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Jessica

« Je— »

Je suis à deux doigts d’aller lui dire d’aller se faire foutre, c’est vraiment le truc le plus puant et le plus dominateur que j’ai jamais vu, et pourtant, j’ai fait l’armée. De quel droit me parle-t-il ainsi ? Pour qui se prend-il pour oser me toucher ? Il se branle et—une fois qu’il m’a bien fait comprendre que j’étais désirable—il m’enduit de sperme. C’est dégueulasse, zarbi et vachement pervers et —

La sensation d’humidité sur mon bras se mue en une chaleur qui inonde mon sang et file droit vers mon utérus. Mes mamelons se dressent et mon vagin se contracte, j’ai trop envie qu’il me pénètre. Le désir coule dans mes veines comme un rail de C-bomb et je lèche mes lèvres, je halète lorsque je m’aperçois que je fixe sa bouche depuis plusieurs secondes maintenant. Le désir monte. J’ai envie de lui. De lui seul. Son étreinte, qui me paraissait alors étouffante et contraignante, se fait … protectrice.

Bizarrement, je sens son odeur boisée, j’ai envie de me blottir contre lui et de le lécher de partout. J’ai envie de sucer sa bite. J’ai envie …

Je zieute son érection prononcée dans son pantalon, j’ai trop envie de lui. Mon vagin se contracte, j’ai trop envie de sentir sa bite me pénétrer.

« Qu’est-ce que tu m’as fait putain ? Tu essayes de me droguer ? T’as pas le droit de te servir de là C-bomb pour te taper une fille ! »

Il me toise et repose ses mains sur le volant.

« J’ignore ce qu’est la C-bomb.

– T’ignores ce qu’est la … et c’est quoi ça alors…? »

Il ignore ma question et nous arrivons sur le parking du centre de recrutement des épouses. La première fois, j’étais entrée par la porte des volontaires, menottes aux poignets, je n’avais pas vu l’entrée principale. Le bâtiment est quelconque et le parking désert.

Je défais ma ceinture, prête à bondir à la seconde-même où la voiture s’arrête.

Je fais trois pas mal assurés lorsqu’on me soulève du sol. « Non ! Pose-moi ! »

Je gigote mais il est tout en muscles. Et en métal.

« Tu es blessée. Je vais t’examiner, partenaire. Et la leçon sera terminée. »

La leçon ? Quelle leçon ? J’ai envie de me mettre en colère, de le forcer à me poser mais mon corps en a décidé autrement. Étrangement, son odeur m’attire, impossible de l’ignorer. Je n’ai plus envie qu’il me pose, qu’est-ce que ça signifie ? J’ai pris un coup sur la tête ? J’ai perdu trop de sang et je délire ?

Je deviens folle ?

Je tremble de partout, les trois pas que j’ai fait prouvent que je suis bien plus faible que je ne l’imaginais.

Nial me porte devant l’entrée du centre de recrutement et appuie sur l’interphone situé à l’extérieur du bâtiment. On nous ouvre immédiatement, comme si la gardienne attendait notre arrivée.

Les portes se referment, je cède au désir, j’enfouis le nez sur le cou chaud de Nial et m’enivre de sa senteur musquée. L’odeur puissante me donne le frisson, je ferme les yeux. C’est un excellent moyen d’oublier la douleur qui empire à chaque seconde.

J’ouvre les yeux lorsque j’entends des pas précipités. La gardienne vient vers nous, elle porte un jean et une tunique eu lieu de l’uniforme de la coalition. Ses cheveux détachés lui arrivent aux épaules, elle ne doit pas être bien plus âgée que moi.

« Vous êtes très jolie. »

Pourquoi j’ai sorti ça ? Je suis saoule ou quoi ?

Elle rougit, visiblement ravie du compliment, elle fixe Nial des yeux et les détourne aussitôt, comme si sa présence la mettait mal à l’aise. C’est peut-être le cas. Elle le voulait peut-être pour elle. Je ne peux pas lui en vouloir. Si elle le désire… autant que moi, elle a probablement envie de lui sauter au cou.

« Merci, Jessica. » Elle me regarde des pieds à la tête mais j’ai reçu une balle dans le dos, elle ne risque pas de voir grand-chose, hormis mes vêtements tâchés de sang. Elle regarde Nial. « Elle est durement touchée ?

– Oui. Je ne connais pas encore l’étendue des blessures, elle n’a pas sa langue dans sa poche mais elle s’affaiblit, elle est en état de choc. Vous disposez d’un caisson ReGen ici ? »

Je me demande ce que c’est, mais j’ai pas la force de le lui demander.

« Non. J’ai seulement une petite baguette ReGen, pas un caisson d’immersion complet. Suivez-moi. » Elle pivote sur ses talons et s’éloigne en trottinant, Nial la suit à longues enjambées tandis qu’elle nous conduit vers les salles d’examen que j’ai aperçu lors du recrutement. La gardienne indique une grande table d’examen. « Allongez-la ici. On va la déshabiller. »

Quoi ? Non.

Nial m’allonge comme si j’étais en porcelaine. C’est attentionné de sa part, jusqu’à ce qu’il saisisse le col de ma chemise noire et la déchire en deux, la descend sur mes bras et la jette par terre comme un vulgaire chiffon.

« Hé ! »

Je me couvre de mes bras, mais il ne me regarde pas comme lorsque je l’ai percuté en pleine rue. Son regard est dénué de chaleur et empreint d’une précision toute médicale.

Il ne répond pas à ma protestation, retire mes chaussures et les jette au sol avec un bruit sourd. Il pose ses mains sur les jambes de mon pantalon et le déchire en deux au niveau de l’entrejambe sans effort, comme un mouchoir. Il appuie sa main au milieu de ma poitrine, me force à me pencher avant de me remettre debout. Je prends appui sur mes coudes, il tire d’un coup sec sur les deux morceaux de mon pantalon, je suis nue, hormis un petit soutien-gorge et un slip rose pâle à pois noirs et en dentelle. C’est inhabituel pour une tenue camouflage mais quand on est la seule fille parmi autant de mecs, les dessous en dentelle et les froufrous sont ma seule fantaisie. Aucun homme ne s’intéresse à moi—je suis susceptible, butée et garçon manqué —la lingerie est mon péché mignon.

Nial me dévore des yeux, je suis allongée sur la table froide, les bras croisés sur la poitrine en un mouvement instinctif qui me fait immédiatement me sentir en position de faiblesse et vulnérabilité. Ça ne me ressemble pas. Je ne bats pas en retraite devant un homme. Doucement, je baisse les bras et relève le menton. Je suis allongée sur la table d’examen et sens le sang poisseux sur mon épaule et ma cuisse. Je le dévisage, il croise à nouveau mon regard, un regard de défi. Vas-y regarde, pensais-je. C’est pas pour autant que tu vas me toucher.

« Qu’est-ce qu’elle a ? » La gardienne Egara se place entre nous et je suis soulagée de ne plus avoir à soutenir le regard intense de Nial. Je concentre toute mon attention sur la gardienne. Je me sens mieux en ignorant totalement le géant extraterrestre penché sur moi, tel un homme alpha dominateur et surprotecteur, je n’ai pas besoin d’un type pareil. Je m’adresse à la gardienne.

« Un calibre douze. Mon ancien patron visait les éclaireurs de la Ruche mais un éclat a ricoché. J’en ai un dans l’épaule et un dans la cuisse. J’en ai peut-être d’autres mais je ne les sens pas. » J’essaie de bouger et je m’aperçois que ça me fait vachement mal après être restée immobile un moment, comme si je devenais froide et raide. Je grimace, la douleur m’arrache un sifflement et je m’affale.

Je suis encore musclée à force d’avoir escaladé des murs et porté de l’artillerie lourde dans le désert. J’ai travaillé dur pour garder la forme, heureusement. Si je n’avais pas couru régulièrement depuis ma démobilisation, les éclaireurs de la Ruche m’auraient eue.

« Je suis désolée pour votre voiture. »

Elle fronce les sourcils. « Ma voiture ?

– Le siège est plein de sang.

– Oh. C’est bon. Je m’en fous. »

La gardienne pose sa main sur mon biceps, l’autre sur ma hanche et j’essaie, sans succès, de réprimer un gémissement de douleur tandis qu’elle m’aide à me mettre sur le côté. Elle est bien plus petite que moi, ses bras et ses épaules sont plus minces, elle est plus fragile et féminine.

Nial s’approche immédiatement, ses larges mains me soulèvent sans toucher mes blessures afin qu’elle puisse voir où j’ai été blessée.

Je suis grognon et je saigne, mais je suis pas une garce. La réaction bizarre—cette excitation subite—que j’ai eue en voiture, s’est estompée, mais me revient au contact de ses mains. La simple sensation de ses paumes me donne chaud. Je savoure sa force, étrange et troublante à la fois, puisque je ne compte en général que sur moi-même. Je n’ai besoin ni de l’aide ni de la force de personne. J’ai toujours été forte.

« Merci, » dit la gardienne en faisait rouler une desserte auprès d’elle. Elle se tourne vers Nial, qui me maintient toujours tandis qu’elle désinfecte et bande mes plaies. Je n’ai pas envie de voir ce qu’elle me fait.

« Ça va faire mal. » Ses mots sont le seul et unique avertissement, je sens un long objet en métal pointu s’enfoncer dans ma chair. Comme des pinces à épiler ?

« Dépêchez-vous. » Je grimace et empoigne le bord de la table. J’ai besoin d’agripper quelque chose, de saisir du concret tandis qu’elle farfouille dans ma chair.

Une large main chaude enveloppe et serre mes paumes tremblantes. C’est Nial. Je me retiens comme une désespérée alors qu’elle farfouille, comme si elle essayait de couper un steak, et non pas d’enlever un éclat.

« Vous n’auriez pas de quoi anesthésier ? De la Lidocaïne ou— » Elle creuse en profondeur et je respire entre mes dents serrées. « —whisky ?

– Impossible. Désolée. » Sa voix est calme et sincère tandis qu’elle poursuit son œuvre. « Ces médocs risquent d’interférer avec la baguette ReGen. »

J’ignore ce qu’est une baguette ReGen, et à vrai dire, je m’en fiche. Mais je commence à compter lentement dans ma tête jusqu’à cent. Ce n’est pas la première fois que je suis sur le billard, et ce n’est pas la blessure la plus moche que j’ai récoltée. Ça fait un mal de chien mais c’est supportable. Mes cicatrices prouvent que je suis déjà passée par là. Je ne me sens jamais à l’aise nue devant un homme avec toutes ces cicatrices et imperfections …

J’ouvre les yeux, je suis curieuse de voir la réaction de Nial face aux blessures de mon dos et ma cuisse. Comme prévu, son regard passe d’une blessure à l’autre. Je m’attendais à y lire de la curiosité ou du dégoût. Pas de la colère.

« Qui t’a infligé ces blessures, partenaire ? » Il croise mon regard et serre les mâchoires. Les veines de ses tempes et de son cou saillent d’émotion. « Dis-le que je le tue. »

Je ris et pousse un cri lorsque la gardienne, qui vient de me retirer un premier bout de métal dans l’épaule, fouille vigoureusement dans ma cuisse.

« Tu veux tuer la Terre entière on dirait, rétorquais-je les dents serrées.

– Je tuerai la civilisation entière pour te protéger. »

Ok. Il est un peu trop à fond à mon goût. « Pas besoin de tuer qui que ce soit. C’était un EEI en Irak. »

Il touche une cicatrice longue de trois doigts sur ma cuisse et je frissonne. « C’est quoi une EEI, partenaire ? Je ne comprends pas. Pourquoi t’ont-ils attaquée ? »

Je retiens mon souffle tandis que la gardienne retire le deuxième éclat de ma jambe et replace la pince sur la desserte. Le souffle court mais soulagée que l’épisode des fouilles à caractère médical soit enfin terminé, je réponds dans un souffle. « C’est un Engin Explosif Improvisé. C’est— j’indique la marque sur ma cuisse, —un clou de dix centimètres.

– Où l’attaque a-t-elle eu lieu ? »

Je hausse les épaules. « C’est la guerre, Nial, ça explose de partout. Les gens meurent. » Comme le simple soldat qui était à côté de moi quand on a sauté sur cette mine il y a trois ans. C’est lui qui a été le plus touché, il est mort dans mes bras.

« Les femmes ne font pas la guerre. »

Je lève les yeux au ciel. « Sur Terre oui.

– Alors il est temps qu’on t’arrache à cette planète. Vos hommes sont des idiots. »

Que répondre à ça ?

La gardienne s’est éloignée, elle revient avec une petite baguette qui ressemble à la télécommande de ma télévision, dotée d’un embout lumineux bleuté. Elle la passe sur la blessure de ma cuisse et je soupire, on dirait que la lumière pénètre à l’intérieur de mon corps, ça chauffe, ça fait du bien, c’est parfait. Je ne ressens plus aucune douleur, je regarde ma peau, complètement cicatrisée, bien qu’encore maculée de sang.

« Oh, mon Dieu. C’est ahurissant. »

Elle sourit et la déplace sur mon épaule, le soulagement est quasi instantané. « Vous me pardonnez de ne pas vous avoir anesthésiée ?

– Oui. » Je pousse un grognement, la douleur a disparu. Je baisse la tête et pousse un profond soupir. Mon Dieu ça fait du bien.

Je devrais lâcher la main de Nial mais je ne suis pas prête. Pas encore. J’ai envie de rester comme ça encore une minute sans penser au cartel, à Clyde, ou à ces trucs de la Ruche qui me pourchassaient. J’ai envie de me sentir bien, la main chaude et solide à la fois de Nial me fait du bien. Je ne ressens plus aucune douleur et il me… rassure.

Mais je ne suis jamais contente, je n’ai plus besoin de me soucier d’être tuée ou pas, je dois passer à la vitesse supérieure. J’ai à faire. Mon répit était de courte durée.

Je dois envoyer les dernières photos à mes contacts de la police et aux médias. Je dois terminer ce que j’ai commencé. La mort de Clyde ne tardera pas à être découverte. Je veux m’assurer que la fièvre médiatique serve à quelque chose.

« J’ai besoin de mon appareil. » J’essaie de m’asseoir mais suis prise de vertige et serre la main de Nial, il m’empêche de tomber de la table.

« L’étrange boîte noire que tu avais autour du cou ? Demande Nial.

– Oui. » J ’essaie de m’asseoir de nouveau mais une large main me tient la nuque. Je lève les mains pour que Nial ôte ses mains chaudes de ma peau sensible mais il ne bouge pas et j’atterris contre lui.

Contrariée, je regarde son visage totalement impassible. La force et l’assurance qui se lisent sur son visage me donne le frisson, je suis obligée de lui demander la permission de me lever. « Je l’ai laissé dans la voiture. Je dois le récupérer. C’est important. »

Il me regarde d’un air chaleureux. Peut-être parce que je ne lutte plus et me colle à lui. « Ander te l’apportera quand il arrivera. »

Ander. Le second, quel qu’il soit. Je l’avais oublié.

« Quand ? » Je secoue la tête et repousse la main de Nial. « J’en ai besoin maintenant. On pourrait le voler. Je dois vraiment le récupérer.

– Tu ne sortiras pas d’ici, partenaire. Tu dois te reposer en vue du transfert.

– Quoi ? Quel transfert ? Non. Non. Non. Je n’irai nulle part. »

Il étrécit les yeux. « Tu es ma partenaire. Tu iras où je te dirai d’aller. »

Je réprime un rire et ça fait un sale bruit. C’est ma blessure, ma déception qui se cache derrière ce son fragile. « Non. Tu as eu ta chance et tu m’as rejetée. Par conséquent je suis libre. J’ai rempli ma part du contrat des épouses. Je ne te dois rien. Je ne t’appartiens plus. C’est terminé. »

Il plisse encore plus les yeux, il n’aime pas être contredit. Je sens sa colère et sa frustration, que rien ne laisse présager dans sa façon de me toucher.

« Je me fiche des contrats que tu as sur Terre, femme. Tu m’appartiens, tu es ma partenaire. Mon père a refusé ta venue. Je n’y suis pour rien, j’étais vraiment furax lorsque je l’ai découvert. Rien n’a changé, hormis le fait que j’ai été obligé de venir te récupérer. Que les choses soient claires. Tu n’as pas été rejetée. Je ne t’abandonnerai pas. Tu m’appartiens. »

J’inspire profondément, histoire de rétorquer mais la gardienne Egara, visiblement très mal à l’aise, lève ses mains en l’air. « Je vais chercher l’appareil photo dans la voiture. Personne n’y verra que du feu. C’est ma voiture après tout. »

Je m’adresse à elle, bienheureuse de ne pas devoir me conformer à la version quelque peu extrémiste de Nial. « Merci.

– Y’a pas de quoi. » Elle sort de la pièce, la grande porte coulissante se referme derrière elle dans un chuintement.

Je célèbre ma petite victoire pendant cinq secondes. Je réalise que je suis à moitié nue et toute seule avec un guerrier extraterrestre qui croit—le plus sérieusement du monde—que je lui appartiens.

Programme des Épouses Interstellaires Coffret

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