Читать книгу Les coliques du cheval : diagnostic et traitement - Joseph-Justin-Adrien Roger - Страница 14
II. — PARTIE AUDIBLE
ОглавлениеUne partie du drame se passe à huis clos et nous ne pouvons la saisir que par l’auscultation abdominale.
Les bruits que l’on peut percevoir à l’auscultation de l’abdomen sont tubaires, péritonéaux ou pariétaux.
I. Bruit d’origine tubaire. — Les bruits tubaires sont fonction de la dynamique du tractus digestif, et de la nature des éléments qu’il renferme; la logique commande d’examiner:
1° La dynamique de l’appareil digestif à l’état normal et à l’état pathologique;
2° Le contenu gastro-intestinal dans les mêmes conditions.
3° Les bruits d’origine tubaire.
A. Dynamique tubaire. — Le tube digestif a une innervation modificatrice. L’autonomie lui est conférée par les plexus intra-musculaires d’Auerbach et sous-muqueux de Meissner.
L’innervation modificatrice lui est apportée par le vague et le sympathique. Remarquons en passant l’analogie qui existe entre l’intestin et le cœur. Les ganglions intra-cardiaques de Ludvig, de Bidder et de Remak sont les homologues des plexus de Meissner et d’Auerbach. Le vague et le sympathique apportent à l’intestin et au cœur une influence modificatrice mais tandis que le vague frène le cœur et excite l’intestin, le sympathique excite le cœur et frène l’intestin.
A l’état normal on peut distinguer dans le tube digestif des mouvements communiqués et des mouvements propres.
a) Mouvements communiqués ou passifs. — L’intestin est suspendu par les mésos à la voûte lombaire, d’autre-part il est séparé de la cage thoracique par le diaphragme, cloison mobile qui exerce huit, dix aspirations et refoulements de la masse intestinale dans le cours d’une minute. Il est hors de doute que l’intestin avance ou recule sous l’influence du diaphragme. Le flux et le reflux s’extériorisent parfois au niveau de l’anus qui s’enfonce en inspiration et saille en expiration. Si on veut bien considérer que les différents segments intestinaux sont plus ou moins étagés et que la traversée intestinale se fait un peu en montagnes russes, on concevra la possibilité de bruits passifs d’origine diaphragmatique. Leur synchronisme respiratoire permettrait à lui seul de les différencier de ceux qui résultent de l’exercice des muscles de la paroi intestinale.
b) Mouvements actifs. — Ce sont: les mouvements péristaltiques, les mouvements antipéristaltiques, les mouvements pendulaires, les mouvements d’Exner.
Les mouvements péristaltiques procèdent d’excitations chimiques ou mécaniques aboutissant à la contraction des fibres musculaires, longitudinales et circulaires de l’intestin.
Les ondes péristaltiques sont à faible amplitude. Elles peuvent naître à un point quelconque. Chez l’homme elles ne s’étendent guère au delà de 3 centimètres et font progresser le bol à la vitesse de 27 centimètres à l’heure. A notre connaissance du moins la vitesse du bol n’a pas été déterminée chez le cheval.
Les mouvements péristaltiques sont influencés par les sécrétions intestinales, par des hormones, par les causes mécaniques, par les produits de la digestion: peptones, glycose, acide lactique, acide acétique, etc., par les produits de la putréfaction; le scatol est un excitant puissant tandis que l’indol et le phénol sont inactifs, par l’eau froide, le refroidissement cutané, les purgatifs, les sels de potasse, les sels de soude, la pilocarpine, l’ésérine qui excitent les contractions intestinales. Les sels de soude déterminent des contractions péristaltiques; les sels de potasse déterminent des contractions locales.
L’atropine à petites doses favorise les mouvements intestinaux et les paralyse à hautes doses. La strophantine a une action identique. La morphine et la belladone les diminuent. L’adrénaline les inhibe. Les mouvements péristaltiques peuvent être impressionnés par certains phénomènes psychiques tels que la peur (diarrhée émotive). Ils peuvent être provoqués par l’excitation de certains points de l’écorce cérébrale correspondant à la région du gyrus sigmoïde du chien.
Les mouvements antipéristaltiques sont ceux qui font progresser les aliments en sens inverse de l’action péristaltique. L’existence de ces mouvements dans l’intestin grêle est très controversée et niée par la majorité des auteurs en s’appuyant sur une expérience d’Ellinger et Preusse. On explique par des remous intestinaux l’arrivée dans l’estomac de substances déposées dans l’intestin grêle.
L’antipéristaltisme est généralement admis en ce qui concerne le gros intestin. Chez le cheval au niveau du cœcum les aliments progressent en sens inverse de la pesanteur et doivent refaire en antipéristaltisme le chemin parcouru primitivement sous l’influence de la péristaltique. D’autre part l’examen comparatif des bandes dans les différents segments intestinaux impose l’idée d’antipéristaltisme.
Les mouvements pendulaires sont de petits mouvements de va et vient comparable à ceux d’un pendule qui ont pour but de diviser le contenu intestinal sans viser à la progression. Ils sont essentiellement caractérisés par une série d’oscillations courtes, rythmée, qui sont sous la dépendance du plexus d’Auerbach.
Phénomène d’Exner. — On distingue sous le nom patronymique du savant qui l’a signalé un moyen de défense peu banal qui se manifeste lorsqu’un corps acéré est mélangé aux aliments. La muscularis mucosae est excitée par le corps étranger et répond à l’excitation en se contractant localement constituant ainsi une sorte de butoir sur lequel le corps étranger se heurte et se renverse. Ce phénomène est sous la dépendance du plexus de Meissner. Il nous a été donné de constater à plusieurs reprises que des corps acérés situés dans le côlon avaient la partie mousse dans le sens de la progression.
II. A l’état pathologique on peut noter des variations de fréquence et de durée des contractions intestinales. La péristaltique peut être exagérée, diminuée ou supprimée.
L’excitation faible du pneumogastrique ou du sympathique augmente la fréquence et l’intensité des mouvements. L’augmentation de voltage a pour conséquence l’accélération du transit.
Des excitations plus intenses de ces rameaux nerveux peuvent aboutir à la contraction spasmodique (Iléus spasmodique ou entérospasme).
Une forte excitation du sympathique entraîne la paralysie du tube digestif par inhibition du vague (entéroplégie).
L’accélération du transit, le spasme ou la paralysie peuvent être d’origine cérébrale. Un traumatisme abdominal peut inhiber le péristaltisme.
Les états atoniques: (gastrite chronique, sclérose dystrophique, sénescence), ralentissent l’activité intestinale.
L’existence de corps étrangers dans l’intestin peut déclancher l’entérospasme: vers, calcul, sable, capsules médicamenteuses, grains d’avoine intacts, cailloux même si les corps sont de faibles dimensions.
Les états inflammatoires sont capables d’entraîner l’entéroplégie d’après la loi de Stockes.
L’entérospasme peut s’observer au cours de certaines affections rénales, aortiques; on peut l’observer dans le tétanos, l’urémie, l’oxalémie, dans certaines intoxications (strychnine).
Les mouvements peuvent être paralysés du fait de la distension gazeuse des réservoirs.
L’exagération des mouvements s’observe dans l’obstruction intestinale. L’intestin lutte contre le corps étranger qu’il essaye de faire progresser par des contractions puissantes et très étendues apparaissant assez loin de l’obstacle comme si l’intestin prenait de l’élan. Si le corps étranger résiste il crée autour de lui une zone qui se stupéfie et se paralyse et comme les puissantes contractions persistent en amont, il y a production de bruits résultant de la collision de liquides, de gaz, d’éléments solides qui sont projetés pêle-mêle dans un segment obstrué et dont les parois flasques permettent des remous. Ce mécanisme est perçu audiblement sous forme de glou-glou ou de clapotage; il peut aussi donner lieu à une sensation tactile en coup de bélier ou comme un soufflet ouaté quand l’anse obstruée est sous-pariétale, Dans ce cas, il peut être loisible d’observer un soulèvement de la paroi.
B. Le contenu intestinal. — A l’état normal, l’intestin renferme des éléments solides, liquides et gazeux en proportions variables. La quantité de liquide est prépondérante après l’abreuvoir. Les gaz sont toujours en faible quantité.
A l’état pathologique, l’élément liquide peut s’exagérer du fait de l’hypersécrétion intestinale, des troubles de l’absorption, de l’hypertension portale, des chasses biliaires, etc....
L’élément gazeux prend des proportions anormales dans l’aérophagie, les fermentations gastriques ou intestinales, etc.
C. Les bruits d’origine intestinale. — Connaissant la nature des mouvements de l’intestin et du contenu intestinal, nous sommes en mesure d’interpréter les bruits qui sont perçus à l’état normal et à l’état pathologique.
Lorsque le tube digestif fonctionne convenablement on ne perçoit que des bruits d’origine intestinale. Il ne se produit pas de bruits péritonéaux ni de bruits pariétaux.
Borhorygmes (d’un mot grec qui signifie «murmure»). — Le borborygme est le bruit normal par excellence du tube digestif. C’est l’extériorisation audible de la contraction intestinale sur une masse diffluente et gazeuse d’où le nom de bruit hydro-aérique qu’on lui donne également. Sur un cheval dont le ventre fonctionne régulièrement, il est loisible de percevoir par l’auscultation de l’abdomen, à intervalles plus ou moins rapprochés un bruit qu’on a comparé au crépitement d’une fusillade ou à un roulement de tonnerre lointain qui se rapproche et donne l’impression de pénétrer dans l’oreille. Quand on a perçu ce bruit, on peut affirmer qu’en ce point l’intestin se contracte; l’activité du segment est incontestable. L’importance de cette notion est capitale, aussi faut-il avoir à l’esprit les termes de la définition du borborygme: bruit lointain qui se rapproche et qui donne l’impression de pénétrer dans l’oreille. Ce dernier caractère est très important. Il évite de confondre le borborygme avec ceux du segment interrogé. Par exemple, en auscultant le cœcum on peut entendre le borborygme de la 4e portion du côlon qui est placé à la face interne du cœcum.
A l’état normal la fréquence des borborygmes varie selon le moment auquel on pratique l’auscultation. Ils sont plus fréquents après l’abreuvoir ou après le repas que pendant le jeûne.
A l’état pathologique, les variation de fréquence sont assez grandes. Cela se conçoit étant donné que toutes les causes susceptibles de retentir sur les mouvements ou les sécrétions influencent la phonation intestinale.
Les borborygmes augmentent dans l’excitation faible du vague ou du sympathique, l’hypersécrétion intestinale, l’entérite diarrhéique, au début des fermentations et de l’indigestion gastrique, dans le cas d’obstacle dans l’intestin.
Ils diminuent dans la constipation, l’atonie intestinale et disparaissent dans les spasmes intestinaux, le tympanisme, l’entéroplégie, en aval du siège d’un obstacle.
Si on perçoit des borborygmes sur toute l’étendue de la cavité abdominale, on peut affirmer que la voie est libre jusqu’au colon flottant. Les borborygmes perçus à l’auscultation de la poitrine constituent un bon signe de hernie diaphragmatique.
Nous avons envisagé jusqu’ici le borborygme typique; il en existe des variétés liées aux variations de composition du contenu intestinal nous voulons parler du gargouillement et des flatuosités.
L’intestin gargouille quand il se contracte sur une masse dans laquelle l’élément liquide prédomine. Il est flatulent quand les fluides volatils l’emportent sur les éléments liquides et solides.
Tandis que le borborygme type signifie que l’intestin est actif dans le segment où il est perçu, on peut se demander si les gargouillements et les flatuosités ne peuvent pas reconnaitre dans certains cas une origine passive sous l’impulsion diaphragmatique. Il faut se méfier quand ces manifestations sont synchrones des mouvements respiratoires, dans les autres cas ce sont des borborygmes traduisant l’activité fonctionnelle de l’intestin.
Le glou-glou peut être comparé au bruit que l’on provoque en versant sur le sol le contenu d’une bouteille à moitié remplie d’eau. Son déterminisme comprend une force assurant la progression d’une masse hydro-aérique dans un espace rétréci. On observe le glou-glou particulièrement au niveau de l’intestin grêle et dans l’obstruction incomplète de la lumière intestinale.
Bruits de spasme ou de distension (bruits métalliques). — Lorsqu’il existe un spasme intestinal, les bulles gazeuses éclatent à la surface du liquide en produisant des bruits à sonorité métallique. Ces bruits peuvent s’entendre en amont d’un obstacle lorsque l’intestin se tétanise sur le corps étranger. On peut percevoir au cours de la distension des réservoirs les mêmes bruits que dans le cas de contraction tétanique de l’intestin. Au niveau du cœcum on peut entendre dans certaines conditions des bruits de gouttelettes de liquide tombant sur une tôle qui sont dus aux mouvements pendulaires. Le bruit est fonction de l’éclatement de bulles gazeuses dans un milieu de tension plus basse que celle du milieu où ils viennent.
Quand il s’agit de bruits de spasmes proprement dit, ces bruits occupent exclusivement la scène sur un segment plus ou moins étendu de l’intestin. S’ils se rapportent à une obstruction intestinale, la zone aval est silencieuse. Quand ils sont liés à la distension, on peut percevoir la réplétion gazeuse par l’inspection, la percussion ou la fouille rectale. Au niveau du cœcum ils seront mis sur le compte des mouvements pendulaires, s’ils sont remplacés à certains moments par des borborygmes et que le transit soit normal dans la première portion du colon où on perçoit la borborygmie. Si au contraire la première portion ne présente pas de borborygmes on les mettra sur le compte de la distension ou la contracture cœcale si le grêle est actif.
Ces bruits sont très variés dans leur expression. Ils se manifestent sous forme d’accords de harpe, de drelin-drelin, de clochette, de bruit de chaînes, de bruit de goutte d’eau tombant sur de la tôle, de bruit de cascade, du tzim d’une balle qui siffle à l’oreille ou du tschak d’une balle tirée dans l’eau. Ces différents bruits ont des tonalités qui varient du grave à l’aigü. Ils ressemblent tantôt à un glas, tantôt à un joyeux carillon. Ces bruits s’observent dans les cas d’occlusion et d’obstruction intestinale. Le signe du bras est à rapprocher des signes d’auscultation. S’il n’y a pas d’occlusion ou d’obstruction, il s’agit de spasme ou de distension. S’il s’agit d’un cheval tiqueur ou sialophage et que la crise comporte du météorisme, il y a gros à parier qu’il s’agit d’une distension, bien qu’il puisse exister un spasme en aval de la partie distendue. Pour trancher, on peut recourir à l’épreuve de l’atropine qui en levant ce spasme fera cesser le météorisme. S’il n’y a pas de météorisme et que l’exploration rectale fasse reconnaître la vacuité relative de la cavité abdominale: spasme. L’épreuve pharmacodynamique par l’atropine confirmera souvent cette manière de voir.
Bruit de clapotage. — C’est un bruit comparable à celui de la vague qui heurte une barque amarée au rivage. Il naît du conflit d’un chyme fluide et des valvules conniventes sous l’influence d’un péristaltisme exagéré. Le bruit de clapotage traduit une lutte ou une hyperactivité intestinale.
Bruit de claquement. — C’est un bruit comparable à celui que produit une planchette frappant brusquement la surface de l’eau. Il nous paraît procéder d’un mécanisme analogue à celui du bruit de clapotage et avoir la même signification.
Bruit de chasse-d’eau. — S’observe particulièrement au niveau du cœcum; il est dû à l’irruption brusque de liquide et de gaz dans le coecum ou dans le colon.
D. Bruits péritonéaux. — Dans le cas de péritonite on entend à certaines périodes de l’évolution, au début et à la période de régression, un bruit de frottement résultant du glissement l’un sur l’autre des feuillets péritonéaux dépolis.
E. Bruits pariétaux. — Dans certains cas l’oreille appliquée sur l’abdomen perçoit un bruit rotatoire comparable à celui d’un moteur entendu dans le lointain, qui est dû à des contractions fibrillaires et qu’on peut très bien reproduire en appliquant la paume de la main sur l’ouverture de l’oreille.
Projection des viscères sur la paroi abdominale. — Ce n’est pas tout de percevoir les bruits et de les interpréter; encore faut-il les localiser et pour cela il est indispensable de connaître la projection des viscères sur la paroi abdominale.
Il importe tout d’abord d’être en mesure de savoir si on ausculte la région thoracique ou la région abdominale. Pour départager ces deux cavités, il suffit de tirer par la pensée une ligne partant du coude et passant par le milieu de la onzième côte. Tout ce qui est en avant de cette ligne est thoracique, tout ce qui est en arrière est abdominal. (Voir les figures 1 et 2 ci-contre, aux pages 44 et 45).
Le côté droit de l’abdomen correspond au coecum à la première et à la quatrième portion du côlon. Chacune de ces portions a sa projection spéciale.
La quatrième portion est située dans l’angle formé par la ligne de partage des zònes thoraco-abdominale et la ligne coupant les articulations chondro-sternales.
La première portion du côlon replié est placée sous les cartilages costaux au niveau des huitième et dix-septième côtes; sa moitié supérieure se trouve à une largeur de main au-dessus des cartilages et l’autre moitié au-dessous.
Le segment postérieur est occupé presque en entier par le coecum. La base ou la crosse du coecum occupe aussi la partie supérieure de la portion antérieure jusqu’à la quartorzième côte en avant.
A gauche, la paroi abdominale est en contact dans ses deux-tiers supérieurs avec des anses de l’intestin grêle et du colon flottant; le tiers inférieur de la cavité abdominale jusqu’à l’ilium en arrière est occupé par les deuxième et troisième portion du côlon replié. C’est surtout la seconde portion qui est en contact immédiat de la paroi de l’abdomen sur une grande surface; la troisième portion en est un peu éloignée; en avant elle se place au-dessus de la seconde portion et est appliquée contre la paroi abdominale ou le diaphragme au niveau des septième et onzième côtes.
Quelques particularités physio-pathologiques du tube digestif. — Les classiques passent sous silence certains faits qui ne laissent pas de frapper le clinicien et que nous allons passer en revue.
Les auteurs sont unanimes à reconnaître l’inertie intestinale au cours d’une indigestion gastrique par surcharge; mais ils n’en fournissent pas la raison.
FIG. 1. Projection des viscères (cheval côté droit), d’après Malkinces.
Cœc: cœcum. – vc: 2e portion du colon. – dc: 4e portion du colon.
Pour arriver à saisir le mécanisme de cette inertie dans ces conditions, il faut, croyons-nous, se remémorer l’innervation modificatrice de l’appareil digestif. Aussi, rappellerons-nous; 1° que l’estomac, le grêle, le coecum et la première moitié du colon sont innervés par le plexus solaire; 2° que la seconde moitié de l’anse colique, c’est-à-dire les troisième et quatrième partions sont innervées par le plexus mésentérique antérieur; 3° que le côlon flottant et le rectum sont innervés par le plexus mésentérique postérieur; 4° que les différents plexus sont réunis entre eux.
Ainsi, de par l’innervation, nous pouvons considérer l’existence de trois segments intestinaux. Le segment innervé par le plexus-solaire qu’on peut considérer comme le segment digestif proprement dit, le segment innervé par le plexus mésentérique antérieur qui au point de vue fonctionnel est un segment intermédiaire à la digestion et à la fécalisation. Le segment innervé par le plexus mésentérique postérieur ou segment de fécalisation et d’émonction.
FIG. 2. – Projection des viscères (côté gauche), d’après Malkinces.
Limites postérieures du champ de percussion. – – – – : Inversion costale du diaphragme. H: Cœur. – dc: 3e portion. – LvC: 2e portion du côlon.
Dans chaque segment la nature a créé l’unité nerveuse ou unité de commandement aux fins d’un bon fonctionnement. Mais, bien que jouissant d’une indépendance relative les segments sont subordonnés entre eux et le plexus solaire est au sommet de la hiérarchie. Dans certains cas, le tube digestif se comporte comme s’il était commandé par le plexus solaire, comme la moëlle vis à vis du cerveau. Cette constatation est de nature à justifier la dénomination de cerveau abdominal par laquelle les auteurs anciens avec Bichat désignaient le plexus solaire.
Tout se passe dans l’appareil digestif comme si l’estomac devait donner le branle-bas. Il semble que les phénomènes doivent être amorcés au niveau de l’estomac et se propager aux différents segments intestinaux. Le système nerveux régit la physiologie comme il régit la clinique. Ses réactions supposent une excitation. Il est certain que la digestion gastrique libère des aliments des substances excito-motrices et on peut considérer le bol comme auto-moteur. Mais ce ne sont pas ces excitations qui interviennent exclusivement. Il faut faire une part à la sécrétion interne de l’estomac qui fournit d’après Zülner une hormone au cours de la digestion, hormone péristaltogène se propageant de l’estomac au rectum. Cette hormone a été désignée sous le nom de Gastrine par Edwins.
Dans l’œsophage, le bol est également automoteur; mais l’automatisme ne peut s’exercer qu’à la faveur d’une déglutition. Si un bol s’arrête dans l’œsophage, l’organisme lutte en faisant des efforts qui ont toujours pour point de départ le pharynx à l’origine de l’œsophage. Il s’amorce un réflexe œsophago-salivaire qui entraîne la sécrétion salivaire et les mouvements de déglutition qu’occasionne ce flux salivaire déclanchent une onde péristaltique œsophagienne. Il semble qu’il y ait une inertie à vaincre avant que l’excitation des parois œsophagiennes mette en branle les centres bulbaires qui commandent à l’œsophage. Par analogie, on peut admettre que comme l’œsophage, l’estomac a une inertie à vaincre pour permettre aux excitants libérés par le métabolisme de mettre le contact entre l’appareil nerveux abdominal et le bol alimentaire. Ce soin incomberait à l’hormone péristaltique ou à la gastrine.
Avec cette conception, nous sommes à même d’interpréter l’influence de l’estomac sur la motricité intestinale:
En cas d’indigestion pas d’hormone: inertie tubaire.
En cas d’hypergastrie: excès d’hormone: accélération du transit.
En cas d’insuffisance gastrique: insuffisance d’hormone, parésie intestinale.
L’inertie intestinale peut être conditionnée par l’irradiation de troubles gastriques dans le plexus solaire qui entraine la paralysie fonctionnelle motrice.
Quoi qu’il en soit de ces explications, un fait reste certain, c est qu’au cours des crises gastriques, le péristaltisme intestinal reflète l’état péristaltique de l’estomac.
La pratique de l’auscultation abdominale. — Nous conseillons de pratiquer l’auscultation abdominale de la façon suivante:
Commencer par ausculter au niveau de la crosse du cœcum. Deux cas peuvent se présenter.
1° On perçoit des borborygmes dans le cœcum.
2° Il n’y a pas de borborygmie cœcale.
Dans le premier cas, on peut affirmer que la voie gastro-intestinale fonctionne normalement jusqu’au cœcum. Connaissant la projection des différentes portions du côlon sur la paroi abdominale, il suffit d’ausculter successivement chacune de ces portions et si on perçoit des borborygmes dans toutes on est en droit d’affirmer que la voie est libre et l’intestin est actif jusqu’au côlon flottant.
La voie peut ne pas être libre (indigestion, coprostase, calcul, iléus, spasmes).
Lorsqu’on est en présence d’une zone dans laquelle on note des gargouillements, des flatuosités, des bruits à timbre métallique, des bruits de clapotage ou de claquement et que la zone située immédiatement en aval est silencieuse, on est en présence d’une obstruction intestinale. Cette obstruction peut être liée à la présence d’un calcul ou être simplement dûe à la coprostase. Dans le cas de coprostase, le plus souvent l’obstruction se fait comme la nuit succède au jour, tandis que l’évolution calculeuse présente souvent une phase de début très douloureuse et marquée parfois par une grande agitation. De plus dans la coprostase, l’intestin est presque aphone tandis qu’il est souvent bruyant dans le calcul.
Dans l’indigestion intestinale, l’anse engouée ou surchargée lutte assez énergiquement. L’intestin gargouille, glou-gloute, mais ne tarde pas à se comporter comme quand il s’agit de coprostase.
Parfois l’intestin ne produit que des bruits passifs: entéroplégie.
Le spasme intestinal segmentaire se traduit par des bruits à timbre métallique. Nous savons que ces bruits s’observent également au cours de la distension gazeuse des réservoirs. Dans le cas de spasme il n’y a pas de météorisme. Cette notion permet de différencier la distension du spasme. Il faut tenir compte qu’un spasme segmentaire peut s’accompagner de distension en amont et qu’il peut se produire des bruits métalliques. L’atropine étant excitante au début de son action s’il y a simplement distension elle la supprimera hâtivement; si au contraire il y a spasme l’action sera retardée, mais aussi efficace. Le spasme intestinal total ou entérospasme se traduit par l’absence de bruits.
Si nous nous plaçons maintenant dans le deuxième cas qui peut se présenter, c’est-à-dire celui dans lequel l’oreille appliquée au niveau de la crosse cœcale ne perçoit pas de borborygmes, il faut déterminer s’il y a un trouble stomacal, grêle, cœcal ou colique (gros côlon et côlon flottant).
Pour cela il suffit d’ausculter la partie supérieure du flanc gauche ou se projette le grêle. 1° Si on y perçoit des borborygmes l’estomac n’est pas en cause. Si on n’en perçoit pas, on peut se trouver en présence d’une indigestion du grêle, d’un spasme ou d’une paralysie du grêle. Le spasme se traduira par des bruits métalliques. L’indigestion par des gargouillements ou des glou-glous. La parésie par l’existence exclusive de bruits passifs.
Il y a lieu d’incriminer le spasme ou l’obstruction de la partie terminale de l’iléon lorsqu’on perçoit des borborygmes qui sont brusquement interrompus et ne s’accompagnent pas de vidange du grêle dans le cœcum. L’imperméabilité de la valvule iléo-cœcale se traduit par l’absence de pénétration de la masse intestinale dans le cœcum, des bruits à timbre métallique et de la pneumatose cœcale, car il y a en même temps imperméabilité cœco-colique.
2° Si on ne perçoit pas de borborygmes dans le grêle, l’estomac est généralement en cause directement où secondairement. Il peut y avoir gastro-entéroplégie: perception exclusive de bruits passifs et gastro-entérospasme: bruits à timbre métallique ou silence c’est-à-dire des états qui seront soumis à l’interprétation du clinicien. Si le trouble est d’origine névrosique on peut le reconnaître par l’emploi du réflexe oto-cardiaque (Voir coliques nerveuses). L’aphonie du grêle coïncidant avec des manifestations audibles transcoecales est liée à une atonie ou à un spasme d’ordre réflexe.
L’entéroplégie peut être liée à la péritonite, être peut-être la conséquence d’un calcul, d’une indigestion par surcharge,. de la sablose, etc., etc..., de même qu’elle peut reconnaître une origine traumatique ou psychique.
L’entérospasme peut être déterminée par la calculose, la sablose, l’aortite abdominale, les néphrites, les affections génitales, l’urémie, l’oxalémie, etc.
Le côlon flottant et le rectum ne sont pas dans la zône auscultable. On interroge ces segments intestinaux par des moyens détournés que nous examinerons en temps opportun.
Perception de bruits anormaux à distance. — Au cours des crises, on entend parfois certains bruits intestinaux sans qu’il soit besoin d’appliquer l’oreille sur les parois de l’abdomen. On peut même entendre des bruits à une certaine distance de l’animal. Dans le cas d’indigestion ou plutôt de surcharge liquide de l’estomac par spasme du pylore, on peut entendre à distance comme une chasse d’eau; ce bruit indique que l’obstacle est levé.
On entend au cours de certains états des borborygmes bruyants. Ces murmures intestinaux peuvent avoir une signification pronostique.
Dans un cas de volvulus nous avons perçu un bruit comparable à celui d’une mitrailleuse qui tire dans le lointain. Dans un cas d’infarctus du colon, il nous a été donné d’entendre au moment où le cheval prenait l’attitude du chien assis un bruit de ferraille ou de chaînes dans la cavité abdominale quelques instants avant la mort. Dans un cas d’infarctus du côlon par thrombose d’origine mécanique nous avons nettement perçu à la fin de l’évolution un sifflement comparable à un échappement de vapeur (Fissure du côlon).
Conclusion. — L’auscultation est prodigue en renseignements. Elle permet de reconnaître:
1° Si la voie est libre de l’estomac au côlon flottant;
2° S’il existe un obstacle et le siège de cet obstacle;
3° S’il y a stase;
4° S’il y a entéroplégie ou entérospasme;
5° S’il existe un spasme localisé ou de la distension;
6° L’état du contenu intestinal;
7° Le degré d’activité de l’intestin, etc., etc.
L’auscultation ne suffit pas à elle seule pour faire le diagnostic, mais elle y contribue puissamment et à ce titre elle mérite plus de faveur qu’elle en a eu jusqu’à ce jour.