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L'ORIENT

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Dans le clair Orient, que la lumière inonde,

Près des limpides flots et des déserts de feu,

Sous l'insondable ciel étincelant et bleu,

Fleurit, naïve encor, la jeunesse du monde.

Là, dans l'enchantement des vivantes couleurs,

L'Humanité s'attarde au sein d'un calme rêve,

Car, du haut des autels, ses dieux veillent sans trêve,

Pour accueillir ses vœux et charmer ses douleurs.

Dans l'espace enflammé, les horizons mystiques

S'y déroulent sans fin parmi les rayons d'or.

Nul clairvoyant regard n'y peut sonder encor

Le sublime néant des visions antiques.

Le brahmane, approchant du Gange vénéré,

S'incline en sa ferveur que nul doute n'altère;

L'Arabe, balancé par le lent dromadaire,

Du prophète, à mi-voix, redit le nom sacré.

Sous les saints oliviers, le chrétien de Syrie

Évoque de Jésus le doux spectre sanglant,

Et rêve qu'il effleure en son baiser tremblant

Les pieds qu'ont arrosés les larmes de Marie.

Et d'infinis essaims de cœurs emplis de foi,

Ayant pour but l'amour et pour vertu l'aumône,

De l'aride Thibet aux bords du fleuve Jaune,

Serviteurs de Bouddha, suivent sa pure loi.

De leurs ardents espoirs ignorant la folie,

Ces peuples confiants, sans crainte et sans remord,

Ayant rempli leurs jours, s'endorment dans la mort

Sans avoir éprouvé notre mélancolie.

Dans l'avenir obscur, fermé d'un triple sceau,

Ils goûteront les biens que notre cœur jalouse:

L'orgueil des fils nombreux, la douceur de l'épouse,

Tous les simples bonheurs du monde à son berceau.

Affermis pour longtemps sur ces supports augustes

Que nos mains ont brisés sans trouver d'autre appui,

Et dédaignant le mal qui nous trouble aujourd'hui,

Ils resteront croyants, paisibles, fiers et justes.

Pour nous, près de trouver le vide sous nos pas,

Nous avons trop détruit sans bâtir assez vite.

D'amers pressentiments, que nul esprit n'évite,

A nos espoirs hautains livrent d'obscurs combats.

Et nous prêtons parfois, aux heures de ténèbres,

Une oreille inquiète aux lointains craquements

Dont le bruit, sourd encor, monte des fondements

De nos États vieillis, en des échos funèbres.

Crédules héritiers de l'humble et saint devoir,

Vous qui des dieux anciens ne touchez point les voiles,

Vivez, vivez heureux sous vos cieux pleins d'étoiles!

Vos rêves sont meilleurs que notre âpre savoir.

Nul ne sait quel triomphe à vos âmes candides,

Pour tant de patience, est peut-être promis.

Poursuivez donc en paix sous les astres amis

Votre songe éternel, au bord des mers splendides.

Poésies de Daniel Lesueur

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