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IX.

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D’avance, les explications du gouvernement français avaient répondu aux deux documents, manifeste et circulaire, que nous venons de citer.

Vainement l’Autriche essayait-elle de rejeter toutes les responsabilités de la guerre sur la Sardaigne, qui avait refusé d’obéir à la hautaine sommation du cabinet de Vienne, et sur la France, qui, pour envoyer des troupes au secours de son allié, n’avait pas cru devoir attendre l’entrée des Autrichiens en Piémont.

Quanta l’appel fait à l’Allemagne, il n’obtint pas une grande faveur, malgré ses formes semi-bibliques. Personne ne crut que l’Autriche représentât, comme l’archange Michel, la justice armée du glaive.

L’attitude de la Confédération ne pouvait être que purement défensive, tant que le territoire allemand n’était pas menacé.

Telle était le vœu exprimé en Allemagne par tous les esprits impartiaux, qui reconnaissaient la nécessité et la légalité de l’intervention française en Italie.

Vainement l’empereur d’Autriche adressait l’ordre du jour suivant aux troupes de la deuxième division armée placées sous les ordres du feldzeumestre comte Giulay:

«Après de vains efforts pour conserver la paix à mon empire, sans mettre en question sa dignité, je suis forcé de prendre les armes.

«C’est avec assurance que je confie le bon droit de l’Autriche aux meilleures mains, aux mains éprouvées de ma brave armée.

«Sa fidélité et sa bravoure, sa discipline exemplaire, la justice de la cause qu’elle défend et un glorieux passé me garantissent le succès.

«Soldats de la deuxième armée, c’est à vous d’enchaîner la victoire aux drapeaux immaculés de l’Autriche. Allez au combat avec Dieu et avec la confiance dans votre empereur!

«FRANÇOIS-JOSEPH.»

C’en était fait, les Autrichiens avaient envahi le territoire Sarde, et franchi le Tessin, déclarant ainsi la guerre à la Sardaigne et à la France.

Ils étaient entrés en Piémont en trois corps d’armée.

Le premier corps, composé de vingt bataillons, pénétra par la Gravellone, le 29 avril 1850, à trois heures; ses avant-postes étaient à Vespolate, le 30, à onze heures et demie du matin.

Le second, plus considérable, fit son mouvement dans la nuit du 29. Il pénétra à Caissalo, près de Vigevano, par le lac d’Abbiatte-Grasso, et se mit en marche de Vigevano sur Mortara.

Le troisième opéra plus au nord. Il débarqua le 20 avril, au matin, à Streta et à Arona sur le lac Majeur.

En même temps, le roi Victor-Emmanuel avait conféré la lieutenance générale du royaume au duc de Savoie Carignan, promulgué une amnistie pour les délits politiques et les délits de presse, et au moment de partir avec son état-major pour se mettre à la tête de ses troupes, adressé cette nouvelle proclamation à ses sujets:

«L’Autriche, qui proteste de son amour pour la paix, nous attaque en refusant de se soumettre à un congrès européen; elle viole les promesses faites à l’Angleterre; elle nous demande de diminuer notre armée et d’abandonner ces braves volontaires accourus de tous les côtés de l’Italie pour défendre le drapeau sacré de l’indépendance italienne. Je confie le soin du gouvernement à mon bien-aimé cousin, et je reprends l’épée.

«A côté de nos soldats combattront pour la liberté et la justice les vaillantes troupes de l’Empereur Napoléon, mon généreux allié. Peuples d’Italie! l’Autriche attaque le Piémont parce qu’il a soutenu la cause de la patrie commune dans les conseils de l’Europe et qu’il n’a pas été insensible à vos cris de douleur; l’Autriche brise maintenant ouvertement les traités, qu’elle n’a jamais respectés. Aujourd’hui, en droit, la nation italienne est libre, et je puis accomplir consciencieusement le vœu que j’ai fait sur le tombeau de mon auguste père.

«Ayons confiance dans la Providence, dans no tre union, dans la valeur des soldats italiens, dans l’alliance de la noble nation française; contions-nous à la justice de l’opinion publique. Je n’ai d’autre ambition que d’être le premier soldat de l’indépendance italienne.

«Vive l’Italie!»

Cette proclamation, signée de Victor-Emmanuel, était contresignée du comte de Cavour.

Voici maintenant la proclamation de l’empereur des Français

«Français,

«L’Autriche, en faisant entrer son armée sur le territoire du roi de Sardaigne, notre allié, nous déclare la guerre. Elle viole ainsi les traités, la justice, et menace nos frontières. Toutes les grandes Puissances ont protesté contre cette agression. Le Piémont ayant accepté les conditions qui devaient assurer la paix, on se demande quelle peut être la raison de cette invasion soudaine: c’est que l’Autriche a amené les choses à cette extrémité, qu’il faut qu’elle domine jusqu’aux Alpes, ou que l’Italie soit libre jusqu’à l’Adriatique; car, dans ce pays, tout coin de terre demeuré indépendant est un danger pour son pouvoir.

«Jusqu’ici la modération a été la règle de ma conduite; maintenant l’énergie devient mon premier devoir.

«Que la France s’arme et dise résolûment à l’Europe: Je ne veux pas de conquête, mais je veux maintenir sans faiblesse ma politique nationale et traditionnelle; j’observe les traits, à condition qu’on ne les violera pas centre moi; je respecte le territoire et les droits des Puissances neutres, mais j’avoue hautement ma sympathie pour un peuple dont l’histoire se confond avec la nôtre, et qui gémit sous l’oppression étrangère.

«La France a montré sa haine contre l’anarchie; elle a voulu me donner un pouvoir assez fort pour réduire à l’impuissance les fauteurs de désordre et les hommes incorrigibles de ces anciens partis qu’on voit sans cesse pactiser avec nos ennemis; mais elle n’a pas pour cela abdiqué son rôle civilisateur. Ses alliés naturels ont toujours été ceux qui veulent l’amélioration de l’humanité, et quand elle tire l’épée, ce n’est point pour dominer, mais pour affranchir.

«Le but de cette guerre est donc de rendre l’Italie à elle-même et non de la faire changer de maître, et nous aurons à nos frontières un peuple ami, qui nous devra son indépendance.

«Nous n’allons pas en Italie fomenter le désordre ni ébranler le pouvoir du Saint-Père, que nous avons replacé sur son trône, mais le soustraire à cette pression étrangère qui s’appesantit sur toute la Péninsule, contribuer à y fonder l’ordre sur les intérêts légitimes satisfaits.

«Nous allons enfin sur cette terre classique, illustrée par tant da victoires, retrouver les tracer de nos pères; Dieu fasse que nous soyons dignes d’eux!

«Je vais bientôt me mettre à la tête de l’armée. Je laisse en France l’Impératrice et mon fils. Secondée par l’expérience et les lumières du dernier frère de l’Empereur, elle saura se montrer à la hauteur de sa mission.

«Je les confie à la valeur de l’armée qui reste en France pour veiller sur nos frontières, comme pour protéger le foyer domestique; je les confie au patriotisme de la garde nationale; je les confie enfin au peuple tout entier, qui les entourera de cet amour et de ce dévouement dont je reçois chaque jour tant de preuves.

«Courage donc, et union! Notre pays va encore montrer au monde qu’il n’a pas dégénéré. La Providence bénira nos efforts; car elle est sainte aux yeux de Dieu la cause qui s’appuie sur la justice, l’humanité, l’amour de la patrie, et de l’indépendance.

«Palais des Tuileries, le 3 mai 1859.

«NAPOLÉON.»

Communiquée au sénat et au corps législatif, affichée par toute la France, répandue par les mille voix de la publicité, cette proclamation fut accueillie avec les plus vives acclamations; elle excita en France le plus grand enthousiasme.

La guerre était une nécessité douloureuse; elle était conforme à la politique traditionnelle de la France, qui avait seulement pour but la sécurité de ses frontières, la défense d’un peuple ami et l’indépendance de l’Italie.

Elle était dans son droit légal comme elle l’avait été quand elle avait, en 1854, défendu la Turquie, son alliée, contre l’invasion de la Russie.

S’opposer aux envahissements de l’Autriche et protéger contre elle l’Italie, c’était là le rôle national du gouvernement français.

Henri IV l’avait compris, comme le rappelle le prince Louis Napoléon Banaparte (aujourd’hui Napoléon III), dans une de ces pages fortement pensées et finement écrites, datées de la prison de Ham:

«Ham, le 5 novembre 1844.

«Rien ne contribue davantage à envenimer les questions, à aggraver les situations, à fausser les esprits, qu’une politique bâtarde, sans dignité et sans suite, qui ne sait pas ce qu’elle veut, parce qu’elle n’ose jamais vouloir.

«Asseoir la paix, ce n’est pas maintenir pendant quelques années une tranquillité factice, c’est travailler à faire disparaître les haines entre nations, en favorisant les tendances, les intérêts de chaque peuple; c’est créer un équilibre équitable pour les grandes puissances; c’est, en un mot, suivre la politique de Henri IV, et non la marche des Stuarts et de Louis XV.

«Ouvrez les Mémoires de Sully et voyez quelles étaient les grandes pensées de l’homme qui avait pacifié la France et fondé la liberté religieuse. Pour établir solidement l’équilibre européen, Henri IV prévoyait qu’il fallait que toutes les nations fussent égales en puissance et qu’aucune ne dominât l’autre par sa prépondérance. Il prévoyait.que pour les peuples, comme pour les individus, l’égalité seule est de toute justice. Henri IV avait amené la plus grande partie de l’Europe à le seconder dans ses vues, et, lorsque le fer d’un assassin vint terminer ses jours si précieux, il rassemblait une puissante armée composée de contingents européens, se proposant pour but, non une conquête stérile, mais la paix universelle. Il fallait forcer l’Espagne (la maison d’Autriche) à reconnaître l’égalité et l’indépendance des nations, et il eût établi une espèce d’aréopage destiné à vider par la raison, et non par la force brutale, les querelles de peuple à peuple. Henri IV, s’il eût vécu, eût pu être surnommé le héros de la Paix.

Soldat de Garibaldi.


«LOUIS-NAPOLÉON BONAPARTE.»

Or, il semblait qu’il fût donné à Napoléon III de réaliser l’indépendance de l’Italie, ce grand projet d’Henri IV.

En effet, Napoléon III est l’héritier des grands règnes de l’histoire, et il s’en est montré digne,, celui qui, en montant sur le trône, a prononcé ces belles paroles:

Tous les gouvernements sont solidaires dans ce qu’ils ont fait de bien.

«L’empire, c’est la paix,» avait dit encore Napoléon III.

Mais pour cela, il fallait qu’on ne forçât pas la France à tirer l’épée.

Or, son devoir, comme Puissance chrétienne, est de protéger partout le faible opprimé et de ne reculer devant aucun sacrifice pour le triomphe de la Vérité et de la Justice.

L’Autriche n’avait-elle pas lassé la patience de l’Europe par l’iniquité de sa politique en Italie? Ne l’avait-elle pas outragée par son dédain pour le droit international? Par sa foi punique et l’aggression de ses actes, ne s’était-elle pas mise au ban des nations civilisées?

En opposant des exigences toujours nouvelles aux efforts conciliants de la diplomatie et à la modération si touchante de la France, et en couronnant tout cela par une violence inouïe, elle avait déchiré, en ce qui la concerne, les traités de 1814.

Ce devait être là son expiation. C’est ainsi que la duplicité et l’ambition sans vergogne sont souvent prises à leurs propres piéges.

Point de refuge dans les traités pour ceux qu’ils ne sauraient plus couvrir. En provoquant la guerre, l’Autriche avait marqué d’avance l’heure de sa dépossession définitive en Italie.

FIN DU LIVRE SECOND.

Histoire de la guerre d'Italie

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