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La Providence, qui s’occupe de ses moindres créatures, avait veillé sur Pierrot. Il n’était pas tombé tout droit du toit sur les pavés. Ses ailes avaient merveilleusement adouci la descente. Il avait su s’en servir, et il en était tout fier. Il avait voleté de corniche en corniche, se reposant sur le haut des volets, sur le bord des fenêtres, à chaque étage. Le voici maintenant sain et sauf tout en bas; il y est arrivé comme sur du velours.

Il se considère maintenant comme le plus habile des acrobates; il continue à exercer ses ailes. Il essaie aussi la force de son bec et va rejoindre une compagnie de moineaux d’âge mûr, qui tout le jour picotent dans la rue tout ce qui peut leur convenir.

— Qu’on me laisse tranquille, à présent, pense-t-il. Je saurai bien me débrouiller comme un autre.

Le pauvre petit! Bientôt la troupe s’en va plus loin, il reste seul en arrière. Les voitures vont l’écraser, il ne sait pas encore faire la nique aux chevaux, attendre le dernier moment pour s’envoler comme une flèche de dessous leurs jambes!

Il a toujours cet air mignon, touchant, des petits oiseaux tout frais sortis du nid. Il s’est réfugié sur un des côtés de la rue et volette en frôlant le bas des maisons.

Une dame, prise d’intérêt pour lui, s’arrête, quoique pressée, pour voir s’il saura se tirer d’affaire. Elle se tient prête à lui porter secours.

Il tente de se soulever de terre, mais ses petites ailes battent l’air inutilement. Soudain quelque chose comme un couvercle tombe sur lui et le plonge dans les ténèbres.

C’était la casquette d’un jeune employé au télégraphe, garçon d’une douzaine d’années. Très adroit, il glisse doucement la main sous son couvre-chef et saisit sa capture.

Pierrot fit entendre un piaulement plaintif qui voulait dire:

— Hélas! hélas!

La dame avait assisté à l’événement. Elle dit au jeune porteur de dépêches:

— Quand il saura voler tout seul, donne-lui la liberté. Alors tu n’auras fait qu’une bonne action.

Le garçon, qui s’appelait Félix, leva vers elle un si bon regard que la dame s’en alla toute rassurée sur le sort du petit oiseau, encore si faible et si dépendant.

Félix rentrait chez lui pour déjeuner. Heureuse coïncidence pour Pierrot, que dévorait de nouveau une faim de loup, et qui ne demandait qu’à ouvrir le bec! Son ambition du côté de la liberté se trouvait singulièrement contrariée par l’avidité insatiable de son estomac, autant que par les circonstances.

Il se vit tout à coup le convive d’une table plus garnie d’enfants que de plats. Un seul fricot, mais abondant. La mère le servait à pleine cuillerée à sa famille nombreuse et bruyante. Pas un ne manquait, depuis la toute petite fille qui gardait encore le logis près du jupon maternel, jusqu’au grand frère qui accompagnait le père à l’atelier. Tous étaient d’aimable humeur, contents de retrouver de bons parents, tous voulaient raconter à la fois les incidents de la matinée.

Félix tenait le milieu entre les grands et les petits. Lorsqu’il sortit son moineau de dessous sa veste et se disposa à le faire manger, ce fut une surprise générale, et les exclamations éclatèrent. On se précipita sur l’heureux Félix, qui leur permit à tous d’examiner et même de caresser son pierrot. On aurait jalousé Félix si on l’eût moins aimé. Il était le frère favori, si bon, si complaisant!

Bientôt la famille se dispersa, chacun retourna à son travail. On se réjouit de se retrouver au souper, — avec le moineau!

— Mais il dormira, dit en pleurnichant l’un des petits garçons, qui savait très bien qu’au coucher du soleil les oiseaux mettent la tête sous l’aile et se transforment en une petite chose ronde.

— Je le mettrai dormir près de toi, dit Félix, et demain matin, c’est lui qui te réveillera.

En attendant, Félix emporta Pierrot au bureau du télégraphe. Là, il se garda bien de le montrer à personne. Pierrot habitait une chaude petite cachette sur la poitrine de son maître. Ce maître était un ami. Le cœur de l’oiseau et celui du jeune garçon battaient très près l’un de l’autre.

A la longue, Pierrot aurait cependant pris de l’ennui dans cette retraite obscure. Pour le moment il était fatigué et se reposait doucement. Il ne voyait rien, mais il entendait tout ce qui se passait dans le bureau plein de monde, et cela ne manquait pas de l’intéresser. Félix n’y restait pas longtemps de suite, tout le jour se passait à porter des dépêches dans le quartier. Le cercle de ses courses était très étendu. Ses jambes travaillaient ferme.

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