Читать книгу Du Droit du chasseur sur le gibier dans toutes les phases des chasses à tir et à courre - François-Ferdinand Villequez - Страница 7

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CHAPITRE I.

Table des matières

Du droit de chasse.

4. Le droit de chasse est le droit de se livrer à la recherche, à la poursuite et à la capture du gibier.

Abandonnée d’abord aux règles du droit naturel, la chasse, libre pour tout le monde, est devenue, en France, l’objet d’un droit dont la réglementation a suivi toutes les vicissitudes de notre organisation politique. Nulle matière n’a été l’objet d’aussi nombreuses dispositions législatives . Apanage exclusif de la noblesse, ou tout au moins attaché à la possession des fiefs, avant la Révolution française, le droit de chasse a été rendu par l’Assemblée Constituante à la propriété, dont il est aujourd’hui l’un des attributs .

Toute personne peut donc chasser sur son terrain ou sur le terrain de celui qui l’y autorise; mais, dans ces limites mêmes, des raisons d’utilité générale, telles que la conservation du gibier et des récoltes, l’intérêt du Trésor et des communes, etc., ont fait soumettre l’exercice du droit de chasse à certaines règles ou conditions, dont l’ensemble forme ce qu’on appelle la police de la chasse. Nul ne peut chasser sans s’y soumettre; leur violation constitue un délit qui, constaté par les agents chargés de la police judiciaire , ne peut être poursuivi que devant les tribunaux de police correctionnelle, au moyen de l’action publique exercée par les officiers chargés, au nom de la société, de la poursuite des délits , et doit être puni de peines qui varient suivant le degré de culpabilité du délinquant, l’amende, la confiscation des armes, la privation du permis de chasse, l’emprisonnement .

5. L’exercice du droit de chasse a été, comme nous l’avons dit, dans notre ancienne France, l’objet d’une foule de règlements, édits et ordonnances. La dernière, celle de 1669, sur les eaux et forêts, avait sur la chasse un titre entier, le titre 30, remplacé par la loi des 22-30 avril 1790, à laquelle a succédé la loi du 3 mai 1844, qui nous régit aujourd’hui. Elle est très bien intitulée loi sur la police de la chasse, car elle détermine les conditions auxquelles la chasse est possible en France pour ne pas constituer un délit. C’est ainsi qu’elle décide que pour pouvoir chasser il faut au moins avoir seize ans, n’être ni garde-champêtre ou forestier, ni interdit, ni placé sous la surveillance de la haute police, être muni d’un permis de chasse délivré par l’autorité compétente, qui peut le refuser à telles ou telles personnes, doit le refuser à telles autres; qu’en principe, on ne peut chasser que sur son terrain ou sur celui d’autrui, avec le consentement du propriétaire, en temps permis, le jour, à tir et à courre, à l’exception du furet et des bourses pour le lapin, etc. .

6. Encore une fois, et je ne saurais trop insister là-dessus, cette loi ne s’occupe en rien et n’avait pas à s’occuper du droit du chasseur sur le gibier qu’il chasse, poursuit ou tue. L’acquisition du droit de possession et de propriété sur toutes les choses qui peuvent appartenir à chacun de nous, gibier, poisson, meubles quelconques et immeubles, est du ressort unique du droit civil commun, qui règle et détermine les manières d’acquérir toute espèce de chose. C’est là, et uniquement là, qu’il faut chercher les éléments de décision de notre question qui est en dehors de tout délit, donne lieu à une action civile ordinaire en revendication du gibier comme de toute autre chose que nous prétendons nous appartenir, contre celui qui la détient; action qui a pour but d’obtenir la restitution de cette chose ou sa valeur si elle ne peut plus être restituée, et non l’application d’une peine dont elle est parfaitement indépendante; action intentée par le chasseur qui réclame le gibier devant le juge de paix, et non devant les juges siégeant correctionnellement; ce qui ne l’empêchera pas, s’il le juge convenable, et qu’un délit concomitant soit soumis au tribunal correctionnel, d’y porter aussi sa demande selon la règle ordinaire écrite dans l’article 3 du Code d’instruction criminelle. Les juges ont alors deux questions distinctes et indépendantes à décider: l’une, sur la poursuite du ministère public, celle de savoir s’il y a délit de chasse aux termes de la loi de 1844, question dont la solution affirmative entraînera une condamnation pénale, l’amende ira au trésor public; l’autre, civile, sur la demande du chasseur; celle de savoir si le gibier ou sa valeur doivent lui être restitués, entraînant une condamnation civile, à son profit exclusif; question que le tribunal peut résoudre affirmativement par le même jugement lorsqu’il reconnaît l’existence du délit, et qui devra être portée devant la juridiction civile s’il y a acquittement, car à la différence des cours d’assises les tribunaux correctionnels ne statuent pas sur l’action civile lorsqu’ils ne prononcent pas de condamnation pénale.

Le droit du chasseur sur le gibier qu’il réclame fait donc l’objet d’une question civile, abstraction faite de tout délit de chasse ou autre, tel que celui qui résulterait d’injures, coups et blessures qui peuvent avoir accompagné soit le fait de chasse sur lequel le chasseur fonde son droit, soit celui sur lequel le détenteur fonde le sien.

Vous avez une chose qui m’appartient, je prétends que vous me l’avez volée, vous êtes poursuivi par le ministère public pour délit de vol et acquitté, j’ai porté ma demande en restitution de cette chose devant le tribunal civil qui peut très bien la résoudre affirmativement. Vous n’aviez pas volé la chose, c’est le voleur qui vous l’avait vendue, prêtée, ou l’avait vendue, prêtée à un autre qui vous l’avait revendue; vous ignoriez le vol. (V. art. 2279, 2280 C. Nap.) A plus forte raison, si vous êtes convaincu de vol et condamné comme tel. Faisons maintenant commettre le délit par le propriétaire qui, pour reprendre sa chose que vous refusiez de lui rendre, a engagé une lutte avec vous, vous a blessé, a brisé votre porte, forcé votre secrétaire, etc.; il est condamné : en est-il moins pour autant propriétaire de la chose? Le tribunal civil auquel il s’adressera vous condamnera aussi à la lui restituer.

Il n’y a, à ce point de vue, aucune raison pour distinguer entre un délit de chasse et un autre délit.

Le gibier que vous emportez m’appartient-il? S’il m’appartient, si j’avais un droit exclusif sur lui, personne ne peut y porter atteinte. Que m’importe que vous ayez ou que vous n’ayez pas de permis de chasse, que vous vous en soyez emparé sur un chemin public, dans un bois où vous aviez ou n’aviez pas droit de chasse ou ailleurs! Si je suis propriétaire ou possesseur du gibier, vous ne pouvez porter atteinte à mon droit; vous me le prenez, il faut me le rendre. Si vous ajoutez à cela un délit de chasse, c’est l’affaire du ministère public. Suis-je ou non propriétaire du gibier, voilà toute la question qui s’agite entre nous; question de pur droit civil, qui se résout par des principes indépendants de ceux qui constituent le délit et qui doit faire le point capital de ce travail. Nous examinerons toutes les hypothèses qui peuvent se présenter, avec ou sans accompagnement de délit de la part de l’une ou de l’autre des parties. Mais, avant d’y arriver, nous avons encore à parler du droit de suite, avec lequel le droit du chasseur sur le gibier a assez de connexité pour avoir entraîné beaucoup de bons esprits dans la confusion.

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