. Tête,—dans l'argot des soldats.

Se faire sauter le caisson. Se brûler la cervelle.

 CALABRE, s. f. Teigne,—dans l'argot des voleurs.

 CALAIN, s. m. Vigneron,—dans le même argot.

 CALANCHER, v. n. Mourir,—dans l'argot des vagabonds.

 CALANDRINER LE SABLE, v. a. Traîner sa misère,—dans l'argot des voyous.

 CALÉ, ÉE, adj. Riche, heureux,—dans l'argot du peuple, à qui il semble qu'un homme calé ne peut plus tomber ni mourir.

 CALEBASSE, s. f. Tête,—dans l'argot des faubouriens, qui ont trouvé une analogie quelconque entre l'os sublime et le fruit du baobab, presque aussi vides l'un que l'autre.

Grande calebasse. Femme longue, maigre et mal habillée.

 CALEBASSES, s. f. pl. Gorge molle, qui promet plus qu'elle ne tient.

 CALÉGE, s. f. Femme entretenue,—dans l'argot des voleurs qui prononcent calèche à la vieille mode.

 CALER, v. n. Appuyer sa main droite sur sa main gauche en jouant aux billes,—dans l'argot des enfants.

 CALER, v. n. Céder, rabattre de ses prétentions,—ce qui est une façon de baisser les voiles. Argot du peuple.

 CALER, v. n. N'avoir pas de besogne, attendre de la copie,—dans l'argot des typographes.

 CALER L'ÉCOLE, v. a. N'y pas aller, la lâcher,—dans l'argot des écoliers qui ont appris assez de latin et de grec pour supposer que ce verbe vient de chalare et de Χαλαω [grec: Chalaô].

Mais les grandes personnes, même celles qui ont fait leurs classes, veulent qu'on dise caner et non caler, s'appuyant sur la signification bien connue du premier verbe, qui n'est autre en effet que Faire la cane, s'enfuir. Mais je persisterai dans mon orthographe, dans mon étymologie et dans ma prononciation, parce qu'elles sont plus rationnelles et qu'en outre elles ont l'avantage de me rappeler les meilleures heures de mon enfance. En outre aussi, à propos de cette expression comme à propos de toutes celles où les avis sont partagés, je pense exactement comme le chevalier de Cailly à propos de chante-pleure:

«Depuis deux jours on m'entretient

Pour savoir d'où vient chante-pleure:

Du chagrin que j'en ai, je meure!

Si je savais d'où ce mot vient,

Je l'y renverrais tout à l'heure...»

 CALICOT, s. m. Commis d'un magasin de nouveautés,—dans l'argot du peuple.

Le mot date de la Restauration, de l'époque où les messieurs de l'aune et du rayon portaient des éperons partout, aux talons, au menton et dans les yeux, et où ils étaient si ridicules enfin avec leurs allures militaires, qu'on éprouva le besoin de les mettre au théâtre pour les corriger.

 CALICOTE, s f. Maîtresse de commis de nouveautés.

 CALIGULER, v. a. Ennuyer,—dans l'argot des gens de lettres, qui ont gardé rancune au Caligula d'Alexandre Dumas.

 CALINO, s. m. Nom d'une sorte de Jocrisse introduit par Antoine Fauchery dans un vaudeville, et qui a été appliqué depuis à tous les gens assez simples d'esprit, par exemple, pour s'imaginer avoir vu bâtir la maison où ils sont nés.

 CALINOTADE, s. f. Naïveté qui frise de près la niaiserie.

 CALLOT, s. m. Teigneux,—dans l'argot des voleurs.

 CALME ET INODORE (Être). Se conduire convenablement,—dans l'argot du peuple.

 CALOQUET, s. m. Chapeau.

 CALORGNE, s. m. Borgne, ou seulement Bigle.

On dit aussi Caliborgne.

 CALOT, s. m. Dé à coudre,—dans l'argot des voleurs.

Signifie aussi coquille de noix.

 CALOT, s. m. Grosse bille avec laquelle on cale en jouant,—dans l'argot des enfants.

 CALOTIN, s. m. Prêtre,—dans l'argot du peuple.

 CALOTS, s. m. pl. Yeux ronds comme des billes,—dans l'argot des faubouriens.

Boiter des calots. Loucher.

 COTTE (La). Le Clergé,—dans l'argot des bourgeois.

Le régiment de la calotte. Société de Jésus,—sous la Restauration. Aux XVIIe et XVIIIe siècles on avait donné ce nom à une société bien différente, composée de beaux esprits satiriques.

 CALOTTE, s. f. Soufflet,—dans l'argot du peuple.

 CALOTTER, v. a. Souffleter.

 CALVIGNE, s. f. La vigne,—dans l'argot des voleurs.

Ils disent aussi Clavigne.

 CALVIN, s. m. Raisin.

On dit aussi Clavin.

 CAMARADERIE, s. f. Aide mutuelle mais intéressée que se prêtent les gens de lettres, journalistes ou dramaturges, pour arriver à la fortune et à la réputation. C'est la courte-échelle appliquée à l'art et à la littérature, c'est-à-dire aux deux plus respectables choses qui soient au monde,—les plus respectables et les moins respectées, «Passe-moi la casse et je te passerai le séné. Dis que j'ai du génie et je crierai partout que tu as du talent.»

Le mot est nouveau, dans ce sens du moins, car les membres de la société de la casse et du séné, souvent, ne sont que des associés et pas du tout des amis; ils s'aident, mais ils se méprisent. C'est Henri Delatouche, l'ennemi, et, par conséquent, la victime de la camaraderie, qui est le parrain de ce mot, dont la place était naturellement marquée dans ce Dictionnaire, sorte de Muséum des infirmités et des difformités de la littérature française.

 CAMARDE, s. f. La Mort,—dans l'argot des voleurs, qui trouvent sans doute qu'elle manque de nez.

 CAMARO, s. m. Camarade, ami,—dans l'argot des faubouriens.

 CAMBOLER, v. n. Se laisser choir. Même argot.

 CAMBRIOLE, s. f. Chambre,—dans l'argot des voleurs.

Cambriole de Milord. Appartement somptueux.

Rincer une cambriole. Dévaliser une chambre.

 CAMBRIOLEUR, s. m. Homme qui dévalise les chambres, principalement les chambres de domestiques, en l'absence de leurs locataires.

Cambrioleur à la flan. Voleur de chambre au hasard.

 CAMBROU, s. m. Domestique mâle. Même argot.

 CAMBROUSE, s. f. Gourgandine,—dans l'argot des faubouriens, qui se rencontrent sans le savoir avec les auteurs du Théâtre-Italien.

 CAMBROUSIER, s. m. Brocanteur,—dans l'argot des revendeurs du Temple.

 CAMBROUSSE, s. f. Banlieue, campagne,—dans l'argot des voleurs.

Ils disent aussi Camplouse.

 CAMBUSE, s. f. Cabaret,—dans l'argot des faubouriens.

Signifie aussi logis quelconque, taudis.

 CAMELLIA, s. m. Femme entretenue,—par allusion à Marie Duplessis, qui a servi de type à Alexandre Dumas fils, pour sa Dame aux Camélias.

C'est par conséquent un mot qui date de 1852. Les journalistes qui l'ont employé l'ont écrit tous avec un seul l,—comme Alexandre Dumas fils lui-même, du reste,—sans prendre garde qu'ainsi écrit ce mot devenait une injure de bas étage au lieu d'être une impertinence distinguée: un camellia est une fleur, mais le camélia est un καμηλος [grec: kamêlos].

 CAMELOT, s. m. Marchand ambulant,—dans l'argot des faubouriens, qui s'aperçoivent qu'on ne vend plus aujourd'hui que de la camelotte.

 Camelotte, s. f. Mauvaise marchandise; besogne mal faite,—dans l'argot des ouvriers; livre mal écrit, dans l'argot des gens de lettres.

Les frères Cogniard, en collaboration avec M. Boudois, ont adjectivé ce substantif; ils ont dit: Un mariage camelotte.

 CAMELOTTE, s. f. «Femme galante de dix-septième ordre,»—dans l'argot du peuple.

 CAMELOTTE EN POGNE, s. f. Vol dans la main. Argot des prisons.

 CAMELOTTER, v. n. Marchander ou vendre.

Signifie aussi mendier, vagabonder.

 CAMOUFLE, s. f. Chandelle,—dans l'argot des voleurs.

La camoufle s'estourbe. La chandelle s'éteint.

 CAMOUFLEMENT, s. m. Déguisement,—parce que c'est à tromper que sert la camoufle de l'instruction et de l'éducation.

 CAMOUFLER, v. pr. S'instruire,—se servir de la camoufle, de la lumière intellectuelle et morale.

 CAMOUFLER (Se), v. réfl. Se déguiser.

 CAMOUFLET, s. m. Chandelier.

 CAMP DES SIX BORNES, s. m. Endroit du cimetière où les marbriers font leur sieste aux jours de grande chaleur.

Piquer une romaine au camp. Dormir.

 CAMPHRE, s. m. Eau-de-vie de qualité inférieure, âpre au gosier et funeste à l'estomac, comme on en boit dans les cabarets populaciers ou assommoirs.

 CAMPHRIER, s. m. Marchand de vin et d'eau-de-vie,—dans l'argot des faubouriens.

Se dit aussi pour buveur d'eau-de-vie.

 CAMPO, s. m. Congé,—dans l'argot des écoliers et des employés, qui ne sont pas fâchés d'aller ad campos et de n'aller ni à leur école ni à leur bureau.

Avoir campo. Être libre.

 CAMUS, adj. Etonné, confus, comme quelqu'un qui viendrait de «se casser le nez»,—dans l'argot du peuple.

 CAMUSE, s. f. Carpe,—dans l'argot des voleurs, qui alors n'ont pas vu les carpes des bassins de Fontainebleau.

 CAMUSE (La). La Mort,—dans le même argot.

 CANAGE, s. m. Agonie,—dans l'argot des voyous, qui ont vu caner souvent devant la mort.

 CANAPÉ, s. m. Lieu où Bathylle aurait reçu Anacréon,—dans l'argot des voleurs, qui ont toutes les corruptions.

 CANARD, s. m. Imprimé crié dans les rues,—et par extension, Fausse nouvelle. Argot des journalistes.

 CANARD, s. m. Journal sérieux ou bouffon, politique ou littéraire,—dans l'argot des typographes, qui savent mieux que les abonnés la valeur des blagues qu'ils composent.

 CANARD, s. m. Mari fidèle et soumis,—dans l'argot des bourgeoises.

 CANARD, s. m. Morceau de sucre trempé dans le café, que le bourgeois donne à sa femme ou à son enfant,—s'ils ont été bien sages.

 CANARD, s. m. Chien barbet,—dans l'argot du peuple, qui sait que ces chiens-là vont à l'eau comme de simples palmipèdes, water-dogs.

 CANARD, s. m. Fausse note,—dans l'argot des musiciens.

On dit aussi Couac.

 CANARDER, v. a. Fusiller,—dans l'argot des troupiers, pour qui les hommes ne comptent pas plus que des palmipèdes.

 CANARDER, v. a. Tromper.

 CANARDIER, s. m. Crieur de journaux.

Signifie aussi journaliste.

 CANARD SANS PLUMES, s. m. Nerf de bœuf,—dans l'argot du peuple.

 CANARI, s. m. Imbécile, serin,—dans le même argot.

 CANASSON, s. m. Cheval,—dans l'argot des faubouriens, qui savent que cet animal se nourrit de son aussi bien que d'avoine: cane-à-son.

 CANCAN, s. m. Médisance à l'usage des portières et des femmes de chambre. Argot du peuple.

 CANCAN, s. m. Fandango parisien, qui a été fort en honneur il y a trente ans, et qui a été remplacé par d'autres danses aussi décolletées.

 CANCANER, v. n. Danser le cancan;—Faire des cancans.

 CANCANIER, adj. et s. Bavard, indiscret. Qui colporte de faux bruits, des médisances.

On dit aussi Cancaneur.

 CANCRE, s. m. Collégien qui ne mord volontiers ni au latin ni aux mathématiques, et qui préfère le Jardin des plantes de Buffon au Jardin des racines grecques de Lancelot.

 CANCRE, s. et adj. Avare, homme qui n'aime point à prêter. Argot du peuple.

Signifie aussi Pauvre Diable, homme qui ne peut arriver à rien, soit par incapacité, soit par inconduite.

 CANER, v. n. Avoir peur, s'enfuir, faire la cane ou le chien.

 CANER, v. a. Ne pas faire, par impuissance ou par paresse. Argot des gens de lettres.

Caner son article. Ne pas envoyer l'article qu'on s'était engagé à écrire.

 CANER, v. n. Mourir,—dans l'argot des voyous.

 CANER LA PÉGRENNE, v. a. Mourir de faim,—dans l'argot des voleurs.

 CANICHE, s. m. Chien en général,—dans l'argot du peuple, pour lequel le caniche est le seul chien qui existe, comme le dada est pour les enfants le seul cheval de la création.

 CANICHE, s. m. Ballot à oreilles,—dans l'argot des voleurs.

 CANNE, s. f. Surveillance de la haute police,—dans le même argot.

 CANNE, s. f. Congé, renvoi plus ou moins poli,—dans l'argot des gens de lettres, dont quelques-uns ont une assez jolie collection de ces rotins.

Offrir une canne. Prier un collaborateur de ne plus collaborer; l'appeler à d'autres fonctions, toutes celles qu'il voudra—mais ailleurs.

 CANON, s. m. Verre,—dans l'argot des francs-maçons; petite mesure de liquide,—dans l'argot des marchands de vin.

Petit canon. La moitié d'un cinquième.

Grand canon. Cinquième.

 CANONNER, v. n. Fréquenter les cabarets.

 CANONNER, v. n. Crepitare,—dans l'argot facétieux des faubouriens, amis du bruit, d'où qu'il sorte.

 CANONNEUR, s. m. Ivrogne, homme qui boit beaucoup de canons.

 CANONNIER DE LA PIÈCE HUMIDE, s. m. Infirmier,—dans l'argot des soldats.

 CANONNIÈRE, s. f. Le podex de Juvénal, dans l'argot des faubouriens.

Charger la canonnière. Manger.

Gargousses de la canonnière. Navets, choux, haricots, etc.

 CANT, s. m. Argot des voleurs anglais, devenu celui des voleurs parisiens.

 CANT, s. m. Afféterie de manières et de langage; hypocrisie à la mode. Expression désormais française.

Le cant et le bashfulness, deux jolis vices!

 CANTALOUP, s. m. Imbécile, melon,—dans l'argot des faubouriens.

 CANTIQUE, s. m. Chanson à boire,—dans l'argot des francs-maçons, qui savent que chanter vient de cantare.

 CANTON, s. m. Prison,—dans l'argot des voleurs.

 CANTONADE, s. f. Partie du théâtre en dehors du décor,—dans l'argot des coulisses.

Parler à la cantonade. Avoir l'air de parler à quelqu'un qui est censé vous écouter,—au propre et au figuré.

Ecrire à la cantonade. Ecrire pour n'être pas lu,—dans l'argot des gens de lettres.

 CANTONNIER, s. m. Prisonnier.

 CANULANT, adj. Ennuyeux, importun, insupportable,—dans l'argot du peuple, qui a une sainte horreur des matassins, armés comme l'on sait, qui poursuivent M. de Pourceaugnac.

 CANULE, s. f. Homme ennuyeux, obsédant.

 CANULER, v. a. Ennuyer, obséder.

 CAPAHUTER, v. a. Assassiner un complice pour s'approprier sa part du vol.

 CAPE, s. f. Écriture,—dans l'argot des voleurs.

 CAPET, s. m. Chapeau,—dans l'argot des ouvriers.

 CAPINE, s. f. Écritoire.

 CAPIR, v. a. Écrire.

 CAPITAINE, s. m. Agioteur, dans l'argot des voleurs.

 CAPITAINE, s. m. Capitaliste,—dans le même argot.

 CAPITAINE BÉCHEUR, s. m. Capitaine rapporteur,—dans l'argot des soldats.

 CAPITAINER, v. a. Agioter.

 CAPITONNER (Se), v. réfl. Garnir le corsage de sa robe «d'avantages» en coton,—dans l'argot des petites dames qui, pour séduire les hommes, ont recours à l'Art quand la Nature est insuffisante.

 CAPON, s. m. Lâche,—dans l'argot du peuple, trop coq gaulois pour aimer les chapons.

 CAPONNER, v. n. Reculer, avoir peur.

 CAPORAL, s. m. Tabac de la régie.

 CAPOU, s. m. Ecrivain public,—dans l'argot des voleurs.

 CAPRICE, s. m. Amant de cœur,—dans l'argot de Breda-Street, où l'on a l'imagination très capricante.

Caprice sérieux. Entreteneur.

 CAPSULE, s. f. Chapeau à petits bords, à la mode depuis quelques années. Argot des faubouriens.

 CAQUER, v. n. Alvum deponere,—dans l'argot du peuple.

 CARABAS, s. m. Vieille berline de comte ou de marquis, carrosse d'un modèle suranné.

 CARABAS, s. m. Riche propriétaire de terres ou de maisons.

On dit aussi Marquis de Carabas.

 CARABIN, s. m. Etudiant en médecine,—dans l'argot du peuple.

Carabine, s. f. Maîtresse d'étudiant.

 CARABINE, s. f. Fouet,—dans l'argot des soldats du train.

 CARABINÉ, ÉE, adj. De première force ou de qualité supérieure. Argot du peuple.

Plaisanterie carabinée. Difficile à accepter, parce qu'excessive.

 CARABINER, v. n. Jouer timidement, aventurer en hésitant son argent sur quelques cartes. Argot des joueurs de lansquenet.

 CARAMBOLAGE, s. m. Lutte générale,—dans l'argot des faubouriens.

 CARAMBOLER, v. a. Battre quelqu'un, et surtout plusieurs quelqu'uns à la fois; faire coup double, au propre et au figuré.

 CARANT, s. m. Planche, morceau de bois carré,—dans l'argot des voleurs.

 CARANTE, s. f. Table.

 CARAPATTER (Se). V. réfl. Se sauver, jouer des pattes. Argot des faubouriens.

 CARBELUCHE GALICÉ, s. m. Chapeau de soie,—dans l'argot des voleurs.

 CARCAGNO, s. m. Usurier,—dans l'argot des faubouriens.

 CARCAN, s. m. Vieux cheval bon pour l'équarrisseur. Argot des maquignons.

 CARCASSE, s. f. Le corps humain,—dans l'argot du peuple.

Avoir une mauvaise carcasse. Avoir une mauvaise santé.

 CARCASSIER, s. m. Habile dramaturge,—dans l'argot des coulisses.

On dit aussi Charpentier.

 CARDER, v. a. Egratigner le visage de quelqu'un à coups d'ongles. Argot du peuple.

 CARDINAL DE LA MER, s. m. Le homard,—dans l'argot ironique des gens de lettres, par allusion à la bévue de Jules Janin.

 CARDINALE, s. f. Lune,—dans l'argot des voleurs.

 CARDINALES, s. f. pl. Les menses des femmes,—dans l'argot des bourgeois.

 CARDINALISER (Se), v. réfl. Rougir, soit d'émotion, soit en buvant.

L'expression appartient à Balzac. Déjà Rabelais avait parlé des «escrevisses qu'on cardinalise à la cuite».

 CARE, s. f. Cachette,—dans l'argot des voleurs et des faubouriens.

On dit aussi Planque.

 CARER, v. a. Cacher, se mettre à l'abri.

 CAREUR, s. m. Voleur dont la spécialité consiste à s'établir à portée du tiroir de caisse d'un marchand, sous prétexte de pièces anciennes à échanger, et à profiter de la moindre distraction pour s'emparer du plus de pièces possible—anciennes ou nouvelles.

On dit aussi Voleur à la care.

C'est le pincher anglais.

 CARGE, s. f. Balle,—dans l'argot des voleurs.

 CARGUER SES VOILES, v. a. Agir prudemment, prendre ses invalides,—dans l'argot des marins.

 CARIBENER, v. a. Voler à la care.

On dit aussi Carer.

 CARLINE, s. f. La Mort,—dans l'argot des bagnes.

La carline (carlina vulgaris) est une plante qui, au dire d'Olivier de Serres, prend son nom du roi Charlemagne, qui en fut guéri de la peste. La vie étant aussi une maladie contagieuse, ne serait-ce pas parce que la mort nous en guérit, grands et petits, rois et manants, qu'on lui a donné ce nom? Ou bien est-ce parce qu'elle nous apparaît hideuse, comme Carlin avec son masque noir?

 CARMAGNOLE, s. m. Soldat de la République,—dans l'argot des ci-devant émigrés à Coblentz.

 CARME, s. m. Argent,—dans l'argot des voleurs.

Quelques étymologistes veulent qu'on écrive et prononce carle,—probablement par contraction de carolus.

 CARME, s. m. Miche de pain,—dans le même argot.

 CARMER, v. n. Payer, faire des effets de poche.

 CARNAVAL, s. m. Personne vêtue d'une façon extravagante, qui attire les regards et les rires des passants. Argot des bourgeois.

 CARNE, s. f. Viande gâtée, ou seulement de qualité inférieure,—dans l'argot du peuple, qui a l'air de savoir que le génitif de caro est carnis.

Par analogie, Femme de mauvaise vie et Cheval de mauvaise allure.

 CAROGNE, s. f. Fille ou femme de mauvaise vie.

 CAROTTE, s. f. Prudence habile,—dans l'argot des joueurs.

Jouer la carotte. Hasarder le moins possible, ne risquer que de petits coups et de petites sommes.

 CAROTTE, s. f. Escroquerie légère commise au moyen d'un mensonge intéressant,—dans l'argot des étudiants, des soldats et des ouvriers.

Tirer une carotte. Conter une histoire mensongère destinée à vous attendrir et à délier les cordons de votre bourse.

Carotte de longueur. Histoire habilement forgée.

 CAROTTE DANS LE PLOMB (Avoir une), v. a. Se dit d'un chanteur qui fait un couac ou chante faux,—dans l'argot des coulisses; avoir l'haleine infecte,—dans l'argot des faubouriens.

 CAROTTER, v. a. Se servir de carottes pour obtenir de l'argent de son père, de son patron, ou de toute personne charitable.

Carotter l'existence. Vivre misérablement.

Carotter le service. Se dispenser du service militaire, ou autre, en demandant des congés indéfinis, sous des prétextes plus ou moins ingénieux.

 CAROTTER, v. n. Jouer mesquinement, ne pas oser risquer de grands coups ni de grosses sommes.

 CAROTTEUR, s. et adj. Celui qui carotte au jeu.

 CAROTTIER, s. m. Homme qui vit d'expédients, qui ment volontiers pour obtenir de l'argent.

Carottier fini. Carottier rusé, expert, dont les carottes réussissent toujours.

Dictionnaire de la langue verte

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