Читать книгу Mémoires pour servir à l'Histoire de France sous Napoléon, Tome 1 - Baron Gaspard Gourgaud - Страница 21
MÉMOIRES DE NAPOLÉON
§ VI
ОглавлениеCette conversation fut décisive. Peu d'instants après, Napoléon descendit chez Siéyes: il lui fit connaître que depuis dix jours tous les partis s'adressaient à lui; qu'il était résolu de marcher avec lui Siéyes et la majorité du conseil des anciens, et qu'il venait lui en donner l'assurance positive. On convint que, du 15 au 20 brumaire, le changement pourrait se faire.
Rentré chez lui, Napoléon y trouva Talleyrand, Fouché, Rœdérer et Réal. Il leur raconta naïvement, avec simplicité, et sans aucun mouvement de physionomie qui pût faire préjuger son opinion, ce que Barras venait de lui dire. Réal et Fouché qui étaient attachés à ce directeur, sentirent tout ce qu'avait d'intempestif sa dissimulation. Ils se rendirent chez lui pour lui en faire des reproches. Le lendemain Barras vint à huit heures chez Napoléon, qui était encore au lit: il voulut absolument le voir, entra et lui dit qu'il craignait de s'être mal expliqué la veille; que Napoléon seul pouvait sauver la république; qu'il venait se mettre à sa disposition; faire tout ce qu'il voudrait, et prendre tel rôle qu'il lui donnerait. Il le pria de lui donner l'assurance que s'il méditait quelque projet, il compterait sur Barras.
Mais Napoléon avait déja pris son parti: il répondit qu'il ne voulait rien; qu'il était fatigué, indisposé; qu'il ne pouvait s'accoutumer à l'humidité de l'atmosphère de la capitale, sortant du climat sec des sables de l'Arabie; et il termina l'entretien par de semblables lieux communs.
Cependant Moulins se rendait tous les matins, entre huit et neuf heures, chez Napoléon, pour lui demander conseil sur les affaires du jour. C'étaient des nouvelles militaires ou des affaires civiles sur lesquelles il desirait avoir une direction. Sur ce qui avait rapport au militaire, Napoléon répondait d'après son opinion; mais sur les affaires civiles, ne croyant pas devoir lui faire connaître toute sa pensée, il ne lui répondait que des choses vagues.
Gohier venait aussi de temps à autre faire visite à Napoléon, lui faire des propositions et demander des conseils.