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§ VI. — Vieillesse
ОглавлениеL’âge de retour constitue une période critique qui annonce et prépare par une gradation lente et continue la décadence sénile. Elle commence entre cinquante et soixante ans, plus ou moins tôt selon les constitutions et les conditions hygiéniques. Les organes s’affaiblissent, les fonctions diminuent d’activité et la vieillesse s’établit petit à petit avec ses attributs caractéristiques: Nutrition languissante, stérilité, stases sanguines par défaut de circulation, tendance aux congestions; atrophies et scléroses musculaire, vasculaire, nerveuse et cérébrale; fonctionnement de l’organisme de plus en plus languissant et difficile.
MODIFICATIONS SURVENANT DANS L’ACUITÉ VISUELLE ET DANS L’ACCOMMODATION. — Les organes des sens suivent une marche régressive et l’œil notamment perd peu à peu les qualités qui en assuraient le parfait fonctionnement. L’acuité visuelle décroît sous l’influence de l’âge, suivant une progression que Donders a calculée et formulée. Elle descend à 2/3 vers l’âge de 60 ans et à 1/2 vers soixante-quinze ans.
MODIFICATIONS SURVENANT DANS LE CRISTALLIN. — Donders a également calculé la progression suivant laquelle le point proximum de la vision s’éloigne de plus en plus avec les années pour aller rejoindre le point remotum à l’infini, vers l’âge de soixante-quinze ans: c’est la presbytie, à laquelle nous consacrerons plus loin un chapitre spécial. Elle est due à la dégénérescence sénile du cristallin, qui commence par une sclérose ou densification du noyau cristallinien. Ce processus sénile diminue progressivement l’élasticité du cristallin et le rend par suite de moins en moins accessible à l’action du muscle accommodateur. Sa transparence n’est pas altérée, mais la dégénérescence que subit l’enveloppe des ses fibres lui donne une teinte jaune d’ambre. Cette coloration augmente sensiblement entre soixante et soixante-dix ans, et finit par s’étendre à toute la masse, de sorte qu’il réfléchit une certaine partie de la lumière incidente et que sa transparence finit par devenir moins parfaite. Souvent, chez le vieillard, la transparence du cristallin se trouve encore troublée par de petites opacités périphériques disposées en anneaux et qu’on a appelées gérontoxon ou cercle sénile du cristallin. La limpidité reste intacte dans toutes les autres régions et n’est troublée que dans la périphérie. Ces opacités restent généralement stationnaires pendant tout le reste de la vie, à moins que la santé s’altérant pour une cause ou l’autre, la nutrition du cristallin ne se trouve modifiée, ce qui amènera la cataracte en complétant l’opacification. La cataracte sénile n’est donc pas un phénomène physiologique de la vieillesse, elle est une maladie engendrée par des affections constitutionnelles et dyscrasiques, des altérations oculaires, des excès de la vue, et en général par toutes les causes qui peuvent compromettre la nutrition du cristallin. Si l’un de ces facteurs n’intervient pas à un moment donné, le cristallin conserve sa transparence malgré sa dégénérescence physiologique et il ne se produit pas de cataracte.
MODIFICATIONS SURVENANT DANS LA CORNÉE. — Le gérontoxon ou arc sénile de la cornée est dû à une dégénérescence d’une bande circulaire de la périphérie de la cornée. Il n’occasionne ni douleur, ni irritation et ne gêne nullement la vision. Il n’existe pas de corrélation entre le gérontoxon de la cornée et celui du cristallin, mais il en existe avec les altérations athéromateuses du système aortique, comme l’ont démontré les recherches de M. le professeur Peter; et l’on peut en déduire des indications pour l’hygiène générale et le régime à suivre.
On n’oubliera pas que les cornées atteintes de gérontoxon suppurent facilement sous l’influence des traumatismes et l’on ne manquera pas de tenir compte de ce renseignement dans le cas d’une opération à pratiquer sur la cornée.
MODIFICATIONS SURVENANT DANS LES PAUPIÈRES ET LES VOIES LACRYMALES. — La peau des personnes âgées perd peu à peu son élasticité et les fibres du muscle orbiculaire se contractent irrégulièrement. Il en résulte tantôt du spasme qui amène à la longue de l’entropion, tantôt un relâchement avec ectropion consécutif. La déviation des points lacrymaux est la conséquence de ces différents phénomènes et de là des affections lacrymales qui s’observent toujours en si grand nombre chez les vieillards.
La photophobie est aussi très fréquente et elle est occasionnée par les affections des voies lacrymales et les troubles du cristallin. Les tissus jeunes se défendent mieux contre la lumière que ceux qui ont perdu leur souplesse. Dans les pays chauds, cette photophobie peut devenir une cause occasionnelle d’ophtalmie granuleuse ou purulente, par les besoins de frottements qu’elle provoque et qui amènent à un moment donné une inoculation spécifique.
PROTECTION DES YEUX. — L’œil du vieillard subissant le processus régressif comme les autres tissus de l’organisme, perd en même temps que ses aptitudes visuelles, sa force de résistance aux influences extérieures de toutes sortes: air froid, vent, humidité et surtout lumière. Il faut donc lui en éviter et lui en ménager autant que possible le contact, et prendre des précautions presque analogues à celles que l’on prend pour les yeux des enfants. Il faudra se garantir contre l’influence de la lumière artificielle, et ne pas abuser des veilles trop prolongées; se protéger contre le froid et le vent; ne pas lire longtemps dans la journée et jamais le soir à la lumière; ne pas avoir des occupations qui demandent une grande application visuelle, se lotionner les paupières tous les matins à l’eau chaude...
Chez la femme, la ménopause, par les troubles qu’elle apporte à la circulation, est très souvent le point de départ d’affections oculaires graves, provenant la plupart du temps d’hémorrhagies des vaisseaux profonds ou de troubles dans la nutrition de l’œil. Les yeux devront être ménagés avec attention pendant cette période et on leur évitera les excitations et les fatigues qui pourraient devenir le point de départ de perturbations dans la circulation intra-oculaire.
Il est absolument indispensable d’opposer à la presbytie le port des lunettes, ainsi que nous le dirons plus loin. Nous condamnons formellement le préjugé qui retarde le plus possible l’usage des verres, sous le prétexte qu’il peut être nuisible à la vue. Bien au contraire, c’est ce retard lui-même qui est nuisible et qui peut amener des troubles intra-oculaires et même le développement de la cataracte, par suite des efforts d’accommodation qu’on impose à un muscle accommodateur relâché et à un cristallin dégénéré.
Les conserves seront nécessaires dans les cas si fréquents d’affections lacrymales, de photophobie. et d’opacités capsulaires. On fera bien d’en porter également en dehors de ces cas particuliers, pour protéger les yeux contre la lumière et contre les irritations de toute nature.
EXERCICE. — L’exercice est indispensable au vieillard dans une mesure proportionnée à ses forces: il porte le sang vers la périphérie et combat la tendance aux congestions internes dûe au ralentissement de la circulation et dont les yeux sont menacés comme les autres organes.
RÉGIME. — Pour cette même raison, on sera très sobre, on n’usera que très modérément des excitants et des alcooliques, et l’on combattra avec soin la constipation qui est si fréquente à cette époque de la vie. Les choroïdites séreuses et atrophiques reconnaissent souvent pour cause une constipation opiniâtre et les hémorroïdes qui l’accompagnent; sans compter les altérations du côté des membranes internes, et entre autres les hémorrhagies provoquées par les efforts pour aller à la garde-robe. Il est donc nécessaire d’assurer la régularité de cette importante fonction par les moyens habituels (Pilules d’aloès et de rhubarbe; eaux de Montmirail, de Loëche, de Pulna, d’Hunyadi-Janos, de Birmenstorf, etc...).
HABITUDES DIVERSES. — Tout ce qui est nuisible pour les yeux pendant la virilité, le sera encore davantage pendant la vieillesse. Il faudra donc savoir rayer de son programme telle ou telle distraction, telle ou telle habitude, au fur et à mesure qu’on avancera en âge; ou tout au moins en diminuer l’usage progressivement, sans attendre par exemple, d’avoir une amaurose pour cesser de lire. Les travaux de bureau et de comptabilité doivent être abandonnés et changés pour d’autres plus conformes à l’aptitude visuelle. Les administrations et les maisons de commerce devraient donner aux employés d’un certain âge à leur service d’autres occupations que la comptabilité qui peut devenir si nuisible à la vue, et à laquelle cependant on voit attachés un si grand nombre d’hommes âgés, sous le prétexte que leur âge même est une garantie de leurs bons services. Nous estimons qu’un grand nombre de cataractes, d’amauroses et de choroïdites sont provoquées par les excès d’accommodation que l’œil du vieillard ne peut plus supporter impunément.
Par conséquent, la modération en tout doit être la règle générale des personnes âgées; modération dans tous les plaisirs et dans toutes les habitudes et aussi modération dans l’usage de la vue. A côté de cela, par de l’exercice pris régulièrement, et par une médication inoffensive opposée à la constipation, on combattra la tendance aux congestions internes qui pourrait amener le développement de troubles et d’affections oculaires profondes.