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B. — Du centre de gravité.

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Le centre de gravité d’un corps est le point d’application de la résultante des poids de toutes les molécules qui le composent. (Larousse.)

Dans les corps solides, à forme régulière et composés de particules de densité égale, le centre de gravité est placé au centre de la figure.

Dans les corps de densité inégale et à forme irrégulière, le centre de gravité se rapproche du côté où existe le corps le plus lourd.

Pour déterminer le centre de gravité d’un corps de petit volume, il suffit de le suspendre successivement par deux points différents et d’abaisser une verticale de chacun de ces points: l’endroit où ces lignes se croisent est précisément celui où se trouve le centre de gravité.

D’après M. le professeur Colin, le centre de gravité du cheval serait situé à l’intersection de deux lignes, l’une verticale, tombant en arrière de l’appendice xiphoïde du sternum, l’autre horizontale, séparant le tiers moyen du tiers inférieur du corps. Il est à égale distance des deux pieds de chaque bipède, mais plus rapproché des membres antérieurs que des postérieurs. Sa situation est impossible à déterminer rigoureusement en raison des phénomènes de mouvement qui, chez l’animal vivant, le déplacent constamment.

Le général Morris a fait de nombreuses expériences pour déterminer les différents déplacements du centre de gravité. Voici comment il en rend compte.

Une jument de selle fut placée dans des balances disposées ad hoc. Les balances abandonnées au poids de la jument tenue dans un état complet d’immobilité donnèrent les chiffres suivants:


La tête de la jument étant baissée:


La tête de la jument étant relevée:


Ces résultats démontrent que l’avant-main est faite pour porter davantage que l’arrière-main.

Le célèbre écuyer Baucher monta ensuite la jument et les balances indiquèrent les poids suivants:


M. Baucher avait distribué son poids de 64 kilos en mettant 41 kilos sur l’avant-main et 23 kilos sur l’arrière-main.

Puis M. Baucher ayant ramené la tête de la jument suivant sa méthode, il surchargea l’arrière-main de 18 kilos.


En se portant entièrement sur les étriers, le poids de l’avant-main se trouve surchargé de 30 kilos.


Ces expériences ont été renouvelées par le général Morris sur plus de trente chevaux de la Garde impériale, puis continuées par M. Colin, MM. Goubbaux et Barrier. Les résultats ont été absolument concordants.

Ces différentes pesées ont démontré :

1° Que l’avant-main porte généralement un neuvième de plus que l’arrière-main, soit environ 50 kilos chez les chevaux moyens; on doit avoir soin de répartir sur chaque bipède, dans cette même proportion, la charge dorsale que le cheval doit porter;

2° Que le changement de position de la tête fait varier un poids de 10 kilos de l’avant-main sur l’arrière-main;

3° Que les encolures longues, même avec des têtes légères, surchargent l’avant-main de 15 à 20 kilos en moyenne, et que les encolures courtes et les grosses têtes déchargent l’avant-main d’une même quantité de poids.

Les premières donnent environ 60 kilos en plus sur l’avant-main, les secondes 40 kilos seulement: il y aurait donc entre les deux types près de 20 kilos de différence en faveur du cheval à encolure courte, même avec une grosse tête; mais il ne faut pas oublier qu’avec les encolures longues, le déplacement du centre de gravité, nécessaire pour l’exécution des mouvements, est plus facile, et que les muscles moteurs de l’avant-main, le mastoïdo-huméral notamment, ont le développement indispensable à la production des allures étendues.

Le rôle du centre de gravité dans tous les mouvements du cheval est des plus intéressants à étudier.. Il subit des déplacements de deux sortes, horizontaux et verticaux.

Lorsqu’un cheval se cabre, il rejette rapidement son centre de gravité en arrière pour dégager l’avant-main; c’est le contraire qui a lieu dans la ruade. Pour exécuter le reculer, le cheval porte son centre de gravité en arrière.

Lorsque le cheval progresse, le centre de gravité du corps est lancé plus ou moins en avant, suivant le genre et la rapidité de l’allure; la ligne de gravité tend à tomber en avant de la base de sustentation; il y a rupture de l’équilibre. Le cheval est alors instinctivement sollicité à projeter ses membres en avant, le plus loin et le plus rapidement possible, si la progression est vite, pour reconstituer sa base de sustentation et y recevoir la projection de son centre de gravité, sa ligne de gravité ; sans cela, il y aurait chute, et le cheval opère ces mouvements avec d’autant plus de précipitation que l’équilibre est plus instable, que la chute est plus imminente, que l’allure est plus rapide.

Fig. 3. — Cheval au galop — allure basculante — entraîné par son centre de gravité, qu’il projette très en avant de sa base de sustentation.


Le cheval ne court pas seulement après son centre de gravité, comme le disent fort bien MM. Jacoulet et Chomel, mais encore il est violemment entraîné par lui, surtout dans l’allure basculante du galop, à l’instar d’un homme qui descend une côte très vile et qui ne peut plus s’arrêter.

Comme le fait encore très ingénieusement remarquer M. Le Hello, «l’extension des oscillations de la trajectoire décrite par le centre de gravité intervient pour favoriser le développement des forces impulsives. Il se produit alors quelque chose de tout à fait comparable à ce que l’on obtient en jetant sur une balance un corps pesant: cela permet de soulever plusieurs fois le poids réel de l’objet déplacé, si la projection est effectuée d’une hauteur suffisante.»

Un homme qui monte un talus à pic en penchant complètement le corps en avant, ne fait pas autre chose que d’aider ses forces propulsives par la projection de sa ligne de gravité ; il en est de même d’un cheval de trait pesamment chargé et montant une côte la tête basse et allongée.

La plupart des pur sang sont incapables de tirer une faible charge, parce qu’ils n’ont pas assez d’intensité musculaire, et parce que la direction horizontale de leur ilium et verticale de leur fémur leur donne des insertions trop obliques des muscles, insertions qui, chez les chevaux de trait, doivent être aussi perpendiculaires que possible, pour agir avec intensité ; aussi, ces chevaux appliquent instinctivement l’observation de M. Le Hello, en cherchant à galoper lorsqu’ils traînent une voiture; ils mettent à profit l’extension des oscillations de la trajectoire décrite par le centre de gravité pour favoriser le développement de leurs forces impulsives; ils suppléent ainsi à la faiblesse de leurs muscles, et ce n’est nullement parce qu’ils ont subi un entraînement au galop qu’ils cherchent à prendre cette allure lorsqu’ils sont attelés.

Le jockey roule son cheval, c’est-à-dire suit, en tenant les rênes constamment tendues, le rythme du galop du cheval, et cherche à en allonger la cadence, pour que le cheval projette le plus loin possible sa ligne de gravité, et soit entraîné par elle. C’est dans le même but que les Sloan, les Rigby et les Mac-Intyre, ont cette attitude penchée sur l’encolure de leur cheval; ils cherchent — probablement sans s’en douter — à faire sortir le plus en avant possible de la base de sustentation la projection du centre de gravité de leurs chevaux, afin que, l’équilibre étant aussi instable que possible, la chute étant imminente, ces derniers soient davantage sollicités à étendre rapidement leurs membres en avant, et que leur translation soit facilitée par la projection de ce centre de gravité, qui les entraîne en avant. (Fig. 3,5.)

La plupart des jockeys de trot, au contraire, relèvent la tête de leur cheval à l’aide de saccades de bridon, rejettent leur propre corps en arrière, de façon à dégager l’avant-main; nous verrons en effet, plus loin, que la progression rapide au trot étant contraire aux lois naturelles de la locomotion, le cheval est dans l’obligation d’user d’artifices, afin de pouvoir employer ce genre d’allure, qui constitue une acrobatie; si l’animal se déplaçait par une détente générale de sa musculature comme dans le galop, s’il laissait aller son centre de gravité, il se verrait forcé instinctivement de dissocier une de ses battues diagonales pour étendre ses deux antérieurs en avant, le plus loin possible, afin d’étayer sa ligne de gravité : il galoperait! Son centre de gravité doit donc être rejeté en arrière par l’élévation de l’encolure et la position du cavalier (à moins qu’il n’ait l’humérus très horizontal, cas que j’analyserai en parlant de cette région), pendant qu’il se donne une vigoureuse impulsion par le jeu local et successif des muscles de l’arrière-main. De plus, cette attitude lui permet de relever plus rapidement les antérieurs pour faire place aux postérieurs, ce qui est, neuf fois sur dix, la condition essentielle de l’adaptation au trot de course.

Enfin, lorsque je parlerai des allures, je démontrerai que l’utilisation du centre de gravité comme force de propulsion, est une des principales causes de la supériorité du galop, allure basculante, sur le trot, allure horizontale, comme allure de vitesse et de durée.

Le rôle du centre de gravité est donc d’une importance tout à fait capitale dans les phénomènes de la locomotion.

CONCLUSION. — L’avant-main du cheval porte plus de poids que l’arrière-main, environ un neuvième.

Le fait d’abaisser ou d’élever l’encolure fait aller un poids de dix kilogrammes de l’avant-main à l’arrière-main.

L’utilisation des oscillations verticales du centre de gravité joue un rôle des plus importants dans la locomotion: elles facilitent singulièrement la progression dans l’allure basculante du galop. (Fig. 3, 5.)

Le modèle et les allures

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