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VI

Table des matières

Par une chaude matinée d’août, Pauline, vêtue d’un peignoir blanc, arrosait les plantes grasses d’une petite serre, lorsqu’on lui annonça la visite de son cousin, le docteur Nerton, de passage à Rouen. Une lettre de sa parente l’avait décidé à s’arrêter dans cette ville.

En montant les quelques marches qui conduisaient du jardin au vestibule, elle s’embarrassa dans les longs plis de son peignoir et tomba sur les genoux.

On dut la porter sur son lit. Le docteur lui prodigua ses soins, et passa toute la journée près d’elle. Quant elle le vit se disposer à prendre congé: docteur, dit-elle, les yeux rouges et gonflés; mon cher cousin, puis-je compter sur vous?

–Oui, Pauline! Soyez tranquille. Puisque vous ne voulez pas rester ici, où pourtant vous pourriez, sans éveiller le moindre soupçon, attendre votre délivrance, je louerai à Paris un appartement que vous viendrez habiter au moment opportun. La femme de chambre que Mme de Roncelay vous a envoyée de Paris me semble intelligente et dévouée. Vous l’emmènerez; mais nous devons, je pense, la mettre dans la confidence. Cela vaudra infiniment mieux que de vous exposer à la curiosité et aux investigations de cette fille, qui doit soupçonner la vérité.

Un profond soupir répondit à ces paroles.

–Adieu, et à bientôt, ma chère Pauline. Soignez-vous et je réponds du reste. Le docteur Nerton déposa un baiser sur le front de sa cousine et partit pour Paris.

Héloïse, la femme de chambre de Mme de Vertval, après avoir fermé la porte de la rue, retourna à l’office où l’attendaient pour déjeuner la cuisinière et la nourrice du petit Louis, devant une table aussi bien servie que celle de leur maîtresse.

–J’ai eu une peur terrible pour notre bonne madame, dit la cuisinière.–Elle aurait pu faire une fausse couche. L’enfant n’aurait pas vécu.

–A sept mois les enfants vivent, dit Héloïse.

–Cinq mois, s’il vous plaît!

–Tiens! j’aurais juré que madame était plus avancée. C’est moi qui l’ai portée tantôt avec le docteur et.

Un coup de sonnette interrompit ces bavardages.

Héloïse courut dans la chambre de sa maîtresse.

–Nous partirons sous peu de jours pour Paris, lui dit Mme de Vertval. Dites-moi, Héloïse, n’est-ce pas vous qui aviez pris la loge de l’Opéra à la fin de janvier?

–Oui, madame, c’est moi. Elle était pour la nuit où Mme la comtesse perdit sa chère petite fille du croup.

–Hélas! nuit fatale!

–Oh! oui, madame. J’avais bien compris le dessein de Mme la comtesse, car en rangeant dans la chambre de M. le comte, j’avais trouvé ce jour-là une lettre–ouverte,–que j’ai eu l’indiscrétion de lire. Je me suis doutée de ce que Mme la comtesse avait médité de faire.

–Hélas! Je suis allée seule à ce bal. J’espérais voir venir la comtesse me rejoindre.

Il s’agissait de retenir le comte–à tout prix,–afin de l’empêcher d’aller au rendez-vous pour lequel il était revenu de la chasse, et…

Mme de Vertval ne put achever ce pénible récit. Elle se couvrit le visage des deux mains; de grosses larmes filtraient à travers ses doigts délicats.

Héloïse avait pâli. Elle s’approcha du lit, joignit les mains et d’une voix basse et émue: Madame, pauvre madame, dit-elle très vite, vous pouvez compter sur ma discrétion. Que madame ordonne tout ce qu’elle voudra… Je ne sais si Mme la comtesse se doutait de quelque chose lorsqu’elle m’engagea au service de madame. Je le croirais assez, car le jour de mon départ elle me dit: «Héloïse, je me sépare de vous à regret. J’espère que vous servirez mon amie aussi fidèlement que moi-même. Si pour une raison ou pour une autre, vous deviez ne pas y rester, revenez chez moi. N’oubliez pas que Mme de Vertval, est ma meilleure amie, qu’elle a droit à votre dévouement, à toute votre discrétion, même si vous deviez ne pas rester près d’elle!…»

–C’est bien, Héloïse, dit Mme de Vertval; je vous remercie. Je vous emmène donc à Paris; mais à la condition expresse que vous n’irez pas à l’hôtel de Roncelay. Tout le monde doit ignorer ma présence à Paris. Je n’y verrai personnne, pas même la comtesse. Le docteur Nerton me louera un appartement où je compte attendre la naissance de mon enfant. Louis restera ici.

Allez, ma fille. Je vais tâcher maintenant de reposer un peu.

Rentrée dans sa chambrette, Héloïse se laissa choir sur sa chaise.-Elle resta longtemps immobile, perdue dans ses réflexions.

Tout à coup elle se releva, et se dit à demi-voix:

–Hé! parbleu, je ne suis pas méchante, mais un peu d’égoïsme n’est pas défendu. Il ne sera pas dit qu’on m’aura surnommée à tort Mlle Figaro. Tous ces gens-là sont riches. Je suis pauvre, moi. Je veux bien être discrète et dévouée, mais du diable si je ne profite pas du secret que je viens d’apprendre. Je ne resterai pas longtemps femme de chambre. Le métier de coiffeuse me plaît davantage. Un petit capital, lorsque j’aurai rencontré un mari de mon choix, fera mon affaire. Je voudrais bien voir si, entre elles deux, elles ne me donnent pas une dizaine de mille francs, pour m’établir d’une façon ou de l’autre. En attendant, motus vis-à-vis du comte. Celui-là me restera pour un cas extrême. Il n’est pas mal libertin, M. le comte de Roncelay. Je saurai bien le retrouver à mon heure.

Mademoiselle Figaro : indiscrétions d'une Parisienne

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