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HUITIÈME ASSEMBLÉE.—DU 12 AVRIL 1791
ОглавлениеAssemblée générale de la section des Postes
du mardi douze avril mil sept cent quatre-vingt-onze.
La section des Postes convoquée en la manière accoutumée, M. Desvieux, membre de la section, a été prié de remplir les fonctions de secrétaire en l'absence du secrétaire-greffier.
Il a été fait lecture de la pétition signée de cinquante citoyens actifs de la section, qui avait pour sujet la communication de plusieurs délibérations et pétitions des autres sections adressées au Comité de la section. Les noms des cinquante citoyens signataires ont été articulés à haute voix, et chacun des citoyens dénommés ont été reconnus (sic) par l'Assemblée être citoyens actifs.
Sur la demande d'un citoyen, conformément aux décrets et à la proclamation du Département[122], la liste d'inscription de chacun des membres de l'Assemblée ayant été rapportée et comptée au bureau, elle s'est trouvée être de cent quatre citoyens présents à l'Assemblée; en conséquence, elle s'est reconnue être en état de délibérer.
Il a été fait lecture par M. le secrétaire d'une délibération de la Halle-aux-blés, du jeudi trente décembre mil sept cent quatre-vingt-dix[123], tendant à ce qu'il fût fait, par les quarante-huit sections, une pétition à l'Assemblée nationale, pour la supplier, de prendre en considération les services rendus à la Nation par ses enfants soldats et de les consacrer par une loi créatrice qui les maintînt dans la (sic) pénible, mais honorable exercice de leurs fonctions primitives. L'Assemblée, consultée par M. le Président, a décidé de passer à l'ordre du jour.
Il a été ensuite fait lecture d'une délibération de la section du Faubourg-Montmartre, du premier mars mil sept cent quatre-vingt-onze, tendant à ce qu'aucun citoyen ne compromit l'uniforme national, ne se mêlât dans aucune foule, et qu'aussitôt que les circonstances extraordinaires l'exigeraient, chaque citoyen serait engagé d'honneur à se rendre au drapeau et à ne pas le quitter, tant que la réunion du bataillon serait jugée nécessaire.
L'Assemblée a unanimement adhéré à ladite délibération.
Il a été fait lecture[124] d'une délibération de la section des Champs-Elysées, du trente mars mil sept cent quatre-vingt-onze, concernant le Comité de surveillance de l'Hôtel-de-Ville, et d'une autre délibération de la section du Palais-Royal, du deux avril présent mois[125], relative au même objet[126].
L'Assemblée, pénétrée des motifs qui ont déterminé lesdites délibérations, y a adhéré et a décidé en outre qu'il serait fait une invitation, en son nom, aux citoyens du bataillon[127] de Saint-Eustache et de la Jussienne pour qu'ils révoquassent les pouvoirs qu'ils auraient pu donner à des députés audit Comité de surveillance.
Il a été fait lecture d'une délibération de la section des Thermes-de-Julien, du dix-sept mars mil sept cent quatre-vingt-onze, concernant la destruction et abolition des mouchards[128]. L'Assemblée a ajourné la question jusqu'après la cessation des Comités de recherche de l'Assemblée nationale et de la Municipalité.
Une députation du bataillon de Saint-Jacques-la-Boucherie est venue demander les mauvaises pièces de canon du bataillon de Saint-Eustache, comme matières propres à en former de bonnes, qui serviraient audit bataillon qui en manque. La même observation a été faite par M. Thomas en faveur du bataillon de la Jussienne.
L'Assemblée a décidé qu'il serait délivré au bataillon de Saint-Jacques-de-la-Boucherie (sic) et conjointement à celui de la Jussienne, par égales portions, toutes les matières superflues au bataillon de St-Eustache, pour faire fondre des canons à leur usage, sur les ordres de la Municipalité, et que cette délivrance serait faite en présence de quatre commissaires, dont deux nommés par l'Assemblée générale de la section et deux par le bataillon de Saint-Eustache, et qu'à cet effet, il serait écrit à M. le commandant dudit bataillon pour lui faire part de ladite délibération; et, de suite, l'Assemblée a nommé pour ses commissaires, MM. Deslauriers, président, et Thomas, des fermes[129], qui ont accepté.
Un membre a demandé que l'Assemblée s'ajournât pour la continuation des objets qui ont motivé la convocation, attendu qu'il en restait beaucoup dont on n'avait pu s'occuper dans cette séance.
L'Assemblée, adoptant cette proposition, s'est ajournée à jeudi prochain, à l'heure ordinaire, et a décidé que la séance serait annoncée en la manière accoutumée.
Un membre a dit qu'il se proposait de faire une motion relative aux patentes[130], et de présenter un projet de pétition. Il a demandé que cet objet fût mis à l'ordre du jour à la prochaine séance.
L'Assemblée a adopté la proposition et décidé qu'elle serait mise à l'ordre du jour à la séance de jeudi prochain.
Fait et arrêté en l'Assemblée générale de la section des Postes, les jour et an susdits.
J. Mareschal. | Deslauriers. |
NOTES:
[122] L'arrêté du Directoire du Département de Paris, ordonnant aux sections de faire désormais le relevé des membres présents à chaque Assemblée générale, arrêté daté du 1er avril 1791, est donné par le Moniteur du 5 avril (réimp., t. VIII, p. 34). Ce texte a été réédité par Mellié, Les Sections de Paris pendant la Révolution française, pp. 96-97. Comme le fait remarquer Mellié (pp. 97-98 et 98 n. 359) désormais le registre de la section des Postes porte toujours le nombre des présents, ce qui n'avait pas lieu auparavant.
[123] Voici le texte de cette délibération, d'après l'imprimé à part. (P. imp. in-4o de 2 p., Bib. nat., Lb40 1871.—Tourneux, no 8228.)
EXTRAIT des registres des délibérations de la section de la Halle-aux-Bleds, ci-devant district Saint-Honoré. Du jeudi 30 décembre 1790.
L'Assemblée générale, convoquée sur la demande de plus de cinquante citoyens, après avoir entendu la lecture du vœu des gardes-nationales d'Auxerre, des membres de la Société de la Constitution à Rennes, et des bataillons des Carmélites, des Filles-Saint-Thomas, et de Saint-Martin-des-Champs;
Pénétrée de respect et de reconnaissance pour les augustes représentants de la Nation, dont les premiers et les plus honorables travaux sont d'avoir gravé sur un airain indestructible les Droits de l'Homme et du Citoyen; convaincue que l'hommage le plus pur qui puisse être adressé à l'Assemblée nationale, est une soumission non aveugle, mais sentie et raisonnée, aux loix émanées de sa sagesse; persuadée encore, d'après une heureuse expérience, que des représentations, quand elles sont respectueuses et justes, sont accueillies avec empressement de nos législateurs; convaincue enfin que la base de notre Constitution est de faire de chaque français un citoyen et un soldat tout ensemble, et que tout ce qui tendrait à altérer ce germe sacré de notre union, doit être proscrit par les pères de la Constitution;
A unanimement arrêté que son vœu était qu'il fût rédigé, par des Commissaires nommés par les quarante-huit sections, une pétition à l'Assemblée nationale, dont l'objet serait de la supplier de peser dans toute sa sagesse l'importance des services rendus à la Nation par ses enfants soldats, et de la consacrer par une loi créatrice qui, les maintenant dans le pénible mais honorable exercice de leurs fonctions primitives, apprenne à tous les peuples de l'univers, combien est fort, combien est puissant un empire qui, à tous les avantages de son territoire, ajoute celui de voir, dans chacun des individus qui le composent, un homme libre et un citoyen armé;
Que, sur le pareil vœu de huit sections, le Corps municipal serait invité de convoquer la Commune entière dans ses quarante-huit sections, dans le plus court délai, à l'effet de délibérer sur le vœu ci-dessus exprimé.
Arrête en outre que le présent serait imprimé et envoyé aux quarante-sept autres sections, avec invitation à chacune d'elles d'y adhérer.
Signé: | Montamant, président. |
Bligny, secrétaire-greffier. |
[124] Depuis cet endroit jusqu'à l'alinéa: «Il a été fait lecture d'une délibération de la section des Thermes-de-Julien...», le présent passage du procès-verbal de la section des Postes a déjà été édité par Lacroix, 2e série, III, 469, qui modifie ainsi le début de ce passage: «Lecture faite d'une délibération...»
[125] Les mots: «présent mois» ont été supprimés par Lacroix, III, 469.
[126] Le 28 février 1791, une foule de trois mille à quatre mille personnes s'était portée au château de Vincennes, en manifestant l'intention de démolir cette ancienne prison d'Etat qu'un décret de la Constituante, sanctionné par le roi, avait décidé d'adjoindre aux prisons de la capitale. La Fayette ayant donné l'ordre à la garde nationale de disperser les manifestants, quelques chasseurs du bataillon de Traisnel (ou bataillon de la section de Popincourt) poussèrent le cri de: A bas La Fayette! ce qui n'empêcha pas l'arrestation d'une soixantaine d'individus, déjà occupés à la démolition du donjon et qui furent conduits par la garde nationale à la Conciergerie. Pendant le trajet il fallut disperser des rassemblements qui essayaient de délivrer les prisonniers (Moniteur des 1er et 2 mars 1791, réimp. t. VII, pp. 504 et 511-512). Le Corps municipal, qui était resté en séance tout l'après-midi et avait été tenu au courant des événements de Vincennes (voyez Lacroix, 2e série, II, 765-767), se réunit à nouveau le soir et entendit le rapport que vint lui faire le commandant général sur les faits de la journée. La Fayette, tout en donnant des éloges à la conduite de la majeure partie de la garde nationale, se plaignit vivement d'un détachement du bataillon des Enfants-Trouvés (faubourg Saint-Antoine) commandé par Santerre, et le Corps municipal prit un arrêté félicitant la force armée de Paris, à l'exception du susdit détachement (Lacroix, II, 770-771). Santerre, ainsi dénoncé et, de plus, stigmatisé par un Ordre du commandant général, du 1er mars (Lacroix, II, 792), par un nouvel arrêté du Corps municipal du 2 mars (Lacroix, III, 11), par un écrit de l'aide de camp de La Fayette, le sieur Desmottes (ibid., 793), par les différents journaux royalistes et par une lettre qui lui fut adressée par sept de ses neuf collègues, commandant les autres bataillons de sa division (Lacroix, III, 59), Santerre répondit par un Rapport public sur l'affaire de Vincennes (Lacroix, II, 793-794) et intenta à La Fayette et à Desmottes un procès en diffamation à l'occasion duquel l'avocat, ou défenseur officieux, Buirette-Verrières, rédigea un Plaidoyer pour le sieur Santerre (Lacroix, III, 58 et 62-69).
Tandis que Santerre poursuivait La Fayette devant les tribunaux, le Corps municipal délibérait sur la suite à donner, au point de vue disciplinaire, aux événements du 28 février. Après s'être occupé de cette affaire, le 2 mars (Lacroix, III, 9-11) et, à deux reprises différentes, le 17 mars (Lacroix, III, 187 et 189), le Corps municipal prenait, le lendemain 18, un nouvel arrêté: pour remplacer un Comité de surveillance militaire de division institué, dès le 6 mars, par la VIe division pour enquêter sur les faits du 28 février (sur ce conseil de surveillance de la division, voy. Lacroix, III, 253-255), le Corps municipal décidait que le commandant général de la garde nationale ferait «tenir sans délai, un Comité de surveillance de toute l'armée parisienne pour prendre connaissance de tous les faits contraires au bon ordre et aux règles du service militaire seulement, qui ont pu avoir lieu dans les différents détachements de l'armée qui se sont portés à Vincennes, le 28 février, pour, sur le résultat et l'avis du Comité de surveillance, être par qui de droit décidé s'il y a ou s'il n'y a pas lieu à la tenue d'un conseil de guerre.» (Lacroix, III, 199).—Le 23 mars, La Fayette faisait présenter au Corps municipal, par son aide-major général, un projet pour la formation de ce Comité de surveillance de l'armée parisienne (ibid., 248-249). Mais alors différentes sections de Paris intervinrent contre ce projet de création d'un Comité de surveillance de toute l'armée, organe non prévu au règlement de la garde nationale (voyez Lacroix, III, 254 et 256). Le 30 mars, la section des Champs-Elysées refusait nettement de coopérer «en aucune manière aux décisions du dit Comité», vu que sa formation était annoncée «d'une manière vague et inconstitutionnelle» et qu'au surplus la garde nationale ne constituait pas un corps militaire. (On trouvera le texte de cet arrêté, d'après un imprimé du British Museum, dans l'ouvrage de Lacroix, III, 455-456.) Le lendemain, 31 mars, la section de Mauconseil s'opposait à son tour à la formation du Comité de surveillance (voyez le texte de cet arrêté dans Lacroix, III, 456-457). Le 1er avril, la section de la Fontaine-de-Grenelle prenait un arrêté analogue, dont nous possédons encore le texte (reproduit par Lacroix, III, 467-469). Le 2 avril, d'après le présent procès-verbal de la section des Postes et d'après le compte rendu de la séance des Jacobins, du 8 avril (voyez Aulard, La Société des Jacobins, t. II, p. 303), la section du Palais-Royal manifestait dans le même sens. Le 3 avril, c'était le tour de la section du Théâtre-Français (d'après le compte rendu de la séance, du 5 avril, du Conseil général, Lacroix, III, 452). Enfin la section du Luxembourg agissait de même (d'après la séance des Jacobins du 8 avril, Aulard, La Société des Jacobins, t. III, p. 303). Quelques-unes de ces protestations (Champs-Elysées, Mauconseil, Théâtre-Français) furent adressées, le 5 avril, au Conseil général qui, en donnant acte à ces sections de la remise de leurs arrêtés, les invita à s'adresser au Département (Lacroix, III, 452). Le lendemain, 6 avril, le Corps municipal, s'occupant à son tour de cette campagne, décidait de présenter de son côté, au Directoire du Département, un exposé de la question (Lacroix, III, 461), décision qui fut renouvelée, le 14 avril, à la suite d'une démarche du Département (Lacroix, III, 566). Le même jour, 14 avril, la section de l'Oratoire, apprenant que la Municipalité n'avait pas renoncé à son projet de constituer un Comité de surveillance militaire, bien que «l'opinion publique» se fût «généralement manifestée» contre ce projet, s'empressait de dénoncer la Municipalité à l'Assemblée nationale (texte de l'arrêté dans Lacroix, III, 469-470, et voyez le résultat de la démarche de la section, ibid., 470-471). Enfin vers le 22 avril, la section des Gravilliers décidait de ne prendre aucun parti dans cette affaire (voyez Lacroix, III, 471). En dépit de l'opposition que rencontra, parmi les sections de Paris, la création d'un Comité de surveillance de toute l'armée parisienne, celui-ci n'en fut pas moins formé et Santerre comparut devant lui, tout en déclinant sa compétence. Le Comité termina du reste l'affaire en mettant hors de cause Santerre et aussi probablement les manifestants du 28 février. On ignore la date de cette décision, qui est certainement antérieure au 11 juin (Lacroix, III, 259).
[127] Lacroix, III, 469: «... des bataillons...».
[128] Cet arrêté, présenté à la Société des Jacobins, le 20 mars 1791, fut imprimé par les ordres de cette Société. On le trouvera en un in-octavo de 4 pages, à la Bib. nat., Lb40 516 (Tourneux, no 8963). Ce texte a été réimprimé par M. Aulard, La Société des Jacobins, t. II, pp. 213-215.
[129] C'est-à-dire employé des fermes générales. On trouvera de même un Vanier, des fermes, à la page 42.
[130] La Constituante avait rendu un décret sur les patentes, un mois environ auparavant, le 2 mars 1791.