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IX.

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Table des matières

Mais ce n'étaient pas ces agitations, purement extérieures, qui préoccupaient le plus les dépositaires de l'autorité publique. La population strasbourgeoise n'a jamais montré beaucoup de goût pour les brutalités révolutionnaires, et même aux heures les plus troubles de notre histoire moderne, la guerre des rues n'y a point traduit en pratique, comme autre part, l'anarchie des esprits. Le danger de la situation semblait ailleurs; les chefs du parti constitutionnel le voyaient dans la tentative d'une organisation plus complète du parti catholique et contre-révolutionnaire, opposant club à club, tribune à tribune, et déchaînant sur Strasbourg et sur l'Alsace, si agités déjà, toutes les horreurs de la guerre civile, au moment précis où l'attitude des puissances étrangères commençait à inspirer des craintes sérieuses aux patriotes.

Pour nous, qui étudions aujourd'hui les choses à distance, ces craintes peuvent paraître exagérées, quand nous considérons quels faits leur donnèrent naissance; mais il ne faut point oublier dans quel état d'excitation continuelle se trouvait alors l'esprit public. Voici donc ce qui avait motivé les inquiétudes et les soupçons du parti constitutionnel: Dans la journée du samedi, 15 janvier, quinze citoyens catholiques avaient fait au Bureau municipal la notification, exigée par le décret du 14 décembre 1789, sur les réunions publiques, de leur intention de s'assembler paisiblement et sans armes, le lendemain, dimanche, à deux heures de relevée, dans la chapelle du Séminaire. Ils avaient déclaré verbalement qu'on discuterait dans cette réunion la circonscription des paroisses, et qu'on rédigerait une adresse, soit au Roi, soit au Corps législatif, à ce sujet.

Le lundi matin, le maire, qui n'avait encore reçu que des renseignements assez vagues sur la réunion de la veille, recevait une seconde notification de la part des mêmes citoyens, portant que ladite assemblée serait continuée le jour même, à une heure, au Séminaire, la pétition n'ayant pu être achevée. Le Bureau municipal enregistra cette déclaration, conformément à la loi, mais le maire fit observer en son nom aux commissaires de la réunion qu'ils étaient responsables des décisions qui seraient prises; qu'on avait le droit de réclamer communication de leurs procès-verbaux, et qu'on espérait d'ailleurs de leur attachement à leur devoir qu'ils ne délibéreraient pas sur des objets proscrits par la loi.

Peu après le départ de ces délégués, deux dépositions furent faites, l'une au procureur de la commune, l'autre au secrétariat de la Mairie, constatant qu'une grande fermentation régnait dans la réunion du Séminaire et que les délibérations y avaient porté sur des matières directement contraires aux décrets de l'Assemblée Nationale. Sur le vu de ces pièces, M. de Dietrich fit convoquer immédiatement le Conseil général de la commune, pour lui faire part de ses appréhensions. On décida de mander immédiatement à la barre le président, Jean-François Mainoni, marchand-épicier dans la Grand'Rue, à l'enseigne de l'Aigle Noir, et le premier secrétaire, Jean-Nicolas Wilhelm, homme de loi, afin de les interroger à ce sujet. Au moment où ils arrivaient à l'Hôtel-de-Ville, le secrétaire du conseil donnait lecture d'une troisième notification, émanant de l'assemblée du Séminaire. Se disant „composée de la presque totalité des citoyens catholiques” de Strasbourg, elle avait arrêté „qu'elle aurait dorénavant des séances régulières, tous les dimanches et jeudis, à une heure”, assurant d'ailleurs qu'elle „s'occupait surtout à maintenir la paix, l'union et le bon ordre.” En d'autres termes, l'assemblée des catholiques du Séminaire, toute fortuite d'abord, entendait se transformer en club politique, comme il en existait alors des milliers dans le royaume.

Le maire, ayant courtoisement fait prendre place au bureau aux personnages cités devant le conseil, demanda tout d'abord communication des procès-verbaux de la réunion, afin qu'on pût se rendre compte de l'esprit qui y avait régné. Mainoni répondit, non sans embarras, que celui de la première séance avait seul été rédigé, que celui de la seconde n'était pas encore mis au net. Le secrétaire Wilhelm dut partir alors pour produire au moins la pièce existante, mais il resta si longtemps absent qu'on envoya l'un des sergents de la municipalité à sa recherche pour le ramener avec son procès-verbal. Quand ce dernier fut lu, on constata qu'il ne mentionnait absolument que la nomination d'un président et de ses assesseurs. De l'objet des débats, pas un mot. Il était évident qu'on cachait quelque chose; il y avait donc quelque chose à cacher. Vivement interpellé, le président Mainoni dut avouer „qu'il y avait été question ensuite de laisser tout ce qui concerne la religion, notamment les paroisses et le culte, sur l'ancien pied”, et qu'à la séance de ce jour on avait arrêté de présenter à ces fins une adresse au Roi Très-Chrétien, un mémoire au Département, et une lettre au Pape, pour le prier de faire part aux catholiques de Strasbourg de sa manière de voir sur le serment imposé aux ecclésiastiques[22]. Il dit encore qu'on avait décidé de continuer les séances „pour délibérer sur des objets relatifs à la conservation de la religion.” Le secrétaire Wilhelm ajoutait, pour pacifier les esprits, que les séances seraient publiques et que les citoyens de tous les cultes pourraient y venir.

[Note 22: La Lettre des citoyens catholiques de Strasbourg à N.S. Père le pape Pie VI (s. lieu ni date, 4 p. in-4°), signée Wilhelm, et datée du 19 janvier, fut imprimée à part et répandue dans les deux langues en nombreux exemplaires. Elle est d'ailleurs rédigée en termes nullement hostiles dans la forme au gouvernement. Mais c'était le fait même de la correspondance avec un souverain étranger que frappait la loi.]

Après cet exposé des faits, qui ne s'était produit qu'avec quelque répugnance, le procureur de la Commune prit la parole. La loi du 26 décembre 1780 porte, dit-il en substance, que toutes les personnes ecclésiastiques ou laïques qui se coaliseront pour combiner un refus d'obéir aux décrets seront poursuivies comme perturbateurs du repos public. Il priait en conséquence le Conseil général de retirer aux membres de l'association du Séminaire le droit de s'assembler désormais, „sauf aux dits membres à se réunir pour délibérer sur tout autre objet non contraire à la loi.” Il proposait en outre d'envoyer un courrier à l'Assemblée Nationale pour lui faire part des faits qui venaient de se passer à Strasbourg. Après une courte discussion, le Conseil général de la Commune décidait en effet d'envoyer un exprès à Paris pour solliciter l'envoi de commissaires dans le Bas-Rhin, afin d'y faire mettre à exécution les décrets de l'Assemblée sur la Constitution civile du clergé; en attendant les instructions demandées à Paris, l'assemblée du Séminaire était autorisée provisoirement à continuer ses séances, à charge des particuliers qui la composent „d'être responsables des événements qui pourront résulter de leurs délibérations.” En même temps on décidait de demander à la Constituante que le nombre des paroisses de la ville et de la citadelle resterait le même; c'était montrer aux catholiques qu'on entendait protéger leurs droits dans la mesure du possible.

Au moment où le Conseil général prenait ces décisions, que l'on ne saurait qualifier d'illibérales, un nouvel incident se produisit, qui devait singulièrement envenimer les choses. Un membre de la Société populaire, le négociant Michel Rivage, qui assistait à la séance, se présenta tout à coup à la barre, demandant à faire une communication d'importance, intéressant l'ordre et la tranquillité publique. „Vu les circonstances”, le maire lui donna la parole. Il raconta alors, pour employer ses propres expressions, „la démarche indécente que quelques habitantes de cette ville se sont permises ce matin, en allant porter un écrit de caserne en caserne”, et pria le Conseil général de mander par devers lui ces dames pour les interroger et connaître les instigateurs de cette étrange et coupable démarche. En même temps qu'il mettait sa dénonciation par écrit, on apportait en séance un exemplaire de la pièce dénoncée, expédiée par M. de Klinglin, commandant des troupes de ligne, à M. de Dietrich.

Voici en effet ce qui s'était passé: Trois voitures chargées de dames appartenant à la bonne société catholique, et députées, disait la rumeur publique, par six cents autres, réunies à cet effet, étaient parties de l'hôtel du département; à la tête de ces dames se trouvaient Mme Poirot en personne et Mme Mainoni, la femme du président de l'assemblée du Séminaire. Elles s'étaient fait conduire au quartier de Royal-Infanterie, y avaient demandé l'adjudant Migniot, et quand il s'était présenté à la portière du carrosse, les occupantes, fort excitées, lui avaient demandé protection pour la religion catholique et remis des paquets d'imprimés à distribuer parmi ses camarades. L'adjudant s'était empressé de les porter à ses supérieurs, et ces dames n'avaient pas été plus heureuses dans les autres casernes. Elles coururent même grand risque d'être maltraitées par les soldats, gagnés à la cause populaire, et l'on nous raconte—espérons que le bruit était faux—qu'au poste de la place d'Armes on avait déjà préparé des verges pour les fouetter, si elles avaient passé par là [23].

[Note 23: Geschichte der gegenw. Zeit, 19 janvier 1791.]

C'était donc, en somme, une équipée ridicule et manquée, mais qui n'en contribua pas moins à échauffer les esprits.

Le Conseil général se sépara, le 17 au soir, après avoir approuvé une „proclamation à tous les citoyens amis de la religion, de la loi et de l'ordre”, qui recommandait le calme et la concorde. Les catholiques s'étant plaint de ce que les protestants s'exprimaient d'une façon blessante sur leur compte, le maire pria les pasteurs de travailler tout spécialement à l'apaisement des esprits, et pour répondre à ce vœu, Blessig, le plus éloquent et le plus populaire d'entre eux, rédigea le lendemain une brochure allemande „Les protestants de Strasbourg à leurs frères catholiques”, pour témoigner du bon vouloir de ses coreligionnaires. Mais ce même jour aussi, la Société des amis de la Constitution, réunie sous la présidence de Le Barbier de Tinan, votait l'envoi d'une adresse au Conseil général, pour réclamer la révocation de la permission provisoirement accordée à la Société des catholiques romains—c'est ainsi qu'elle s'appelait maintenant elle-même—de continuer ses séances. Elle décidait en outre de dénoncer à l'Assemblée Nationale les femmes sorties du département pour répandre parmi les troupes des écrits insidieux et contraires aux lois. Enfin des délégués spéciaux devraient déclarer aux divers corps de la garnison „que la façon dont ils ont reçu ces dames fait autant honneur à leurs mœurs qu'à leur patriotisme”.

D'autres esprits, moins enflammés, se contentèrent de décocher des épigrammes plus ou moins spirituelles contre l'immixtion du beau sexe dans les luttes politiques. Il circula en ville une „Chanson sur les extravagances catholiques du beau sexe de Strasbourg”, à chanter sur l'air de Calpidgi, qui commençait ainsi:

Quelle est donc cette bande joyeuse?

Ce sont des dames scrupuleuses,

Qui s'en vont en procession

Epauler la religion (bis), Et dans ce pieux exercice Les vieilles, jeunes et novices Vont demander soulagement A messieurs du département.

Bien que la pièce soit rare, il nous serait impossible d'en citer la plupart des couplets, un peu trop lestement troussés à la hussarde, pour prendre place autre part que dans un Recueil de chansons historiques strasbourgeoises qui se fera peut-être quelque jour. On ne se borna point à des chansons. Les soldats, encouragés par les allocutions des patriotes irrités et par la licence générale qu'on ne réprimait guère dans les rangs de l'armée, allèrent, dans la nuit du 19 au 20 janvier, donner une sérénade aux principales d'entre les ambassadrices cléricales, accompagnés de la musique du corps d'artillerie, et chantèrent sous leurs fenêtres le Ça ira et une autre chanson, sans doute populaire à ce moment: Où allez-vous, Monsieur l'abbé? Le lendemain encore, mis sans doute en verve par ce premier exploit, des députations des régiments circulaient en ville, distribuant chez ces dames des cartes de visite, avec enjolivement d'épigrammes. Elles „sentaient le corps de garde[24], de l'aveu d'un des journalistes les plus zélés à suivre la campagne contre cette manifestation féminine, et qui eut à en souffrir personnellement de son activité patriotique un peu trop intempérante, Mme Mainoni lui ayant intenté un procès en diffamation, dont nous ignorons d'ailleurs l'issue[25].

[Note 24: „Im Grenadierton geschrieben.” Gesch. der gegenw. Zeit, 21 janvier 1791.]

[Note 25: Simon, le rédacteur en chef de la Geschichte der gegemvärtigen? Zeit. Nous devons dire d'ailleurs, pour avoir parcouru, la plume à la main, tous ces journaux de Strasbourg, que leur ton, sans être toujours poli (il est parfois brutal), n'offre rien de semblable aux attaques vraiment ignobles que nous aurons à signaler tantôt contre la vie privée des adversaires, dans les pamphlets contre-révolutionnaires, rien de cet art savamment perfide de déshonorer sans scrupule un adversaire politique ou religieux, que nous constatons dans la presse bien pensante ou révolutionnaire de nos jours. C'était alors l'enfance de l'art, et d'ailleurs l'exiguité seule de leur format (4 pages petit in-4°) aurait obligé nos feuilles locales à n'être au fond que des recueils de faits divers.]

Dans la séance du Conseil général de la Commune, tenue deux jours plus tard, le 20 janvier, à 9 heures, M. de Dietrich commença par annoncer que la municipalité avait dénoncé les séditieuses à l'accusateur public; puis il donna lecture de plusieurs dépositions et témoignages, recueillis dans l'intervalle, et qui donnaient aux assemblées du Séminaire un tout autre cachet que celui d'une inoffensive réunion occupée à débattre „la circonscription des paroisses”. Il y était dit que le sieur Wilhelm, secrétaire de la Société, avait déclaré à la tribune que la religion était en danger, et qu'il fallait envoyer un pressant appel aux curés des villages catholiques voisins. Puis l'ancien notable Ditterich, professeur à l'Université épiscopale, s'était, à son tour, dans un discours pathétique, lamenté sur les persécutions qui menaçaient la foi, et avait déclaré parjures et dignes du mépris de leurs ouailles tous les prêtres qui prêteraient le serment. Nous savons même que plusieurs des plus exaltés proposèrent de réclamer (auprès des puissances garantes?) l'exécution stricte des traités de Westphalie et de faire ainsi appel à l'étranger. Ce détail, qui, mieux que tout le reste, marque la surexcitation des esprits dans cette réunion du Séminaire, fut, il est vrai, soigneusement dissimulé dans les dépositions des citoyens appelés à la barre, mais il est avoué par un des pamphlets contre-révolutionnaires les plus haineux, écrits à ce moment, le Junius Alsata[26].

[Note 26: Junius Alsata aux membres des départements, districts et municipalités du Haut-et Bas-Rhin. S. l. 1791, p. 13.]

Des faits plus graves encore furent allégués. Un nommé Kaetzel, de Gambsheim, vint attester qu'un émissaire de la réunion catholique était venu, le mardi, 18, à 5 heures du matin, dans son village, situé à quelques lieues de Strasbourg, pour appeler les habitants au secours de leur religion, menacée à Strasbourg. On affirmait que quatre-vingt-trois villages de l'évêché s'étaient clandestinement coalisés pour prendre les armes au premier signal, et toute part faite à l'exagération naturelle de ces temps troublés, ce que nous verrons plus tard, rend très probable l'existence de conciliabules destinés, dès ce moment, à s'opposer à l'exécution des lois sur le clergé.

Une discussion des plus vives s'engage alors au sein de la représentation municipale. Les uns plaident la théorie répressive, les autres parlent en faveur de la liberté, même pour ceux qui en abusent; on se croirait transporté dans une des enceintes législatives où se discutent encore aujourd'hui ces graves problèmes. La discussion durait encore, quand on apporta dans la salle un factum imprimé, Avis au public, que l'assemblée du Séminaire venait de mettre au jour. Cet Avis contient en appendice deux pièces, une Adresse au Roi, qui lui demande de suspendre la Constitution civile du clergé, une Lettre à N.S.P. le pape Pie VI, qui l'interroge sur la valeur du serment imposé aux ecclésiastiques fonctionnaires publics et promet d'obéir à sa décision souveraine.

La production de cette pièce fit pencher la balance du côté de la rigueur. La majorité du Conseil trouva séditieuse une adresse qui s'opposait à la mise en vigueur des lois du royaume, sanctionnées par le roi, et plus encore l'invitation adressée à un prince étranger à s'immiscer dans les affaires de la nation. Elle déclare par suite absolument défendues les réunions du Séminaire; elle intime au président et à ses assesseurs l'ordre de ne plus se réunir pour délibérer, même entre eux seuls, et les prévient que la force publique sera mise en mouvement pour empêcher toute tentative semblable. Le Directoire du département et celui du district seront avertis de ce qui s'est passé et priés d'employer toute leur influence pour calmer l'agitation suscitée dans les campagnes. Une députation, composée de six membres, dont un seul protestant, leur est envoyée à cet effet.

On peut se figurer quelle dut être, de part et d'autre, la surexcitation de nos bourgeois, réactionnaires ou constitutionnels, quand ils entendirent battre la générale, quand ils virent amener des canons sur les principales places publiques, accourir les députations des gardes nationales de Schiltigheim, Westhoffen, Wasselonne, et autres communes patriotiques, mettant leurs bayonnettes à la disposition des autorités municipales.

Les adversaires de la Constitution civile du clergé ne se tinrent pas néanmoins pour battus. Le soir même du 20 janvier, une députation de la „Société romaine-catholique-apostolique” présentait au bureau municipal une pétition nouvelle pour obtenir le droit de se réunir, offrant de réviser les adresses incriminées et d'en effacer tout ce qui pouvait leur donner une apparence de révolte. Ce motif, allégué fort habilement, ne put convaincre la municipalité. Elle répondit que la loi ne connaissait pas de Société romaine-catholique-apostolique, mais seulement des citoyens, sans distinction de culte, et qu'elle ne pourrait répondre qu'à une association qui n'afficherait pas ainsi ses tendances confessionnelles. „Qu'à cela ne tienne, répondirent les catholiques; nous changerons de nom.” Et dès le 22 janvier, douze citoyens déposaient à la mairie une notification, portant qu'ils „sont dans l'intention de former une société paisible et tranquille, que la loi autorise qu'ils verront avec plaisir MM. les officiers municipaux honorer les séances de leur surveillance, et qu'ils ont fait choix du Poêle des Charpentiers pour y tenir leurs assemblées sous le nom d'Amis de l'Union, le mardi et le samedi de chaque semaine.”

Le même jour encore, le Conseil général leur donnait acte de leur déclaration; il ne leur refusait pas la permission d'user d'une liberté constitutionnelle, „mais, attendu le dommage dont a menacé récemment la chose publique une société, qui, après avoir invoqué la loi pour se former, s'est bientôt permis d'attaquer la loi-même”, il rendait personnellement responsables les signataires de tous les événements qui pourraient arriver de leur réunion, et enjoignait au corps municipal de faire surveiller la nouvelle société de très près.

Le tribunal du district, saisi par réquisitoire de M. François-Joseph Krauss, accusateur public, ne se montra pas fort sévère non plus contre MM. Mainoni et Wilhelm, accusés, „d'un mépris trop marqué pour la loi.” Sur le rapport du juge, M. Louis Spielmann, le tribunal, considérant l'imprimé Avis au public „comme une démarche illégale, d'autant plus répréhensible qu'elle peut compromettre la tranquillité publique”, déclarait que cet écrit serait et demeurerait supprimé comme dangereux, et que tous les citoyens seraient tenus de rapporter au greffe les exemplaires déjà distribués. Défense était faite d'en colporter ou vendre aucun exemplaire. Pour le surplus, M. Louis Zaepffel, juge, est chargé d'en informer et de faire plus tard le rapport qu'il appartiendra.

Mais la Société des Amis de l'Union n'était pas destinée à vivre plus longtemps que son aînée. Le 24 janvier, au moment où le Conseil général de la commune allait lever la séance, on introduisit dans son sein le procureur-syndic du district qui venait l'alarmer par la perspective de dangers nouveaux. Il avait reçu la visite des sieurs Belling et Widenloecher, maire et procureur de la commune de Molsheim, arrivés en toute hâte pour lui faire part de l'état d'esprit de leurs administrés. Des instigateurs, envoyés „par les gens du Séminaire, renaissant de leurs cendres sous le nom captieux de Société de l'Union”, avaient provoqué à Molsheim une véritable levée de boucliers contre les décrets de l'Assemblée Nationale. Les ultras de la vieille ville épiscopale avaient forcé par leurs menaces les officiers municipaux eux-mêmes à signer les protestations envoyées de Strasbourg, etc.[27].

La cathédrale de Strasbourg pendant la Révolution. (1789-1802)

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