Читать книгу Au pays des féeries - Diverse Auteurs - Страница 15

RAIPONCE

Оглавление

Table des matières

Un mari et sa femme habitaient une maison retirée qui avait une petite fenêtre d’où l’on avait vue sur un beau jardin plein de fleurs et de légumes. Ce jardin était enclos d’un haut mur.

Un jour que la femme regardait par la petite fenêtre, elle remarqua une plate-bande où étaient plantées de superbes raiponces. La raiponce est une herbe dont on fait d’excellente salade, et, depuis longtemps, la femme avait envie de ce mets. C’est pourquoi elle dit à son mari: — Il me faut absolument un plat de raiponces, ou je vais mourir.

L’homme, tout bouleversé, s’empressa, quand le soir fut venu, d’escalader la clôture du jardin pour aller cueillir une poignée de raiponces; malheureusement, à peine était-il en bas du mur que la propriétaire du terrain, qui était une magicienne, se trouva devant lui et lui demanda d’une voix irritée ce qu’il cherchait là. — Hélas! balbutia le mari, ma femme a vu de la fenêtre vos raiponces, et elle en a une telle envie qu’elle mourra, dit-elle, si je ne lui en apporte. — La magicienne s’adoucit alors et reprit d’un ton bienveillant: — S’il en est ainsi, je te permets de cueillir autant de pieds que tu voudras; seulement tu me remettras l’enfant que la cigogne apportera prochainement chez vous. — L’homme n’eut garde de dire non, fort aise de se tirer d’affaire de la sorte.

Quelque temps après, une petite fille étant apparue au logis, la magicienne survint aussitôt, emporta l’enfant et lui donna le nom de Raiponce.

Raiponce était la plus charmante créature qu’il y eût sous le soleil. Lorsqu’elle eut atteint sa quinzième année, la magicienne se dit que quelqu’un pourrait bien la lui venir enlever, et alors elle l’enferma dans une tour qui se dressait solitaire au milieu d’une forêt, et qui n’avait ni porte ni escalier. Tout en haut seulement était percée une petite fenêtre. Quand la magicienne voulait y entrer, elle se plaçait sous la lucarne, et criait: — Raiponce, tends-moi tes cheveux. — La belle enfant dénouait aussitôt sa tresse, l’attachait à un crochet de la fenêtre, et laissait pendre de vingt aunes au dehors sa magnifique chevelure dorée, à même laquelle grimpait la magicienne.

Or, un jour, le fils du roi étant venu à passer devant la tour, en ouït sortir de si doux accents, qu’il s’arrêta pour les écouter. C’était Raiponce qui chantait pour charmer les ennuis de sa solitude. Le fils du roi voulut monter jusqu’à elle; mais, ne trouvant pas de porte à la tour, il fut obligé de retourner; chez lui. Néanmoins la douce voix lui avait remué le cœur à tel point, qu’il ne manqua pas un seul jour de se rendre à la forêt pour l’écouter.

Une fois qu’il était ainsi aux aguets derrière un arbre, la magicienne parut; il l’entendit crier: — Raiponce, tends-moi tes cheveux; — il vit la tresse descendre de la fenêtre et la magicienne s’accrocher après elle, — Tiens! se dit-il, voilà donc l’échelle dont on se sert pour monter là-haut. Très bien, j’en userai, moi aussi.

Il revint le lendemain à la nuit tombante sous la tour, et se mit à crier: — Raiponce, tends-moi tes cheveux. — La tresse d’or se déroula aussitôt, et le fils du roi grimpa vers la fenêtre.

En voyant entrer le cavalier, Raiponce commença par avoir bien peur; mais le prince était si beau de sa personne, et il sut lui parler d’une façon si aimaible, que la recluse fut bientôt rassurée. Aussi, quand le visiteur lui demanda si elle consentirait à le suivre et à devenir son épouse, répondit-elle: — Certes oui, de tout mon cœur! mais comment faire pour sortir de la tour? — Je me charge de la chose. Attends-moi seulement demain soir; je t’apporterai une échelle de soie au moyen de laquelle tu descendras.

Le jour suivant, quand la magicienne revint voir Raiponce, celle-ci lui dit ingénument: — Marraine, comment se fait-il que tu éprouves tant de peine à monter jusqu’ici? Le fils du roi est autrement leste que toi! — Ah! coquine! s’écria la magicienne, tu m’en apprends de belles! Je voulais te séparer du monde entier, et voilà que tu te joues de moi et que des jeunes gens ont accès dans cette tour! Attends un peu!

Dans sa colère, elle saisit Raiponce par ses beaux cheveux, et, cric, crac, les lui coupa net. Ensuite elle emporta la charmante enfant au fond d’un désert, où elle la laissa dénuée de tout; puis, revenant à la tour, elle attacha la chevelure de Raiponce au crochet habituel de la fenêtre. Quand le prince arriva le soir avec son échelle de corde, il cria: — Raiponce, tends-moi tes cheveux. — La tresse de se dérouler aussitôt, et le fils du roi de grimper à la tour. Mais, qui le reçut? Ce fut la magicienne qui, l’air courroucé et d’une voix moqueuse, lui cria brutalement: — Je sais ce que tu viens chercher, c’est Raiponce; mais l’oiseau s’est envolé du nid, et il est perdu pour toi à jamais! — A ce mot, le fils du roi fut saisi d’une telle douleur qu’il se précipita en bas de la tour et se creva les yeux aux épines d’un buisson.

Sept années durant, le prince aveugle erra par le monde, souffrant toutes sortes de chagrins et de misères. Enfin il arriva dans le désert où la magicienne avait relégué Raiponce. Là, il entendit une douce voix qu’il lui sembla reconnaître, et vers laquelle il marcha à tâtons. Lorsqu’il fut près de Raiponce, celle-ci vit tout de suite que c’était son cavalier de la tour, et elle se jeta à son cou en pleurant. O prodige! Deux de ses larmes étant venues à tomber sur les yeux de l’aveugle, celui-ci recouvra soudainement la vue.

Le prince s’empressa de regagner son royaume avec Raiponce; tout le monde les accueillit avec joie, et ils vécurent longtemps ensemble dans une félicité sans nuages.

Au pays des féeries

Подняться наверх