Читать книгу L'élite des contes du sieur d'Ouville - Antoine d' Ouville - Страница 11
P. 405. — Normands.
ОглавлениеPour montrer que ie ne pardonne non plus à ceux de ma nation qu’aux Gascons, ie mettray ce chapitre icy des Normands, c’eft une nation qui ne se trompe guère qu’a son profit & tiennent à auoir seuls le priuilege de se pouuoir defdire. C’eft la vérité qu’vn Normand depayfé eft assez difficile à attraper. Il n’y a personne qui plus franchement fasse un faux ferment qu’eux, & peu de Normands perdent leurs procez, quand ils font receus à faire preuue, car on ne manque point de tefmoins en ce pays-là, ou qu’on s’en rapporte à leur ferment, car en ce cas ils disent promptement à leur valet: «Bride, la befte eft à nous,» & quand mefme ils se confessent d’auoir rendu faux tefmoignage contre quelqu’vn: il se trouue des conteneurs en ce pays-la, principalement en la basse Normandie, qui leur disent: «Lais-fez ces bagatelles, venons aux gros,» comme si rendre un faux tefmoignage contre quelqu’un n’eftoit pas vn péché. Ce n’eft pas que i’en veuille faire une regle générale & qu’il n’y ait de très-honneftes gens, mais que voulez-vous? ils n’en ont pas le bruit, & ie vous iure que, me trouuant un iour en certain pays, comme on me demanda d’où i’eftois, & que ie respondis que i’eftois Normand, un honnefte homme qui eftoit la présent, me dit-qu’il n’en croyoit rien, à cause que ie l’aduouois trop franchement. le diray aussi à leur gloire qu’il ne se trouue point de prouince en France d’où il foit forty plus d’habiles gens, pourueu qu’ils ayent hanté le grand monde, & il n’y a rien de plus rude qu’vn Normand qui n’a iamais forti de son pays, & peut-on dire auec vérité que la Normandie eft une excellente pépinière de beaux esprits, mais il faut qu’elle foit transplantée ailleurs. Ce font les plus subtils pour plaider qui se puissent voir, & feront un procez sur la pointe d’une aiguille, tesmoin un procez entre deux Normands, qui dura vingt-quatre ans pour un nid de pie, qui eftoit sur la branche d’vn qui pendoit sur l’héritage de son voisin, chacun prétendant que le nid luy appartenoit, l’vn disant que l’arbre eftoit planté sur son fond, & l’autre que la branche où eftoit ledit nid, pendoit sur son héritage, & que l’ombre faisait tort a son herbe, & que par conséquent il deuoit auoir le profit. Vous en verrez par la fuite de ce discours d’assez memorables.