Читать книгу Études sur l'industrie et la classe industrielle à Paris au XIIIe et au XIVe siècle - Gustave Fagniez - Страница 3

Оглавление

AVANT-PROPOS

Table des matières

Il nous paraît superflu de faire ressortir l’intérêt du sujet traité dans ce livre; mais, plus ce sujet excite la curiosité, plus il rend le lecteur exigeant, plus il oblige l’auteur à aller au-devant de certains mécomptes et à se dégager de la responsabilité de certains défauts qu’il n’était pas en son pouvoir d’éviter.

C’est surtout à cause de leurs lacunes que ces études paraîtront manquer aux promesses de leur titre. Si elles tombent entre les mains d’un économiste habitué aux renseignements précis et complets de la statistique, ou dans celles d’un industriel désireux de se rendre compte des progrès de son industrie, ni l’un ni l’autre n’y trouveront des notions aussi sûres, aussi détaillées que dans les enquêtes et les traités techniques contemporains. S’ils s’en étonnaient, nous leur ferions observer que le moyen âge ne nous a laissé ni statistiques officielles ni manuels d’arts et métiers comparables à ceux de notre temps. Nous ajouterons, à l’adresse de tous les lecteurs et spécialement des érudits, que les archives anciennes qui contenaient le plus de matériaux pour un travail comme le nôtre, ont été partiellement ou entièrement détruites. Celles dont la perte est la plus regrettable, ce sont les archives des corporations elles-mêmes. Là se conservaient, avec les actes émanés de l’autorité publique, les titres de propriété, les procès-verbaux de réunions, les pièces de comptabilité, les brevets d’apprentissage, bref tous les documents auxquels donnait lieu le fonctionnement des corporations et qui nous auraient fait assister à leur vie intime. Que ces documents aient été conservés intacts jusqu’à la suppression définitive des corporations ou que celles-ci se fussent déjà débarrassées de ceux qui avaient perdu toute utilité pratique[1], leur perte nous a réduit à ne donner de leur administration intérieure qu’une idée générale et insuffisante. Combien on doit déplorer aussi l’incurie des greffiers du Châtelet qui n’ont pas su préserver de la destruction les plus anciens registres civils de cette juridiction! C’était elle qui jugeait en première instance ou en appel les affaires commerciales et industrielles, qui statuait sur les débats entre les patrons et leurs ouvriers ou apprentis, qui condamnait pour contraventions aux règlements.

Par suite de la disparition presque totale des documents les plus propres à nous montrer le jeu de l’organisation industrielle, les statuts et les règlements qui nous la présentent, pour ainsi dire, au repos, ont pris la première place parmi les sources de notre travail. Mais que de sous-entendus, que de lacunes dans ces règlements, fragments d’une législation qui consistait surtout dans les traditions professionnelles, dans la jurisprudence des gardes jurés!... Ces règlements, secs et inanimés comme des textes de lois, ne nous auraient pas mis à même de pénétrer jusqu’à la réalité des choses, si des documents tout différents, de nature et de provenance diverses, ne nous avaient transporté au cœur même de la vie industrielle et ne nous avaient permis de donner à notre tableau quelque couleur et quelque vérité. On verra que nous avons emprunté quelques traits de ce tableau à des documents étrangers à notre cadre par leur date ou leur origine, lorsque l’analogie nous y autorisait et que l’harmonie ne devait pas en souffrir.

Dans quel ordre devions-nous classer et présenter les résultats de nos recherches? L’ordre chronologique, le plus simple de tous, n’était pas possible, car il ne saurait s’appliquer qu’à un sujet qui offre des périodes bien tranchées. Or, si l’industrie parisienne a subi, depuis l’époque à laquelle remontent les premiers documents jusqu’à la fin du XIVe siècle, d’inévitables modifications, ces modifications n’ont pas été assez importantes pour donner lieu à des divisions suffisamment justifiées. Restait l’ordre méthodique, avec ses difficultés et l’arbitraire qu’il implique toujours. A force d’y réfléchir cependant, nous avons reconnu que notre sujet offrait deux parties principales, distinctes à la fois par leur objet et par la méthode qu’elles exigent. Nous étudions dans ce volume l’industrie et la classe industrielle; ces deux choses, qui se confondent dans la réalité, peuvent, par une abstraction très-légitime, être envisagées séparément. Et non-seulement cette distinction est commode, mais elle est nécessaire. La même méthode ne peut servir à exposer la condition de la classe ouvrière, dans ses différents éléments, et le fonctionnement des diverses industries. A côté de nombreuses variétés de détail, l’organisation des corporations offre des traits généraux qui, si on réussit à les distinguer de ce qui est particulier et accidentel, doivent former un tableau d’ensemble aussi vrai que peut l’être une généralisation. L’exposé des procédés industriels est incompatible avec une pareille méthode; ici la variété domine, et on se heurterait à une difficulté invincible en essayant d’éliminer des différences qui sont essentielles pour amener à l’unité un sujet qui y répugne complétement. C’est cette considération qui explique la division de l’ouvrage en deux livres: l’un où la classe industrielle est étudiée à tous les points de vue et principalement au point de vue économique, sans distinction de métiers; l’autre qui repose, au contraire, sur les distinctions professionnelles et qui fait connaître les habitudes et les procédés propres à un certain nombre d’industries.

Nous avons dit pourquoi ce livre restera, à certains égards, au-dessous de l’attente du lecteur, nous avons essayé d’en justifier le plan. Le meilleur succès, à notre gré, qu’il puisse obtenir, c’est d’en susciter de meilleurs sur l’industrie des principales villes de la France et d’ouvrir ainsi la voie à des travaux du même genre, qui permettront un jour d’écrire l’histoire générale de l’industrie et de la classe industrielle dans notre pays.

G. F.

Décembre 1877.

LIVRE PREMIER
ORGANISATION CIVILE, RELIGIEUSE ET ÉCONOMIQUE
DE LA CLASSE INDUSTRIELLE

Table des matières

Études sur l'industrie et la classe industrielle à Paris au XIIIe et au XIVe siècle

Подняться наверх