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INTRODUCTION

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Table des matières

Anciens habitants de la Savoie. — Les plus anciens habitants de la Savoie dont l’histoire fasse mémoire, sont les Centrons en Tarentaise, dans la vallée de Beaufort et dans le Haut Faucigny, les Nantuates en Chablais, les Graïocèles et les Médulles en Maurienne, et surtout la célèbre nation des Allobroges, qui, répandue dans le Viennois et dans le Bugey, occupait dans notre pays les cantons de Chambéry et d’Annecy.

Toutes ces nations étaient réputées Gauloises. Annibal les traversa (218 av. J. C.), quand il envahit l’Italie, par une route qu’on croit être celle du Petit Saint-Bernard.

L’an 121 av. J. C., les Allobroges ayant été soumis, d’abord par Domitius Ænobarbus à Vindalium, puis, malgré les Arvernes qui vinrent à leur secours, sur le Rhône par Fabius Maximus, leur territoire fit désormais partie de la province romaine de Narbonnaise. Le reste de la Savoie ne fut soumis qu’après que César eut conquis la Gaule. Dans le Val d’Aoste, Varron triompha des Salasses après de furieux combats. Auguste réduisit les autres, et les noms de ces peuples se lisaient sur le trophée des Alpes élevé à la Turbie par ses soins l’an 8 ou 6 av. J.-C.

La Maurienne unie au Val de Suse forma quelque temps un Etat tributaire des Romains, sous le sceptre du roi Cottius. Enfin fut composée des peuples de Savoie autres que les Allobroges, et du Valais, la province des Alpes Pennines.

Histoire de ces peuples sous le régime Romain. — Les Allobroges devenus Romains partagèrent en tout le sort de la République. On les vit, mêlés aux guerres civiles, prendre le parti de Sertorius en 76, porter plainte au Sénat de Rome contre Fontéius leur gouverneur, qui fut défendu par Cicéron, entrer dans les intrigues ourdies par Catilina, les dénoncer ensuite, enfin prendre les armes dans une insurrection, que Lentinus et Promptinus écrasèrent à Vencia et à Solonium (63).

Dès lors peu d’événements particuliers signalent,dans l’histoire du peuple Romain, les Romains de la province des Alpes. Les révolutions du palais des empereurs ne se faisaient sentir qu’à Rome, et la guerre n’était qu’aux frontières. Ces provinces éprouvèrent le sort de toute la Gaule, dont l’histoire pendant trois cents ans est celle d’une paix profonde et d’un avancement continu de la richesse, de la politesse et des arts.

Aux Césars, dont plusieurs sont fameux par d’exécrables cruautés, succèdent en 69 les Flaviens, en 96 les Antonins, en 193 les Sévères, presque tous célèbres par leurs vertus. Le siècle des Antonins marque pour la Gaule et pour le genre humain une ère de prospérité mémorable.

Aux Sévères en 235 succédèrent plus de trente ans d’anarchie militaire. La Gaule séparée de Rome se donne successivement cinq empereurs, de 258 à 273. On les nomme les Césars gaulois. En proie à la révolte des paysans nommés Bagaudes (269, 286), retournée entre temps à l’unité romaine, elle voit écraser cette révolte et mettre un terme à ses pillages par les soins de l’empereur Dioclétien.

Bienfaits de ce régime. — Disons maintenant quel fut l’effet de l’établissement Romain dans nos provinces. Ces provinces furent transformées, ou plutôt elles commencèrent d’être, sous l’influence réunie de la paix, du sage gouvernement de Rome, de l’excellence de sa civilisation. Des routes, des villes, furent bâties dans Ces contrées jusque alors à demi sauvages. Leur ancien langage, dont aucun vestige ne reste, fut échangé contre le latin: Le commerce prospéra, les esprits s’instruisirent. Martial cite nos ancêtres au nombre des lecteurs les plus assidus de ses ouvrages.

Une grande route qui partait de Milan et, franchissant le Petit Saint-Bernard, bifurquait depuis Conflans, sur Vienne d’une part et de l’autre sur Genève, faisait de ces provinces le principal passage pour aller d’Italie en Gaule. C’était pour elles la source d’une importance, qu’attestent les monuments romains retrouvés en grand nombre sur tous les points de notre pays: à Lémenc près de Chambéry, à Aime, à Thonon; le fameux arc de Campanus à Aix (débris d’un magnifique tombeau du IIIe siècle); à nos portes les antiquités d’Aoste et de Suse; la colonne Jou au Petit Saint-Bernard.

Les Allobroges avaient pour capitale Vienne, qui fut la métropole de la province Viennoise. Celle des Alpes Pennines était Darentasia ou Tarentaise, depuis nommée Moûtiers, résidence d’un procurateur: c’était le nom donné aux gouverneurs des petites provinces, dont l’un, Pomponius Victor, a signé de son nom des ïambes voués au Sylvain, conservés dans l’ancien prieuré de Saint-Martin d’Aimé.

L’établissement du Christianisme. — Le Christianisme parut en Gaule dans le premier siècle. La première Eglise importante qui s’y soit vue fut celle de Lyon, persécutée sous Marc Aurèle (177), et dont il se peut que l’influence ait rayonné sur nos provinces.

Le martyre de saint Ferréol à Vienne ne remonte peut-être qu’au IIIe siècle. L’évêché fondé dans cette ville évangélisa nos contrées. Un autre, son suffragant, fut établi à Genève. L’an 302, sous Dioclétien, Maximien, son collègue à l’Empire, ayant conduit dans nos contrées la légion de Thébaïde ou Thébaine, cette légion, qui était chrétienne, refusa de sacrifier aux idoles et souffrit le martyre avec saint Maurice son chef, saint Victor et quelques autres. Le lieu de cet événement est Agaune en Valais, appelé depuis Saint-Maurice; il tient dans l’histoire de la Savoie catholique un rang vénérable et insigne.

Enfin l’empereur Constantin proclama par l’édit de Milan en 313, le christianisme religion de l’empire. La conversion des peuples s’ensuivit; l’apostolat se multiplia. Vers 368 fut fondé l’évêché d’Aoste; saint Jacques ou Jacquemoz, l’apôtre des Centrons, fut le premier évêque de Tarentaise, en 420.

Le premier royaume de Bourgogne. — Sous Constantin, sous Théodose, l’Empire connut de nouveaux jours de grandeur et de prospérité. Cependant les nations barbares qui tour à tour assaillaient l’empire et s’établissaient sur son sol en s’engageant dans sa défense, avançaient peu à peu sa ruine. L’une après l’autre les provinces romaines s’en allaient à eux en partage.

Tel fut le sort, entre 435 et 460, de l’ancien pays des Allobroges et de plusieurs cantons avoisinants. Des événements qu’on débrouille mal firent que ce pays appartint aux Burgondes, depuis peu formés en État régulier dans la Lyonnaise et dans la Séquanaise. Les évêques consentirent d’abord à ce changement. Mais depuis que Gondebaud leur roi eut entraîné ces peuples dans l’hérésie arienne, l’appui des évêques lui manqua. Saint Avit, archevêque de Vienne, favorisa l’expédition que Clovis, nouvellement fait chrétien, menait contre les Burgondes, et dont le succès les obligea à rendre à l’Église sa liberté (500).

Un autre fruit du zèle et de la vigilance du même évêque fut la conversion de saint Sigismond, fils de Gondebaud et roi de Bourgogne après lui (516 à 524). Ce prince, ayant abjuré l’hérésie, réunit vingt-sept évêques au concile d’Yenne (517), pour l’extirper dans ses États. A Agaune il fonda l’abbaye de Saint-Maurice en l’honneur du martyre du Saint, et lui donna tout de suite le renom et l’importance qui lui vaudront un rôle dans cette histoire.

Assailli par les fils de Clovis, saint Sigismond est pris et mis à mort. Gondemar son frère, d’abord vainqueur de ces princes à la bataille de Vézéronce, puis vaincu dans une seconde campagne, est obligé en 534 de leur céder tous ses États.

La monarchie Franque. — Incorporées dès lors à la monarchie Franque, nos contrées n’ont d’histoire dans les trois siècles qui suivent (534 à 887), que l’histoire de cette monarchie.

Elles continuaient de suivre la Bourgogne dans les partages, et de 361 à 493, elles eurent Gontran, fils de Clotaire, pour roi. Contre les Lombards, qui s’étaient jetés dans le pays, elles furent défendues par ce prince, qui conquit sur ces peuples les vallées d’Aoste, de Suse et d’Oulx, et érigea le diocèse de Maurienne, dans lequel il est encore en vénération. Sous son règne le célèbre abbé de Luxeuil, saint Colomban, fut reçu avec honneur dans le Chablais, où il passait, se rendant en Italie.

Thierry, neveu de Gontran (mort en 596), fut le dernier qui porta le titre de roi de Bourgogne. Pourtant le souvenir de cet ancien royaume et de ses limites survécut. Il ne s’effaça ni sous les derniers Mérovingiens, ni dans les réformes issues de l’administration de Charlemagne, ni dans les partages qui, après la mort de cet empereur, démembrèrent à plusieurs reprises le territoire de ce royaume.

Le second royaume de Bourgogne. — En l’an 887, temps où fut déposé Charles le Gros à la diète de Tribur, et où l’empire de Charlemagne fut décidément partagé, le nom de Bourgogne sert à désigner trois choses:

Le duché de Bourgogne, possession des rois de France, et que ceux-ci depuis donnèrent en fief;

Le royaume de Bourgogne Cisjurane, ou Provence, composé de la Provence propre, des pays qui depuis ont formé le Dauphiné, et de la Bresse;

Le royaume de Bourgogne Transjurane, composé de ceux qui ont formé la Franche-Comté, les cantons Suisses, et la Savoie dans ses provinces du nord. Le sud de cette contrée fut réuni plus tard.

Rodolphe, gouverneur de ces derniers territoires sous Charles le Gros, s’en fit roi lors de la déposition de cet empereur. Puis il se fit reconnaître des nobles et des évêques, assemblés à Saint-Maurice d’Agaune, renouant ainsi avec solennité la tradition de la première Bourgogne et de la monarchie de saint Sigismond.

La Bourgogne Cisjurane eut pour rois Boson, beau-frère de Charles le Chauve, et ses descendants, jusqu’à ce que Hugues, l’un d’eux, devenu roi en Lombardie, céda le royaume à Rodolphe II, successeur (912) de Rodolphe, fondateur de la monarchie Transjurane. Ainsi furent réunies (933) les deux Bourgognes sous le nom de Bourgogne simplement, plus tard remplacé par celui de royaume d’Arles.

A Rodolphe II, en 937, succède Conrad le Pacifique.

L’invasion Sarrasine. — Les troubles engendrés du partage de l’Empire furent redoublés par trois grandes invasions: celle des Normands en France, celle des Hongrois en Allemagne, celle des Sarrasins dans le royaume d’Arles.

Les Sarrasins venaient de l’ancienne Cyrénaïque, qui formait un Etat arabe indépendant sous le gouvernement des Califes Aglabites avec Cairouan pour capitale. Comme ils ne tendaient qu’à transporter sur terre les pirateries que leurs corsaires exerçaient dans la Méditerranée, ils se saisirent d’abord des passages des Alpes, où ils rançonnaient les marchands (911).

Les abbayes de ces contrées furent ruinées, Saint-Jean de Maurienne fut livrée aux flammes; les bourgeois furent pillés, les moines et les évêques massacrés, les paysans réduits en esclavage. Avant 924 les Hongrois pénètrent jusqu’en Lombardie, dont l’empereur Bérenger disputait le royaume aux rois de l’une et de l’autre Bourgogne. Chacun de ces princes recherche contre son compétiteur l’alliance funeste des Barbares. Enfin les Sarrasins se fixent et s’établissent en Maurienne, en Valais, en Tarentaise, dans le Val d’Aoste.

Des légendes qu’on ne peut vérifier en détail, assurent que Conrad le Pacifique parvint à jeter sur eux les hordes hongroises toujours nomades. Profitant de l’antagonisme des deux peuples, il réussit à les écraser l’un par l’autre dans la journée de Valprofonde (950). Izarn, évêque de Grenoble, achève de purger le Grésivaudan de ces infidèles. Digne successeur des Jacques et des Avit, saint Bernard de Menthon restaure dans nos vallées le culte chrétien sur leurs ruines (970 à 980), et bâtit, entre autres hospices qui portent son nom, celui de la colonne Jou, où la tradition rapporte que les faux cultes ont eu leur siège.

La tradition ajoute que les Sarrasins avaient perfectionné chez nous le travail des mines, et c’est un fait certain qu’un peu de leur sang demeure mêlé à celui des habitants, principalement des habitants des Bauges.

Fin de la dynastie des rois d’Arles. — Les grands Etats formés des débris de l’Empire ne jouirent jamais d’une unité parfaite. Le partage de l’autorité, dont fut constitué l’ordre féodal, commençait justement dans le temps de leur formation. Les siècles qui suivirent virent le pullulement des seigneuries particulières, qui de plus en plus tenaient en échec les suzerains.

Ceux-ci se trouvèrent impuissants contre l’invasion Sarrasine. Cette impuissance obligea partout de petits pouvoirs à s’armer pour la défense des habitants, en sorte que ces pouvoirs s’accrurent, diminuant d’autant celui du suzerain.

Rodolphe III, successeur de Conrad le Pacifique (993), fut le témoin de cet état dans le royaume d’Arles. La résistance de ses vassaux le fit chercher un appui près de l’empereur Conrad le Salique, dont il dépendait. Comme il n’avait pas d’enfants, rien n’empêcha qu’il se le rendît favorable en l’instituant son héritier.

A sa mort, l’an 1032, il envoya à ce prince sa couronne et la lance de saint Maurice en investiture du royaume, qui depuis lors n’eut plus de souverain que les Empereurs.

Histoire de Savoie, des origines à l'annexion

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