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II.

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A la Salle-le-Comte de Valenciennes, bâtie par Baudouin IV comte de Flandre et de Hainaut, Jean Molinet, alors indiciaire de Bourgogne (vers1485), chanoine et agrégé du Puy de Rhétorique aimait à régenter le plus jeune de ses neveux qui devait être «son loingtain imitateur». L’autre, qui mourut dans la guerre de Gueldre, ne reçut qu’une éducation militaire. Jean, qui avait le feu sacré, s’exerça avec une précocité dangereuse aux plus subtiles inventions rythmiques recommandées par Molinet dans son Petit traictée compillé à l’instruction de ceulx qui veulent apprendre l’art de rhétorique (B.N. fr. 2375).

Le puy de Valenciennes presque aussi ancien que celui d’Arras, chef d’ordre de la Flandre, avait dû populariser les «patrons, exemples, couleurs, figures et tailles de dictiers» comme on les paragonnait déjà dans les traités d’Eustache Deschamps et de Henri de Croy. Rondeaux de toute facture, virelais, fatrasies, baguenaudes, ballades aux rimes les plus insensées, servantois, chants royaux aux épithètes les plus ronflantes, voilà ce que le jeune disciple dut pratiquer pour complaire à son protecteur Molinet «tant la fleur comme la farine, telle quil a seu tourner entre ses meulles.»

Un ami de Molinet, Guillaume Cretin (le Raminagrobis de Rabelais?) atteste cette éducation minutieuse dans ces vers:

Dont Molinet qui tavoue à parent

Acquiert honneur, bruyt et loz apparent

Veu que soubz luy tu as si bien appris

Que ton labeur vault estre mys à prix.

Cet «art de rhetoricque vulgaire ou rigmicque» fut pour le jeune vuallon, comme il aimait à dire, une seconde fatalité, une autre hantise. Il faut lui en tenir compte à la lecture de ses œuvres de jeunesse ou de sénilité. Ne pas oublier, non plus, quand il balbutie sa critique des origines troyennes, que Rabelais, Bonaventure, Desperriers et Sorel lui reprochent avec tant de malice, que l’impressionnable écolier de Valenciennes a dévoré le roman pseudo-historique de Jacques de Guyse, soit dans le manuscrit latin conservé aux Frères Mineurs, soit dans la traduction bourguignonne de Simon Norkart. Il a été comme ensorcelé par ce titre: Illustrations de la Gaule Belgique, antiquitez du pays de Hay nau et de la grand cité de Belges, à present dicte Bavay dont procèdent les chaussées de Brunehault.

Était-il encore à Valenciennes, au retour de Marguerite d’Autriche (13juin1493) lorsque les corps de «stiles et mestiers» reçurent, avec tant de processions, de jeux historiés et de «mistères» la blonde dauphine que la politique française venait de faire répudier? Qu’il y fût ou non, Lemaire avait, dès sa prime enfance, appris à vénérer «la très superillustre princesse, fille unique de Cesarauguste Maximilian.» C’est ce qu’il convient de retenir quand on rencontre en ses écrits tant de locutions apothéotiques. Qui sait, d’ailleurs, si les élans césariens de l’Enéide, son premier livre de chevet, n’ont pas achevé de le griser d’hyperboles?

La vie et les oeuvres de Jean Lemaire de Belges

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